Il arrivait des moments de lucidité — aussi rares soient-ils — pendant lesquels Viktor réalisait ce qu’il perdait en ne s’autorisant presque aucun plaisir aux côtés des études. Une doctrine sévère qui naissait à même une profonde angoisse de performance. Chaque seconde qu’il vivait loin de ses théories et de ses expériences était une seconde de plus entre lui et sa volonté d’élever l’espèce humaine. Bien qu’il ait retrouvé son corps d’antan, du tout début du « projet hextech », c’était le même esprit brisé qui l’avait soutenu jusqu’au conseil de la lune de sang qui l’habitait. Plus vif, certes, mais tout aussi obsessif. Mais elles lui manquaient parfois, ces soirées qu’il passait avec Jayce, autour d’un alcool trop fort pour lui, après avoir remporté un concours universitaire ou un autre. Ces soirées avant que tout dérape. Le Kovalyov commençait à se permettre des dérives, reconnaissant que de l’inspiration naissaient les découvertes. Et que l’inspiration, à l’instar de la matière, ne pouvait émerger de rien. Il ne sortait pas encore vraiment de sa zone de confort, lorsqu’il était seul, mais il se complaisait dans les choses simples, telles les visites au musée.
Viktor se sentait un peu futile, surtout en tant que personne consacrant sa vie à la science, de s’extasier devant des animaux empaillés, mais tout ça était si loin de ce qu’il retrouvait dans ses souvenirs éparses. Des créatures banales auxquelles les waveriders n’avaient rien à envier, pourtant. Mais il n'en avait jamais vu de semblables de si près. Ni à Piltover ni à Zaun, trop polluée pour la plupart du règne animal et végétal. Même les humains y pourrissaient de l’intérieur… Viktor, prenant le temps d’observer ses alentours, entra dans une pièce aux teintes sombres où étaient regroupés des squelettes de dinosaures. Il n’y remarqua qu’une jeune femme blonde, semblant également s’intéresser aux restants de reptiles préhistoriques. Seul l’écho de sa canne claquant sur le parquet de bois brisait le silence. Comme à son habitude, il s’attarda à chacun des encadrés explicatifs et analysa ce que protégeaient les vitres et les comptoirs. Le scientifique inspira, tapotant du bout de l’index sur une des vitrines. « Penser que de telles créatures — assez fascinantes, reconnaissons-le — aient pu dominer le monde, puis disparaître aussi facilement, du jour au lendemain, ne me rassure pas du tout. », réfléchit-il à voix haute, avec peu d’espoir que l’inconnue lui réponde. « Avec sa faible composition, l’humanité devrait garder les doigts croisés et prier pour le mieux. », ajouta-t-il d’un ton à la fois nonchalant et songeur.
C'était étrange d'être seule dans un monde inconnue. Effrayant et étrange. Elle s'était mise en tête de rechercher quelqu'un, quelque chose de son monde, de Runaterra ... Et on lui avait soufflé que si elle cherchait quelque chose de précis, elle pourrait PEUT-ÊTRE le trouver dans ce qui s'appelle le Musée. S'habillant comme d'habitude, d'une tunique grise à capuche et de son leggins bleu, elle prit le chemin du "Musée". Douce enfant donc l'innoncence ruiselle de chaque pore de sa peau ... Elle fut émerveillée, extasiée devant certaines choses, certains anciens animaux ou "humains". C'était totalement différent. Chez elle, tout était consigné dans des livres que ce soit les mémoires, les dessins ... Mais ici, ils avaient même des reproductions des animaux qui avait disparus ! Elle repense à Galio et la première fois qu'elle l'avait réveillé. Sa voix dans sa petite tête lui manque parfois.
Puis les yeux de la lumineuse demoiselle s'accrochent sur un squelette. Un souvenir d'une énorme créature qui foulé autrefois la terre. Ils étaient géants, presque aussi grands que Galio lui-même ! Et pourtant, elle savait que Galio était un géant. Elle entend un bruit s'approchant d'elle, une canne martelant doucement le bois ancien que forme le parquet. L'homme se met à parler d'une voix calme mais surtout intéressée. Lux tourne la tête vers lui et sourit. "L'humanité est bien trop ... Aimante de sa propre vie pour risquer les choses que ses créatures ont connu. Ses créatures là étaient malheureusement primaires et même si elles avaient un QI assez élevés pour survivre, elles n'avaient pas la chance de nos connaissance ... Et l'humanité risque bien plus de mourir par leur choix que par les catastrophes naturelles." Lux sourit à nouveau et fixe le squelette. "Et puis ... Cela ne serait même pas possible qu'à Runaterra, ce genre de Créatures aient existées, vu la stupidité que certains." Elle émet un petit rire. "Je suis Luxanna." Tendant sa petite main vers l'homme, elle sourit à pleines dents, comme toujours avec cette lumière joyeuse.
La réponse de la jeune femme lui arracha un subtil rictus : si elle n’avait pas tort, elle semblait en revanche surestimer l’humain. Il hocha la tête, un peu perdu dans ses pensées. Du bout de l’index, inconsciemment, le zaunite traça les lettres creusées dans un des panneaux explicatifs. « Hmn. » Au fil de sa pratique, si Viktor avait bien réalisé une chose, c’était que les hommes pouvaient bien accumuler toutes les connaissances du monde, le niveau de stupidité insouciante y demeurait proportionnel. On ne faisait qu’accorder à l’idiotie les instruments nécessaires pour atteindre son plein potentiel. L'humanité s'annihilerait sans l'aide de quoi que ce soit. « Vous avez en partie raison. Cela dit, l’obsession des Hommes pour la gloire et la domination l’aveugle devant l’évidence : quoi qu’il en soit, la Nature reste supérieure. À quoi bon avoir tous les outils et tous les savoirs du monde si nous refusons d’écouter ceux qui les maîtrisent ? » C’était pour pallier ce défaut que Viktor avait versé sueur et sang, littéralement, pour développer l’Hextech et le cœur d’Hextech. Sa foi en l’humanité était étonnamment solide, malgré tout.
Soudainement, Viktor leva un regard interrogatif vers la blonde. Un sourcil haussé, il la détailla de la tête aux pieds ; l’avait-il déjà rencontrée ? « Runeterra, vous dites ? À première vue, je doute, Luxanna, que vous soyez de Zaun ou de Piltover. Je me trompe ? » Luxanna, en effet, ne portait pas la rudesse de ceux qui avaient grandi dans la cité souterraine ni l’air autosuffisant de ceux qui vivaient sur « l’au-dessus ». Si, au fond, ça le rassurait de tomber sur quelqu’un de « chez lui », il n’en montra pas grand-chose, faute d’en savoir plus. « Vous pouvez m’appeler Viktor. », il inspira, « Enfin. Pour en revenir à ce que vous disiez : s’il y avait de telles créatures sur Runeterra, force est d’admettre que les guerres runiques n’ont pas eu pitié d’elles. Ce sont les risques de laisser la haine, la méfiance et la magie dans les mêmes mauvaises mains… » Un faible sourire en coin, un peu amer, souleva sa pommette alors qu’il repensait à la surdité volontaire dont il faisait preuve lorsque Heimerdinger tentait de le prévenir des dangers de la magie. Cette même sourde-oreille dont témoignait le Conseil face aux risques de l’Hextech. Une belle boucle rappelant que l’Histoire ne faisait que se répéter.
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