S’il connaissait l’Asgard ? Bien évidemment. Han en était un client régulier. Il renflouait souvent les caisses du casino, quand il ne jouait pas les piliers de bar. Sa descente n’avait rien perdu de sa superbe. Il pouvait enchaîner les verres tout en conservant une parfaite contenance. En dépit des apparences, il n’était pas question de s’amuser. Lorsqu’il franchissait le seuil de cet établissement, Han commençait le service, et ce, non pas en tant qu’employé de la maison, mais bien sous sa casquette de contrebandier. Ici se jouaient nombre d’affaires. Le temps d’un soir, il arrivait fréquemment que l’Asgard devienne le théâtre de ses opérations. Aucun mot d’ordre n’était donné. Han agissait seul, en électron libre. Officiellement, il ne faisait qu’échanger un verre ou mener deux ou trois parties de blackjack, ponctuées de quelques œillades. Les noms s’échangeaient sous le manteau et les tarifs se négociaient en fonction du nombre de victoires, sinon de défaites. Bien sûr, les affaires se menaient à l’extérieur. On ne mêle pas mondanités et commerce ! Ainsi allait son monde. Ce soir, cependant, Han dérogeait à la règle. Il venait en simple client. Sa journée de travail derrière lui, il comptait s’accouder au bar et payer sa tournée. Le gamin l’accompagnait… Aussi, charge à lui de montrer l’exemple. Il était étrange pour lui de l’appeler "gamin", quand le concerné s’avérait désormais plus âgé que lui. Mais il n’en avait pas toujours été ainsi. Han l’avait connu dans ses langes. Poe Dameron se trouvait dans sa quarantaine. Han était un jeune trentenaire. Certes, pour la seconde fois de son existence. Le monde tournait résolument à l’envers. À ses yeux, Poe resterait éternellement un fichu gamin. Celui qu’il voyait cavaler avec Ben. Il n’avait pas son pareil pour s’attirer des ennuis et le jeune Solo se trouvait toujours dans son sillage, courant sur ses jambes encore branlantes de bambin. On eût dit deux frères.
Dire qu’il travaillait avec le petit Dameron. S’il avait imaginé l’avoir un jour pour collègue ? Pas exactement… Il se voyait plutôt donner les ordres, en vieux patron ronchon. Ben et Poe lui auraient mené la vie dure. Dans un monde idéal… Un monde tel qu’il l’avait rêvé à ses heures. C’était avant tout cela… Le Premier Ordre, Snoke, Kylo Ren… Mais ce soir, il se tournait vers l’avenir. Il n’entendait pas penser au passé. Oui, il aspirait à s’amuser.
Poussant la porte du casino, il s’avança de quelques pas. Un franc sourire habillait ses lèvres. Poe se trouvait sur ses talons. Sans chercher à l’attendre, il prit la direction du bar. Sur le chemin, Han adressa quelques signes de mains. Il s’était rafraichi pour l’occasion. Solo portait une chemise propre. Pour une fois, il s’était même peigné. Après tout, il avait une "image" à tenir. Le barman le salua chaleureusement, reconnaissant là l’un de ses habitués. Han prit place sur l’un tabourets, le dos en miettes. Il vivait peut-être une seconde jeunesse, mais bosser vous casse quel que soit l'âge. « Tu sais ce que tu vas prendre, gamin. » demanda-t-il, jetant un rapide coup d’œil à la salle de jeux. « Vodka Martini au shaker pour moi. Merci. » Le barman acquiesça d’un signe de tête. « Comme d’habitude, je vous en mets deux ? » Han lui adressa une moue complice. « Bien entendu, toujours prévoir un coup d’avance. » renchérit-il, tout sourire. Sa commande passée, il se tourna enfin dans la direction de son invité. « Alors dis-moi, comment vont tes amours ? » Autant entrer dans le vif du sujet !
AVENGEDINCHAINS
Invité
Mer 1 Déc 2021 - 18:09
Avec modération
La dynamique de certaines relations est vouée à changer naturellement, et pour le meilleur, comme ça a été le cas de sa relation avec Finn, dont la progression avait suivi une courbe naturelle, logique… d’autres semblent vouées à demeurer dans une sorte d’entre-deux difficile à décrire, que les circonstances elles-mêmes ne pouvaient pas être en mesure d’altérer. Qui eut cru cela possible, Poe Dameron est techniquement plus âgé qu’Han Solo, tout comme il est techniquement plus âgé, aussi, que sa propre mère (vous parlez d’un monde de fou). Et pourtant, il serait bien incapable de se considérer comme l’aîné de son interlocuteur. Ce serait d’ailleurs une incohérence concrète, car bien que plus jeune d’apparence, l’âme d’Han Solo reste plus âgée, et pour cette raison, Poe trouve refuge dans le sentiment d’avoir encore affaire à cet homme qui avait longtemps représenté le monde adulte pour lui avant qu’il ne l’intègre lui-même.
Parfois, il a l’impression que tout ça, c’était dans une autre vie, comme il est à mille lieues de savoir admettre qu’à une époque à présent si lointaine, et même s’ils avaient déjà le chic pour se mener la vie dure, lui et Ben Solo s’entendaient comme larrons en foire. Une autre époque, une autre vie, dont il n’a bien voulu retenir que ce qui l’arrangeait, en l’occurrence ce lien qui continue de le faire se sentir proche de Han, et de continuer à le considérer comme une figure paternelle, lui qui garde si peu de souvenirs de son propre père… il faut seulement ajouter à cela le fait qu’ils sont à présent collègues, le genre de collègues qui, après une journée de travail harassante peut prendre la décision de prendre un verre. Ou deux. Poe n’est pas contre. Surtout si c’est Han qui offre. Il a profité de rassembler ses affaires pour écrire un message rapide à Finn afin de lui apprendre qu’il rentrerait tard et il a donc suivi Han jusqu’à l’Asgard.
Une fois installé sur un tabouret, au bar, il commande pour sa part un verre de whisky, s’amusant d’une esquisse de sourire de l’habitude qu’il conserve à l’appeler « gamin », sans que Poe jamais ne le corrige pour autant, sourire qui s’élargit quand le serveur souligne son habitude… bah, il n’y a pas de mal, après tout. Et quand on va boire un coup, on sait qu’on est généralement parti pour plusieurs, pas vrai ? « Mes amours ? » répète-t-il sans s’être attendu à ce que Han rentre si rapidement dans le vif du sujet, ou aborde un tel sujet tout court.
Est-ce sans raison ? Ou lui pose-t-il la question parce qu’il sait déjà la réponse ? Sa question est trop directe pour être complètement honnête, non. En soi, en parler ne dérange pas Poe le moins du monde, il n’a pas ce genre de pudeur. Au contraire, même, Finn fait même partie de ses sujets de conversation préférés, et c’est davantage son entourage qui regrette, très rapidement, d’avoir ne serait-ce que posé la question. « C’est Rey qui a vendu la mèche, c’est ça ? »