Cela fait longtemps que tu ne t’es pas rendu chez Piers. Depuis une fameuse nuit trop alcoolisée, t’arrives plus à le regarder en face. Déjà que votre relation n’a pas été des plus fameuses non plus – la faute à qui, Gavin. T’aimerais pouvoir le dégager totalement de ta vie, mais même déménager n’a pas suffit ; t’as quand-même envie d’aller le voir. Peut-être parce qu’il est aussi cabossé que toi. En-fin, plus tellement depuis qu’il reprend sa vie en main et dégage une à une ses casseroles. Ça te gonfle. Tu sais très bien que tu devrais le féliciter, l’encourager dans cette voie, comme toute per-sonne normale, avec des potos normaux. Mais t’as jamais été de ce genre, d’aussi loin que tu t’en souviennes. Tu as l’envie vicieuse de ruiner tous ses efforts en quelques mots, l’attirer au fond avec toi. Lui cracher au visage à quel point les personnes comme lui te dégoûte, pour le voir serrer la mâ-choire, jusqu’à ce qu’il craque et riposte.
- Ouvre, Piers !
Ton poing martèle la porte. Tu as un double des clefs, mais tu ne manqueras jamais l’occasion de le faire chier. Tu ne changeras jamais. Tu t’en penses incapable. C’est bien plus simple ainsi. Frustré que la porte ne s’ouvre pas dès que tu as aboyé l’ordre, tu t’allumes une clope, plutôt qu’administrer un coup de pied au bois qui n’a rien demandé. Flemme d’avoir des remarques sur la patience, gestion de la colère, ou une connerie du genre. Flemme de devoir payer pour la porte, aussi. T’aurais sans doute dû prendre un pack de bières avant de venir. Même si Piers ne doit plus toucher une seule goutte d’alcool pour ne pas sombrer à nouveau, toi y a rien qui t’empêche de boire. Tu n’es pas al-coolique. Il t’arrive d’enchainer les verres, parfois, certes, mais tu ne seras pas alcoolique. C’est un de tes rares exploits.
- Si t’ouvres pas dans cinq minutes, c’est moi qui vais l'ouvrir cette putain de porte !
Et pas avec la clef. Mais ça, Piers doit s'en douter.
Lentement mais sûrement tu redeviens un homme présentable. Du moins, assez pour te reprendre en main et faire en sorte que tu ne fasses pas tâche à ton nouveau boulot. Car oui, fini le Piers alcoolique qui traîne les bars et change de boulot comme de boxer, aujourd’hui t’es un homme nouveau, style comme dans les films d’amour où la meuf décide de changer et change réellement. La seule différence ici c’est que tu n’as pas de seins et que t’es un mec mais ça doit autant compter. Y a pas mal de nouvelles connaissances dans ta vie mais aussi des anciennes qui sont revenus, comme ton ex-capitaine, Chris, qui t’as proposé de bosser pour lui après avoir passé quelques tests et te voilà désormais capitaine de ta propre équipe chez les S.T.A.R.S., une division de la police ce qui fait que tu bosses avec une vieille amie aussi. Et pour une fois, la journée passe vite et tu finis même à l’heure, exploit quand on sait que dès qu’un métier te plaît, tu peux y passer tes jours et tes nuits, facile aussi quand on sait que tu n’as personne qui t’attends à l’appartement, elle est loin l’époque des colocataires, tu devrais peut-être songer à reprendre quelqu’un, ça serait pas mal, au moins ça ne serait pas pire que ton ex-colocataire : Gavin.
Une fois que t’as retrouvé le confort de ton chez-toi, te voilà nu comme un vers, prêt à prendre ta douche. Tu n’as rien prévu de ta soirée et tu files donc laver ton corps, retirant la crasse et toute cette journée qui t’a littéralement épuisé. Alors que tu rinces tes cheveux, t’entends quelqu’un toquer à la porte. Merde, qui ça peut être ? Tu n’attends personne. Alors tout en te dépêchant de te rincer, tu entends une voix, un peu effacée avec les murs et les portes et tu te décides de sortir, enfilant une serviette autour de ta taille tout en prenant une seconde pour sécher tes cheveux. Quand la voix se fait entendre à nouveau, tu la reconnais immédiatement : Gavin. Fallait que tu penses à lui pour qu’il pointe son nez, coïncidences ? Tu ne crois pas. Ouvrant la porte d’entrée, tu observes l’homme de bas en haut avant de dire, limite blasé. « On sait tous les deux que t’aurais rien fait à cette malheureuse porte. Et t’as perdu ton double ou tu venais juste vérifier si tu pouvais toujours me faire chier ? » Que tu demandes, arquant les sourcils alors que tu te décides de le laisser passer, soupirant légèrement en refermant derrière-vous quand il est à l’intérieur. « Que me vaut le plaisir de votre visite, ô inspecteur Reed ? » Tu termines de sécher tes cheveux et tu viens glisser ta serviette sur ton épaule, avançant jusqu’au salon où tu laisses le plus vieux gérer sa vie. « Attends, tu sais quoi, j’arrive, je sais que t’es pas branché testostérone, tout ça tout ça alors on va éviter de jouer avec le feu hein ? » Que tu lui dis d’un clin d’œil, le laissant seul dans le salon alors que tu retournes dans ta salle de bain. Une fois complètement séché tu enfiles un boxer, un jogging et un débardeur, retournant auprès du brun en venant te poser dans le canapé. « Je te manquais, c’est ça ? »
Made by Neon Demon
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Lun 19 Sep 2022 - 0:14
I was looking for some kind of savior
Alors que tu t’apprêtes un donner un léger coup de pied à la porte, tel un tir de sommation avant la vraie frappe, elle s’ouvre sur Piers. A moitié à poil. Tu clignes des yeux. Une fois. Deux fois. Puis tes yeux se lèvent rapidement vers son visage. Merde, il aurait pu foutre un pantalon avant de venir. Ta bouche est sèche et tu déglutis difficilement ; les souvenirs, c’est de la torture.
- Va te faire. Tu sais très bien que j’aurai enfoncé la porte. C’est déjà arrivé. C’est une de mes fiertés de ma carrière de flic d’avoir le droit de faire ça. A ton avis pour le double ?
Tu entres, mains dans les poches et épaules sorties ; et surtout évitant d’avoir ton ex-colocataire dans ton champ de vision. Ce qui est compliqué. Le bâtard est musclé, imposant. Ça se voit qu’il refait du sport, reprend une vie scène – et toi, la seule évolution, c’est le temps qui passe et te vieilli. Chienne de vie. Tu te jettes dans le canapé une fois arrivés au salon, la tête appuyée sur le dossier pour te lancer dans une contemplation du plafond – et tes choix de vie, au passage. Puis comme ça ne risque pas de donner quelque chose de fameux, tu t’empares plutôt de la télécommande pour surfer sur les chaines. Puis s’il refait une allusion à ce qu’il s’est passé, tu pourras lui balancer dans la tronche. Ou lui mettre dans un endroit spécifique que l’on ne peut nommer. Quoiqu’il risque d’apprécier. Tu grognes alors que tu te laisses tomber sur le côté, tête rattrapée par l’un des oreillers. Piers n’a même pas un coup d’œil lorsqu’il revient et s’assoit.
- Non, c’est juste que l’électricité coûte une blinde alors je squatte… Et ton wifi est meilleur que le mien, et que celui du fast food du coin.
Fais-tu, sortant ton téléphone pour consulter tes réseaux sociaux. Tu t’es arrêté sur une série policière vraiment bidon, à la télévision, gardant la télécommande en otage. Histoire de le faire chier jusqu’au bout. Il mérite de souffrir, ce type qui ose réussir sa vie. De quel droit ?
- Et je ne te parle pas du wifi du commissariat. Et du matériel en général. A mon époque on avait des ordinateurs holographiques.
Etrange discours de vieux du futur. Tu ricanes et secoues la tête. A ton époque les citoyens crèvent de faim dans les rues car la technologie a volé le travail, ne t’en veux pas de ces merdes, car tu connais l’évolution. Mais t’en as jamais trop parlé avec Piers. Le passé reste dans le passé. Enfin, le futur ? Le futur reste dans le passé ?
- Si tu crois que je te manque, le doigt dans l’œil tout ça, tout ça. Je venais juste, outre l’électricité et le wifi, voir comme le grand Piers Nivans se porte depuis qu’il a arrêté de se bourrer la gueule.
T’aimes pas l’idée qu’il ait réussi à se reprendre en mains. T’aimes pas l’idée qu’il ait réussi à se faire des potes. T’aimes encore moins l’idée que sa vie est plus belle sans toi. Et la tienne se dégrade.
- C’est quand le mari, le chien, les enfants adoptés, du coup ? Faut me dire, que je sache quand je ferai tache dans ta parfaite petite vie de bon citoyen modèle.
Tu ne peux clairement pas être tranquille, même sous ta douche et quand il ne vit plus chez toi, Gavin arrive toujours à venir foutre son nez là où t’es, à croire qu’il te kiffe ou autre mais tu ne le taquines pas avec ça, enfin pas tout le temps, tu le connais, il va te péter la gueule sinon, faudrait pas que vous recouchiez ensembles, ça serait l’horreur. « Abuser de ton statut de flic pour faire ça, c’est vraiment pathétique, même pour toi Gav… » Mais bon, la porte est ouverte, t’es encore légèrement humide et tu ne vas pas rester là cent ans donc tu le laisses entrer, faire comme si cet appartement était toujours le sien alors que non. Va falloir que tu lui dises que désormais t’as un nouveau colocataire mais pour l’instant tu te contentes de l’abandonner, le charriant tout de même au passage avec ton corps d’athlète finement musclé : le sport ça aide à remettre en forme, il n’y a pas à dire.
Et une fois que t’es présentable, c’est-à-dire vêtu et non plus presque nu comme un vers, tu reviens, et lui demande qu’est-ce qu’il fout là, si c’est le fait que tu lui manques qui fait que ou bien tout autre chose. « Ouais, trop sympa. T’es plus riche que moi j’crois, blaireau. » Que tu répliques alors qu’il ne prend même pas la peine de te regarder quand il t’adresse la parole. T’as oublié à quel point il était… comme ça. Il te manque, un peu, et tu ne saurais pas dire pourquoi. Il a allumé la télé et tu regardes trois secondes pour voir que c’est un truc merdique, une série policière, comme si t’en voyais pas assez au boulot. Puis tu vois que la télécommande reste entre ses doigts, bien, s’il croit que tu vas bouger pour le récupérer ou autre, il peut se la foutre où il veut, comme il te l’a trop souvent dit aussi. « Mon dieu, mais ça devait être magnifique tout ça. J’imagine tes coéquipiers voir ta sale tronche en 8kUHD, les pauvres, à côté même un zombie fais moins peur. » Tu souris comme un con car tu n’en penses pas un mot, c’est juste pour le faire chier, comme d’habitude quoi.
Alors que tu te redresses, histoire d’aller dans la cuisine pour te servir un truc, tu dis. « Le grand Piers Nivans se porte très bien. Merci de t’intéresser à moi, quand on vivaient à deux t’en avais rien à foutre et depuis ton départ tu ne peux plus te passer de moi, c’est mignon. » Tu te sers alors un café, noir, sans rien et tu demandes. « Tu veux boire un truc ? » Que tu demandes, plus par politesse que par réelle envie, mais sa question te fait rouler des yeux alors que tu poses ta tasse peut-être un peu trop rapidement. « Et pourquoi uniquement un mari ? Je pourrais rêver d’une femme, je ne suis pas que gay du con. » Tu reviens finalement, le scrutant avant d’ajouter, comme exaspéré. « Et toi, c’est quand que t’arrêtes d’être un connard ? A croire qu’en trois ans tu changeras jamais. » Tu soupires et ça te fait serrer un peu plus ta tasse, que tu prends à deux mains donc pour en boire une gorgée. « J’ai un nouveau coloc, au faite. » Que tu balances alors, rabaissant ta tasse pour plonger ton regard dans le sien. Voilà, c’est dit.
Made by Neon Demon
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Jeu 3 Nov 2022 - 0:03
I was looking for some kind of savior
A quoi ça sert d’être flic si on ne peut pas abuser de son statut, de temps à autre ? Faut bien s’amuser pour pas devenir complètement taré. Pas que les cadavres provoquent encore un quelconque trouble chez toi, ça fait un moment que t’en vois. Tu es même devenu cet enfoiré qui fait des blagues irrespectueuses. Ce sont plutôt les réactions des vivants qui t’estomaquent. Contrairement à ce que tu fais croire aux autres, tu es capable d’empathie. T’as juste jugé que c’est un frein à ton quotidien déjà compliqué – la gestion des émotions, ça n’a jamais été ton truc.
La série policière n’a aucun intérêt, mais c’est mieux que regarder Piers en face. Des fois que les souvenirs d’une fameuse nuit viennent te hanter. Ses commentaires t’amusent cependant, et tu ne peux empêcher le souffle amusé de quitter ton nez. C’est le seul qui puisse t’insulter sans conséquence ; tu lui rends bien.
- C’est toi le blaireau, les seuls trucs qui voyaient en 8kUHD ce sont les p’tains d’androïdes. C’est eux qui foutaient les jetons.
Tu n’as franchement pas envie d’en parler, même si c’est toi qui as lancé le sujet. A chaque fois que tu penses aux machines, y a un truc dans un coin de ton esprit qui te dérange. Tu sais que tu as perdu des souvenirs, et celui-ci semble important. Tu n’as pas le temps d’y réfléchir davantage puisque Piers enchaine. Il abuse. Tu n’es pas tout le temps collé à lui, tu passes quand le travail te libère. C’est tout.
- Désolé j’avais un vrai métier quand on vivait ensemble, tu comprendras quand tu bosseras pour de vrai. Non j’pas soif.
Un sentiment que tu refuses de décrire comme de la jalousie brûle soudainement ton estomac. Tu es conscient que quelques secondes de silence planent avant que tu ne lui balances :
- Qu’est-ce que ça peut me foutre ?
Le ton n’est pas aussi mordant que tu l’aurais voulu, et ta main se serre autour de la télécommande. Tu espères qu’il est aussi con que toi, son nouveau colocataire. Et en même temps tu sais qu’il mérite mieux. Piers est un homme bon, et maintenant qu’il prend en main sa vie, t’as l’impression qu’un fossé se creuse entre vous.
- Il est sympa ?
Sans aucun doute plus que toi. Tu te demandes si c’est toi qui l’as poussé à s’améliorer. Arrêter l’alcool et trouver un vrai job, pour se casser rapidement de son connard de colocataire. Peut-être que tu devrais en être fier si c’est le cas. Pourtant ça te fait vraiment chier.