Tu te dévisages dans le miroir sans comprendre au moment de réaliser où tu te trouves... sans le réaliser complètement. Tu fais plusieurs tours sur toi-même pour contempler la tenue qui te colle à présent à la peau. Fluide, parfaitement ajustée, on dirait qu'elle a été faite pour toi... Elle est à l'image de tout ce que tu avais eu à l'esprit au moment de fantasmer ce moment... et tu l'as espéré tant de fois, n'est-ce pas Queenie ? Tu avais réfléchi au moindre détail, pensé le moindre aspect d'une union qui était vouée à n'avoir jamais lieu... Ou peut-être que non ? Ce n'est définitivement pas le bonheur ou l'enthousiasme qui agitent ton coeur en cet instant, mais l'incompréhension, et aussi une légère angoisse. Tu ne comprends, tu ne comprends tout simplement pas ce qui t'arrives.
Tu reconnais cet endroit. Tu le reconnais pour tous les moments que tu y as passé, lors de vos retrouvailles clandestines avec Jacob, quand il vous fallait éviter d'attirer l'attention : l'arrière-boutique de sa boulangerie... Pas de la boulangerie devant laquelle tu gardes la tentation de passer trop souvent - plus souvent que tu ne le devrais - depuis que tu as retrouvé Jacob dans ce nouveau monde (des retrouvailles douloureuses). Mais de celle qui avait fait son succès à New York. Tu es à New York. Tu ne saurais dire l'année mais tout, depuis le mobilier jusqu'au choix de ta tenue en passant par la décoration aux murs te crie que tu es revenue d'où tu étais partie. Est-ce que c'est seulement possible ? Tu ne comprends pas... tu ne comprends rien. Tu es là, et c'est comme si tu te retrouvais dans le corps de quelqu'un d'autre... quelqu'un qui te ressemblerait trait pour trait.
Tu paniques face à tant d'incompréhension... Et quand on vient frapper à la porte de la pièce où tu te trouves pour le moment seule, ton premier réflexe est de chercher une échappatoire par tous les moyens. Mais il n'y a pas de fenêtre ici, et tu es coincée.
"Une minute !" tu tentes presque malgré toi sans même savoir à qui tu t'adresses.
Tu voudrais retirer cette robe et la donner à quelqu'un d'autre. Tu sais que tu as usurpé ta place, cette tenue, ce n'est pas toi qui es supposée la porter. Tu ignores qui aurait dû se trouver à sa place, et tu n'es pas sûre de vouloir le savoir. Quand la porte finit par s'ouvrir, tu cherches désespérément un endroit où te planquer... Mais tu es livrée à toi-même. Alors, dans l'entrebâillement de la porte, tu le vois, dans un costume beaucoup trop élégant pour ne pas être assorti à ta belle robe blanche. Un sentiment vertigineux te coupe le souffle. Tu ne comprends toujours pas. Mais à présent... tu as peur de comprendre.
C’était l’incompréhension la plus totale. Te voilà devant ton miroir en train de contempler l’incrédulité : tu étais très beau, rasé de près sans perdre cette fidèle moustache en compagnie de ces cheveux coiffés sur le côté. Quelques-uns se rebellaient en formant des boucles et ondulations ici ou là. Tu aimais bien, parce que ça faisait sophistiqué sans pour autant être strict. Mais ce qui t’impressionnait, c’était surtout ce costume neuf. Rien qu’au toucher, tu sentais que la manufacture était de très haute qualité, un point que tu retrouvais autant sur ta chemise que sur ta cravate et tout le reste. Ce n’est pourtant pas ce qui te déconcertait le plus : ce costume, ce n’était pas celui qu’on mettait pour un rendez-vous professionnel ou pour une fête, mais plutôt pour un mariage. Avec qui ? Queenie n’était pas le premier nom qui te venait en tête. Nagini était celle qui se présentait naturellement et un nouvel espoir soufflait contre ton cœur. Tu ignorais les raisons de ta présence ici, mais tu ne pouvais t’empêcher de faire des suppositions : avais-tu été ramené dans le passé (avec ta pleine conscience de ton futur et de ta vie sur cette île mystérieuse) pour ralentir cette échéance qui arriverait malgré tout et te laisser l’occasion de vivre un bonheur pendant quelques années supplémentaires avec Nagini ? Tu ignores quand tu l’aurais demandé en mariage, mais un élan de spontanéité pour lui prouver qu’elle comptait te ressemblait bien. Surtout lorsque tu étais désireux de ne pas reproduire les erreurs du passé. Cette idée t’égayait. Pas seulement pour toi, mais aussi pour Nagini : elle méritait un peu de paix et savoir que tu étais celui qui le lui apportait… Tu étais plus qu’enchanté face à cette perspective.
Il y avait cependant des petits détails qui te réfrénaient dans ton rêve pour te faire voguer vers un autre. Aussi surprenant et déstabilisant que cela puisse être, tu reconnaissais la chambre que tu occupais autrefois au-dessus de ta boulangerie à New York. Tu ignorais l’année de ton retour à cette période de ta vie, mais les indices disséminés un peu partout te laissaient sous-entendre que tu avais retrouvé tes bonnes vieilles années 30. Alors, forcément, avec tout ce décor, tu ne pouvais t’empêcher de penser que ta mariée, c’était Queenie. Si tu t’attendais à ce que de la tristesse et de la rancœur percent ton cœur en pensant à elle, c’était tout le contraire qui se produisit. Tout comme pour Nagini, en pensant à la sorcière, tu retrouvais cette sensation de bien être infini. Une flopée de papillons naissait dans le creux de ton estomac avant de prendre son envol gaiment aux quatre coins de ton être. Le tout était agrémenté de vagues d’amour puissantes et déstabilisantes. Tu cherchais à les réprimer parce que tu n’étais plus censé ressentir une telle chose pour Queenie, en vain. Savoir que tu l’aimais aussi ardemment te rassurait autant que cela t’effrayait : quid de Nagini pour laquelle tu avais les mêmes sentiments ? Tu ressentais un léger mal-être, la gorge serrée quand tu pris conscience que tu serais tout bonnement incapable de choir entre les deux. Elles étaient très différentes l’une de l’autre et c’était ce point-là qui nourrissait cet amour délicat que tu ressentais pour les deux femmes. Ton effroi montait soudainement d’un cran : et si elles étaient toutes les deux là, habillées en mariée ? Et si le destin t’avait mis là expressément pour que tu fasses un choix entre elles ? Reprendre ton histoire avec Queenie là où vous l’aviez laissé en faisant table rase du passé était très tentant, tout comme la perspective d’un avenir radieux avec Nagini l’était. Pas de Voldemort ici pour court-circuiter votre histoire puisqu’il avait techniquement moins d’un an dans cette temporalité.
Il n’y avait qu’une façon de chasser les doutes : sortir de cette chambre et en avoir le cœur net. D’un naturel anxieux, cela te demandait un effort surhumain. Mais tu avais de la chance, Jacob, parce que tu avais une force de caractère que beaucoup t’enviaient et tu y arrivais. Malgré ce cœur qui battait en désordre et ces suées d’angoisse, tu déambulais sans problème dans le couloir pour rejoindre la pièce adjacente à ta chambre et dans laquelle tu avais entendu du bruit. Encore maintenant, à l’approche du verdict, tu ignorais si tu préférais voir Queenie ou Nagini derrière cette foutue porte. Devant elle, à cause de ce stress plus intense, tu pris une très grande inspiration pour à la fois t’apaiser un tant soit peu, mais aussi pour te donner du courage. Au bout de quelques secondes, tu toquais enfin. Puis sa voix te percutait de plein fouet, te figeant sur place Queenie. C’était Queenie ! Ton cœur battait si fort, si vite que tu peinais presque à respirer — douce agonie. Mais il y avait encore cette part minuscule de doute qui subsistait au fond de toi et qui s’envolerait qu’une fois la porte ouverte. Et dès que tu l’aperçus dans l’encadrement de la porte, tout volait en éclat. Même la malheureuse Nagini était reléguée au second plan dans ton esprit — Queenie éclipsait tout, réminiscence d’un amour éternel que jamais tu n’arriveras à chasser. « Qu… Queenie ? Mais… Je… » Tu en perdais tes mots. Tu ne l’avais pas revu depuis votre discussion houleuse à l’Anavrin. Dieu qu’elle t’avait manqué. Tant de questions se bousculaient dans ta tête et tu n’arrivais à en formuler aucune clairement, réduites à l’état de balbutiement. Tu perdais aussi tous tes moyens pour une tout autre raison : dieu qu’elle était sublime. Queenie était déjà une femme magnifique et n’avait pas besoin de faire grand chose pour briller, mais dans cette robe, pour le peu que tu en voyais à travers l’entrebâillement… Elle était tout bonnement indescriptible. « T’es… T’es magnifique. » Tu soufflais ces mots dans un murmure, ignorant si tu avais le droit de les dire. Si ému par l’instant et subjugué par elle, tu en avais même les larmes aux yeux et tu ne cherchais pas à le cacher. Tu te montrais même audacieux le temps d’un instant, en venant chercher sa main derrière la porte pour l’extirper de la pièce et mieux l’admirer.
Puis tu repensais à l’incongru de cette situation. Vous ne devriez pas être là. Surtout pas sur le point de vous marier vu l’état de votre relation dans le monde sans nom dans lequel vous aviez été propulsé il y a trois ans. Alors, tout en la contemplant, totalement perdu, tu tentais : « Je… Je sais pas si c’est réel, là. Si tu es vraiment devant moi. Surtout… Surtout avec une robe de mariée. J’ai l’impression d’être dans un rêve. Je comprends pas trop ce qu’il se passe… » Tu riais pour détendre la situation, puis toi par la même occasion. Même si tu aimais profondément Nagini, avec une infinité de subtilités, il y avait malgré tout une petite partie de toi qui espérait que tout ça soit vrai.
Invité
Lun 28 Nov - 11:38
It could have been us
feat Jacob
La surprise dans le regard et dans la voix de Jacob achève de te convaincre d'une réalité que tu aurais aimé occulter, tout en sachant, bien sûr, que c'est impossible. Ce n'est pas un rêve, ce n'est pas une hallucination, ce n'est pas un retour au moment présent, et en même temps... ce n'est pas réel. Vous ne devriez pas être ici. Vous n'avez rien à faire là. Tout ceci n'est pas un rêve devenu réalité, tout ceci n'est pas non plus un cauchemar ou un fantasme, tout ceci est... autre chose. Quelque chose que vous ne comprenez pas, une chose qui vous happe et qui vous prend de court... Et vous vous retrouvez tous les deux plongés dans ce moment, aux prises avec cet instant qui vous bouleverse et vous échappe, dont vous ne parvenez pas à saisir le sens. Il ne t'aidera pas à comprendre ce qui se passe, parce que lui-même ne le sait pas. Les larmes qui humidifient tes yeux ne sont pas des larmes de tristesse, elles trahissent des émotions plus confuses. Il y a de la panique, bien sûr, pas seulement. Une part de toi n'oublie pas combien tu avais espéré ce moment, combien le fait de ne pas l'obtenir t'avait mené aux décisions les plus extrêmes. Bien des choses se sont passées, depuis, bien sûr, et grâce à Merlin, tu as pris conscience du fait que tu réussirais peut-être à prendre un nouveau départ.
"Merci..." Ta voix tremble au moment de prononcer ces mots. L'émotion que tu éprouves, tu n'arrives tristement pas à la contenir. Il dit te trouver magnifique... Comme tu aurais voulu entendre ce compliment, de sa part, dans des circonstances par contre différentes. Là... Ces mots te font plaisir et te rendent triste en même temps. Tu sens la morosité te submerger, un mélange d'amertume et de regrets. Cette scène pourrait être belle si elle était... réelle. Mais il est trop tard, radicalement trop tard. Aucun retour en arrière n'est possible. Aucun retour en arrière qui ne suggère, en tout cas, une certaine et insoutenable. "Tu es très beau, toi aussi."
Tu le penses. Tu l'as toujours trouvé beau, il t'a toujours charmée pour tout ce qu'il est, physiquement, mentalement, parce qu'il possède la plus belle âme qu'il t'ait jamais été donné de rencontrer. Alors oui, tu n'as pas à feindre ce compliment. Dans ce costume qui semble taillé sur-mesure, il est clairement à son avantage, et tu le trouves plus charmant que jamais. Une part de toi voudrait qu'il se soit réellement apprêté pour toi, tout comme toi-même tu t'es apprêtée pour lui. Mais vous savez l'un et l'autre qu'il n'en est rien, n'est-ce pas ?
"J'en ai aucune idée moi non plus", tu confesses quand Jacob observe n'avoir aucune idée de ce qui se passe. "Je crois que c'est... réel ? Mais en même temps..."
Tu ne finis pas ta phrase, tu te concentres, tu entends des échos de voix, de l'autre côté de la porte, tu captes des pensées au vol, tu en reconnais certaines... Celle de Tina. Celle de Newt...
"Ils vont nous attendre... Il faut qu'on trouve un moyen de s'en aller en douce..." Tu ris doucement au moment de prendre pleinement conscience de ce que tu viens de dire. "J'avais tellement rêvé ce moment, tu sais..." Il le sait... Il le sait mieux que personne. "Je voulais ce mariage plus que tout, et maintenant je m'apprête à le fuir."
Ironique.
PrettyGirl
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[Intrigue 3] It could have been us (Jacob)
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