Bewitched ♤ ft. Penny

Penny ne pouvait pas se cacher que cela lui manquait énormément de chasser le mal comme elle l'avait toujours fait dans sa famille. Ayant perdu tous ses pouvoirs, la sorcière ne s'y était pas risquée avant de rencontrer Minerva. C’était une sorcière, elle aussi, d'un genre différent de Penny. Elle utilisait une baguette magique, ce dont la Halliwell n'avait jamais eu à se servir, et les sortilèges qu’elle utilisait pouvaient l'être par n'importe qui, même des sorciers qui commençaient tout juste à apprendre la magie. C’était une manière de fonctionner qui était bien mystérieuse et qui attirait la curiosité de la matriarche.

Contrairement à elle, Minnie, comme elle l'appelait, avait retrouvé ses pouvoirs et se retrouvait donc capable de pratiquer la magie. Grâce à ces potions, Penny pouvait l'accompagner dans des épopées contre des monstres légendaires et vivre enfin cette sensation pleine d'adrénaline qu'elle ressentait quand elle chassait les forces du mal. Seule, ses potions n'auraient pas suffi. Mais avec la magie d'une autre sorcière fonctionnelle, elles obtenaient des résultats plutôt satisfaisants. Elles étaient donc plusieurs fois parties à l'aventure ensemble.

Mais cette fois, elles avaient peut-être vu un peu trop gros. Cela faisait plusieurs heures qu'elles se battaient contre une bande de démons et même en les ayant presque tous vaincus, le dernier ne leur laissait aucun répit. Elle ne l'aurait jamais avoué mais Penny était épuisée. Elle faisait tout ce qu'elle pouvait pour compenser son absence de pouvoir avec ses potions et le résultat n'était pas mal, mais ça ne changeait pas le fait qu’elle s'épuisait. Quant enfin, le sortilège de Minnie frappa le démon et le vainquit, la quadragénaire sentit que ses jambes ne la porteraient plus bien longtemps.

Pliée en deux, le souffle court, elle échangea un regard avec sa complice de fortune, tombée à genoux. Un sourire naquit sur ses lèvres en même temps que sur celle de sa partenaire et quand le fou-rire la prit, un fou-rire nerveux, ce fut le moment que choisirent ses jambes pour la lâcher complètement. Elle tomba à genoux une main sur le front et l'autre sur son cœur en ne pouvant retenir ses éclats de rire. L’adrénaline provoqué par la chasse aux démons était toujours la même, même des années après. Si elle avait eu le moindre doute sur la question, elle n'en avait plus maintenant.

« Eh bien, on a sacrément eu chaud, tu ne trouves pas ? »

Ce disant, elle releva la tête vers son amie et croisa son regard dans lequel elle perçut une lueur dont elle ne comprit pas complètement la nature, mais qui lui semblait tout-de-même familière. Une émotion la parcourut avec un sentiment irrépressible de danger totalement incongru avec le fait qu'elles venaient de terminer complètement le groupe de démons et qu'elles ne risquaient plus rien. Ses sentiments et impressions contradictoires la perturbaient et elle déglutit pour essayer de reprendre ses esprits, mais elle n'y parvenait pas. Ses pensées se figeaient sur les lèvres de Minnie qui lui semblaient désespérément tentantes. Sans s'en rendre vraiment compte, elle approchait son visage de celui de l'enseignante.

« Minnie, je… »

Qu’était une sorcière sans sa magie ? Voilà une question que Penny s’était souvent posée depuis qu’elle était dans cette ville. La première fois qu’elle avait tenté de projeter quelque chose sans y parvenir, son visage s’était peint d’un mélange d’inquiétude et de consternation. Elle n’avait pas eu à se battre contre des démons au tout début, mais la perte de ses pouvoirs n’était pas pour autant moins préoccupante. Elle avait fini, à force d’enquête, par découvrir que la magie semblait ne pas exister du tout dans ce monde curieux, et elle s’était donné accès à la seule présente, celle des plantes.

Et puis, des traces de magie avaient refait surface. Certains des amis qu’elle s’était faite, comme Minnie, retrouvaient leur puissance sans que rien ne le laissât présager. Mais des forces machiavéliques aux puissants pouvoirs retrouvaient aussi leurs forces par la même occasion et Penny était toujours inutile dans le combat magique en face à face. Elle accompagnait Minnie en combattant comme une personne dénuée de pouvoirs, mais elle ne pouvait que continuer d’espérer que cet état serait temporaire. Penny en avait assez de devoir être un poids lors de ses sorties avec Minnie. Elle faisait ce qu’elle pouvait mais ce n’était pas la même chose sans pouvoirs.

Enfin, elles avaient vaincu. Et la pression retombait en un double éclat de rire. Elles avaient eu chaud, c’était certain, mais Minnie avait été parfaite dans sa façon de s’occuper de la créature. Les sorciers de son monde ne semblaient pas avoir pour principale mission de combattre les démons, mais celle qui avait été professeur de métamorphose dans une école de son monde semblait efficace dans la chasse aux créatures cruelles et malveillantes. Le sort qu’elle avait choisi d’utiliser avait été plutôt efficace et Penny le reconnaissait elle-même. Mais elle avait pris des risques. La matriarche n’aurait pas apprécié qu’il lui arrive du mal.

« Fais attention quand-même la prochaine fois, Je ne voudrais pas qu’il t’arrive quelque chose », dit-elle dans un souffle.

Le souffle devenu court, la respiration ayant pris un rythme un peu erratique, Penny sentir que quelque chose la traversait, un frisson qu’elle n’avait que peu connu, mais elle ne comprenait pas pourquoi cela se produisait en présence de Minnie. C’était la première fois que ce trouble se produisait en présence féminine, et elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que c’était une erreur, qu’une part d’elle-même devait se tromper, alors que le prénom de la jolie femme se perdait dans le murmure de Penny, alors que son nom à elle avait le même trouble perceptible dans la voix de Minnie. Ces sensations perturbantes les prenaient au dépourvu.

Leurs visages s’approchaient imperceptiblement, leurs lèvres se rapprochaient sans qu’elles ne s’en rendent vraiment compte, la conscience de ce qu’il était en train de se passer ne se faisant qu’à moitié, Penny posa ses lèvres sur celle de Minnie, ses yeux se fermant pour en savourer la chaleur, la saveur, pour répondre au besoin impérieux qu’elle éprouvait au fond d’elle-même de connaître le goût de cette femme, de la savourer, de l’embrasser. Penny avait envie de ce baiser, elle l’avait pris, et elle ne se rendait même pas pleinement compte de ce qu’elle était en train de faire.

Venait-elle vraiment de faire ça ? Embrasser son amie ? Comme si elle en était amoureuse… En était-elle amoureuse ? Peut-être bien, au fond. Et peut-être bien que c’était réciproque au vu de la façon dont elle lui avait rendu son baiser. Elle ne voulais pas la perdre, elles ne voulaient pas se perdre, de tendres aveux qui troublaient le cœur et la tête de la matriarche des Halliwell, elle ne savait plus où elle en était, comme si un son cerveau était soudainement vide tandis que son cœur était chaud, doux rempli. Le sourire qu’elle offrit à Minnie ne laissait pas le moindre doute sur la façon dont elle aimait ses doux mots.

Mais Penny n’était quand-même des plus à l’aise avec ce qui était en train de se passer. Dans la bagarre, les affrontements, quand il fallait démolir la tête des démons, là, elle était à son affaire. Les histoires de cœur, ce n’était clairement pas son domaine de prédilection depuis qu’elle avait fermé son cœur et considéré que les hommes n’avaient plus d’intérêt. Mais Minnie n’était pas un homme et Minnie lui plaisait. Elle se rendait compte de ce fait avec une stupeur peu égalée. Minnie lui plaisait. Et elle n’était pas tout à fait à l’aise avec ce fait.

Elle resta un instant à sourire bêtement, mais aussi béatement devant la simplicité de la choses, Minnie était plus qu’une amie pour elle, elle lui plaisait. Mais le malaise qu’elle ressentait face à ses sentiments était bien réel aussi. Elle n’était pas à son aise, et il allait falloir briser la glace si elle voulait que les choses reprennent un cours classique. Avec sa main dans celle de Minnie. Avec Minnie dans ses bras. Un cours classique où elle aurait Minnie pour elle, comme son cœur le voulait tellement en ce moment, sans qu’elle ne comprenne pourquoi.

« Hem, bon, j’espère que tu t’attends pas à ce que je vienne te courtiser avec quelques bouquets de fleurs, hein, c’est pas mon genre », grommela-t-elle, par plaisanterie, pour redescendre l’atmosphère sur quelque chose de plus léger. « Je risque plutôt de te ramener des bouts de démon, ou de créature diabolique, ça, ça me parle plus. »

Elle lui offrit un sourire complice, un peu teinté de malice. Elles savaient toutes les deux que Penny en était tout à fait capable, comme elle était vraisemblablement capable d’être romantique le moment venu, même si elle ne l’admettrait pas. Elle se releva, en prenant le bras de Minnie, comme si elle ne voulait plus la lâcher, et c’était au fond le cas. Une fois debout, elle ne put se retenir de l’étreindre et de la serrer fortement dans ses bras. Ainsi s’exprimait cet amour qu’elle venait de se découvrir sans savoir pourquoi il avait attendu si longtemps pour arriver.

« Je t’aime vraiment, Minnie. Je sais pas trop ce qui est en train de se passer, mais c’est bien, ça me plaît, et j’ai pas envie que ça s’arrête. »

Faire redescendre la tension était assez commun pour Penny depuis toujours. Elle lançait une petite pointe d’humour et la situation s’aplanissait aussitôt. Nul ne pouvait savoir le nombre de démons qu’elle avait vaincu en les vannant comme s’il ne s’agissait que d’une aimable partie d’échecs en bonne compagnie. C’était l’une des caractéristiques de Penny, ça et le côté mélodramatique et fantasque qui la conduisait régulièrement à bouder quand elle n’avait pas ce qu’elle voulait ou qu’elle se chamaillait avec quelqu’un. La cible de cela était régulièrement sa fille, quand elle se trouvait encore à San Francisco, mais elle était habituée et la laissait généralement dans son coin.

Minnie ne connaissait pas encore son côté boudeur. Elles n’avaient pas eu l’occasion de se chamailler en combattant du démon, mais il n’était pas impossible que cela arrive quand elles passeraient plus de temps toutes les deux, parce qu’elles avaient toutes les deux des caractères de feu et qu’il devrait invariablement arriver qu’elles ne soient pas d’accord. Mais pour le moment, elle ne réfléchissait pas aussi loin, elle pensait simplement à ce qui venait de se faire. Elles s’étaient embrassées, elles étaient amoureuses et elles avaient envie d’aller un peu plus loin, de voir où ça aller les mener. Penny en était curieuse.

« Il faudra que je te fasse goûter ma recette de tartelettes de fruits et de chocolat, tu en raffoleras. »

Elles se sentaient forcément désarçonnées. Ni l’une ni l’autre n’avaient envisagé l’homosexualité comme faisant partie d’elles et elles étaient tombées l’une sur l’autre. Si elle avait dû choisir une femme pour passer un moment dans le feu de l’action, Minnie était un choix évident et quitte à tomber amoureuse, elle était convaincue que son cœur n’avait pas été chercher la plus fragile des fleurs. Elle était combative, forte, puissante, et lorsque Penny aurait recouvré tous ses pouvoirs, elles seraient redoutables toutes les deux. En attendant, elles étaient déjà à craindre pour toutes les créatures démoniaques de ce monde, même si ce soir, elle avait bien cru perdre la vie.

Minnie l’attrapa, n’ayant pas envie de marcher. Leurs mains mêlées, la jeune femme se concentra un instant et elles se retrouvèrent dans l’officine de Penny en un instant. Son nouvel amour s’excusa aussitôt de l’avoir fait sans prévenir. Elle avait préféré le faire plutôt que de rentrer à pied, mais ça ne dérangea pas Penny qu’elle ait pris cette initiative. Elle ne se sentait même pas si malade que ça. Elle avait tellement l’habitude de voyager avec son être de lumière, ça n’avait rien de plus extraordinaire. Elle lui sourit tendrement et caressa sa joue avec une douce tendresse, un sourire aux lèvres.

« Ca n’est pas plus troublant qu’un voyage avec un être de lumière. Ma tête tournerait davantage si tu me serrais contre toi, là, tout-de-suite, qu’en une dizaine de ces… transplanages. »

Séduire, Penny savait le faire. Et elle avait envie d’en découvrir plus sur Minnie, sur ce qu’elle ressentait et sur l’envie qu’elle avait de se rapprocher d’elle. Elle était plus sûre d’elle, moins effrayée par ce qui venait de se produire, et elle avait envie de profiter de ce qui la grisait tant. Elle mit sa main sur la nuque de Minnie et attira son visage auprès d’elle avant de l’embrasser. L’enlaçant, elle la rapprocha d’elle avec une lueur dans les yeux, qui ne devait pas être des plus sages.

« Tu restes avec moi ? Tu dois être bien trop fatiguée pour rentrer tout-de-suite. »

Les deux sorcières partageaient un goût commun évident pour les friandises et les sucreries. Ce n'était pas pour rien si, en plus d'être douée dans le domaine des potions, la matriarche des Halliwell avait tenu à travailler un don pour la cuisine. Elle était toujours ravie de goûter les gâteaux qu'elle faisait elle-même. Et dorénavant elle pourrait les partager avec une personne particulièrement chère à son cœur. Ce qu'elle commençait à ressentir pour celle qui avait été son alliée et son associée pendant aussi longtemps, sur le chapitre du combat contre les Forces du Mal était complétement fou et inattendu, mais tellement doux.

Cela la remua tout particulièrement quand Minnie lui avoua que son cœur battrait également plus vite dans les bras de Penny. Depuis leurs tendres aveux, le cœur de la quadragénaire semblait battre au rythme des mots doux de sa partenaire. Le petit voyage rapide qu’elle lui offrit n'était rien en comparaison de ce qu'elle avait éprouvé face à l’affection profonde de l'ancienne sous-directrice d'une école de magie. En arrivant à l'apothicairerie, elle lui proposa d'ailleurs de rester en sa compagnie et de passer un peu de temps ensemble, mais elle s’attendait à ce refus. Minnie était maman et il était normal que sa fille passe avant.

La sorcière passa une partie de la soirée à repenser au sourire de celle qui venait d'entrer dans son cœur et au baiser qu'elles avaient échangé toutes les deux. Il n'était pas facile de reconnaître des sentiments aussi atypiques ce que ceux qui se présentaient aujourd'hui à elle. Mais s'il y avait une chose dont elle était absolument certaine, c'était qu'il n'était pas question pour elle d’y mettre fin. Ce n'était pas quelque chose de commun et ce n'était pas quelque chose de facile à assumer, mais le plus important pour elle était de se sentir heureuse dans ce monde où elle ne retrouvait pas ce qui avait pu contribuer à son bonheur jusque-là.

Au matin, elle se leva comme d'habitude pour ouvrir son apothicairerie et attendre les clients. La période était calme et non loin du comptoir, la vieille dame faisait l'inventaire de ses ingrédients et réfléchissait aux potions qu'elle allait préparer dans la période à venir. Certaines étaient plus populaires que d'autres et elle devait les préparer plus fréquemment. Ses inventaires étaient réguliers afin de savoir ce qui allait peut-être venir à manquer. Et puis, il y avait des potions qui nécessitaient les mêmes ingrédients et il fallait savoir mettre en place des priorités. Tandis qu'elle faisait tout cela, elle entendit un bruissement, signe que quelqu'un ou quelque chose était entré dans la boutique. Avec un peu plus d'attention, elle eut l'impression que le bruit ressemblait à celui d'un félin. Elle connaissait bien cet animal, familier des sorcières.

« Et alors ? N'y aurait-il pas une petite créature qui a décidé de venir me rendre visite ? » dit-elle en approchant doucement du comptoir. « Viens par ici mon mignon, n'aie pas peur, tu ne crains absolument rien. »

Quand le chat vint nonchalamment s'installer sur le comptoir, Penny se dit qu'il était vraiment sans-gêne mais au fond, cela ne la dérangeait pas trop. Elle avait toujours été bienveillante et affectueuse avec les animaux. Cela dit, cet animal précis avec quelque chose de familier, même si elle n'aurait pas su dire exactement ce qui lui faisait dire ça. Toutefois, ce sentiment de familiarité mit un sourire sur ses lèvres quand son regard se posa sur le petit félin. Elle ne savait pas si c'était un animal sauvage ou apprivoisé, mais il avait déjà dû rencontrer des êtres humains car il ne semblait pas farouche.

Mais ce fut quand il se transforma pour devenir la jolie Minerva que Penny se rappela que la femme pour laquelle son cœur battait si fort avait le pouvoir de se changer en animal. C’était l'un des pouvoirs personnels qui existaient dans certaines familles de sorcière, mais pas chez les Halliwell. Pour autant, chez les sorciers tels que Minerva, il ne s'agissait pas d'un pouvoir personnel mais d'un apprentissage. Cet apprentissage et la faculté qui en découlait permettait de vivre des moments comme celui-là où l'on se faisait surprendre en pensant qu’une personne était un animal. Mais le sourire de l'apothicaire s’agrandit quand sa compagne lui fit remarquer qu'elle était revenue comme elle le lui avait promis.

« Et cela ne te gêne pas d'utiliser mon comptoir comme un siège », remarqua la quadragénaire avant de gratifier la jeune femme d'un baiser. « Je suis heureuse que tu sois revenue me voir. »

Elle lui prit la main et l'entraîna vers l'arrière-boutique où elles seraient plus à l'aise pour parler. Elle gardait néanmoins un œil sur sa boutique pour éviter qu'on ne lui vole quelque chose. Cela dit, il n'y avait pas une quantité si exceptionnelle de clients en ce moment pour qu'elle ne soit pas prête à fermer temporairement la boutique pour passer un moment avec Minerva si cela s'avérait possible. Elle avait bien l'intention de se laisser porter par l'inspiration. Elle ne put d'ailleurs s'empêcher de gratifier la jolie sorcière d'une caresse dans le dos alors qu'elle s’avançait vers la petite kitchenette de la boutique.

« Une tasse de thé mon cœur ? »