Dancer and the moon. [Tara & Willow, AU fête médiévale]

Dans un autre contexte, à une autre période, Tara Maclay vit à Sunnydale, émancipée de sa famille, en couple avec la plus puissante des sorcières de son temps. Mais dans ce contexte-ci, Tara vit avec son père et son frère dans un petit village du fin fond de l'Irlande. Sorcière, elle l'est toujours. Un don hérité de sa mère. Un don dont ont hérité toutes les femmes de sa famille, en fait. Mais un don qui, à cette époque en particulier, est sévèrement réprimé. Chaque jour, le père de Tara lui répète qu'elle abrite en son sein un démon et que chaque fois qu'elle s'exerce à la magie, elle ne fait qu'alimenter ce démon qui, un jour, prendra possession de son esprit et s'en prendra au village entier. Et pourtant... pourtant, Tara ne parvient pas à renoncer à l'utilisation de la magie. Cette dernière lui semble si douce, si bienveillante... qu'elle est parfois tentée d'ignorer les discours de son père. Mais ceux-ci sont trop nombreux et trop répétitifs pour ne pas avoir d'impact sur son comportement. Si bien que Tara est connue dans tout le village comme cette jeune femme timide, silencieuse, en retrait. Un fait qui aurait attiré toutes les suspicions si elle n'avait pas eu l'excuse parfaite pour justifier de ce comportement : sa mère est morte alors qu'elle n'avait que dix-sept ans. Ce qui l'a profondément bouleversée, bien sûr. Mais son attitude réservée, c'est bien à son père qu'elle la doit.

C'est toutefois sans se soucier de l'opinion des hommes de sa famille qu'elle se rend ce jour-ci à la fête du village voisin, plus grand que le sien. C'est le solstice d'été qui est célébré ce jour-ci, et les festivités s'étendront sur la nuit entière voire sur le lendemain. Sur place, l'ambiance est joyeuse. Une musique constante habite les ruelles, chacun y va de ses danses et de ses démonstrations, et les étals des marchants venus des quatre coins du pays occupent tout l'espace. Aux musiques s'ajoutent donc le parfum des plats et des friandises régionales, celui des épices, et de toutes ces merveilleuses petites choses qui font de ce festival une occasion à ne surtout pas manquer.

Tara, dans un premier temps, avance seule, les pans de sa robe frôlant le sol de terre, son regard avide de découvertes passant d'un détail à l'autre. Lorsque les rires fusent à ce point, il est si simple de se laisser aller au fantasme de retrouver d'autres femmes comme elle, qui célèbrent dans la discrétion de leur demeure les équinoxes et solstices, même les moins connus qui, eux, ne sont pas célébrés publiquement.

Progressivement, son esprit est submergé par toutes ces sensations nouvelles, et par sa timidité naturelle qui l'enjoint à se méfier des regards trop insistants. Elle sait quel sort est réservé aux sorcières trop imprudentes, et redoute que sa nature soit un jour révélée et soumise au mécontentement des autres villageois. Fort heureusement, ses préoccupations prennent fin au moment où elle aperçoit une chevelure rousse si caractéristique, un peu plus loin au milieu de la foule. Un sourire enjoué pare alors ses lèvres tandis qu'elle presse le pas pour rejoindre sa seule amie.

- Willow, tu es venue ! s'exclame-t-elle en posant une main sur son bras.

Willow, sorcière elle aussi, rencontrée par hasard lors d'une excursion au marché, mais en qui elle a immédiatement reconnu un pouvoir magique considérable. C'est avec cette jeune femme que Tara pratique parfois la magie, là où aucun regard malveillant ne pourra se poser sur elles. Là où l'intensité de leur magie est telle qu'elle en est parfois troublante.

Un mouvement à leur gauche attire l'attention de Tara et lui permet de cesser de fixer Willow comme si son apparition était sa seule bouffée d'air de la journée. Ce sont les flammes d'un cracheur de feu qui viennent d'attirer son attention, et lui font hausser les sourcils d'un air impressionné.

- Ça, c'est une magie que je ne comprendrai jamais.

Tara constate que Willow est seule, elle aussi. Ce qui n'est pas pour lui déplaire. Lorsqu'elle est avec Willow, elle n'a d'yeux que pour elle, alors elle redoute, nécessairement, le jour où la relation sera déséquilibrée du fait que Willow sera avec ses amis et que Tara, elle, restera une étrangère. C'est un mélange de possessivité timide et de manque de confiance en soi, qui fort heureusement, se dissout complètement lorsqu'elles ne sont que toutes les deux. Il n'y a qu'avec elle que Tara puisse se sentir à ce point en confiance. À ce point... Honnête. La compréhension qu'elles ont l'une de l'autre se passe même parfois de mots, et Tara aime à penser que n'est pas uniquement dû à la magie ou à leur nature de sorcières. Elle aime à penser que c'est également... Émotionnellement, et humainement, qu'elles s'apprécient et se comprennent à ce point.

- Oui, je suis venue seule. Mon père ne s'intéresse pas à ces choses-là. En fait, il ne s'intéresse à rien d'autre qu'à ses grandes théories.

Elle aborde le sujet avec légèreté, car ce n'est pas un sujet sur lequel elle tient à s'épancher. Elle est bien plus intéressée par le fait de reporter son regard sur Willow lorsque celle-ci lui partage la théorie de sa mère sur les cracheurs de feu, théorie qui d'ailleurs, l'amuse franchement.

Mais le cracheur de feu s'éloigne, et Willow en vient à aborder un sujet hautement plus intéressant. Tara fait d'abord semblant de réfléchir à sa proposition, alors qu'il ne fait aucun doute qu'elle est déjà décidée à accepter toute proposition de la part de son amie.

- Oh, je comptais rentrer et jouer à la fille idéale, fait-elle mine d'affirmer. Mais il se pourrait bien que je pratique deux ou trois sortilèges, finalement. Avec la meilleure sorcière du pays.

Elle continue de s'exprimer à voix basse, puisque même avec la musique, même avec l'excitation ambiante, les oreilles continuent de traîner. Elle reste donc prudente, même si en de telles circonstances, elle ne parvient pas totalement à réfréner son excitation quant au programme de la journée, et conserve donc son sourire habituel et malicieux au coin des lèvres.

C'est d'ailleurs sans plus tarder qu'elle glisse son bras sous celui de Willow et les entraîne en direction des artistes et artisans qu'elle n'a pas encore eu l'occasion d'apercevoir. Mais elle balaie la foule d'un regard distrait, étant bien en peine de se concentrer sur quoi que ce soit lorsque Willow est présente.

-Plus précisément, quelle est ton idée ?

Les yeux bleus de Tara dérivent d'étal en étal, s'attardent sur les autres passants, et s'écarquillent d'admiration face à chaque démonstration d'artiste ou chaque pièce d'artisanat qui lui plaît. L'atmosphère de ces festivités est... joyeuse. Plus sereine qu'elle ne s'y attendait. C'est quelque chose qui lui fait le plus grand bien, elle qui ne connaît d'ordinaire que la rudesse de son village et de sa famille, et dont les seuls moments de liberté qu'elle parvient à grapiller sont passés auprès de Willow. C'est vers cette dernière qu'elle porte finalement son regard, un sourire doux aux lèvres. Sa Willow... peut-être ne devrait-elle pas penser à elle en ces termes, avec ce possessif, mais... c'est plus fort qu'elle. Willow est son refuge, son pilier, celle qui lui permet de rêver à un avenir plus flamboyant et avec qui elle peut se contenter d'être elle-même sans jamais n'avoir à craindre de représailles. Elles se comprennent. Intimement, et sans que cette compréhension n'ait besoin de passer par les mots. Un regard, un sourire suffisent.

Se laissant détourner des festivités pour ne se concentrer que sur son interlocutrice, elle continue de se pencher sur elle pour entendre ce qu'elle lui partage à voix basse. Oui, bien sûr que Willow est la meilleure sorcière du pays. Tara le pense sincèrement. Elle a pourtant entendu des histoires de prodiges, des histoires de sorcières dont les prouesses sont devenus des exemples pour les générations à venir, mais... le pouvoir de Willow, elle l'a fréquenté intimement. Elle sait qu'avec la pratique et avec la connaissance, Willow pourra, elle aussi, faire partie de ces sorcières légendaires.

Elle hausse les sourcils d'un air surpris lorsque son amie mentionne avoir déniché un grimoire.

- Oh. Où l'as-tu trouvé ? s'étonne-t-elle, par simple curiosité.

Son pouvoir n'est pas à la hauteur de celui de Willow, mais son intérêt, en revanche, est bien développé. Bercée par ces savoirs et ces modes de vie depuis toute petite, elle n'a jamais eu à découvrir la magie. Elle a toujours été présente dans sa vie. Jusqu'à ce que sa mère rejoigne la Déesse, en tout cas. Et ensuite... ensuite, elle avait rencontré Willow. Et Tara reste persuadée que leur rencontre n'est pas le fruit du hasard.

Émue par le fil que prennent ses réflexions, elle lui répond avec douceur :

- Ça me ferait très plaisir de le découvrir avec toi. Tu as déjà repéré des choses intéressantes ?

La jeune sorcière fronce les sourcils, peinée d'apprendre qu'un ouvrage contenant de telles connaissances ait passé autant de temps dans un grenier, à moisir en attendant que la bonne sorcière le trouve.

- C'est dommage de condamner des livres comme celui-ci à prendre la poussière... C'est tellement... Tellement de savoir perdu. Heureusement que tu étais là pour le sauver de l'humidité et... de l'oubli.

Mais si cet ouvrage se trouvait chez Willow, alors... Cette dernière n'était sans doute pas la seule sorcière de sa famille. C'est une information qui l'intrigue. Si sa mère était encore en vie, elle lui demanderait si elle avait entendu parler de la famille de son amie. Sa mère savait... énormément de choses. Sur les familles des environs, sur tous les exploits magiques du pays et d'ailleurs. Tara, lorsqu'elle était plus jeune, ne se lassait jamais d'écouter ses histoires et les connaissances qu'elle voulait bien lui transmettre. Mais sa mère a rejoint la Déesse, et seule Willow est capable de la renseigner sur elle-même, maintenant.

Tara continue de l'interroger sur cet ouvrage, hochant doucement la tête en entendant cette liste de rituels. Ce sont des éléments relativement classiques, en effet. La mention des philtres d'amour l'interpelle un peu plus, mais elle met rapidement ses doutes de côté. Tant qu'elle n'a pas lu le contenu de ces pages par elle-même, elle ne peut pas se faire une idée précise de ce qu'il en est.

- Est-ce que je dois en conclure que... tu n'as pas besoin de rentrer chez toi, ce soir ?

Il est important qu'elle sache combien de temps elle peut espérer retenir Willow... car si elle s'écoutait, elle passerait la nuit avec elle, à simplement profiter de sa présence, ou en pratiquant quelques rituels. Tara adore pratiquer la magie avec Willow, tout simplement parce que dans ces instants-là, elle a l'impression qu'elles sont seules au monde. Lorsque sa magie et celle de la rousse sont liées, elle a le sentiment de la comprendre intimement, plus que qui que ce soit d'autre ne sera capable de la comprendre.

À force d'avancer, elles sont arrivées à la place du village, où les habitants sont rassemblés en cercle pour observer les plus courageux ayant osé se placer au centre de la place pour danser ensemble. C'est avec un sourire mutin que Tara se tourne vers Willow.

- Mais avant tout ça... et si on dansait ? suggère-t-elle en lui tendant la main.

Quel meilleur programme que celui de passer la nuit avec Willow ? Avec elle, même le sommeil devient dérisoire. Tout le reste devient dérisoire. Lorsqu'elles sont ensemble, Tara ne pense plus à son père ou à son frère et à leurs sermons, elle ne pense plus à la mort de sa mère ou à sa peur d'être seule à jamais avec ses pouvoirs et ses connaissances... Elle ne pense plus qu'à Willow et à cette superbe magie qu'elles créent ensemble, par l'association de leur magie respective et... de ce quelque chose de plus qui fait que passer du temps avec Willow est une évidence et au-delà de ça, un besoin qu'elle ne s'efforce même plus de refouler ou de dissimuler. Parce qu'elle est persuadée, au fond, que c'est un besoin que partage son amie. Elle l'espère ardemment, en tout cas.

Un large sourire fait rayonner le visage de Tara lorsque Willow accepte sa main tendue et accepte donc de danser avec elle. La danse est maladroite, la musique est légèrement trop forte, les autres personnes autour d'elles sont trop agitées... mais Tara n'a d'yeux que pour Willow. Son coeur s'emballe, ses joues rosissent, ses cheveux, longs, détachés, accompagnent chacun de ses mouvements... et elle n'a jamais été aussi heureuse qu'en cet instant, malgré la maladresse de leurs pas qui, au contraire, auraient tendance à ne lui rendre ce moment que plus doux encore.

Lorsque la danse s'achève, Tara, qui est encore dans l'euphorie du moment, ne parvient pas à maîtriser l'envie de continuer la danse et finit par exécuter un mauvais pas qui lui fait perdre l'équilibre. Elle resserre alors sa prise sur les mains de Willow et manque de s'effondrer sur elle mais se rattrape de justesse. Elle ne peut cependant s'empêcher de remarquer que ce mouvement les a considérablement rapprochées, physiquement, et ce constat la trouble tout autant qu'il lui plaît... Exaltée, elle affiche cependant un sourire contrit tout en replaçant une mèche de cheveux derrière son oreille d'un geste nerveux.

- Désolée...

Elle ne tarde pas à se redresser et entraîne Willow à l'écart des autres danseurs afin de ne pas obstruer le cercle qui s'est formé. Tentant de ne pas trop interpréter la manière dont les battements de son cœur se sont accélérés, elle l'interroge finalement :

- Qu'est-ce que tu aimerais faire, maintenant ?

La jeune sorcière est sur un petit nuage dont elle a bien du mal à se séparer. Cette danse lui a donné l'impression que le temps n'importait plus, qu'il savait tout à la fois s'étendre et se comprimer, si bien qu'elle est incapable de dire si elles ont dansé une éternité ou seulement l'espace de quelques secondes.

La proposition de Willow a le mérite de la ramener à une réalité qui est tout aussi douce, en cet instant, que ses rêveries. Tara adresse à son amie un sourire à la fois doux et sibyllin. Willow se doute-t-elle des sentiments de Tara à son égard ? Ces sentiments sont-ils partagés ? Ce sont des questions que Tara ne cesse de se poser, sans réussir à déterminer si ce qui prime est l'appréhension de la réponse ou l'envie de mettre un terme à ce mystère. Un subtil mélange des deux, qui lui donne parfois l'envie de tout avouer, surtout lorsqu'elles sont seules et ont tout loisir de se contempler... Et qui au contraire, d'autres fois, la fait tant douter qu'elle en perd ses moyens.

- Oui... Allons manger.

C'est à regret qu'elle décroche son regard du sien, mais Tara suit gaiement Willow tandis qu'elles s'aventurent de nouveau vers les étals, passant de l'un à l'autre. Attentive aux articles qui s'y trouvent, son attention dérive pourtant, gardant toujours un œil sur la silhouette de son amie, comme si elle craignait que celle-ci ne s'éclipse.

Soudainement, Willow s'arrête et désigne un bracelet. La remarque qui accompagne ce geste la surprend, au point de la faire bafouiller :

- Oh... t-tu crois ?

Bien sûr, sinon elle ne le dirait pas, Tara. Cette dernière adresse un sourire d'excuse à Willow et, ne souhaitant pas mettre un terme à son enthousiasme, essaye le bracelet, le montrant à son interlocutrice en souriant.

- Je... Il est très beau, mais... C'est trop.

Elle le repose avec précaution, et ce mouvement lui permet d'apercevoir un autre bijou, une pierre verte suspendue à une corde de cuir. La corde en elle-même est anodine, mais c'est le pendentif qui attire le regard de Tara, qui le saisit avec délicatesse.  

- Ce collier irait très bien avec tes yeux, décrète-t-elle en levant le bijou à hauteur de la gorge pâle de Willow, tentant d'imaginer la pierre reposer sur sa peau, frôlant la naissance de sa poitrine... Et il est sans doute préférable qu'elle n'y songe pas davantage, finalement, si elle se fie à la chaleur qu'elle sent monter à ses joues.

L'enthousiasme de Willow est contagieux. Tara, d'ordinaire si peu encline à envisager de s'offrir quoi que ce soit, en vient à reconsidérer cette habitude tandis qu'elle pose les yeux sur le bracelet.

- Il est très beau, admet-elle lorsque son amie lui demande ce qu'elle pense du bijou.

Elle prononce cela d'un air songeur, mais écarquille les yeux, se tournant vers elle pour la regarder avec stupéfaction.

- Willow ! Non, c'est trop. Je n'ai pas besoin de ça.

Et son trouble ne va pas en s'arrangeant. C'est à son tour de lui suggérer un bijou. Pendant qu'elle lève le collier pour mieux visualiser ce qu'il donnerait, à la gorge de Willow, le pendentif pesant sur la naissance de sa poitrine, les doigts de la rousse frôlent les siens... et Tara se sent rougir de plus belle. Bouleversée, elle s'efforce pourtant de rester calme d'apparence. Mais ses yeux se baissent, préférant fixer le pendentif plutôt que de soutenir le regard de l'autre sorcière... Du moins, jusqu'à ce que cette dernière l'interroge, non pas sur le collier, comme elle s'y attendait, mais précisément sur ces mêmes yeux qu'elle tenait tant à éviter de crainte d'être incapable de leur dissimuler plus longuement à quel point ils la séduisaient.

Comment elle trouve ses yeux ? Sublimes. D'un vert d'émeraude si perçant qu'ils lui donnent l'envie de plonger dans leur profondeur et de s'y perdre jusqu'à la fin des temps. Expressifs, aussi. Tara sait toujours quelles émotions traversent l'esprit de Willow dès qu'elle s'intéresse à ses yeux. Ils s'assombrissent lorsqu'elle est contrariée... et semblent pétiller lorsqu'elle est de bonne humeur, comme en cet instant. Lorsqu'elles pratiquent la magie toutes les deux, ils se parent d'un voile presque paresseux, qui ne fait en vérité qu'attirer Tara davantage.

- Envoûtants, sourit-elle tendrement.

Oubliant leur environnement, oubliant tous les témoins, Tara lève une main et effleure la joue de Willow du revers de ses doigts.

- Willow, je pourrais passer des heures à en observer les moindres détails.

La jeune sorcière ressent une frustration certaine à l'instant où Willow est interrompue par le vendeur qui les fixe d'un regard réprobateur, les accusant silencieusement de trop traîner et de repousser les autres clients potentiels. L'achat de Willow lui cause une gêne telle qu'elle en rougit de plus belle et se confond en excuses auprès de son amie, tout en lui adressant à son tour un regard un tantinet réprobateur, car elle sait que Willow a eu tout temps d'anticiper sa gêne, même s'il s'agit là de lui faire plaisir.

Mais cette gêne est oubliée dès l'instant où Willow lui remet le bijou. Tara doit admettre qu'elle reconnait bien là le symbolisme d'un tel présent, elles deux, portant un bijou acheté le même jour pendant qu'elles étaient ensemble... C'est tout ce qu'il y a de plus romantique, et à cette pensée, ce n'est plus l'embarras qui colore les joues de Tara mais bien la joie, celle d'être vue, véritablement vue et appréciée, par la femme la plus merveilleuse qu'elle connaisse.

Entraînée à l'écart, sa frustration se dissipe lentement, car enfin, elles se retrouvent toutes les deux, se dévorant des yeux... Et la révélation de Willow au moment de lui avouer qu'elle a très envie de l'embrasser ne l'effraie pas, pas plus qu'elle ne la surprend. Car un instinct l'incite, depuis quelques minutes déjà, à l'embrasser également. Et parce qu'elles sont sur une même longueur d'ondes, toutes les deux. Leurs désirs sont toujours similaires.

- Viens, murmure-t-elle malicieusement tout en lui prenant la main pour l'entraîner un peu plus loin.

Elle la mène jusqu'à une roulotte légèrement à l'écart, dont elle relève le rideau qui garde l'entrée. À l'intérieur, elles découvrent un décor rempli d'étoffes colorées et de tissus drapés, un décor destiné à donner un aperçu d'orient aux plus curieux. Elles y sont seules, et Tara guide Willow en position assise sur les coussins dispersés au sol. Son sourire est tendre, toujours tendre, au moment où elle se penche sur elle et, enfin, scelle leurs lèvres.

Embrasser Willow, c'est aussi naturel que de respirer. Et pourtant, Tara avait été nerveuse au moment de se pencher sur elle pour réduire l'espace vacant entre leur visage. D'une nervosité appréciable cependant, de celles qui amorçaient un événement capable de changer le cours des choses. Pour le meilleur comme pour le pire, mais avec toujours un minimum d'excitation quoi qu'il en soit. Et le soulagement est tel, en sentant Willow répondre favorablement à son baiser, que Tara en oublie toutes ses inquiétudes passagères. Elles s'aiment, c'est évident. Elles s'aiment depuis bien longtemps, elles se sont convoitées depuis trop de temps, sans jamais oser effectuer le premier pas… C'est chose faite, à présent. Sans retour en arrière possible. Et Tara n'a aucune envie de revenir en arrière et d'effacer cette journée qui a tout de la journée idéale.

Émue, son sourire est rayonnant, son regard baissé sur ces lèvres qu'elle vient tout juste d'embrasser. Elle peine à croire que cette situation soit réelle, tout en sachant pourtant, à la manière dont son cœur bat, qu'elle n'imagine rien de tout cela.

- Au moins autant que moi.

La roulotte est plongée dans le calme, mais le monde extérieur leur est toujours accessible en bribes. Elles parviennent à saisir des bouts de conversation à mesure que les autres personnes présentes à ce festival passent, elles entendent les musiques se succéder, de façon lointaine… Et loin d'être dérangée par ces preuves du monde extérieur, Tara a bien au contraire l'impression que l'intimité qu'elles sont parvenues à trouver, ici, n'en est que plus véritable. Mais à présent qu'elles ont trouvé ce refuge au beau milieu des festivités, la jeune sorcière n'a aucune envie qu'elles soient interrompues ou dérangées. Alors, sans un mot, elle lance un sort sur la porte et la verrouille, puis murmure un sortilège de discrétion qui incitera tout curieux à s'éloigner.

- Je t'aime, reprend-elle ensuite à quelques millimètres de ses lèvres. J'ai l'impression de t'avoir toujours aimée,confesse-t-elle tendrement, ses yeux cherchant les siens en quête de réaction.

Une lueur d'incertitude passe dans le regard de Tara juste après sa confession. Cela dure à peine une seconde, mais il s'agit d'une seconde durant laquelle la jeune sorcière se met à douter. Et si elle avait mal lu les signes ? Et si Willow n'osait pas lui dire non, tout simplement ? Et si elle se leurrait depuis le départ ?

Toute à ses incertitudes qu'elle est, Tara manque l'expression qui passe sur le visage de Willow. En revanche, elle ne manque rien de la manière dont elle lui répond. Les mots qu'elle prononce la rassurent aussitôt, et toute appréhension s'efface pour ne plus laisser place qu'au bonheur le plus pur. L'absence de filtre dont elle fait preuve lui fait un bien fou. Ce qu'elle peut aimer Willow, et ce qu'elle peut aimer la manière dont elle s'exprime, comme si elle tentait d'exprimer au mieux le fil de ses pensées à l'instant où celles-ci surviennent.

Elle aimerait répondre, mais elle peine à trouver les mots justes. Ce qu'elle doit exprimer est trop intense pour que de simples mots, même arrangés selon les plus émouvantes des formulations, transmettent ce qu'elle ressent véritablement. Fort heureusement, Willow prend les choses en main et l'embrasse avec une passion et une envie telle que Tara se laisse happer par ce baiser. Elle le lui rend avec tout autant de langueur, ses mains se posant sur sa taille pour mieux bénéficier de la chaleur de son corps. Pouvoir l'aimer en toute liberté, sans avoir à craindre les rumeurs ou les yeux indiscrets, voilà une liberté qui a un goût de reviens-y. Cette liberté a un goût sucré qu'elle vient cueillir encore et encore aux lèvres de Willow.

- Je savais qu'aujourd'hui serait une journée radieuse, souffle-t-elle malicieusement près de sa bouche. Mais je n'imaginais pas à quel point je serais heureuse.

Au bout de ses doigts, Tara peut sentir sa magie crépiter sous l'émotion qu'elle ressent. Tout son corps semble comme engourdi, bouillonnant de ces sentiments d'une grande puissance qu'elle s'était jusque-là efforcée de contenir, mais qui ne réclament qu'à s'exprimer dans toute leur variété à présent. Leur histoire d'amour est également une histoire de magie… Leur sorcellerie les a liées dès les premiers instants, et elle estime que c'est là chose plus intime encore que les baisers qu'elles sont désormais libres de partager sans craindre la réaction de l'autre.

Chaque geste esquissé par Willow l'hypnotise. Elle suit du regard le rapprochement de ses doigts, savoure leur brève caresse lorsqu'ils replacent quelques mèches de ses cheveux derrière son oreille. Ces quelques petits gestes qui sont un rien, pour d'autres, mais qui pour elle sont infiniment précieux et émouvants. Chaque geste de tendresse, elle l'interprète comme une déclaration d'amour et comme une réaffirmation de cette intimité qui les lie, elle l'espère, à jamais. Quant à la véritable déclaration de Willow, elle parvient à réaffirmer son sourire, et à rendre ses yeux encore plus brillants de joie.

- C'est ton sourire qui fait mon bonheur. Et, Willow, depuis que je te connais… il ne se passe pas un jour sans que je ne sourie grâce à toi.

Elle est tellement sincère qu'elle en frissonne d'appréciation, comme si elle libérait enfin toutes les émotions refoulées, toutes les paroles similaires qu'elle avait voulu lui adresser par le passé mais qu'elle avait tues de crainte de la froisser. C'est une liberté grisante, qu'elle célèbre en clamant, une fois de plus, les lèvres de la jeune femme. L'une de ses mains se cale sur la nuque de Willow, sans aucune brusquerie, pour la rapprocher d'elle et lui permettre de caresser ses lèvres des siennes avant que de les entrouvrir pour approfondir ce baiser qui lui fait clore les yeux, lui permettant d'en apprécier les sensations brutes qui, toutes, lui font tourner la tête de la plus délicieuse des manières.

Tara sentit son cœur battre avec une intensité qui lui était familière, mais qui pourtant semblait toujours nouvelle quand elle était en présence de Willow. Les paroles de cette dernière la touchaient au plus profond de son être, faisant fondre ses doutes et ses craintes, ne laissant place qu'à la pureté de leurs sentiments partagés.

« Promesse tenue, alors », murmura-t-elle d'une voix douce tout en lui adressant un chaleureux sourire, ses yeux fixés sur ceux de Willow, dans lesquels elle trouvait son refuge.

Leurs lèvres ne se lâchaient plus, scellant cet accord silencieux d'une affection mutuelle. Chaque caresse, chaque contact semblait électrifier l'air qui les entourait, créant un espace suffisamment intime pour qu'elles puissent se laisser aller à explorer la profondeur de leurs émotions.

Lorsque Willow la guida avec une délicatesse qui la fit frissonner vers les coussins confortables, Tara se laissa aller avec confiance. Sous les douces caresses de Willow, Tara sentit une douce chaleur se diffuser à travers son corps. Ses doigts glissaient le long du ventre de Tara, éveillant chez elle des sensations insoupçonnées. À chaque caresse, Tara répondait par un soupir, par un frisson. Allongée, elle la regarda avec une affection évidente, ressentant un mélange d'anticipation et d'excitation monter en elle. Les yeux de Willow étaient une énigme dans laquelle elle se perdait volontiers, un regard chargé de désir et de tendresse.

Un sourire léger s'épanouit sur les lèvres de Tara, répondant à la demande muette de Willow. Elle l'invita d'un mouvement subtil de ses doigts à se rapprocher encore, à explorer cet espace qu'elle partageait sans peur ni hésitation. Leurs souffles se mêlaient dans un rythme presque hypnotique, alors que Tara murmurait à mi-voix :

« Willow, je te fais confiance... avec tout mon cœur. »

La magie qui les liait sembla s'amplifier, transcendant leur connexion physique pour laisser place à une fusion de cœurs et d'âmes. C'était ainsi que Tara le ressentait, du moins. Rien d'autre ne comptait dans cet instant précieux qu'elles, et ce moment où elles se découvraient mutuellement et s'abandonnaient à la beauté de leur amour et de leur intimité partagée.