[Terminé] Painful but effective treatment | Margot

▿ Date de naissance : 19/02/1972

Painful but effective treatment

Découvrir Margot sur le pas de la porte de son cabinet, la première fois que la chose s'est produite, l'a intrigué sans vraiment le surprendre. Non, il n'avait pas la certitude que Margot Verger soit présente ici, il en avait en revanche l'intuition, et cette intuition avait finalement été confirmée par les circonstances. Comme bien d'autres. Les cartes redistribuées, plusieurs options doivent s'offrir à eux : en la présence des acteurs de leur passé commun, ils ont la nécessité d'évoluer conformément à cette variable qu'ils se seraient tous deux épargnés. Cela passera par la manipulation, la dissimulation... voire la dissimulation.

Hannibal aurait pu tuer Margot immédiatement. Il y a d'ailleurs songé. Il n'a rien de particulier contre elle, pourtant. Il a même une certaine admiration pour la force de caractère dont elle sait faire preuve : mais il a fait une promesse dans son autre vie, pas à elle certes, mais sa vie était en jeu, elle l'est toujours. Hannibal n'a pas oublié, il n'oublie jamais. Mais la curiosité l'a d'abord emporté sur ses résolutions, puis il a admis que le moment n'était pas encore venu, et qu'il adviendrait bien assez tôt. Pour que la mort de Margot Verger serve un véritable dessein, il faut que celle qui a involontairement ordonnancé cette tragédie en ait elle aussi conscience. Car oui, il n'ignore plus, à présent, que tout comme Margot, Alana est là, elle aussi... mais la dynamique entre ces deux femmes a, pour l'heure, changé. Et tant que c'est le cas, tuer Margot serait... une perte de temps.

Et il trouve davantage de divertissement à leurs échanges qu'il n'en trouverait à un massacre en règle. Margot est différente, privée d'une partie de sa mémoire qui l'empêche de considérer la pleine mesure de son évolution. Mason toujours en vie, elle sous son emprise, comme Abigail se retrouve de nouveau sous l'emprise de son père biologique (mais en l'absence de sa mère), il semblerait que certaines situations soient cycliques, et que ce soit une leçon, toute singulière, que ce monde veuille leur apprendre. Il leur appartient de briser le cercle, de ne pas tout refaire à l'identique. C'est une mise à l'épreuve, et ils en ont tous affectés, chacun à leur échelle. C'est également le cas de Will, Hannibal le sait, même s'il voudrait mieux pouvoir l'ignorer.

Ainsi donc, c'est Margot qui doit se présenter à son prochain rendez-vous, et Hannibal éprouverait presque de l'impatience à entendre ses vues toujours très directes et très personnelles de sa propre situation. Elle arrive exactement à l'heure, parfaitement ponctuelle.

"Margot", la salue-t-il poliment en ouvrant la porte pour lui laisser l'espace d'entrez. "Installez-vous."

Lui-même prend place sur le fauteuil qui fait face au sien et lui laisse le soin d'ouvrir le dialogue, comme ils ont pris pour habitude de procéder tous deux.

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▿ Date de naissance : 18/04/1987

Painful but effective treatment

On pourrait considérer la décision de Margot de poursuivre ses consultations auprès du docteur Lecter dans cette vie comme une preuve de folie, si ce n’est de bêtise, mais Margot a pris cette décision, l’une des rares qu’on l’ait autorisée à prendre au demeurant, en son âme et conscience et sans la moindre hésitation. Elle a tout à fait conscience du danger que peut représenter Hannibal pour ses patients, et c’est parce qu’elle en a conscience qu’elle veut s’en croire préservée… Elle ne pense pas qu’elle puisse davantage l’atteindre ici qu’il ne l’aurait pu dans son autre vie, et par ailleurs, leurs conversations ont pour elle quelque chose de cathartique, dont elle aurait bien du mal à se passer dorénavant.

De son ancienne vie, il ne lui reste que le pire… mais en même temps, elle n’a plus vraiment le souvenir de ce qu’elle avait connu de meilleur. Si ses seuls repères familiers doivent être son frère et son psychiatre, elle préfère encore se tourner vers le second plutôt que de s’appuyer sur le premier. A plus forte raison que Mason ne lui a jamais semblé plus oppressant, plus directif et plus violent qu’il ne l’est depuis ces trois dernières années. Hannibal l’écoute, la conseille à sa manière… elle l’oriente dans une direction qu’elle a envie de suivre. Elle estime ne pas être dupe de son jeu, et parce qu’elle considère qu’ils sont sur un pied d’égalité, elle est capable de profiter sincèrement de leurs échanges, et en effet, elle y trouve quelque chose de singulièrement thérapeutiques.

Ses conversations avec le docteur Lecter sont, de manière générale, toujours ou presque orientées autour du même sujet, qui est celui de Mason et de ses intentions de vengeance à son adresse. C’est sans doute tourner en rond que d’en discuter encore et encore, mais c’est un exercice auquel Margot serait bien capable de se livrer très longtemps encore. La jeune femme s’en moque, elle dépense l’argent de Mason à cet escient, et elle estime que, d’une certaine manière, ça fonctionne pour elle. Ceci dit, pour cette fois, elle a un sujet de conversation bien différent à soumettre à son interlocuteur, et elle est assez curieuse de connaître l’opinion de son interlocuteur sur la question puisqu’il semblerait qu’à sa manière, il soit impliqué dans l’affaire.

Quand il lui ouvre la porte de son cabinet, le psychiatre est fidèle à lui-même, force tranquille qui peut être rassurante, et aussi alarmante, car on serait bien mal avisé de ne pas envisager que ces airs composés et propres sur eux ne dissimulent pas quelque chose. Elle, est un peu différente. Mais elle n’en montre rien, tout d’abord, au moment de s’installer sur le fauteuil où elle a pris l’habitude de s’asseoir à chacune de leurs consultations, toutes les semaines depuis bientôt trois ans.

« J’ai fait une rencontre singulière, il y a quelques jours. » Elle observe le psychiatre avec attention, le détail du regard, elle veut être en mesure de discerner la moindre micro-expression qui trahirait ce que cette nouvelle pourrait éventuellement éveiller en lui. « Une de vos consœurs, il semblerait que vous vous connaissiez. Le docteur Alana Bloom ? »

Codage par Libella sur Graphiorum

▿ Date de naissance : 19/02/1972

Painful but effective treatment

Margot, en habituée des lieux, en habituée qu'elle a été avant même son arrivée dans ce monde, cède à toutes ses habitudes. Elle n'a pas besoin d'être dirigée dans une direction ou une autre, elle n'a pas besoin d'être poussée à de quelconques aveux pas plus qu'il n'est nécessaire d'employer toutes les techniques propres aux thérapeutes les plus avisés pour obtenir d'elle qu'elle parle. Margot Verger sait précisément ce qu'elle veut dire et dans quel sens elle peut vouloir ou non orienter les conversations dont elle se fait l'incontestable maîtresse. Pour cette raison et bien d'autres, Hannibal serait presque capable de nourrir une certaine estime à son endroit. Mais estime ou non, Margot n'en est pas moins condamnée. S'il n'a rien contre elle et se révèle bien trop curieux au sujet de Mason Verger pour s'occuper d'elle trop rapidement, il n'a pas oublié sa promesse faite à Alana, une promesse qui s'étend tout autant à sa femme et à leur fils : et Hannibal Lecter n'a qu'une parole, qu'il compte bien s'engager à tenir quoi qu'il advienne. Margot mourra de sa main, car cela en a été décidé depuis de nombreuses années. En attendant, Hannibal ne peut résister à la tentation de jouer, encore un peu, avec sa nourriture.

Il laisse donc à la jeune femme le soin d'ouvrir le bal, et l'on doit admettre qu'elle le fait magistralement au moment de lui apprendre avoir rencontré une personne qu'il connaît. Il pourrait s'agir de n'importe qui. Aurait-elle vu Will ? Abigail ? ... Jack ? Non, une consoeur. Il comprend aussitôt. Evidemment, il s'agit d'Alana, bien sûr qu'il ne pouvait s'agir que d'Alana, de retour dans leurs vies, sans doute déterminée à soustraire son épouse aux griffes de son ignoble frère, une épouse qui a tout oublié d'elle. Il exprime le moins d'émotion possible, ni suprise ni rien d'autre au moment de répondre à son interlocutrice. En soi, il n'est pas étonné de savoir qu'Alana est ici. En soi, cela paraît... logique. Il ne s'attendait pas en revanche à apprendre sa présence par ce biais. Malgré tout, il décide d'y voir une sorte davantage. Il reconnaît ce ton qu'emploie Margot, mais il sait aussi que les souvenirs de cette dernière continuent de lui faire défaut, c'est une chose qui n'a pas changé.

"En effet, je connais le docteur Bloom", répond tranquillement Hannibal, qui compte bien en dire le moins possible tant qu'il ne saura pas ce que l'intervention d'Alana dans l'équation bouleversera dans toute cette situation. "Que vous a-t-elle dit exactement ?"

Autant poser la question frontalement, quand lui-même s'abstient bien, pour le moment, d'en dire davantage sur le passif qu'il entretient lui-même avec cette consoeur qui en aura sans doute déjà suffisamment dit à Margot, en réalité... qui par ailleurs, dispose d'un certain talent pour lire entre les lignes, une intelligence qu'on dévalue parfois et pourtant très présente chez elle.

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▿ Date de naissance : 18/04/1987

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feat. Hannibal

Hannibal ne lui fait pas l’affront de nier. En même temps, cela aurait été une manœuvre des plus hasardeuses de sa part. Margot n’attend pas la confirmation du fait qu’ils se connaissent ou non, elle attend de savoir dans quelle mesure ils se connaissent, et dans quelle mesure, aussi, le psychiatre lui a menti. Elle a besoin de savoir l’ampleur de son mensonge. Cela changera-t-il grand-chose ? Mettra-t-elle fin à sa thérapie pour autant ? Il est plus que probable que non, mais pour l’heure, elle veut surtout obtenir des réponses. L’ampleur des mensonges d’Hannibal l’intéresse au fond bien moins que l’ampleur des vérités qu’Alana Bloom a pu lui dire lors de leur rencontre.

Margot a voulu demeurer la plus neutre possible, mais elle ne peut prétendre que les paroles adressées par celle qui en savait tant sur elle, y compris des choses que Margot ignorait elle-même, n’avaient pas eu un impact sur elle. Elle attend d’Hannibal un minimum de transparence. Convaincue qu’il ne lui en accordera sans doute qu’une infime partie, elle accepte par avance de s’en contenter. Malgré tout, elle a besoin de savoir, et ce désir-là, impérieux, ne peut tolérer autre chose que d’être satisfait.

Ainsi donc, Hannibal Lecter conserve son masque habituel, de détachement. C’est comme si rien au monde ne pouvait affecter cet homme. Toujours d’attitude composée, toujours d’humeur égale. C’est quelque part rassurant, réconfortant. Quand il vous intime de tuer votre frère d’un ton tout aussi égal, il est plus que jamais séduisant de céder à cette impulsion cathartique, mais en l’occurrence, Margot aurait aimé être capable de décrypter les informations qui pouvaient bien passer par l’esprit de son interlocuteur. Elle n’a que ses paroles pour interpréter – justement ou non – ce qui peut bien lui traverser l’esprit en cet instant, mais elle pense néanmoins voir juste, ou ne pas être si éloignée de la réalité en estimant que la présence de cette femme l’inquiète, ou l’interroge du moins suffisamment pour qu’il ne puisse que lui demander davantage de précisions.

« Elle m’a parlé de vous, bien sûr. De Mason, aussi. Et de souvenirs que j’aurais refoulés, mais dont vous auriez parfaitement conscience. » Elle marque une pause. « Vous avez vraiment drogué Mason pour l’obliger à se taillader le visage ? Vous lui avez vraiment brisé la nuque ? » Elle le considère de son regard pénétrant. « Pensez bien que ce sont des informations dont j’aurais aimé disposer plus tôt », ajoute-t-elle presque sur le ton de la conversation.

S’il faut adopter une attitude détachée et mesurée, elle en est tout autant capable que son interlocuteur, et c’est un fait qu’elle cherche à établir d’entrée de jeu au moment de prononcer ces mots. Elle sait. Et il serait bien avisé de la part du psychiatre, de ne pas lui mentir à présent. Si elle sait devoir tout de même se défier des paroles d’Alana Bloom, cette dernière lui inspire naturellement bien plus de confiance que ne saurait le faire Hannibal Lecter.

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▿ Date de naissance : 19/02/1972

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Sans surprise, Alana avait parlé de lui à Margot. C’était inévitable, il fait partie intégrante de son histoire, après tout. L’a-t-elle mise en garde contre lui ? Lui a-t-elle parlé de la promesse qu’il lui a faite et qui la concerne ? Si tel est le cas, cela ne l’a visiblement pas empêchée de venir le trouver ici, ce qui veut forcément dire quelque chose, n’est-ce pas ? Oui, cela veut forcément dire quelque chose. Faut-il qu’il fasse payer à Alana le prix de son indiscrétion ? Peut-être le devrait-il effectivement, oui. Il devrait honorer une partie de cette promesse dans l’instant, afin de se libérer une bonne fois pour toutes de cette obligation spécifique. Mais il n’en ferait rien. Parce que même s’il ne peut prétendre que cette situation soit totalement soous son contrôle, elle l’intrigue suffisamment à tout le moins pour qu’il estime être en mesure de la maîtriser, et pour caresser, qui plus est l’intention d’en apprendre davantage, cela va sans dire.

Alana lui a parlé de Mason, de ces souvenirs qu’elle a en effet oublis, et qu’Hannibal ne s’est pas empressé le moins du monde de rappeler à son souvenir. A l’évidence, Alana a trouvé les bons arguments pour la convaincre. Elle n’a sans doute pas eu besoin de faire grand-chose pour cela, à la vérité, certains sentiments peuvent plus facilement raviver vos souvenirs que des faits concrets, qui paraîtrait forcément irréels et impersonnels si on se trouve en situation de déni. Ce n’est pas sans raison, si Margot a oublié, et c’est bien là une chose qu’il faudra qu’elle considère et accepte de regarder en face et de considérer avec l’attention nécessaire.

"Vous n’étiez pas en mesure de les entendre, à l’époque. Et je n’étais pas l’interlocuteur approprié pour vous faire ces révélations", répond posément Hannibal.

Ce dernier se refuse à perdre son assurance, son calme ou sa superbe, ce serait mal le connaître. Il garde une attitude sereine et composée au moment de dire tout cela. Il ne peut prétendre avoir attendu le bon moment pour lui dire la vérité ou même avoir espéré que quelqu’un d’autre le ferait à sa place, car ce serait évidemment un mensonge éhonté. Mais il n’a guère l’intention de s’excuser pour autant. De sa part, il ne faut rien attendre de tel. Maintenant elle a toutes les cartes en mains, ce qui ne veut pas dire que ses cartes sont les plus fortes ou qu’elle peut espérer en quoi que ce soit emporter la partie.

"Qu’avez-vous ressenti, Margot ? Au moment d’entendre ces informations ? Au moment de comprendre que des pans de votre propre histoire vous avait échappés ?"

Comme s’il n’était pas directement responsable de son trouble et des épreuves endurées, il lui pose des questions de psy classique, qui ne serait à l’évidence pas différentes si les circonstances, elles, l’étaient. S’il était innocent comme l’agneau qui vient de naître. Scénario pour le moins improbable.

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▿ Date de naissance : 18/04/1987

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feat. Hannibal

Margot adresse à son psychiatre un regard des plus sceptiques quand ce dernier, en guise de piètre défense, lui affirme qu’à l’époque, elle n’était pas en mesure d’entendre les informations qu’elle avait autrement découvertes, de même que ce n’était pas à lui de le dire. Peut-être en effet préfère-t-elle l’avoir entendu de la bouche d’Alana plutôt que de celle d’Hannibal ou, pire encore, de celle de Mason. Est-ce pour autant qu’elle apprécie découvrir la vérité si tard ? Pas le moins du monde, non, mais au moins est-elle en mesure de confronter son interlocuteur à ce sujet à présent. Il ne nie pas et elle apprécie, cela n’ôte rien au fait qu’il lui a menti par le passé. Par omission arguera-t-il peut-être, mais l’omission de quatre années de son existence ne peut définitivement être qualifiée comme telle aux yeux de la jeune femme, qui est bien décidée à en découdre avec son interlocuteur.

Ce qu’il peut être calme, ce qu’il peut être sûr de lui. D’une attitude tout à fait sereine et composée, c’est presque comme s’il estimait que tout ceci ne le concernait pas, comme s’il en était le curieux spectateur, qui attendait simplement de voir comment les choses allaient se passer dorénavant. Elle gage que c’est bien souvent de cette manière qu’il observe les situations qu’il encourage ou provoque, mais elle estime cette fois différente. Il ne peut prétendre avoir joué un rôle mineur dans cette histoire, pas au regard de tout ce qu’Alana lui a appris. Il est celui qui a rompu le cou de Mason, il est celui dont son frère a mis la tête à prix, celui que Mason a enlevé et torturé. Il n’est pas juste un menteur, pas juste un spectateur, ni ennemi ni adjuvant. Il a joué un rôle de taille, et elle attend de lui qu’il prenne la peine de l’endosser sous ses yeux, sans lui mentir.

Mais faute de s’expliquer ou de se justifier, Hannibal ne sort pas de son rôle de psychiatre. Ce qu’elle a ressenti au moment de prendre la pleine mesure des manipulations qu’il lui avait fait subir au même titre que son frère ? Ce serait mentir que de prétendre qu’elle s’était sentie trahie. Pour cela, il aurait fallu qu’elle place en l’un comme en l’autre davantage de confiance que ce qu’elle a bien voulu leur accorder.

« Ce que j’ai ressenti ? » répète-t-elle, atterrée par l’évidente absence de scrupule de son interlocuteur. Mais cela avait été son tort, à elle et à elle seule, évidemment, de s’imaginer qu’il s’y prendrait d’une autre manière. « De la colère. »

De la tristesse, aussi, du dégoût, mais c’est sur cette émotion qu’elle se focalise.

« J’ai envisagé de vous faire subir ce que vous avez fait endurer à Mason, mais je suppose que je devrais vous en être reconnaissante, n’est-ce pas ? » Elle marque une pause. « En me mentant, vous le couvrez, j’ai peine à voir ce que vous y gagnez. »

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▿ Date de naissance : 19/02/1972

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Margot attendait peut-être d'Hannibal qu'il se jiustifie, qu'il tente de noyer le poisson ou de plaider sa cause par tous les moyens à sa disposition, mais le psychiatre n'a guère l'intention de faire quoi que ce soit de la sorte. Il sait reconnaître les situations dans lesquelles les arguments ne seront pas reçus, et s'avèreront donc invalides. Il a affaire à une jeune femme d'une grande intelligence. Par conséquent, il sait qu'elle ne se laissera pas faire si facilement. Il n'a aucun doute à ce sujet. Il ne peut certainement pas douter du fait que tout ceci a de bonnes chances de lui retomber sur le coin de la figure, tôt ou tard et d'une manière ou d'une autre. Il est de son devoir, par conséquent, de faire au mieux pour minimiser la situation autant que faire se pourra. Margot semble affligée, mais en réalité, elle est tout à fait à même de le comprendre. Cette jeune femme d'une grande vivacité d'esprit ne saurait s'y laisser totalement prendre, c'est du moins une certitude aux yeux du psychiatre.

Elle accepte finalement de répondre très littéralement à la question de son interlocuteur, observation qui décoche une très infime esquisse de sourire au psychiatre, à peine visible, une simple risette qu'il ne cherche pas à dissimuler. Est-ce qu'il a véritablement l'avantage sur cette situation ? A bien y regarder, Margot l'a bien plus qu'il ne saurait l'avoir lui-même. Elle admet avoir ressenti de la colère : autrement dit, une émotion facile à déceler, et plus simple encore à contrôler et à modeler à sa guise. En bref, une émotion qu'il est possible d'exploiter pour peu qu'on sache l'orienter dans une relation autre que la sienne : mais sur ce point, il considère qu'il ne manque pas de ressources.

"La colère est un sentiment plus que légitime dans ces circonstances." Il l'observe un instant. "Vous ne me devez aucune forme de reconnaissance, je vous ai aidé dans mon propre intérêt", admet-il sans détour. "Et je vous aiderai pour les mêmes raisons. En vous mentant, j'endormais la confiance de votre frère, en endormant la confiance de votre frère, je vous donnais les meilleures chances d'en finir avec lui." Il marque une pause. "Les circonstances sont différentes, ici, celles de la mort de Mason devront l'être aussi. Je peux vous aiguiller, vous conseiller, mais je ne compte pas intervenir cette fois, ou dans une moindre mesure." Il l'observe. "Les mêmes schémas ne sont pas toujours voués à se répéter. La répétition est un échec de notre fonction mnésique, un raté dans notre acquisition d'un savoir-faire face à une situation donnée. Evitez la répétition, Margot, c'est une nécessité."

Ses paroles restent floues, énigmatiques. Une stratégie dont il a l'habitude et pour laquelle il a acquis par ailleurs (en toute humilité) un certain talent. Hannibal ne serait-il pas en train de noyer le poisson ? Il estime que non, mais l'affaire est sans doute plus complexe que cela, à bien y regarder.

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▿ Date de naissance : 18/04/1987

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feat. Hannibal

Oh que oui, sa colère est légitime, et si son psychiatre s’était avisé d’affirmer le contraire, Margot aurait eu tôt fait de le remettre à sa place, et sans sommation. Non, elle ne considère pas, en effet, lui devoir la moindre forme de reconnaissance, et elle apprécie qu’il admette agir dans son propre intérêt. En même temps, elle peut reconnaître aussi qu’elle l’a sans doute acculé et qu’elle ne lui a pas exactement laissé le choix. Il devait dévoiler plus clairement ses cartes à présent qu’il ne pouvait plus le manipuler à sa guise. Cela veut-il dire qu’il cessera de le faire ? Sans doute pas… elle en serait franchement surprise, en tout cas, mais elle a un léger avantage sur lui, ce qui n’est pas une situation si courante quand il est question d’Hannibal Lecter, et elle a la ferme intention de profiter de cette même position.

Il ajoute qu’il l’aidera pour les mêmes raisons. Margot est davantage réticente à ce sujet. Elle ne tient pas à se faire avoir si facilement, mais elle doit tout de même reconnaître avoir quelque hésitation, quelque réticence à le croire. C’est prudent, c’est humain et c’est surtout nécessaire que de ne pas avaler religieusement tout ce qu’il pourra avoir à lui dire ou à lui affirmer. C’est à elle de prendre le meilleur parti de ces circonstances et de faire en sorte qu’elles jouent en sa faveur, mais cela l’oblige à s’engager dans une partie qui a été initiée bien avant elle, et elle a tout à fait conscience du fait que, d’une façon ou d’une autre, ça peut véritablement devenir un problème, et un problème qu’il sera de bon ton de résoudre autant que nécessaire. Parce que ce pourrait trop aisément se retourner contre elle et elle le sait.

« J’ai peu de chances de répéter à l’identique une chose dont je n’ai aucun souvenir, n’est-ce pas ? » répète-t-elle en ne se laissant pas impressionner par le jargon de son interlocuteur, si hannibalesque soit-il.

Au fil de leurs consultations, elle a appris à retirer de ses discours très précisément ce qu’elle souhaitait et à oublier le reste. La plupart du temps, ça fonctionne, mais pas à chaque fois, malgré tout. Elle sait en l’occurrence que tout ce qu’il peut affirmer sert avant tout à noyer le poisson, du moins c’est ce qu’elle présume. En attendant, si l’histoire n’est pas vouée à se répéter à l’identique, pourquoi les jeux de pouvoirs et d’influence demeurent si similaire ? Margot aurait tendance à considérer que ce n’est pas franchement juste, même si bien sûr, on ne lui demande pas exactement son avis.

« Que représente une « moindre mesure » à vos yeux ? » demande-t-elle alors.

Oui, chaque mot à son importance, et Margot se fait un impératif de dénouer les données même les plus cryptiques. Elle a tendance à considérer que c’est une nécessité, en vérité. Il a parlé de ne pas agir, ou finalement, dans une moindre mesure, ce qui n’est décidément pas la même chose. Et c’est une chose qu’elle retient.

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▿ Date de naissance : 19/02/1972

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"L'on est parfois surpris des mécanismes de l'esprit, ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, Margot", observe le psychiatre en lui adressant un regard entendu. S'il en est bien un qui ne demande qu'à se laisser surprendre par les mécanismes de l'esprit les plus alambiqués - dans l'unique but de se les approprier, cela va sans dire -, c'est bien votre humble serviteur. "Notamment par notre capacité à la répétition, y compris de nos erreurs les plus conscientes. La répétition peut être considérée comme un échec de la symbolisation, une réitération en acte de ce qui a été refoulé - ou, dans votre cas plus spécifique, Margot, de ce qui a été oublié. C'est une fixation du traumatisme autant qu'un souhait inconscient de symbolisation. Gardez-vous bien de présumer de ce que vous seriez susceptible de reproduire à l'identique ou non", jargonne le psychiatre comme il en a si souvent l'habitude, mais non sans une très claire intention sous-jacente.

A ses patients qu'il estime les moins obtus et les plus intelligent, il se permet toujours les laïus les plus longs sur un domaine de compétence qu'il pourrait simplifier à outrance par souci d'accessibilité et de vulgarisation. Il s'épargne l'infantilisation quand il est en présence de Margot, de même qu'il ne se l'autoriserait pas en présence de Will, ni ne se l'autorisait en compagnie de Jack. Margot est à même d'écouter les vérités nues, sans ambages, d'en retirer ses propres conclusions également, suffisamment brillante pour en prendre le meilleur parti.

"Votre présence ici et nos conversations sont mon humble contribution à vos projets concernant Mason Verger", reprend-il alors posément quand Margot lui demande de quelle manière il se verrait définir la notion de moindre mesure dans ce contexte très spécifique.

En ce qui le concerne, elle peut aisément évoluer et varier en fonction de ce qui finira par réellement l'intéresser, et Margot, qui le connaît même si elle a oublié et négligé une partie de qui il est, ne peut pas être sans l'ignorer. Encore moins à présent qu'elle a pleinement conscience du fait qu'il lui a menti, chose qu'Hannibal ne peut guère plus prétendre faire mine d'ignorer. Les choses ne peuvent guère se passer ainsi.

"Je n'ai pas d'intentions autres que celles de vous aider, comme je viendrai en aide à quiconque s'assiérait à la même place que vous."

Sauf que Margot ne peut être tout à fait dupe de cette information, parce que malgré ce qu'elle oublié, elle le connaît, parce qu'elle était parvenue tout de même à le percer à jour autrefois et se chargera sans doute de laisser Alana éclairer sa lanterne sur les zones d'ombre qui demeurent encore. Mais en cet instant, le psychiatre ne cherche en aucun cas à se montrer entièrement convaincant. Le double sens que l'on peut trouver à ses propos ne doit en aucun cas échapper à son interlocutrice. Ce qui n'a pas l'apparence du conseil possède les atours de l'avertissement.

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▿ Date de naissance : 18/04/1987

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feat. Hannibal

Margot affiche un sourire empreint d’un léger cynisme qu’elle ne cherche guère à dissimuler quand le psychiatre lui fait remarquer que ce n’est certainement pas à elle qu’il va apprendre combien les mécanismes de l’esprit peuvent parfois être surprenants. Elle en a effectivement largement conscience de son côté, pas uniquement sur elle-même d’ailleurs, c’est une chose qu’elle a eu tout loisir d’observer aussi chez son frère, par exemple, dont l’esprit tortueux et violent pouvait certainement en impressionner certains, il avait surtout eu le don, en ce qui la concerne, de toujours l’angoisser au-delà des mots.

Une fois de plus, Hannibal jargonne. Margot a bien compris que c’était là sa manière de procéder, sa façon de conserver le contrôle de chaque situation. Être doué dans quasiment tous les domaines existants lui confère une aura bien particulière, et qui ne rencontre que peu de comparaisons possibles. Ses connaissances appuyées de la psychiatrie lui permet d’assimiler chaque situation à des termes techniques, mais Margot n’a pas l’intention de se laisser endormir en quoi que ce soit. Elle l’écoute parler, mais elle ne se laisse pas surprendre ou influencer, quand bien même elle sait trouver une vérité beaucoup trop parlante aux propos qu’il formule.

Une fixation du traumatisme et un souhait inconscient de symbolisation : elle est absolument convaincu de sombrer dans ces deux écueils contre lesquels elle cherche tant bien que mal à lutter. Répéter à l’identique ce dont elle n’a guère de souvenir tient à ses yeux de l’impossibilité, mais s’en rapprocher, même inconsciemment, est sans doute bien plus logique, pour ne pas dire envisageable par bien des aspects.

Hannibal ajoute que sa présence ici, leurs conversations, sa thérapie, sont son humble contribution à ses projets vis-à-vis de Mason. La jeune femme observe son interlocuteur avec circonspection. Elle est loin de s’imaginer que cela puisse être si simple, et elle est loin, par la même, de vouloir se laisser trop facilement duper. Il en est même tout à fait hors de question. Il a autre chose à y gagner, quelque chose qui, elle le devine, dépasse sa seule fascination et curiosité morbides, même si elle n’a aucun mal à croire que les deux soient plus que prononcés chez son interlocuteur. Il y a autre chose : peut-être veut-il tester les limites de son influence. Peut-être a-t-il des projets vis-à-vis de Mason qu’elle ignore totalement. Ou encore des projets vis-à-vis d’elle, en réalité.

« Vous ne devriez plus me mentir à présent que vous n’êtes plus en position de le faire, mais j’admire votre aplomb », observe Margot en détaillant son interlocuteur du regard comme si elle le découvrait pour la première fois. « Je veux que vous me parliez de ce qui s’est passé après mon accident, que vous me parliez de ce qui s’est passé pour moi – et pour vous. Après tout, je n’ai entendu qu’un seul son de cloche, il paraît qu’il en faut plusieurs pour se façonner une opinion, n’est-ce pas ? » reprend-elle avec une certaine décontraction dans la voix.

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▿ Date de naissance : 19/02/1972

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"Je ne vous mens pas, Margot. Vous l'avez dit vous-même, je n'y ai plus d'intérêt."

Mais bien sûr, Margot n'a aucun intérêt à le croire, et elle a même plus qu'intérêt à rester sur ses gardes et à ne surtout pas le croire sur parole quoi qu'il en soit. Il est convaincu, et c'est un fait, que l'esprit toujours fragile de sa patiente demeure malléable en dépit de ses découvertes. Peut-être même qu'elle est à présent plus malléable encore qu'elle ne l'était autrefois. Elle est hésitante, elle est incertaine, et il y a beaucoup de choses qu'elle ignore encore. La combinaison de ces éléments est un terreau propice à toutes les dérives manipulatoires, et il est assez humain, aux yeux d'Hannibal, que de vouloir s'engouffrer dans cette brèche bien particulière.

"C'est votre droit le plus strict que de me le demander, en effet."

Il l'observe un instant avant de reprendre la parole, réfléchissant aux meilleurs termes à employer pour satisfaire à la requête de son interlocutrice. Car au fond, il est du même avis qu'elle. Elle doit avoir plusieurs sons de cloche. Mais la manière dont on raconte une même histoire a naturellement ses conséquences.

"Les circonstances m'ont vivement encouragé à me débarrassé de Mason Verger. Il est des seuils de vulgarité qui ne sont pas tolérables. Et votre frère en retour estimait manifestement que j'avais fait mon temps." A présent qu'il daigne répondre à la requête de son interlocutrice, il parle de façon et directe, et sans détour. Il n'éprouve aucun besoin de se dissimuler derrière des nobles desseins. Margot Verger a suffisamment entrevu de son vrai visage pour ne pas s'en offusquer et pour ne pas lui en tenir rigueur, c'est du moins ce qu'il présume. Et sa version de l'histoire ne différera pas vraiment de ce que le docteur Bloom a d'ores et déjà pu lui apprendre. "J'ai été pris à un piège qui s'est retourné contre lui, et il a fini drogué, défiguré... rien moins que ce qu'il méritait... Je pensais le faire définitivement taire en lui rompant le cou, mais votre frère est, à l'évidence un coriace. Il a survécu et a été déterminé à se venger." Il marque une pause, avec un léger hochement de tête approbateur. "Et à me manger." Il marque une pause. "Je faisais face à mes propres démêlés avec la Justice, alors, j'avais fui, à Florence, mais votre frère, secondé de votre épouse, a retrouvé ma trace. Comme vous l'aurez déjà compris, je suppose, il ne s'en est pas sorti indemne. J'ai marchandé sa liberté et je vous aidé, vous et Alana, à obtenir cet héritier dont vous aviez désespérément besoin. Et dans cet autre monde comme dans celui-ci, j'ai estimé que sa mort vous revenait de droit."

Il est à la fois concret et précis tout en se payant le luxe d'être lacunaire, mais c'est à dessein, il est curieux, pour tout dire, de voir sur quels aspects de son récit elle décidera de demander des précisions.

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En effet, sur le papier, Hannibal n’a plus la moindre raison de lui mentir, mais il faut tout de même admettre qu’il est assez difficile de savoir à quoi s’en tenir avec lui. Elle pense lire plus clair en lui que bon nombre de ses patients, qui se laisseraient peut-être abuser par ses bonnes manières et son élégance, mais elle n’est pas à l’abri de se tromper pour autant. Pour preuve, elle n’avait pas eu du tout conscience des jeux de manipulation que se jouaient à son insu alors qu’Hannibal prenait le plus grand soin d’omettre une vérité qui n’était pourtant pas du tout négligeable : non pas celle de sa nature, soit, mais celle d’un potentiel qu’il avait manifestement voulu étouffer pour des raisons qui échappent encore à son interlocuteur à l’heure actuelle.

Au moins, il accepte bel et bien de lui confier le récit, réel et sans ambages de ce qui s’est passé, de son point de vue. Certes, elle ne met pas longtemps à comprendre que ce récit demeure laconique, mais elle prend soin de retenir ce qui l’intéresse le plus, un soin tout particulier. Elle n’apprécie pas d’entendre que son intention avait bel et bien été de se débarrasser de Mason. Elle-même lui avait confié trop de fois son désir de se débarrasser de son frère, et lui, pour sa part, l’y avait bien assez encouragé pour qu’elle n’apprécie pas outre mesure l’idée qu’il ait pu chercher à la devancer. Certes, il avancera peut-être qu’en fin de compte, seul le résultat importe, mais elle n’est pas tout à fait certaine non plus de goûter complètement à cette interprétation des faits qui, à l’évidence, se passe de réflexions trop soutenues sur les engagements tacites qu’avaient toujours impliquées leur connaissance partielle de la nature profonde de l’autre.

C’était donc un jeu de dupe, une chasse à l’homme dont on n’avait plus trop su qui chassait qui en fin de compte. Elle affiche une légère grimace quand elle entend que l’intention de manger le docteur Lecter. Ce sont bien là des méthodes rustres et démesurées qui au fond lui ressemble. Il a sans doute voulu le traiter d’une manière équivalente aux porcs qui s’entassaient dans la grande entreprise d’élevage des Verger.

« Vous n’aviez pas estimé que sa mort me revenait de droit pour commencer », le corrige Margot, qui n’est que partiellement satisfaite des explications de son interlocuteur. Non, à l’évidence, il faudra qu’il lui en dise bien plus pour qu’elle sache complètement apprécier ses explications, qui ne sont pas tant des explications qu’une manière comme une autre à ses yeux, sans doute, de se donner raison. Et ce n’est pas tout à fait efficace.

« Et l’implication de Will Graham dans tout ça. J’ai remarqué que vous n’avez pas prononcé son nom une seule fois. »

Mais elle sait, par l’intermédiaire d’Alana, qu’il a bel et bien eu son rôle à jouer dans toute cette histoire.

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Margot l'écoute, imperturbable, sans doute parce que la jeune femme a déjà entendu une grande part de ce récit de la bouche d'une autre femme, de sa femme. Margot sait, et pour cette raison, son opinion est d'ores et déjà biaisée. Ce n'est pas pour déranger Hannibal, il apprécie la manière dont elle contre-argumente, dont elle se défend, dont elle défend également son droit à être ce bras fratricide qui mettra fin aux jours de Mason Verger. Il a conscience de cela, de même qu'il ne peut qu'observer que le sentiment de trahison de Margot ne repose pas seulement sur la privation qui lui a été faite d'une part importante de ses souvenirs, mais d'un privilège qu'il lui avait fait la promesse tacite de lui accorder. Les événements s'étaient précipités à l'époque, abondant dans un sens différent, qui l'avait poussé à réviser son jugement, mais dans ces circonstances spécifiques, et même s'il n'ignore pas que Mason pourrait être une menace sérieuse autant pour lui que pour Will, c'est tout de même bien à Margot qu'il veut laisser le privilège de mettre fin aux jours de son frère.

"Je me vois dans l'obligation de vous contredire sur ce point, Margot. Ce sont les circonstances qui ont manqué vous prendre ce privilège, pas moi", s'exprime-t-il, jouant avec les mots. "Quand ma vie est menacée, je me vois dans l'obligation de rendre coup sur coup, c'est un réflexe de survie naturel." Il marque une pause. C'est en effet ce qui s'est passé : lui suspendu à ce crochet, sauvé in extremis par Will, et la suite... la suite serait devenu légende si ce monde n'avait pas donné à tant l'occasion de l'oublier. "Mais vous pouvez à présent réparer ce tort si vous le souhaitez... et je vous le souhaite également."

Là-dessus, il ne dit plus rien, mais les questions ne sont pas terminées encore. Et bien sûr, il n'est pas surpris qu'Alana ait évoqué avec Margot la part d'implication de Will dans cette affaire. Il a été l'impulsion initiale dans ce piège qu'il a voulu commencer à refermer sur lui, en le poussant au vice, en l'incitant à un crime concret... En se servant de Mason Verger comme d'un appât nécessaire à ferrer un plus gros poisson. Sur ce point, Hannibal ne peut certainement dire autre chose : il est vrai que Will Graham est définitivement un excellent pêcheur. Et un excellent pécheur, cela va sans dire.

"Vous devriez l'interroger vous-même, si vous voulez en savoir davantage à ce sujet", répond-il alors évasivement, gardant cette part pour lui. Curieux, aussi, de ce que Will daignerait lui apprendre si son interlocutrice devait bien décider d'interroger Will. "Je pense que vos questions devraient s'en tenir à vos préoccupations me concernant. Je ne peux vous éclairer que sur ce point. Ce n'est pas mon rôle de le faire sur aucun autre. Ce n'est pas mon rôle de prêter ma voix à un grand absent de cette conversation. De même que je ne me permettrais certainement pas de vous interroger au sujet du docteur Bloom."

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Aux arguments incisifs de Margot, Hannibal répond invariablement avec ce même calme et cette même pondération qui toujours le caractérisent, qui peuvent être plaisant quand il sait répondre à vos élans de rage par des réactions aussi rationnelles qu’encourageantes, mais légèrement agaçantes également quand il fait le choix de vous donner tort au moment même où vous êtes pourtant absolument convaincu d’avoir raison. Elle ne l’estime pas en droit de lui donner tort, ni sur ce point ni sur aucun autre dans ces circonstances où elle a clairement été bafouée, mais par curiosité, néanmoins, elle ne sait s’empêcher de le laisser poursuivre.

Elle lève légèrement les yeux au ciel quand il se permet de blâmer les circonstances plutôt que lui-même quant à ce qui était arrivé à son frère. Oh, comme l’excuse lui semble facile ! Et même trop facile pour un homme tel que Hannibal Lecter, qui l’a habituée à une verve autrement plus grande et à des arguments autrement plus convaincants. Se pourrait-il qu’elle y soit parvenue ? A le mettre au pied du mur ? Elle en a le sentiment, et c’est un constat qui, dans son malheur et dans la position d’infériorité qu’elle conserve malgré tout, lui confère un semblant de sentiment de pouvoir qui n’est guère pour lui déplaire.

Cela dit, ce qu’il ajoute est déjà bien plus acceptable en matière d’argument. Mason Verger avait menacé sa vie, il avait rendu coup pour coup… Instinct de survie oblige. Elle peut le lui concéder, elle ne le fait pas, pas verbalement en tout cas. Elle lui conserve toujours une rancœur certaine quant aux mensonges qu’il lui a adressés. Elle a toujours eu conscience du fait qu’il se jouait de lui, qu’il trouvait son propre intérêt dans ses encouragements au meurtre, mais parce qu’elle avait conscience de ce jeu, elle ne se sentait pas flouée, ou dupée. C’est à présent le cas, et elle déteste profondément cela.

« Vous savez très bien quelles sont mes intentions. » Elle marque une pause. « Dois-je donc m’attendre à ce que l’histoire se répète. J’ignore pourquoi mon frère a jugé bon de vous garder en vie jusqu’ici, mais je devine que le sort qu’il vous réserve ne sera pas différent de celui qu’il vous prêtait autrefois. »

Sur sa réserve, elle enchaîne les questions, et il y en a une à laquelle le psychiatre continue de lui refuser catégoriquement la moindre réponse, ce qui l’agace prodigieusement. Elle commence à comprendre que si elle veut comprendre l’implication de Will Graham dans cette affaire, elle devra en référer au principal concerné.

« Vous le protégez », déduit-elle sans détour en refusant catégoriquement d’évoquer Alana avec lui et de rentrer dans le jeu où, elle le sent, il veut engager une partie. « Pourquoi ? »

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Les intentions de Margot sont en soi très claires, mais il n'est pas convaincu qu'elle sache voir au-delà de cette ambition qu'elle couve depuis si longtemps qu'elle en a certainement oublié l'origine, cette ambition première qui sera peut-être source de satisfaction sur le court terme, mais ne saurait la satisfaire sur le long terme. Pour cela, il faut qu'elle sache agir et opérer différemment. Oui, son intention est de tuer son frère, mais passée cette ambition, que se passera-t-il ? Elle ne devra pas, elle ne pourra pas s'arrêter là. Quoi qu'elle choisisse de faire, quoi qu'elle décide, elle ne peut pas faire autrement, c'est tout bonnement impossible pour elle de faire autrement.

"Comme nous tous, votre frère tâchera d'apprendre de ses erreurs. Je devine évidemment qu'il ne compte pas me garder en vie, mais pour l'heure, vous êtes sa priorité, Margot, et il vous sous-estime. Même après tout ce qui s'est passé, son plus grand tort demeure, encore et toujours, de vous sous-estimer. Il lui sera fatal une fois encore."

Reconnaître ses torts exige de savoir mettre de côté son ego, et quand ce dernier est plus démesuré que jamais, il est probablement impossible de pallier à cette tare qui en l'occurrence facilitera la tâche de sa patiente (et probablement celle d'Alana, qui ne résistera sans doute pas à l'avis de l'assister dans cet ouvrage, Hannibal en est intimement convaincu).

Sur ce sujet, il ne dit rien de plus, il ne sera bientôt plus temps pour Margot de spéculer sur la survie ou non de son frère, elle n'aura d'autre choix que de le tuer, et de le tuer vite : elle a dorénavant pris la pleine mesure de tous les terribles enjeux qui accompagnent sa survie, elle saura faire son choix. Rien à dire à ce sujet.

Rien à dire non plus au sujet de Will... Parce qu'il ne le veut pas... Et c'est une chose que Margot a parfaitement comprise. Il le protège, en effet, d'une façon si intuitive qu'en définitive, il réaliserait à peine lui-même que c'est ce qu'il fait si on ne lui agitait pas sous le nez ce qui est pourtant évident et tiendrait lieu de certitude à chacun.

"Pour quelles raisons cherchez-vous à protéger le docteur Bloom ?" se dérobe-t-il derrière une question toute rhétorique afin de ne pas avoir besoin de répondre à ce qui exigerait une réponse tout à fait honnête qu'il n'a pas l'intention de formuler quoi qu'il en soit. Préfère ne pas formuler quoi qu'il en soit.

En ne lui répondant pas, cependant, il lui fait tout de même la faveur d'une demi-réponse. Qui est bien assez à l'heure actuelle selon lui. Il ne compte pas lui en accorder davantage. Mettre en parallèle sa relation à Will et la relation qu'elle-même entretient avec Alana est en soi suffisamment éloquent, selon lui, pour ne guère avoir besoin d'ajouter quoi que ce soit.

"Je crains, malheureusement, que notre séance touche à sa fin. Je vous remercie de votre franchise, Margot."

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