(terminé) You can't erase what's in your blood [Maman]

You can't erase what's in your blood

feat. Maman

« Je ne te flatte pas », répond posément Regulus, sans faire preuve de la plus grande honnêteté, il faut l’admettre. Oui, il la flatte, il la flatte car il veut réussir à rendre leur conversation plus légère, parce qu’il veut se débarrasser de ce poids qui l’oppresse et l’angoisse immensément. Il la flatte parce qu’il a le sentiment de ne pas avoir le choix. « Tu n’irais pas remettre en cause ton propre talent et même si du temps a passé, je connais tes qualités. Est-ce mal de vouloir les mettre en exergue ? » demande-t-il en se rattrapant aux branches.

Elle sait que sa mère ne veut peut-être pas en discuter davantage, mais lui, veut s’efforcer, s’il ne l’est plus, d’au moins jouer ne serait-ce qu’un peu les fils modèles. Il devine, bien sûr, que cela sera sans effet, et qu’il a les meilleures chances du monde de se prendre un mur en faisant ça, mais il a le sentiment de ne pas totalement échouer, ce qui quelque part le réconforte. Il a vu un fin sourire se déposer sur ses lèvres. Pas un sourire franc, et pas longtemps, et ce sourire lui a réchauffé le cœur. Les circonstances sont complexes, trop complexes, elles les ont probablement bien trop éloignés. Mais quoi qu’il advienne, le bonheur de sa mère ne cessera jamais de lui tenir à cœur.

« J’y tiens », confirme le jeune homme quand sa mère lui dit qu’elle lui fera parvenir ses critiques si cela l’intéresse. Oui, il y tient, comme une manière de préserver à tout prix ce lien bien trop ténu, entre eux, et qui semble menacer, à tout instant, l’équilibre précaire d’une relation qui en a encore les contours, mais qui ne sera définitivement plus jamais ce qu’elle avait été autrefois, peu importe les efforts qu’ils voudront déployer afin d’y parvenir. « Et c’est vrai, j’ai mon travail, qui me prend beaucoup de temps. »

Pas que le travail, un cercle social tel qu’il aurait de quoi couvrir de honte des générations de Black si Regulus se décidait à en parler plus en détails. Bien sûr, Regulus a conscience de ce que sa mère cherche à faire : elle veut en apprendre plus sur sa vie, elle veut l’inviter à se dévoiler. Regulus ne veut pas le lui refuser, bien sûr. Mais il le doit. Elle lui reprochera sa discrétion, ses secrets et ses silences, mais elle lui reprocherait peut-être davantage encore la manière dont il s’est adapté à ce monde. Peut-être un peu trop bien, peut-être un peu trop facilement, en dépit des défis d’un autre ordre qu’il doit relever.

« Tu sais bien, j’ai jamais eu une vie sociale très… mouvementée. Et je m'épargnerais de renouer avec certains de mes anciens amis... »

You can't erase what's in your blood

feat. Maman

C’est vrai, Regulus a toujours été un solitaire… Par choix ? par envie ? par nécessité ? Lui-même n’en sait trop rien. Il veut croire que c’est dans son tempérament, qu’il a toujours été asocial et a toujours eu tendance à faire en sorte de tenir les autres à l’écart, mais en réalité, il serait bien incapable, même encore aujourd’hui, de déterminer la part qu’a joué son éducation dans son rapport à autrui. Il songe qu’il n’aurait probablement pas été le même s’il avait grandi dans une famille différente… et d’un autre côté… eh bien, Sirius avait reçu la même éducation que lui – et pourtant, cette éducation ne l’avait pas empêché de n’en faire qu’à sa tête et d’être quelqu’un d’excessivement sociable. Que ce soit sa personnalité, son éducation, ou une cumulation des deux, peu importe, il est en effet un solitaire… qui oublie parfois de l’être en compagnie de Peter, mais jamais très longtemps, cela dit.

Sa mère à raison, il reste seul pour se protéger… des fréquentations inconvenables ? ça a probablement été le cas dans un premier temps, mais les choses ont changé ensuite. Il se protège, oui, mais dans d’autres circonstances et pour des raisons finalement bien différentes. Sa vie sociale est pauvre en effet, car en dehors de Sirius, l’on pourrait dire, pour ainsi dire, qu’il n’y a que Peter… Quelques autres connaissances vont et viennent, mais Regulus refuse d’y prêter plus d’attention que cela… Il n’est pas du tout question pour lui de se créer un grand cercle d’amis… Il s’efforce seulement de trouver… Si ce n’est son bonheur, du moins son équilibre, de la manière qu’il pourra.

« Je le sais », répond Regulus avec un fin sourire.

Il pourra toujours se tourner vers sa famille. Surtout, il voudra toujours se tourner vers sa famille, quoi qu’il advienne. Peu importe les avertissements de Sirius, peu importe tout ce qu’il sait faire sens dans une situation à ce point désastreuse, il veut pouvoir retrouver son foyer, sa mère, le sentiment de réconfort qu’il éprouve avec elle, même si les étreintes et les « Je t’aime » sont rares, voire même, en réalité, inexistants.

Oui, il veut compter sur eux… En toutes circonstances, par contre… Regulus en doute quelque peu… Il connaît les valeurs familiales, il a vu sa mère partir dans une rage folle après le départ de son frère, il a contempler la souffrance d’un foyer brisé. Si sa mère devait tout savoir, l’histoire se répéterait nécessaire, il ne peut vraiment pas l’envisager, pas le moins du monde, même.

« Et tu sais… tu peux compter sur moi également. Si tu devais avoir besoin de quoi que ce soit… je serai là. »

You can't erase what's in your blood

feat. Maman

Regulus esquisse un fin sourire. Le discours de sa mère est encouragé, mais le ton qu’elle emploie, toujours aussi pondéré, toujours aussi ferme… si familier, au fond… ne manque pas de le remettre à sa place. Il se sent redevenir adolescent, soumis aux exigences de sa mère, dans une réalité où cette loyauté inconditionnelle n’est malheureusement plus possible. Il préfère ne pas commenter quand sa mère affirme que les Black ont toujours été unis… Il en doute. Le départ de Sirius, tous ces noms effacés sur l’arbre généalogique familial, racontent une autre histoire. Non, les Black n’ont jamais été unis. Par contre, ils ont toujours su prétendre l’être… Et ils auraient probablement besoin de le prétendre plus que jamais… Mais les adversités qui se présentent à eux sont trop nombreuses… Et les notions qu’ils ont de l’adversité ne sont définitivement plus les mêmes.

Pour ce qui est des convictions propres à Regulus… C’est délicat… Lui-même ne sait plus vraiment ce qu’elles sont. Tout ce qu’il tenait pour acquis autrefois a changé, son univers tout entier s’en est vu bouleverser, sans lui laisser le moindre répit. Toutes ses convictions se voient bouleversées, si bien qu’il ne sait pas exactement de quelle façon se comporter vis-à-vis de cette situation.

« Je me tournerai vers vous », confirme Regulus avec, pour le coup, une totale sincérité quand Walburga la met en garde contre les dangers qu’il rencontrera, afin de lui assurer que sa famille le protègera quoi qu’il en soit. « S’il doit m’arriver quoi que ce soit. Je te le promets. »

Oui… Mais est-ce que sa famille peut quoi que ce soit contre le seigneur des ténèbres et ses sbires ? Il ne ferait que les mettre en danger, rien d’autre, et il le sait pertinemment. Quant au reste, quant à tout ce qui le préoccupe autrement, il ne se voit pas lui en parler, au risque de l’offusquer, au risque de lui briser le cœur. Il lui fera suffisamment de mal comme cela… Bien malgré lui… Il veut éviter de lui faire le mal qu’il se sait capable de ne pas lui faire.

Comment ne pas être touché par les paroles de sa mère ? Regulus sent son cœur fondre comme neige au soleil. Qu’importe la part de manipulation dans son discours, elle n’en est pas moins sincère, il en est convaincu, quand elle lui affirme qu’elle l’aime. Il sait que c’est sincère, et ce baiser sur son front achève de l’attendrir. Les marques d’affection sont si rares au sein de cette famille, chacune d’entre elles doit, par conséquent, être appréciée et accueillie avec la plus grande douceur.

« Vous êtes mon cœur et mon sang, quoi qu’il advienne. Je ne l’oublie pas. »