Cette semaine avait été des plus épouvantable. Entre la pluie, les livraisons à en tomber malade, les milliers de boissons servies, encore et encore pour des clients de plus en plus bourrés, la rencontre avec son -non- meilleur ami, son double, une connaissance d'un autre double, plus un autre double, qui faisait donc un triple, enfin c'était le bazar dans la tête de Peter. Il n'avait qu'une hâte, que cette semaine étrange se termine par une bonne tasse de chocolat chaud, devant un programme TV bidon comme un gosse de 5 ans.
Et c'est exactement ce qu'il allait faire en ce dimanche soir, prêt à en découdre avec son lit et certainement se fondre entre ses draps avec volupté. Néanmoins, par malheur, c'est comme si quelque chose l'empêchait de rentrer chez lui, alors qu'il était épuisé et dégoulinant de sueur après ses heures de danse et de vélo. L'idée de se retrouver seul, dans son studio miteux, à donner la moitié de son repas aux rats qui lui servaient de colocataire, ça ne l'enchantait pas plus que ça bizarrement... Il pensait bien évidemment à elle sans avoir le courage de remonter la rue principal pour aller toquer à sa jolie habitation. Leurs dernières disputes remontaient à maintenant trois jours et peut-être était-ce la réelle raison de son humeur massacrante. Enfin, c'était le cas, mais il préférait se voiler la face pour tenter de se raisonner, se dire qu'elle n'avait pas tant d'importance que ça... Juste une petite amie... Mais plus Peter se répétait ces mots et plus son estomac se serrait, son cœur ayant un tout autre opinion.
Il resta donc 2 heures dans un restaurant chinois, à mâcher sans envie des nouilles déjà froides depuis 1 heure 30. Ses pensées braquées sur cette même femme jusqu'à ce qu'il se lève dans un soupir, payant le maigre repas et montant sur son vélo afin de pédaler dans le vide. Du moins c'est ce qu'il tentait de se dire en se rapprochant de la boîte, évitant de se poser trop de questions, suivant son instinct sans réfléchir. Et cela lui valut de faire le trajet assez rapidement puisque sans s'en rendre compte il était maintenant devant l'établissement huppé, actuellement fermé puisqu'il était encore trop tôt. Travaillant ici depuis quelques mois, il passa par derrière et déverouilla la porte grâce au code pour par la suite pénétrer dans l'enceinte, saluant le barman et les quelques serveuses déjà présent pour l'ouverture dans moins d'une heure, il prit directement la direction de l'étage auquel résidait Qi'ra, sa malédiction.
C'est devant la porte massive qu'il se rendit soudainement compte de sa situation et toutes les questions qu'il retenait, revenaient maintenant en force, lui bourrinant le crâne. Incroyablement fatigué, et encore plus attristé de leurs silence respectif durant ces trois jours, comme un pauvre chien malheureux qu'on vient de mettre dehors, il toqua, espérant qu'elle soit chez elle. Et le brun n'eut même pas à attendre quelques secondes que déjà la porte s'ouvrait et dans l'encadrement apparaissait la divine tentatrice contre qui il ne pouvait résister sans même savoir pourquoi ni comment. « Qi'ra je- Je pensais qu'on pouvait parler ? » c'était maladroit et pas du tout préparé mais la revoir, c'était comme reprendre une dose après trop de temps d'abstinence, tous les signes du manque semblant animer son corps jusqu'au bout de ses doigts qui brûlaient de la prendre dans ses bras.
I want your stupid love but there's nothing you'll give me for free.
— Peter était bien le seul à se tracasser pour cette misérable dispute qu’il avait eu lieu entre vous il y a déjà trois jours de cela. C’était toi y avais mis un terme. « Parle autant que tu veux, je ne t’écoute plus. Tu me fais perdre mon temps. » Tu l’avais repoussé d’un signe de main dans l’air afin de t’en servir ensuite pour glisser une cigarette entre tes lèvres et tenter de calmer tes ardeurs au travers de la nicotine. Après, tu t’étais dérobée dans ta chambre ce soir-là, sans une once de remords, alors que tu l’avais abandonné à son triste sort dans le salon. La raison de la dispute ? Tu t’étais ouvertement moquée de lui parce qu’il avait eu une délicate attention à ton endroit : il t’avait ramené une rose, la plus belle assurément. À juste titre, ça l’avait vexé. D’autant plus que tu n’avais jamais eu, toi, d’attention envers lui, sauf quand il s’agissait de le charmer pour l’attirer dans tes draps. Deux mois que ce cirque durait, alors Peter s’était énervé. Sa petite rébellion t’avait amusé jusqu’à ce que le sang te monte toi aussi à la tête. Mais finalement, sa rose, tu l’avais acceptée et prise puisqu’elle trônait désormais fièrement dans un joli vase posé sur ton bureau. L’attention t’avait touché bien plus que tu l’affirmais. Tu te surprenais même parfois à la sentir quand la mélancolie t’attaquait. Son parfum t’apaisait, te rappelant la douceur de ton amant.
Toutefois, cela ne changeait pas l’état actuel des choses : la dispute était tombée aux oubliettes cinq minutes après sa fin. Tu avais repris le cours de ta vie, menant de front tes activités autant licites qu’illicites. Tu t’enivrais dans ces fêtes qui duraient le temps de l’éternité sans penser une seule fois à ton amant régulier. Pourquoi ? Parce que tu savais qu’il finirait par revenir comme chaque fois que vous vous preniez le bec. Il ne savait pas se passer de toi, sûrement la faute à son jeune âge qui rend ses amours plus ardentes, mais cela n’avait pas échappé à ton œil acéré. Alors tu en profitais pour le mener par le bout du nez. Jusqu’au jour où il ne reviendra plus parce qu’il en aura plus qu’assez de ton petit air dédaigneux et de ton comportement plus qu’exécrable. Qu’importe. Tu le remplacerais aussi vite qu’il était entré dans ta vie. Enfin… c’est ce que tes œillères te faisaient croire — tu étais bien plus attachée que cela au beau brun, sinon tu ne le laisserais pas s’aventurer autant dans ton intimité. Personne ne te connaissait personnellement (sauf Han) et c’était une chose que tu souhaitais perpétuer en ne partageant la couche de tes amant·e·s qu’un soir dans leur vie. Et Peter était l’exception à la règle, parce qu’il était encore là. Les jours s’étaient mués en semaines, puis en mois. Plus que dix pour compter en année. Une idée qui ne te déplaisait pas quand tu prenais le temps d’y penser, mais tu chassais bien vite cette horreur de ton esprit à travers une énième bouffée de cigarette ou gorgée d’alcool.
En tout cas, tu avais eu raison : Peter était revenu. Comme toujours. Parce que tu avais un certain effet sur lui et que le jeune homme avait bien du mal à s’en défaire. Tu souriais, un brin amusé quand tu y pensais. Quand il sonnait à ta porte, tu étais en pleine comptabilité avec cette sempiternelle cigarette coincée entre tes doigts. Tes gestes étaient lents et esthétiques dans cette ambiance tamisée créée par le soleil qui se couchait. Ses rayons faiblards traversaient la pièce pour la teinter d’un orange fané. Une scène d’un autre temps semblait se dessiner surtout avec cette musique jazz qui tournait en guise de bruit de fond naturel sur le tourne-disque. Par ta grâce, tu rendais élégant ce geste dégoutant de porter ta cigarette à tes lèvres et d’en tirer une bouffée pendant que tu notais quelque chose dans ton carnet de comptabilité. Peter avait sonné depuis quelques secondes déjà, mais ton envie de te faire désirer était plus forte que tout. Tu savais que c’était lui de toute manière et personne d’autre derrière la porte parce que cela ne pouvait être que lui — il était le seul à te courir autant après. Tu te parais de ton air nonchalant et désintéressé pour lui ouvrir la porte et ensuite le considérer du regard. « Peter. Quelle surprise. » Et avec la même habileté que d’ordinaire, tu glissais ta cigarette à moitié consumée entre tes lèvres pour en tirer une bouffée. Tu remarquais que le jeune homme était en sueur, que la dernière douche qu’il avait dû prendre remontait sûrement à plusieurs heures, mais tu n’en ferais que mention si tu voulais être méchante ou te débarrasser de lui. Tu roulais déjà des yeux quand il t’annonçait qu’il voulait parler. « De quoi donc ? Je n’ai pas grand-chose à te dire de mon côté. » Tu t’échappais de l’encadrement de la porte sans un regard pour lui, mais tu la laissais ouverte — une invitation indirecte et inconsciente à pénétrer chez toi, sinon tu lui aurais claqué la porte au nez si tu ne voulais pas de lui. Mais tu ne lui accordais pas beaucoup plus d’attention, te dérobant jusqu’à ton bureau qui trônait au fond de l’immense salon. À ton passage, le halo solaire faiblissant qui transperçait tes fenêtres soulignait joliment tes courbes, traçant finement le contour de tes hanches qui se balançaient avec prestance au rythme de ta marche. Le jazz sublimait le tout. Le céleste te rendait plus séduisante et envoutante — un piège pour que Peter tombe à nouveau dedans. Les marins d’Ulysse l’avaient pourtant prévenu de prendre garde aux sirènes, mais tout comme le héros mythique, le jeune homme n’avait jamais semblé y prêter attention. Tu étais une odieuse tentatrice, et tu en étais plutôt fière. « Dépêche-toi, car tu m’ennuies déjà. » Comble du mépris, tu ne le regardais même pas à la suite de ces propos secs. Tu te contentais de jeter ta cigarette encore fumante dans le cendrier et de te replonger dans tes comptes.
Bien évidemment, comme à son habitude, elle était nonchalante là où il était nerveux, sèche là où il tentait la douceur, et pourtant Peter ne reculait pas, se contentant de traverser la porte, la refermant derrière lui pour préserver cette intimité qu'il ressentait dès qu'il posait un pied dans sa tanière. Le salon qu'il traversa pour la suivre était presque plongé dans l'obscurité par rapport à son bureau dont les quelques rayons du soleil couchant dessinait les contours, même si c'était loin d'être les contours sur lesquels il s'attardait. Dans sa robe au tissu fin, il pouvait deviner la courbe de ses hanches en contre jour tandis qu'elle se dérobait à lui, sans cesse, l'obligeant à ne jamais la lâcher du regard, comme si elle pouvait disparaître à tout moment, lui refusant ce simple droit visuel, et il l'en savait capable. Impressionné par chaque geste qu'elle esquissait, il resta interdit un temps, trahis par ces sentiments vivaces qu'il n'avait encore jamais ressenti, même s'il se sentait honteux par rapport à MJ, sa compagne de longue date mais elle s'effaçait doucement au profil de Qi'ra, plus âgée, plus enivrante, tellement plus de chose... Bientôt son parfum finit de s'infiltrer dans ses sinus, enflammant ses poumons et brouillant son esprit, un cerveau normalement bien affûté, capable de se défendre mais ici, comme ailleurs, juste auprès d'elle, son système de survie s'évanouissait et il répondait gaiement à la noyade tant que c'était elle qui lui infligeait. Une odeur précise, de tabac froid, chose que normalement il ne supportait pas et qui pourtant mélangeait au parfum délicat et entêtant de la femme lui faisait oublier jusqu'à la raison de sa venue.
Elle lui aboya dessus, comme toujours, de sa voix chantante, et comme toujours il courrait tête la première pour combler la demande. Omnibulé par son envie soudaine de revoir ses lèvres éternellement rouges s'étiraient en un sourire solaire, qu'il aimait croire destiné seulement pour lui. Mais ce sourire, il le savait, effacerait sa semaine de galère d'un claquement de doigt pour le laisser anesthésié d'amour dans un cocon de coton moelleux. Alors il rangeait soigneusement la dispute dans un tiroir dans un coin de sa petite tête qui exploserait très certainement un jour, mais voilà Peter était foncièrement gentil et surtout aveugle, alors il laissait la rancune doucement se remplir, se contentant de s'accroupir près de son envie actuellement assise et être à sa hauteur pour tenter de capter son regard bleu qui lui ferait aller décrocher une étoile si elle le lui demandait. « Je suis désolé... ? » il tente dans un chuchotement pour ne pas la brusquer. Désolé de lui avoir offert une fleur, c'était aussi stupide que vérédique, et pourtant il avait bien vu cette même rose sanguine fièrement dressée dans un jolie vase choisit par ses soins. Et il n'y avait rien qu'il désirait plus que pousser les portes de son jardin secret, même si pour cela il devait en gratter les murs à la petite cuillère et souffrir des balles de défenses qu'elle envoyait sans arrêt.
Si elle l'avait entendu, elle n'en fit guère démonstration en premier temps, et Peter en grand impatient n'attendit pas quelques secondes de plus, agrippant la chaise pour la tourner vers lui afin qu'elle se détourne de ses papiers. Il jouait avec le feu et le savait pertinemment tandis que ses mains se posaient avec délicatesse sur ce visage de marbre, dessinait par les dieux pour être sa chute. S'avançant, il déposa un doux baiser au coin de ses lèvres, se préparant à tout, à sa passion comme à sa colère, prêt à reculer si elle lui sautait au cou pour avoir tenté de la manipuler dans ses bras. « Ô grande Qi'ra, veuillez accepter les excuses de votre humble serviteur. » alors il s'essaye à l'humour maintenant, sa plus grande force à son avis. Et comme elle n'a encore fait aucun mouvement trop dangereux, il en profite pour céder au caprice de son désir inondant son ventre et capture les lèvres de son amante dans un baiser volage qui éteint en même temps qu'il ranime ce feu ardent avec lequel il ne sait jouer, trop nouveau, une passion dévorante de jeune en pleine effervescence d'hormone et la faute à cette vile créature qui a réveillé cette étincelle bien cachée en lui. « Tu es magnifique » c'est un aveux soufflait contre son doux épiderme électrisant le sien.
I want your stupid love but there's nothing you'll give me for free.
— Il t’agaçait. Tu voulais t’énerver, mais au lieu de cela, tu continuais de cacher cet emportement derrière cette colère froide et cette impassibilité. Tu ne voulais pas qu’il s’excuse, tu voulais qu’il te dise merde. Tu avais besoin d’être remise à ta place, car à l’image du cliché sur patte que tu étais, tu voulais d’un homme à poigne, d’un type qui osait te contrer. Mais… étant un paradoxe à toi toute seule, tu appréciais aussi au fond de toi qu’il s’aplatisse, qu’il se mette ainsi à genoux devant toi pour être à ta hauteur. Cela te rappelait le pouvoir que tu avais sur lui, une emprise dont tu ne voulais surtout pas te débarrasser tant elle était exaltante. Tu feignais encore la différence, trop occupée à gratter des chiffres sur ce foutu papier. Jusqu’à ce que Peter change enfin la donne. Il était incroyablement séduisant. Était-ce tout ce temps passé avec toi qui lui avait appris à user de tes ruses pour faire fondre n’importe qui ? Ou était-ce son charme naturel indéniable que tu t’obstinais à rejeter pour ne pas te laisser berner par ce dernier ? Sûrement un peu des deux, mais tu devais avouer que lorsqu’il prit l’initiative de tourner ta chaise vers lui, ton cœur ne fit qu’un bon, agréablement surpris par sa manœuvre. Mais malheureusement pour Peter, tout ce chamboulement n’était qu’intérieur. Tu étais toujours aussi froide, prétentieuse et un brin méprisante dans ta façon de le prendre de haut.
Puis tu finis par craquer. Si par son trait d’humour, Peter n’espérait pas plus qu’un sourire, tu lui offrais bien mieux que cela : un rire franc et mélodieux qui tranchait avec la mélancolie de la musique jazz qui continuait inlassablement de se jouer. Avoue-le, il te rendait heureuse. Par sa douceur, sa gentillesse, son humour maladroit… À toi d’être Ulysse et lui les sirènes quand il vint baiser le coin de tes lèvres. Tu en voulais plus. Il fallait qu’il s’attarde, c’était un ordre. Ton corps était en plus un traitre infâme : il scarifiait ta peau de frissons violents impossible à cacher à cause de cette robe qui laissait tes bras nus. Tu ne pouvais plus prétendre, Peter ne te croirait pas. Alors, pour une fois, tu ne te dérobais pas répondant à tes envies les plus primaires, enterrées dans ton inconscient en lui rendant son baiser avec plus de langueur, tes bras coulissant autour de sa nuque. À toi de reprendre ta parade nuptiale : tes doigts semblables aux serres d’un prédateur avec tes ongles parfaitement manucurés saisissaient plus fermement sa prise en se mêlant à ses cheveux pour les serrer avec envie. Machinalement, tu t’étais un peu relevée pour te coller contre lui puisque dans cette manœuvre il t’avait surplombé. Ton cœur se meurt à la suite du compliment qu’il te fit, créant une myriade d’émotions qui entrait en guerre avec ta personnalité si froide et fermée. L’araignée s’était faufilée dans les moindres nervures de ton essence. Elle serait presque sur le point de te posséder. Presque. Il ne restait plus que le vestige d’un maigre sourire sur tes lèvres, laissant ton front contre le sien pour profiter encore un peu de lui. « Vil séducteur, va. Ne crois pas que tu vas être pardonné aussi facilement. » Pardonner de quoi ? D’avoir eu une attention pour toi ? Tu étais celle qui était en faute dans cette histoire pour t’être moquée ouvertement de lui. C’était à toi de te faire pardonner, mais jamais tu ne le feras, trop fière, ne te considérant même pas dans l’erreur. Tu aurais pu lui dire qu’il était splendide lui aussi, afin d’adoucir les choses entre vous, mais tu ne feras jamais un tel aveu auprès de lui. Pas dans ces circonstances. Tu te contentais de laisser ta main se balader contre son torse, glissant délicatement le long de sa clavicule pour se faufiler contre ses pectoraux en sortant tes griffes sur la fin. « Tu aurais bien besoin d’une douche, trésor. » Tu déposais un baiser contre ses lèvres : délicat et bref dans le seul but de le laisser sur sa faim pour qu’il te suive. Tu l’avais bien dit à tes démons alléchés que tu garderais ta réflexion jusqu’à ce que tu puisses en tirer un avantage — tu résolvais tout de cette manière de toute façon, pour le tenir, pour qu’il oublie le mal que tu pouvais lui infliger par toutes tes réflexions aussi douloureuses qu’un coup assené en pleine figure en lui procurant le plus de plaisir possible. Peter était tombé sur la pire des succubes du royaume des enfers.
Tu te faufilais hors de ses bras après l’avoir repoussé. Plus de détachement de ta part, seulement des sorts que tu lui jetais au travers de ton regard océan pour le séduire avec tes serpents. Tes yeux l’appelaient, viens…, infligeant une douce caresse sur chaque partie de son corps que tu balayais à l’aide de tes prunelles si attirantes. Le tien ne tardait pas à se retrouver en tenue d’Eve puisque tu semais tes vêtements derrière toi lors de ton ascension jusqu’à la salle de bain qui se trouvait non loin de là. En viles tentatrices qu’elles étaient, tes courbes dévêtues se pavanaient avec provocation devant lui avant de disparaître dans la pénombre du couloir — un spectacle sublimé par les derniers du soleil qui n’était désormais plus. Tu savais qu’il te suivrait après un tel appel. Tu ne voulais pas parler des choses qui fâchent. Tu ne voulais pas les entendre. Tu souhaitais juste esquiver les mots trop forts réclamer par Peter qui révulserait ton cœur — tu ne désirais pas parler d’amour avec lui. Tu convoitais simplement son enveloppe charnelle avec avidité pour tenter tant bien que mal de rester sur cette ligne de conduite : pour ton plus grand malheur, son âme t’appelait de plus en plus. Réfugiée dans la salle de bain, seul le bruit de la douche était perceptible au travers de ce silence aguicheur. Tu te glissais déjà sous l’eau pour éteindre tes ardeurs sentimentales. Tu craignais depuis quelque temps de perdre le contrôle au cours de l’action en lui faisant cet aveu inavouable. Il ne faudrait surtout pas que tu perdes la partie, jamais, surtout en t’abaissant à de telles choses qu’un « je t’aime ». Rien qu’en y pensant, tu avais la nausée. Il suscitait en toi trop de choses qui devraient à tout prix rester dans le néant. Il t’affaiblissait et tu le savais. Tu le haïssais de toute ton âme pour cela. Tu préférais te noyer sous le jet en attendant son arrivée si espérée plutôt que de te glisser dans cet habit de colère en pensant au feu ardent et passionné qu’il allumait dans tes entrailles encore gelées par des années de souffrance. Tu voulais juste t’abandonner dans ses bras et oublier. Ne plus rien ressentir.