Depuis qu’il était arrivé dans cette ville étrange, c’était la première fois qu’Harry prenait un congé d’une semaine. Il s’était énormément investi ici non pas pour se sentir intégrer à la communauté, mais parce que rester seul chez lui l’angoissait terriblement. Lui qui s’était toujours senti entourer de tant de monde, en particulier après son entrée à Poudlard, il avait le sentiment d’être revenu au temps où il vivait dans le placard sous l’escalier des Dursley, seul et rejeté. C’est pourquoi il avait rapidement trouvé un local à louer pour ouvrir son cabinet vétérinaire, lui qui avait toujours eu de bons contacts avec les animaux dans son monde, et qu’il s’était même porté bénévole pour aider les refuges de la ville à soigner leurs malheureux pensionnaires. Mais depuis le passage de Scorpius Malefoy et ses retrouvailles avec son fils, Albus, Harry avait la sensation que quelque chose dans sa vie était sur le point de changer et il ne savait pas si ce constat l’effrayait ou, au contraire, était excitant pour son côté « saut dans l’inconnu » qu’il apportait avec lui. Peut-être que ses retrouvailles avec Albus allaient enclencher une série d’autres belles retrouvailles ? Il pensait notamment à Ron, Hermione et Ginny, mais aussi à certains membres de sa famille. A Sirius surtout, son regretté parrain qu’il a si peu connu et plus encore, à ses parents. En discutant avec certains propriétaires venus faire soigner leur animal à son cabinet, il avait appris que certains d’autres eux étaient décédés dans leur univers ou qu’ils avaient retrouvé un proche décédé dans leur monde ici, dans cette ville. Il lui était donc permit d’espérer pouvoir enfin retrouver sa mère et son père, pouvoir enfin apprendre à les connaître comme il l’avait toujours rêvé. Cependant, si ces résurrections avaient bel et bien eu lieu, un autre avait dû connaître une expérience similaire. Voldemort. Autant sa mémoire lui faisait défaut sur bien des points de sa vie passée, autant il ne pourrait jamais oublier ce visage blafard et ce nom auxquels étaient rattachés d’innombrables crimes et autres atrocités. Pourtant, ce n’était pas en restant cloîtrer chez lui ou constamment en exercice à son cabinet vétérinaire qu’il pouvait espérer retrouver ses proches, amis et autres connaissances qui le reconnaîtraient si d’aventure il ne pouvait pas remettre leur nom sur leur visage. Il fallait qu’il sorte, qu’il voit du monde. Alors il prit un livre avec lui, son portefeuille, sa veste, ses clés et quitta son appartement en verrouillant la porte sur son passage.
Une fois dehors, un coup d’œil rapide à sa montre lui apprit qu’il était presque 16h00. L’heure du thé traditionnel en Angleterre, se rappela-t-il, un peu amusé par le rituel presque sacro-saint que cela représentait dans ce pays et c’est donc vers le salon de thé de son quartier, l’Anavrin, qu’il se dirigea. Il y était souvent venu sans vraiment prendre le temps de s’y asseoir. Ses passages étaient rapides, juste histoire de prendre une boisson chaude et un muffin ou une autre sucrerie à emporter. Aujourd’hui cependant, il comptait bien prendre ce fameux temps qu’il s’était toujours refusé. Et puis, qui sait ? Peut-être le hasard ou la chance feront-ils bien les choses et lui permettront-ils de recroiser quelqu’un de son univers ? Quelqu’un qui se rappellerait lui ? Qui l’aiderait à recouvrir la mémoire ? Car plus le temps passait, plus il avait la sensation de se retrouver devant un puzzle qu’il voulait à tout prix terminer mais dont il lui manquait plusieurs pièces, chacune ayant disparu sans qu’il ne sache comment et où. En tout cas, il venait à la bonne heure pour espérer voir du monde tant l’endroit était rempli. Il ne restait plus qu’une table pour deux personnes de libre, table à laquelle il prit place et commanda un thé noir et un muffin au chocolat. Mais lorsque la serveuse l’informa qu’ils n’en avaient plus mais qu’il restait d’autres choix en muffins et brioches au comptoir, l’encourageant à aller y jeter un œil, Harry se leva et se dirigea vers le comptoir en question, laissant son livre sur la table et sa veste sur le dossier de sa chaise pour qu’aucun autre nouveau client qui passerait la porte ne lui vole sa place. Une femme aux longs cheveux sombres s’y trouvait déjà et semblait hésiter entre plusieurs choix. Un rapide regard vers elle lui apprit deux choses : son visage ne lui disait rien MAIS elle était d’une grande beauté. Immédiatement, il sentit son côté timide refaire surface, comme lorsqu’il hésitait sur la façon dont il devait se comporter envers Ginny Weasley avant leur premier baiser. Il se mit à se gratter machinalement derrière l’oreille droite, ne sachant pas s’il devait prendre son courage à deux mains et entamer la conversation ou simplement choisir ce qu’il voulait pour accompagner son thé avant de se hâter de regagner sa place pour qu’elle ne voit pas la soudaine rougeur qui avait saisi ses joues.
- Un conseil ; ne prenez pas les scones. Même avec du beurre et de la confiture, ils restent très secs. Ça doit pas être la spécialité du lieu, s’entendit-il dire à la jeune femme en lui souriant avant de se fustiger mentalement. T’es vraiment pas doué avec les femmes, Potter…
▿ Ton univers : Tétralogie (( Dragon Rouge (1981) Le Silence des agneaux (1988)﹒Hannibal (1999)﹒Hannibal Lecter : Les Origines du Mal (2006) )) + Films (( Le Silence des Agneaux (1991)﹒Hannibal (2001) ))
▿ Date de naissance : 20/01/1968
▿ Age : 56
▿ Métier : Neurochirurgien
▿ Quartier : Baker Street Avenue
▿ Côté cœur :
“I'll confess it is pleasant to look at you asleep. You're quite beautiful, Clarice.” ― Hannibal Lecter to Clarice Starling
Salon de thé Anavrin, le 16 Mars 2022. for @Harry Potter
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Les aiguilles de sa montre pointent sur 15 heures lorsque le docteur Gaunt sort enfin du bloc opératoire à la suite d’un énième pontage coronarien. Dans l’engrenage d’une vie éreintante dans l’art méticuleux de la cardio-chirurgie, Merope Gaunt souffle quelques minutes en-dehors du bloc. Des infirmières ôtent ses gants en latex recouverts de particules de fluides corporels et de sang poisseux. Le sang. Cette odeur si familière pique ses narines. Elle embaume la pièce stérilisée, et s’y accroche comme une sangsue à sa proie. Gaunt est une doctoresse reconnue dans le milieu scientifique pour ses publications et se opérations de haute voltige à cœur ouvert. Elle est quelqu’un, dans ce monde, sur cette île. Merope n’est plus la fille d’un fou, héritière de l’illustre patronyme des Gaunt. Elle n’est plus une sorcière, c’est une chirurgienne. Une excellente chirurgienne, même. Merope Gaunt ne peut faire autrement, tous ses souvenirs se sont évaporés à l’instant même où elle s’est réveillée dans un luxueux appartement au début de l’année 2019. Tout ce qui lui reste, ce sont les souvenirs implantés de cette nouvelle vie trépidante et solitaire. Tous les chirurgiens sont des solitaires dans l’âme, après tout, ce n’est finalement pas si étonnant qu’en tant que Moldue, ce soit exactement le type de carrière qu’elle a embrassé. Merope est enfin dehors, changée en tenue citadine, et regrette déjà les effluves âcres du bloc opératoire. Elle repense nerveusement aux étapes de son opération de l’après-midi. Elle pense toujours à chacune d’entre elles après coup, afin de repérer les failles dans l’exercice de son art. Elle s’imagine en train d’effleurer du bout des doigts les artères obstruées par les dépôts graisseux dissimulées dans la paroi interne du palpitant de ce quadragénaire. Elle se souvient de sa vulnérabilité, touchante à souhait, alors qu’il était étendu complètement nu sur la table d’opération. Des souvenirs qui resteront éternellement gravés dans la mémoire de cette chirurgienne de renom. Il n’y a rien de bien compliqué, au vu du nombre de fois où elle a pratiqué cette opération. Une maladie classique dans son milieu, mais Merope Gaunt est une diablesse perfectionniste. C’est une obsédée, une compulsive, une maniaque de sa profession. Elle n’a la sensation d’exister qu’entre les quatre murs de son bloc, entourée de son équipe, de son infirmière de bloc attitrée et de son anesthésiste. D’autres s’illustrent par une vie de famille ou des loisirs trépidants, mais la vie de Merope Gaunt tourne autour de la pratique intensive de la médecine ; elle n’échangerait cela pour rien au monde. Foutaises. Caprices d’une pro du bistouri, une adoratrice des palpitants entre la vie et la mort, du sang frais et dégoulinant entre ses doigts gantés d’un très beau latex bleu turquoise. Merope Gaunt ne sait absolument pas de quoi elle parle. Elle ignore qu’un joli petit grain de sable va se mettre en travers de sa machine bien huilée. Elle ignore encore qu’une personne particulière va bouleverser son existence en un battement de cil, balayant alors toutes ses convictions pour ne laisser qu’un champ de ruines en lieu et place. Harry Potter. Un homme qu’on a longtemps surnommé « le survivant ».
16h. Merope Gaunt ne garde aucuns souvenirs de sa vie d’avant, mis à part quelques bribes de conversations ou de flashs aveuglants. Il lui arrive d’entrevoir même la possibilité de caresser son ancienne vie du bout des doigts, lorsque ces vagues submergent son esprit encore troublé. Elle réalise depuis quelques mois que quelque chose cloche dans sa vie. Jusqu’à sa rencontre avec un certain Tom Jedusor, la cheffe du service de cardiologie du Grey Sloan Memorial Hospital était convaincue d’avoir toujours vécu sur cette île. Cette rencontre a éveillé en elle les souvenirs d’une vie passée, de manière anarchique, comme les morceaux d’un puzzle auquel on aurait volontairement enlevé des pièces. C’est d’un pas lourd que Merope se rend dans le salon de thé Anavrin, situé en plein cœur du quartier de Hogwarts’s Place. Elle se sent tiraillée entre son devoir envers ses obligations professionnelles et son envie de mettre tout sur pause au moins une fois. Les rues sont bondées de monde à cette heure de l’après-midi. Elle parvient, non sans mal, à se glisser entre les passants avec les bras chargés de sacs et de café à emporter. Hogwarts’s Place est un quartier où il fait bon vivre, même si ce n’est pas l’un des plus hype de l’île, c’est un endroit incontournable pour les petits commerces. Elle hésite quelques instants avant de franchir les portes du salon de thé, comme si quelque chose essayait de la retenir en arrière, comme si elle se cherchait des excuses pour retourner sur son lieu de travail. Soupirant intérieurement, la jeune trentenaire balaie ses doutes. Tout le monde mérite de prendre une pause au moins une fois dans la journée, particulièrement quelqu’un d’aussi débordé qu’elle. Merope estime qu’elle est en droit de s’accorder un peu de répit, en ayant enchaîné une nuit de garde et cinq heures passées au bloc depuis ce matin. Une petite friandise avant de repartir à l’hôpital afin d’étudier les dossiers de ses patients post-op et préparer les opérations prévues le lendemain matin. En pénétrant dans le lieu, Merope réalise que c’est en quelque sorte l’endroit à la mode. Les tables sont presque toutes occupées, les employés s’affairent pour satisfaire les désirs de leurs clients et ces derniers…ne savent décidément pas quoi choisir entre le latte vegan et les variétés de thé glacé. Merope est plein d’assurance lorsqu’elle se rend au comptoir afin de commander un latte macchiato au lait d’amande. « En menu, mademoiselle ? »s’enquit de demander une agréable serveuse aux cheveux de feu et aux beaux yeux en amande. Elle a pris la chirurgienne au dépourvu, puisque Merope bute quelques secondes sur la question du menu spécial goûter. « Ah… Non. Quoique... Attendez une minute. »Gênée d’avoir laissé le fil de la discussion lui échapper, Merope remet l’une de ses mèches brunes derrière son oreille. « Peut-être bien un scone… Pourquoi pas un cinnamon roll, tiens... » chuchote la jeune femme, plus pour elle-même qu’à l’intention de la serveuse, mais cette interrogation est loin de passer inaperçue.
C’est vers 16h15 que la foudre vint la frapper une seconde fois. Un coup de foudre fulgurant et violent. Un coup de folie, tout comme la première fois, à Little Hangleton. Au point qu’elle est capable de recréer cette scène dans un coin de son esprit, de capturer en mémoire jusqu’à l’odeur mi-sucrée et mi-musquée de son mystérieux inconnu, de se remémorer les intonations exactes de sa voix grave. Alors qu’elle se retrouve entre les brioches et les scones, une apparition vient la détourner de sa contemplation des viennoiseries et autres friandises faites maison. La première chose que Merope Gaunt découvre de lui, ce n’est pas son visage ou sa carrure, mais le timbre de sa voix. Une voix qui l’emporte presque naturellement dans son sillon de séduction, une voix masculine et légère, qui suscite en elle un feu ardent. Elle glisse dans ses oreilles comme les notes envoûtantes du refrain de l’une de ses musiques préférées. Merope se sent extatique pendant quelques secondes. Cette voix lui évoque même un lointain son familier… Comme celui d’un ancien amant, d’un ancien amour perdu. Ils se ressemblent tellement. Si Merope avait encore conscience de ses souvenirs, elle aurait nécessairement fait un point de comparaison entre cet inconnu et son mari, Tom Jedusor Senior. Une beauté ténébreuse, une voix chaude et rauque, il n’y a finalement que le tempérament qui sépare les deux hommes. Merope s’attarde sur le visage du trentenaire qui s’adresse à elle avec une certaine maladresse. Cette vision trouble la chirurgienne cardio-thoracique au plus profond de son palpitant. Loin d’être aussi glacé qu’elle ne le pense, l’organe fragile de Merope Gaunt vibre encore pour les beaux garçons un brin rebelles dans l’âme. Cet étranger frappe son palpitant de plein fouet avec la lame invisible d’un poignard. Elle se sent meurtrie par la foudre, ne dit-on pas que celle-ci frappe toujours par deux fois ? Merope Gaunt se crispe lentement contre son portefeuille, ses longs doigts manucurés tiennent sa carte de crédit, pendant que ses yeux scrutent attentivement chaque détail de l’allure de ce bel inconnu. De beaux yeux bleus lagune, un visage de forme carrée, une peau laiteuse, des cheveux bruns légèrement ébouriffés et une paire de lunettes rondes. Merope Gaunt est charmée. Elle entrouvre ses lèvres fines en voulant lui répondre, mais son cœur saigne à cette simple idée. Merope comprend assez vite qu’il est troublé par sa personne. Sa présence, sa beauté, sa longue chevelure brune et ses yeux noisette-miel. Cela lui laisse un étrange pincement au cœur, elle est même persuadée de ne pas mériter cette affection. Merope soupire intérieurement en se confrontant aux fantômes de son passé, ces démons qui enserrent son âme et s’imposent à elle dans une douleur sourde.
« Eh bien... »Un murmure s’échappe finalement de ses lèvres joliment dessinées, colorées avec un nude bois de rose. Merope hausse les sourcils, ne pouvant nier l’effet de surprise que cet homme vient de provoquer en elle. Il déclenche en elle des flashs aveuglants, comme des bourrasques qui malmènent tous les recoins de son cerveau. Cet homme réveille les souvenirs de son premier et grand amour, un Moldu snob et antipathique. Tom. Un homme très beau, brun et aux yeux bleus, exactement comme cet habitué du salon de thé. Elle croit se rappeler de quelque chose d’important, là, ici et maintenant. Merope répète au moins cinq fois ce prénom en croyant l’identifier comme un détail de son passé. Tom… Un Moldu… Deux mots qui éveillent en elles les foudres de la colère et de la rancœur. Qu’est-ce qu’un Moldu ? s’interroge-t-elle. Pourquoi ce mot est-il apparu dans son esprit…comme par magie ? Merope ne se rend pas immédiatement compte que son regard vient de s’assombrir. Elle en ignore les raisons, mais quelque chose dans ce prénom et ce qui semble être une insulte étrange lui filent des nausées.
Son cœur s’emballe furieusement à l’intérieur de sa cage thoracique, ce qui est manifestement le pire qui puisse lui arriver. Merope se sent comme déchirée devant une vision trop surnaturelle pour être vraie. « Merci pour le conseil. » répond-elle en courbant ses lèvres en un sourire sincère, tout en portant son choix sur une autre douceur que les fameux scones secs. Ce garçon a du goût… Je devrais suivre son conseil. « Je prendrai un cinnamon roll, en plus du latte. Merci. »dit-elle en se détournant du jeune homme dans une tornade de cheveux bruns. Quelque chose semble l’avoir piquée. Elle virevolte, visiblement pressée et enthousiaste à l’idée de poursuivre cette discussion dans un endroit plus approprié. Un endroit beaucoup plus calme qu’un comptoir en pleine effervescence, bondé de clients de plus en plus impatients. « Vous venez souvent ici ? »Cette phrase n'est pas dénuée d’arrière-pensées. Merope espère secrètement mettre une heure précise sur un visage et un lieu. Qui sait, peut-être que l’envie de le revoir dépassera ses prérogatives professionnelles ? C’est surtout une question idiote, puisqu’il vient de lui préciser l’aspect des scones, ce qui laisse sous-entendre que c’est un habitué de ce salon. Merope se flagelle mentalement. Elle confie sa carte de crédit à la serveuse afin de régler sa commande. Lorsque son café est posé sur le bord de la table, elle remarque aussitôt qu’on l’a enveloppé dans un gobelet en carton élégamment décoré et certifié éco-responsable. « On ne peut leur reprocher de ne pas faire les choses bien. »confie-t-elle en souriant de manière extatique. Cet homme… Il est beau comme un dieu. Merope s’empare du précieux café d’une main et de sa friandise de l’autre. NOTES — hey you j'espère que ma réponse te plaira, dis moi sinon *hugs to you*
Depuis combien de temps n’avait-il plus ressenti cela ? Le temps…Celui-ci semblait s’être arrêté dès l’instant où cette femme croisa son regard. Son regard noisette rencontra le sien, azur, et ce fut comme si quelqu’un mit ce moment-là sur « pause ». Plus rien ni personne d’autre qu’elle n’existait pour Harry. Le vacarme des clients du salon de thé avait disparu. Il lui semblait même qu’il n’y avait plus qu’eux dans la salle. Mais ce n’était qu’une douce illusion, férocement détruite par la présence de l’employée derrière le comptoir, qui tendait sa main pour prendre la carte de crédit de la cliente et l’insérer dans le terminal bancaire. Clignant des yeux et se rappelant soudain de respirer, Harry s’obligea à détourner le regard pour se plonger dans la contemplation des différents paniers et bocaux à muffins disposés derrière la vitrine du comptoir lorsque la serveuse s’adressa à lui.
- Et pour vous monsieur ?
- Un muffin aux raisins secs s’il-vous-plaît. Ces derniers n’avaient jamais beaucoup de succès, pas parce qu’ils n’étaient pas bons, mais parce que les gens préféraient en général ceux au chocolat ou aux myrtilles. Du coup, Harry savait qu’il en avait toujours au moins un pour lui. C’était ça, l’avantage de ne pas avoir les mêmes goûts que les autres. Il patienta pendant que la serveuse le lui préparait sur une petite assiette en porcelaine blanche avec quelques serviettes en papier puis lui demanda s’il voulait régler de suite. Il répondit par l’affirmative et sortit quelques billets de son portefeuille. De l’argent qu’on lui rendit, il en glissa un peu dans le bocal à pourboires puis, tout comme la ravissante brune, il prit sa commande et se détourna du comptoir. Il lui décocha un petit sourire bref et timide. Son côté incroyablement introverti dès qu’il se trouvait en présence d’une belle femme reprit le dessus. Que devait-il faire maintenant ? Lui souhaiter une bonne fin de journée et en rester là ? C’était hors de question ! Cela faisait plus de trois ans qu’il était ici. Il avait croisé de nombreuses femmes et certaines étaient loin d’être dénuées de charmes. Mais aucune ne disposait de cette aura qui se dégageait d’elle. Aucune ne lui avait fait cet effet de se sentir transporter dans un autre lieu où il n’y avait qu’eux, tout cela d’un simple regard et en n’ayant prononcé que quelques mots d’une voix mélodieuse. Et son parfum…Il l’envoûta lorsqu’elle avait tourné la tête et que ses longs cheveux sombres avaient dansé autour de son visage. Non. Il ne pouvait pas juste lui dire « bon appétit et bonne fin de journée » et s’en retourner à sa table en lui lançant des regards furtifs, envieux et furibonds contre lui-même de ne pas avoir osé engager plus avant la conversation. Réfléchis Potter, ré-flé-chis… se dit-il. Et finalement, ce fut la salle bondée qui lui donna la réponse. Plus aucune table de libre ! Il n’y avait plus que la sienne qu’il pouvait proposer à la belle inconnue, à moins qu’elle eût l’intention de la consommer ailleurs ? Il sauta donc sur son idée et prit son courage à deux mains pour parler aussi calmement et distinctement que possible, combattant sa nervosité intérieure de ne pas lui déverser un flot de mots inintelligibles par trop d’empressement à vouloir lui parler !
- Si vous comptiez manger sur place, il y a encore une place à ma table, proposa-t-il, sentant la chaleur lui monter aux joues. Enfin…je fais juste la proposition. Elle ne vous engage à rien…. Oh que si, elle vous y engage ! pensa-t-il, espérant de tout coeur que c’était là son envie à elle aussi. Conscient soudain qu’ils bloquaient légèrement la fil d’attente devant le comptoir, il lui fit signe de le suivre sur le côté. Venez, je crois qu’on gêne un peu ! Donnez-moi ça ; j’ai encore une main de libre ! La galanterie ; ça marchait toujours avec les femmes ! Il se saisit donc de son latte, effleurant par la même occasion très légèrement ses doigts fins. Un frisson électrique lui parcouru tout le bras jusqu’à la nuque par ce simple et si bref contact et il dut se faire violence pour ne plus y faire attention tant la sensation lui était agréable. Pour répondre à votre question, oui je viens assez souvent ici. C’est pas loin de mon cabinet vétérinaire. Donc je peux vite me chercher un bon café ou quelque chose à manger entre deux rendez-vous. Ils font de bonnes choses et si vous êtes sensibles à l’écologie et au respect de l’environnement, vous êtes effectivement au bon endroit ! Là-dessus, Harry lui offrit son plus éclatant sourire puis, enhardi peut-être par sa réponse qui lui permit d’aligner plus de dix mots sans trop bafouer ni se hâter dans sa diction, il prit les devants et la mena à sa table. Venez, ne restez pas debout. Ils slalomèrent entre les tables pour arriver à la sienne, sur laquelle il posa le latte face à la chaise libre et face à son propre thé noir, à côté duquel il posa son assiette et son muffin. D’un geste de la main, il l’encouragea à s’asseoir, non sans la fixer du regard. Tout dans ses mouvements était gracieux, contrôlé, souple. Comment était-ce possible qu’il ne l’ait pas rencontré plus tôt ? Où était-elle donc pendant ces trois longues années ?!
- C’est la première fois que vous venez ici ? finit-il par lui demander. Vous savez maintenant que je suis un habitué mais il ne me semble pas vous avoir déjà vu ici. Je m’en serais souvenu…Oh merde, t’as dit quoi là ??!!?? le fustigea son cerveau. T’es en train de la draguer ou je rêve ?!?! Une violente vague de chaleur le saisit au point qu’il pria pour qu’elle n’atteigne pas son visage ! Il entreprit donc de passer son stress sur son muffin en en faisant de tous petits morceaux avec ses doigts. Au final, il en mit un en bouche, le mastiqua puis avala avant de s’excuser pour son impolitesse. Pardonnez-moi. J’ai un livre avec moi si jamais vous ne vouliez pas faire la conversation à un étranger à la curiosité mal placée ! Un sourire gêné mais sincère apparu sur ses lèvres mais ses yeux ne pouvaient pas se détacher de son visage. Il serait incapable de se concentrer sur sa lecture…Alors…Tant qu’à faire…Autant se jeter à l’eau. Il s’essuya les doigts sur une des serviettes en papier qui accompagnait son muffin et lui tendit sa main droite par-dessus la table :