"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Le métier d'agent, c'était également un métier d'accompagnement et de soutien. Certains acteurs pouvaient être sensibles, peu sûrs d'eux malgré leur métier, et qui était mieux placé pour les soutenir que leur agent ? Andréa en avait pertinemment conscience, même si en cet instant, la perspective de devoir jouer la babysitter toute la journée pour son acteur l'agaçait au plus haut point. Non pas que son client ne soit pas charmant, mais elle avait originellement eu dans l'idée de gérer d'autres clients durant cette journée.
Elle l'accompagnait, donc, tout en s'efforçant de gérer son impatience. Ce qui n'était pas une mince affaire. Le tournage avait au moins le mérite d'avoir lieu dans un décor original.
Pendant que son client tournait, elle restait sur place, bras croisés, les yeux rivés sur la scène. Mais rapidement, elle reçut des appels, auxquels elle répondit en s'isolant un peu plus loin. Lorsqu'elle revint, elle avait perdu toute concentration et toute volonté de se tenir sagement derrière le réalisateur en attendant que la journée se termine.
Elle profita donc de la pause pour envoyer son acteur manger et se réhydrater, et, mains dans les poches de sa veste, s'intéressa au lieu de tournage. Les lieux avaient été monopolisés pour le tournage mais, pendant les pauses, ils étaient libérés pour permettre aux véritables géologues et employés de laboratoire de reprendre leur travail.
Andréa circulait donc parmi les membres de l'équipe de tournage, en quête d'une distraction pour lui faire oublier son agacement et les affaires bien plus pressantes qui l'attendaient.
Finalement, elle aperçut une silhouette particulièrement avantageuse qui captura immédiatement l'intégralité de son attention. Cette personne semblait préoccupée, et Andréa s'interrogea sur les raisons de cette préoccupation. Du moins, elle s'interrogea car cela lui donnait un très bon prétexte pour entamer la conversation.
Elle s'avança vers elle et se plaça à ses côtés, cherchant à croiser son regard tout en secouant la tête pour mimer un air faussement affligé.
- Ces acteurs... Ils mettent le bordel partout où ils passent c'est incroyable.
C'était l'hypothèse la plus probable au sujet des préoccupations de cette nouvelle connaissance. Andréa ne la reconnaissait pas, donc elle ne faisait pas partie de l'équipe. Et puis... Il fallait avouer que le laboratoire avait été réorganisé pour l'occasion, ce qui pour quiconque avait ses habitudes, ne devait pas être des plus agréables.
Invité
Ven 5 Nov - 20:06
Journée sur un décor de film.
Si ça n’avait tenu qu’à elle, Pearl n’aurait pas accepté que leur laboratoire serve de lieu de tournage pour elle ne sait quel film dont le contenu la désintéresse complètement, mais elle n’est évidemment pas à même de décider de ce genre de choses, et elle veut bien croire que leur centre de recherches ait besoin de fonds supplémentaires, on ne pouvait pas dire que la géologie suscitait un profond désir de subvention chez ceux qui pourraient éventuellement les aider (même si Pearl estime – en toute objectivité – que son travail est d’utilité publique, surtout dans ce cadre particulier). Avant, Pearl n’avait pas à s’inquiéter de toutes ces considérations financières, et ça l’arrangeait bien… ici, c’est autre chose. Et donc, depuis le matin, elle ronge son frein en sachant que son précieux espace de travail allait être mis sens dessus dessous par une équipe de tournage éventuellement peu scrupuleuse.
Elle ne pense pas si bien dire. Quand elle revient à son poste de travail, ce dernier est en effet complètement dérangée, ce qui est insupportable pour la très maniaque Pearl qui ressent le besoin compulsif que tout soit parfaitement ordonné et à sa place. Certes, il ne tient qu’à elle d’y remettre de l’ordre, et elle adore également mettre de l’ordre dans le désordre, justement. Seulement là, sachant que tout va être dérangé et qu’elle perd du temps, elle n’est définitivement pas au meilleur de son moral… sans oublier que, de toute manière, Pearl est constamment stressée dans tous les cas. Après presque trois années passées dans son monde, c’est à peine si elle sait se familiariser avec ce corps terriblement humain qu’elle malmène en oubliant de faire ce que les humains normalement constitués font naturellement : manger à sa faim, boire à sa soif, dormir suffisamment. Ce dernier point, surtout, est difficile à appréhender pour elle. Le temps qu’elle passe à dormir, c’est un temps qu’elle ne consacre pas à la recherche de Steven, et donc du temps perdu, et cette pensée ajoute un stress supplémentaire à sa nature d’ores et déjà nerveuse.
Alors qu’elle peste intérieurement contre les équipes peu scrupuleuses qui ont laissé son espace de travail en désordre, une femme qu’elle n’a jamais vue jusqu’alors vient lui adresser la parole, l’air compatissant, semblant s’excuser du « bordel » laissé par les acteurs. Pearl relève le regard pour croiser celui de la femme qui vient de s’adresser à elle, légèrement mal à l’aise à l’idée que son malaise ait potentiellement été à ce point tangible. « C’est rien, c’est que pour une journée », cherche à relativiser Pearl, légèrement intimidée par cette interaction inattendue. « Vous faites partie de l’équipe du film ? Qu’est-ce que vous faites ? »
Peut-être que plutôt que de faire la conversation, elle devrait se concentrer sur son travail, d’autant qu’elle est au fond stressé que son plan de travail ne soit pas complètement clean (raison pour laquelle elle continue de ranger tout en s’adressant à son interlocutrice), mais ça ne se fait pas, non ? Et puis, cette femme, bien que directe, lui semble plutôt sympathique, au fond.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Malgré ses bonnes intentions, Andréa éprouva aussitôt un immense amusement en observant cette inconnue s'acharner à ranger tout ce qui allait nécessairement être derangé l'après-midi même. Mais cela, elle estima qu'il était plus judicieux de le taire sous peine d'assister à une possible contrariété de cette personne qu'elle trouvait d'ores et déjà charmante. Ce qui, chez Andréa, se traduisait par une envie de séduction.
Dans ce monde-ci aussi, elle aimait plaire. Un peu trop, tout comme à Paris. Elle aimait d'autant plus cela et coucher avec les plus belles filles de la ville qu'elle ne se rappelait pas de son propre monde et de son ancienne vie. Elle éprouvait un manque constant, qu'elle interprétait, faute de souvenirs, en tant qu'envies libidineuses impérieuses... et d'envies de "s'éclater" comme elle l'aurait exprimé, à profiter des soirées et des bars.
Une vie peu sage, donc. Andréa ne connaissait pas la mesure. Lorsqu'elle éprouvait quelque chose, elle le ressentait intensément. Qu'il s'agisse de colère ou de désir.
La question de cette charmante inconnue parvint à la distraire de son... observation très appuyée de la silhouette qui lui faisait face, profitant du fait qu'elle s'affaire à ranger pour laisser son regard appréciateur glisser sur elle.
- Oui, enfin, non... Je ne fais pas partie de l'équipe à proprement parler, j'accompagne juste Timothé, l'acteur principal... Je suis son agente, expliqua-t-elle.
Le dénommé Timothé apparut à quelques mètres de là, visiblement en grande discussion avec l'un des techniciens. Andréa ne parvint pas à entendre ce dont il retournait, mais elle le connaissait suffisamment pour savoir qu'il se plaignait de quelque chose. Elle eut un soupir, avant de retourner à sa conversation :
- C'est à lui que vous devez l'occupation de votre lieu de travail, d'ailleurs. Il a absolument tenu à ce que je négocie ça, le décor, pour lui dans son contrat.
Elle eut un petit sourire désolé, avant de lui tendre la main avec amabilité : - Pardonnez-moi, j'en ai oublié de me présenter. Je m'appelle Andréa Martel, et vous êtes ?
Invité
Dim 7 Nov - 9:48
Journée sur un décor de film.
« Oh, je vois… »
Pearl voit, oui et non, en réalité. Même si elle n’est pas totalement étrangère au monde du cinéma, pas parce qu’elle y a un jour mis un pied, mais parce que Steven avait ses films fétiches qu’il regardait constamment, elle n’a jamais trouvé un intérêt majeur non plus à rester assise devant un écran, et elle ne sait jamais trop posé de questions quant aux coulisses de ce genre de productions, si bien qu’elle ne savait pas que les acteurs avaient des chaperons… Parce que c’est un peu ça, du coup, les agents, non ? Des sortes de chaperons ? Ou bien elle est complètement à côté de la plaque. L’ancienne gemme suit le regard de l’agente quand ce dernier se pose sur un jeune homme à l’air imbu de sa personne, en train d’avoir une discussion animée avec un technicien. Charmant et tête à claque, il doit bien s’agir d’un acteur, en effet. Il en a quelques attributions évidentes, en tout cas. « Et donc, votre rôle, c’est d’accepter tous les caprices de vos acteurs ? » suggère Pearl, sans y voir aucune forme de manque de respect, elle trouve ça plus intrigant qu’autre chose, en fait.
Elle se dit que ces acteurs qui veulent que le monde tourne autour d’eux et que chacun se plient à leurs exigences devraient avoir autour d’eux des personnes que l’on paierait à les faire redescendre sur terre, pas à rester sur leur piédestal. Mais c’est évidemment faire preuve d’une méconnaissance crasse de ce milieu qui, au demeurant, ne l’a jamais attirée, de penser que les choses se passent de cette manière la plupart du temps.
« Je me demande pourquoi il a tant tenu à ce décor, c’est plutôt banal, comme endroit. »
Et s’il en avait choisi un autre, son plan de travail ne semblerait pas avoir subi le passage d’un ouragan, mettant sa sacrosainte maniaquerie à très, très rude épreuve. Et elle ne gagne pas du temps en parlant avec son interlocutrice, mais au-delà de ne pas vouloir lui sembler impolie, elle est sincèrement curieuse. Elle songe à Steven et à l’état d’enthousiasme et de fébrilité dans lequel il se trouverait s’il savait que son lieu de travail servait à un tournage. A coup sûr, il serait intenable, à courir dans tous les sens, à poser des questions à tout le monde, à négocier un rôle de figurant dans le film. Oui, c’est une habitude, chez Pearl, de vouloir intégrer Steven à tous les épisodes un peu hors du commun de sa vie. Mais Steven n’est jamais là… Finalement, Pearl reporte son attention sur l’agente, qui se présente finalement. Pearl lui rend sa poignée de mains avec un fin de sourire. « Pearl Pinkstone », se présente-t-elle à son tour. « Je sais, c’est un nom très… approprié à mon métier. »
On lui en a souvent fait la remarque, alors à présent, elle anticipe avant même qu’on ait eu le temps de lui dire quoi que ce soit.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
La question de son interlocutrice la fit rire doucement. C'était une question à laquelle elle était habituée, même si généralement, ceux qui la lui posaient se montraient bien plus hypocrites et s'embarrassaient de détours inutiles.
- D'accepter leurs caprices, ou de les raisonner, quelques fois. Mais plus sérieusement, mon rôle c'est de négocier leurs contrats, de les défendre, de les guider vers les bons ou mauvais films, d'orienter leurs choix de carrière, de leur venir en aide quand ils en ont besoin... De s'en occuper comme de grands enfants, en somme.
La mention des enfants lui provoqua un pincement au coeur, sans qu'elle ne sache bien pourquoi. L'image d'un bébé lui traversa l'esprit, comme une image sortie tout droit d'un songe... Ou d'un souvenir oublié. Mais elle cilla, et cette impression lui passa.
Elle adressa un nouveau sourire enjôleur à son interlocutrice et se concentra sur sa nouvelle remarque, laquelle l'amusa une fois de plus.
- Il aime intégrer du réalisme dans ses rôles... Et pour lui, tourner sur les véritables décors, c'est une manière de s'imprégner. J'ai connu pire, cela dit. L'un de mes anciens clients, pour un rôle de personne sans domicile, a véritablement passé quinze jours à vivre sous les ponts. Il était dans un sale état quand je l'ai retrouvé.
Que cette dénommée Pearl lui rende sa poignée de main lui procura une immense satisfaction. Elle avait eu un sourire, et un contact physique. C'était un premier pas, en séduction. Et puis, plus les secondes s'écoulaient, plus Andréa se faisait la réflexion que ce sourire qu'elle lui avait adressé était décidément trop beau pour qu'elle renonce à l'envie de la faire sourire de nouveau.
- C'est vrai que c'est approprié. Comme si vous étiez destinée à ce métier, finalement. C'est original, en tout cas. Pearl... C'est un beau prénom, conclut-elle avec enthousiasme.
Un nouveau coup d'oeil en direction de son comédien l'informa que celui-ci voulait lui parler. Elle lui fit signe d'attendre et se tourna de nouveau vers Pearl. Elle fit mine d'hésiter, avant de reprendre la parole :
- Je vais devoir y aller. Mais j'aimerais beaucoup continuer à parler avec vous, alors... Ca vous dirait, de venir boire un verre après le tournage ? Ou un thé, un café, ou qu'importe.
Invité
Mar 9 Nov - 22:27
Journée sur un décor de film.
Andréa ne semble pas prendre ombrage de sa question trop directe tandis qu’elle lui parle plus en longueur de son métier. Pearl songe qu’elle aurait bien du mal à faire un tel travail. Le simple fait de devoir s’occuper d’un seul individu, plus généreux que capricieux, était déjà beaucoup pour elle, elle n’en aurait clairement pas fait son métier, même si elle veut croire ne pas toujours s’en être si mal sortie avec Steven (et parfois avec Amethyst, qui n’était pas non plus la maturité incarnée).
Les acteurs ont l’air d’être les plus capricieux entre tous, non, vraiment, ce ne serait pas un métier pour elle, et elle n’y trouve rien de franchement attirant. D’un autre côté, elle se doute que la géologie ne doit pas davantage intéresser la grande majorité de ceux auprès de qui elle ne fait qu’évoquer son métier. Andréa, elle, doit sans doute avoir davantage d’anecdotes croustillantes à raconter à la fin de la journée. Les acteurs sont trop bavards. On ne peut pas dire autant des pierres, en tout cas pas dans ce monde, pas dans cette dimension.
Elle peut reconnaître ça à l’acteur qu’Andréa chaperonne, elle aurait tendance à admirer le dévouement à son travail, qui le pousse à rechercher toujours plus de réalisme. C’est peut-être un peu excessif, mais ça prouve qu’il s’implique, et Pearl a tendance à penser qu’un projet ne vaut définitivement rien si on ne s’y investit pas à cent pour cent. « C’est beau, cette dévotion à son métier », remarque simplement Pearl, mais sans en dire beaucoup plus, parce qu’elle ne se voit pas rentrer dans le détail de ce qu’elle ne connaît pas.
Le cinéma, c’est un milieu fascinant, certes, mais aux antipodes de tout ce qu’elle connaît ou a spécialement envie de connaître, alors même si elle est un peu curieuse, elle ne cherche pas à connaître des détails complémentaires, et de toute façon, il faut qu’elle se remette au travail, déjà qu’elle ne peut grapiller qu’un peu de temps entre deux prises.
« Merci », se contente-t-elle de dire en sentant ses joues rosir légèrement alors qu’Andréa la complimente sur son prénom… qui n’est pas exactement son prénom, puisqu’elle n’a pas exactement de prénom, pas plus que de nom, mais c’est une chose qu’elle s’épargne d’expliquer au détour d’une conversation toute simple, de même que le fait qu’elle soit littéralement une perle.
Elle envisage de dire quelque chose, même si rien d’intelligent ne lui vient, mais elle est partiellement sauvée par l’acteur qui, plus loin, réclame son agente. « Euh oui… un thé, j’aime bien le thé », répond-elle avant de remarquer la stupidité de sa réponse et de se racler la gorge. « Je vous laisse mon numéro si… vous voulez ? »
Intimidée par l’intérêt incompréhensible que lui porte cette femme si charismatique, Pearl est dans ses petits souliers. Elle comprendrait honnêtement qu’Andréa reprenne son invitation après ça, mais elle a toujours l’air décidée à lui consacrer du temps après le tournage.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Elle acquiesça lorsque Pearl parla de dévotion. Pour sûr, la dévotion, c'était le mot juste. Surtout concernant cet acteur en particulier. Pearl avait très bien résumé la situation, aussi Andréa n'ajouta rien.
En revanche, elle remarqua la teinte de rose qui colora les joues de son interlocutrice, et ne sut retenir un sourire en coin, fière de son effet. C'était léger, mais c'était déjà quelque chose. Son sourire s'accentua lorsque Pearl accepta son invitation à se retrouver plus tard. Ca, ce n'était pas léger. Et cela la ravissait.
- Un thé, oui. C'est parfait, le thé. Et puis l'avantage c'est qu'il y a plein de sortes, alors on aura le choix, plaisanta-t-elle maladroitement pour contenir son excitation à l'idée qu'elles se reverraient.
Bien sûr, elle aurait préféré boire de l'alcool, jusqu'au bout de la nuit, et finir celle-ci dans son appartement en compagnie de sa nouvelle rencontre. Mais ce n'était qu'un fantasme, et elle comprenait parfaitement qu'il était mille fois plus raisonnable de se retrouver pour un thé. Qu'importait, en vérité, tant qu'elle pouvait la revoir.
Très fière de son coup, elle tendit son portable à Pearl, à la page des ajouts de contact.
- Mais ce sera avec grand plaisir, pour votre numéro. Je vous laisse le noter. Je vous rappelle après le tournage, ça vous va ? Je ne serai pas loin de toute manière...
Elle apercevait son acteur qui s'agaçait, à quelques mètres de là. Elle fronça les sourcils et lui fit signe de patienter, jusqu'à ce que celui-ci finisse par s'avancer.
- Bon, Andréa, tu fous quoi ? - J'arrive, bichon. Attends-moi dans ta loge, ok ? On répète ensemble si tu veux, proposa-t-elle fermement pour l'apaiser, ne voulant pas que Pearl se retrouve pressée par cette interruption.
Alors qu'il s'éloignait à contrecœur, elle adressa de nouveau un regard à son interlocutrice, inspirant longuement comme pour lui signifier comiquement et avec complicité que ce n'était pas facile tous les jours.
- Je vais vraiment devoir y aller, mais on se voit tout à l'heure, Pearl. Croyez-moi, j'ai hâte.
Invité
Ven 12 Nov - 21:14
Journée sur un décor de film.
Pearl se sent complètement stupide. Elle a dû passer pour une complète idiote avec ses histoires de thé, c’est du moins le sentiment que lui donne la réponse d’Andréa. Elle a l’impression qu’elle se moque gentiment d’elle… Ou bien c’est juste son embarras à elle qui lui fait interpréter les choses de cette manière ? Elle n’en sait vraiment rien… Elle se dit juste qu’à la place d’Andréa, elle reprendrait sans doute sa proposition aussi vite qu’elle la lui a soumise. Mais au final, Andréa lui tend son téléphone.
Pearl, un peu nerveuse, ajoute son numéro au répertoire d’Andréa, en se disant que son interlocutrice ne la contactera sans doute jamais après son histoire de thé. Enfin, comme ça, c’est au moins elle qui prendra l’initiative. Si ça devait être à Pearl de téléphoner à Andréa, il y aurait eu de fortes chances pour qu’elle se contente à fixer l’écran de son téléphone sans oser faire quoi que ce soit. Elle hoche la tête. Advienne que pourra. Peut-être qu’elle ne l’appellera pas. Et si elle doit ne pas l’appeler, ce n’est pas si grave, pas vrai ? Non, elles n’ont échangé que deux mots, après tout… Mais… cette femme l’intéresse, elle l’intimide, et elle ne peut s’empêcher de penser à la probabilité qu’elles passent un peu plus de temps ensemble, en tête à tête. Ça fait très longtemps, si cela est seulement déjà arrivé, qu’elle a l’impression de susciter l’intérêt de qui que ce soit, et elle ne sait pas quoi faire de cet intérêt, pas le moins du monde.
Elle a envie de dire quelque chose, au moment de lui rendre son téléphone, mais se contente finalement d’un sourire un peu embarrassé tandis qu’Andréa, de son côté, est mise à contribution par son acteur, qui semble particulièrement incommodé de la trouver distraite. Tandis qu’elle l’entend lui répondre, Pearl se dit qu’elles gravitent toutes les deux dans des cercles absolument différents. Vraiment différents, tous les deux, et qu’elles n’auront peut-être rien à se dire, et qu’elle regrettera de lui avoir accordé du temps. Surtout pour boire du thé. Évidemment que ce genre de femmes ne boivent pas de thé. Sans doute qu’elle boit de l’alcool, ce genre de boissons qui lui mettent la tête de travers en une gorgée à peine. « Oui… moi aussi… », dit-elle, mal à l’aise, quand Andréa lui dit qu’elle a hâte.
Elle songe qu’elle aussi… et en même temps, à l’idée de se retrouver seule avec cette femme intimidante, elle est aussi terrifiée. Bon… ne plus y penser. Pearl va se concentrer sur son travail, voilà tout. Si elle en est capable. Mais elle doit bien reconnaître qu’elle est distraite, et que son travail en pâtit très clairement. Quand on lui demande à nouveau de laisser son espace de travail pour le tournage d’une nouvelle scène, Pearl rassemble ses affaires pour se diriger à l’extérieur. Comme une idiote, une fois dehors, son premier réflexe et de fixer son téléphone comme si sa vie en dépendait. Elle n’appellera pas. Pourquoi elle appellerait ? Et puis, c’est ridicule, franchement. Et quand le téléphone sonne finalement, son téléphone manque de lui échapper des mains.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Pearl semblait décontenancée. Son interlocutrice osait à peine la regarder droit dans les yeux, et encore moins lui adresser plus de quelques mots. Ce qui n'était pas pour lui déplaire, en vérité. Andréa aimait faire son petit effet à celles qu'elles trouvaient séduisantes. Et elle trouvait Pearl particulièrement séduisante, un sentiment qui ne s'était pas atténué suite à leur conversation, bien au contraire. Elle la trouvait délicate et fine. Sa timidité, elle, était adorable.
L'anticipation et l'excitation de revoir sa nouvelle rencontre lui occupèrent l'esprit tant et si bien qu'elle se montra distraite sur le plateau. Elle profita d'une scène tournée pour envoyer un message à Pearl, afin que celle-ci ait également son numéro... Des fois qu'elle veuille communiquer, ou la prévenir d'un quelconque problème. Il fallait se montrer prévoyante.
Andréa était la première surprise, à vrai dire. Généralement, elle oubliait le nom de ses conquêtes immédiatement après l'avoir appris. C'était à peine si elle se souvenait de leur apparence, par moments. Or, là, le nom de Pearl tournait en boucle dans son esprit, la faisant sourire de cet air ridicule, songeur et enjôleur de celles qui rêvassent.
Et, en effet, l'agente rêvassait. Elle avait hâte que sa journée de travail se termine - fait rare, pour l'acharnée du travail qu'elle était - pour savourer le moment à venir entre elle et Pearl... Même si ce moment devait se dérouler autour d'un thé.
Finalement, ses heures de travail prirent fin. Elle s'assura que son talent obtienne une voiture pour rentrer chez lui et, après avoir souhaité une bonne fin de journée à chacun, se hâta de quitter les lieux et de retrouver le contact de Pearl dans son téléphone. Elle l'appela pendant qu'elle marchait avec empressement. Un sourire fin ourla ses lèvres en entendant une voix féminine lui répondre.
- J'espère que vous vous souvenez de moi, plaisanta-t-elle d'un ton séducteur. Je suis disponible, pour ce thé, si vous l'êtes aussi. Je viens juste de quitter le tournage, alors... Où voulez-vous qu'on se rejoigne ?
Invité
Sam 13 Nov - 15:26
Journée sur un décor de film.
« J’ai une excellente mémoire », répond Pearl au téléphone, qui ne sait pas trop si elle énonce un fait en cet instant ou si elle essaie juste, à sa manière, de faire un peu des deux. Sans doute un subtile mélange des deux… Il va vraiment falloir qu’elle apprenne à communiquer convenablement avec l’agente, à croire qu’elle n’a jamais tenu de conversation – téléphonique ou non – de toute sa vie. C’en serait pas loin de pathétique, honnêtement… et elle en a bien conscience, ce qui ajoute évidemment encore davantage à son embarras.
Pearl avait voulu qu’Andréa la recontacte, mais elle ne s’est pas forcément attendue à ce qu’elle le fasse bel et bien. Elle a songé que son interlocutrice se remémorerait leur court échange avec un certain embarras, et ne tarderait pas à effacer son numéro de son répertoire. Elle n’est pas habituée à plaire. Elle ne s’est autorisée ce genre de… est-ce qu’on peut même parler de flirt, à ce niveau, sans doute pas… d’interaction, on va dire, qu’une seule fois durant sa longue vie, et après la mort de Rose. Elle ne sait tout simplement pas y faire. Et elle n’est pas habituée à ce qu’on la regarde autrement que comme un naturel objet de curiosité, ce qu’elle est… encore plus quand elle commence à se présenter comme… eh bien, comme un caillou. Ce qu’elle évitera de faire tout de suite, en l’occurrence.
Bref, Andréa se fiche sans doute de l’excellente mémoire de Pearl, toujours est-il qu’elle l’a donc appelée, et que Pearl aurait difficilement pu l’oublier puisqu’elle s’est refait nerveusement le film de leur conversation pendant tout le temps qu’elle a passé à tenter laborieusement (et de façon tout à fait infructueuse, cela va sans dire) de se concentrer sur son travail. Et donc, puisque Andréa ne semble pas avoir été arrêtée par sa nervosité naturelle et veut toujours bien le boire, ce thé…
« Il y a un café à quelques mètres du labo, c’est… en fait, je vais vous envoyer l’adresse, ce sera plus simple, comme ça. Hum, à tout de suite, du coup ? »
Elle a sans doute raccroché un peu trop vite, et parlé un peu trop vite aussi, par la même occasion, mais il est trop tard pour essayer de se rattraper à présent, alors tant pis, elle envoie les coordonnées GPS du café par message et s’y rend, les mains enfoncées dans les poches de son manteau. Elle ne sait pas exactement à quoi s’attendre, maintenant, mais c’est sûr que du thé, ça lui fera du bien dans tous les cas. Une fois dans le café, elle s’installe à une table et attend patiemment, toujours aussi nerveuse, ce qui se traduit à présent par l’insistance avec laquelle elle triture les manches de son haut. Finalement, Andréa arrive, et Pearl lui adresse un signe pour signaler sa présence. « Alors, ça a été avec votre acteur ? » elle demande pour commencer, surtout pour se donner contenance… dans la mesure du possible.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
L'attitude de Pearl amusa, un brin sadiquement peut-être, l'agente. Andréa avait toujours eu un côté prédateur lorsqu'il s'agissait de séduction. Et, malgré elle sans doute, Pearl remplissait à la perfection son rôle dans ce petit jeu.
Elle ne répondit que quelques mots affirmatifs concernant l'adresse, n'ayant de toute manière pas le temps d'ajouter grand-chose puisque, déjà, son interlocutrice raccrochait. Avec un empressement qui en disait long sur son état de... nervosité ? Hâte ? Elle ne saurait le dire.
C'était déstabilisant, en vérité, de faire face à une telle attitude lorsque l'on était habituée à fréquenter les bars dansants et à enchaîner les conquêtes d'un soir comme le faisait Andréa. Mais cette dernière adorait cela. Elle avait véritablement l'impression d'avoir à jouer un rôle actif. Elle pressentait que cette séduction n'allait pas être évidente, ni même garantie. Mais Andréa était une femme tenance, qui avait de surcroît le vice d'aimer la résistance. Car elle était stimumante, et car elle était inspirante, et ce peu importait le domaine. En amour, en sexe, au cinéma...
Secouant doucement la tête suite à ce coup de fil express et ne pouvant se départir de son sourire, elle suivit donc les coordonnées du GPS, pressant le pas. Elles avaient déjà suffisamment perdu de temps et il lui tardait d'en apprendre davantage au sujet de la mystérieuse et timide Pearl.
Une fois arrivée au café, elle balaya la pièce d'un regard circulaire. Son sourire s'élargit quand elle repéra le signe de sa nouvelle rencontre. Elle la rejoignit aussitôt, s'asseyant face à elle.
La question la prit de court, mais elle accepta cependant d'y répondre après avoir marqué un temps de pause pour repenser à son après-midi.
- Ouais, ça s'est bien passé. Mieux que ce que je pensais, à vrai dire.
Elle prit la carte des boissons qui reposait sur la table et y jeta un coup d'oeil circonspect. Heureusement que sa journée s'était bien passée, sans quoi elle aurait définitivement commandé de l'alcool plutôt qu'une boisson chaude. Il aurait été dommage de faire mauvaise impression dès le départ.
Son choix fait, elle reposa la carte à plat sur la table et redressa le menton pour mieux dévisager Pearl, non sans sympathie.
- Et vous ? Ça s'est bien passé ? Est-ce que vous avez de quoi... travailler, même quand le cinéma s'approprie votre laboratoire ?
Invité
Dim 14 Nov - 10:45
Journée sur un décor de film.
Pearl affiche un sourire sincèrement ravi pour Andréa en entendant qu’elle n’a pas rencontré de difficultés particulières et que les choses se sont bien passées pour elle. Elle n’est pas encore complètement certaine d’avoir tout compris à son métier, mais elle a tout de même compris une chose, et c’est que c’est un métier stressant, exigeant, et il ne doit pas être bien difficile de perdre patience ou encore le contrôle dans certaines circonstances. Donc si les choses se sont bien passées pour elle, elle ne peut qu’en être ravie, sincèrement ravie pour elle. Même si elles ne connaissent pas grand-chose l’une de l’autre, elle voit qu’au-delà de toutes leurs différences, elles ont du moins ceci en commun : elles ne font jamais les choses à moitié, et elles s’investissent à fond dans leur travail. « C’est plus compliqué que ce dont j’ai l’habitude », répond-elle sincèrement. « J’ai ce… basalte, enfin, je sais que ce n’est pas du basalte, mais je ne sais pas comment le qualifier autrement, c’est une roche que je n’ai jamais vue auparavant. J’essaie d’en isoler les composantes, mais… enfin, mon matériel a été brinqueballé d’un bout à l’autre du laboratoire et… »
Elle s’interrompt alors qu’un serveur vient s’enquérir de leur commande. Après avoir commandé son thé blanc à la rose, Pearl tente de reprendre le fil de son discours et de ses pensées, le tout pour se rendre compte que ce qu’elle vient de dire n’a vraiment que peu de chances d’intéresser l’agente, voire pas du tout. Elle passe sa vie sur des plateaux de cinéma, à côtoyer des stars, qu’en aurait-elle à faire de ses bêtes histoires de cailloux ? Pour Pearl, c’est super important, et elle se désespère même que son travail ne soit pas considéré avec davantage de sérieux alors qu’elle est convaincue de son intérêt et du fait qu’en décortiquant les particularités géologiques de cet endroit, ils se donneront tous une chance de rentrer chez eux. Mais elle ne veut pas embarrasser son interlocutrice de ce genre de considérations, d’autant qu’elle risque de la déranger plus qu’autre chose.
« Je disais… hum… c’est pas si intéressant, en fait. Je ne veux pas vous ennuyer avec mes histoires de cailloux. »
Elle tente de soutenir le regard de son interlocutrice, mais ce n’est pas simple du tout, il se dégage d’elle un charisme et une assurance qui la déstabilisent. Pourtant, elle est capable de faire preuve d’assurance et d’autorité quand il le faut, mais dans ce contexte particulier, elle perd ses moyens, et le pire, c’est qu’elle ne le fait pas du tout discrètement, ça se voit comme le nez au milieu de la figure.
« Je me rends compte que je ne sais même pas de quoi parle le film pour lequel on monopolise mon labo. »
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Andréa était ravie d'entendre Pearl prononcer plus que de simples phrases de circonstance. En la faisant parler de son travail, elle espérait la faire parler sans les barrières de la timidité. Et cela semblait fonctionner. Pour être honnête, Andréa ne comprenait pas grand-chose au métier de Pearl, ni à ces histoires de basalte. Tout comme, elle supposait, Pearl ne devait pas comprendre grand-chose à son métier d'agente. Mais ce n'était pas rédhibitoire pour elle. Cela leur faisait de quoi converser, et apprendre à mieux se connaître dans le même temps.
Elle fit donc son possible pour se montrer attentive, hochant la tête en même temps que son interlocutrice s'exprimait. Mais bientôt, son écoute se transforma en observation. Et même, en contemplation. Comment la blâmer ? Celle qui lui faisait face était sublime.
L'interruption du serveur la sortit donc de sa contemplation silencieuse, ce qui était sans doute pour le mieux. L'intensité avec laquelle Andréa dévisageait Pearl aurait pu devenir gênante.
Elle commanda donc un thé noir à la vanille, avant de s'intéresser de nouveau à la conversation. La gêne de son interlocutrice, cette fois-ci, lui fit une certaine peine. La pauvre semblait complètement démunie, ce qui malgré la nature séductrice d'Andréa, était dommage.
- Je ne vais pas vous mentir, je comprends pas tout à ce que vous me racontez. Mais c'est pas grave, si vous voulez m'en parler, je suis là pour vous écouter aussi.
Elle s'interrompit, pour planter son regard dans le sien. Sa voix prit des intonations plus chaleureuses :
- Et puis j'aime bien ça, vous écouter. Vous avez une voix agréable, vous savez.
Elle lui adressa un sourire engageant. Sa posture était particulièrement détendue. Appuyée contre le dossier de sa chaise, jambes croisées, son avant-bras gauche reposant sur la table pendant que son bras droit reposait sur l'accoudoir.
Un haussement d'épaule rompit la décontraction de cette posture suite à la dernière remarque de Pearl.
- Une histoire d'apocalypse et de météorite. Pour être franche, ce n'est pas le film du siècle. Mais c'est un contrat important et le type de film qui plaît au public, alors... Il faut bien s'y coller.
Invité
Mer 17 Nov - 19:00
Journée sur un décor de film.
Au moins, Andréa se montre honnête, et ce n’est certainement pas Pearl qui va lui reprocher de ne pas comprendre exactement de quoi elle parle. C’est naturel, en vérité, la plupart de ceux qui se retrouvent dans la même situation qu’elle, pas forcément en posture de séduction, mais du moins à l’écouter déblatérer sur son métier de géologue, étaient pareil, oui, la plupart du temps, ils faisaient semblant d’écouter (quand ils s’en donnaient seulement la peine) et c’était tout, et Pearl ne les blâmait pas.
Elle pouvait s’exaspérer que l’on ne soit pas assez attentif quand elle cherchait à se montrer didactique, mais là, ce n’est pas vraiment le cas, elle ne cherche pas à faire comprendre son métier à Andréa, tout comme elle se doute que ce dernier ne l’intéressera jamais spécialement (en même temps, elle a bien mieux à faire avec ses talents qui lui offrent tout le strass et toutes les paillettes qu’elle peut bien vouloir). Donc non, elle ne lui reproche pas de ne pas trop comprendre, et même, en vérité, elle apprécie plus que largement son honnêteté.
De cette manière, elle sait au moins quels sujets éviter. Elle a beau lui affirmer qu’elle a une voix agréable – ce qui fait rougir Pearl de plus belle (décidément, elle n’arrêtera jamais) –, elle n’est pas sûre de vouloir monologuer plus longtemps malgré tout. Il est assez évident qu’elle caresse le souhait que son interlocutrice la trouve intéressante, même si elle ignore comment s’y prendre (pas qu’elle considère ne pas être intéressante, cela dit, mais elle n’est pas sûre que parler de tout ce qui fait d’elle, selon elle du moins, un individu intéressant soit chose à faire). « Oh, il n’y a pas grand-chose de plus à en dire de toute manière », dit-elle avant de souffler sur sa tasse. « C’est juste… frustrant, j’espérais que je trouverais des réponses, avec ce métier. Mais finalement… Je ne fais que me poser davantage de questions, je crois que c’est sans fin », soupire-t-elle. « Je suis toujours étonnée du nombre de films qui scénarisent la fin du monde et de notre aptitude à gérer la fin du nôtre », remarque-t-elle pensivement après qu’Andréa lui a fait le pitch du film qui est en train de se tourner et qui, selon elle, n’aura absolument rien d’un chef-d’œuvre, loin de là.
C’est une pensée qui l’a souvent traversée, car elle savait que Steven, lui, aimait ce genre de médias apocalyptiques – comme beaucoup d’autres qui à elle lui échappaient, et elle trouvait cela assez ironique compte tenu du fait qu’ils consacraient leur temps, constamment, à devoir protéger la planète Terre de drames tout aussi cataclysmiques.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Andréa continuait de fixer Pearl, avec une intense attention et un léger sourire au coin des lèvres. Elle était la première surprise de la patience dont elle faisait preuve avec son interlocutrice. Elle n'avait pas ressenti cela depuis... Depuis... Elle ne savait pas. Elle n'avait pas le souvenir d'avoir rencontré quiconque ayant pu obtenir une pareille attention de sa part, et pourtant, elle avait le sentiment d'avoir déjà vécu de telles sensations. Le frisson de la séduction, l'envie de plaire et de faire plaisir, et non pas seulement de passer une nuit ensemble.
Elle devenait cinglée, c'était la seule réponse possible à ses interrogations muettes. Elle passait trop de temps à lire des scenarii, se perdait dans son imagination et dans ses rêveries, voilà tout. C'était ridicule que d'imaginer qu'elle ait un jour pu être domestique.
Et de toute évidence, elle n'était pas la seule à se poser des questions. Mais celles de Pearl semblaient aborder un tout autre sujet, et être plus sérieuses. Ce qui n'était pas étonnant. Andréa n'était sérieuse qu'au travail, et encore.
- Des réponses à quel sujet ? l'interrogea-t-elle donc avec une curiosité qu'elle ne feignit pas.
La frustration de Pearl était bien mystérieuse pour elle, qui ne voyait pas encore l'étrangeté de leur situation à tous, dans cette ville. Elle l'observait donc avec un mélange de confusion et d'intérêt, trop absorbée par son observation pour faire attention à son entourage. La conversation lui paraissait être suffisamment fluide pour qu'elle ne se préoccupe pas du reste.
Sa remarque au sujet des films apocalyptiques et de la capacité générale des êtres vivants à réagir à une possible fin de leur monde la fit sourire.
- Comme quoi, on est mieux capables de gérer nos peurs à travers la fiction qu'en agissant pour remédier à nos craintes. L'imagination et l'anticipation sont acceptables et acceptées au cinéma, mais pas dans le monde réel où l'on s'embarrasse d'études sur études qui se contredisent toutes, jusqu'à ce qu'il y ait tant de contradictions que plus personne ne fait attention au sujet de départ.
Invité
Ven 19 Nov - 19:54
Journée sur un décor de film.
« Concernant l’endroit où nous sommes, bien sûr ! » répond Pearl sur le ton de l’évidence. « Des réponses sur cette île. Je me suis dit qu’en examinant sa composition rocheuse, je parviendrais peut-être à me faire une meilleure idée d’où la situer sur le globe terrestre ou… enfin, sur n’importe quel autre globe, en fait. »
Elle s’arrête là, un peu mal à l’aise. Elle sait la réaction la plus courante quand elle essaie de suggérer qu’au-delà du fait d’être dans une autre dimension, il est selon elle très probable qu’ils ne se trouvent pas non plus sur la planète qui a vu naître la plupart des personnes qu’elle a rencontrées jusqu’ici (même s’ils sont tous nés dans des versions alternatives de la même planète, de ce qu’elle a été capable de le comprendre – personne, par exemple, n’a jamais connu la Terre telle qu’elle-même l’a connue). Pour elle, c’est une hypothèse simple et logique, facile à assimiler parce qu’elle-même vient d’une planète différente.
Mais pour les autres, c’est évidemment quelque chose de bien plus complexe à appréhender… Et quand on ne trouve pas cela tout bonnement improbable, on aura tendance à trouver cela pour le moins… vertigineux, ce qu’elle peut comprendre aussi. Elle n’est pas éloignée non plus de ce sentiment de vertige quand elle songe à combien tout ce qu’elle connaît paraît ô combien lointain, pour ne pas dire tout à fait inaccessible.
Elle préfère donc se concentrer sur les films et sur celui qui se tourne en ce moment dans son précieux laboratoire. Et son interrogation, si elle peut paraître un peu surprenante ou naïve, peut-être, n’en est pas moins sincère. Pearl a passé le plus clair de son existence à protéger l’humanité des plus terribles menaces, il est curieux pour elle de se dire que l’on préfère en faire des œuvres de fiction plutôt que d’admettre que la vérité est souvent bien moins reluisante, et d’autant plus urgente.
Mais la réponse d’Andréa lui fait voir les choses sous un angle un peu différent. C’est vrai, il est sans doute plus simple de gérer ses peurs à travers la fiction, mais la fiction n’aidait pas à contrer ces peurs ou à effacer la menace. Et le résultat des courses est clairement démoralisant. Pearl n’a jamais rien lâché cependant, et aussi, elle a vu des humains le meilleur de ce qu’ils étaient capables d’offrir, si bien qu’elle est absolument convaincue qu’ils peuvent encore bien les surprendre et se sauver de n'importe quelle situation. Ici, il est assez difficile de déterminer quels peuvent être les risques en dépit des plus évidents, bien sûr.
« Donc on regardera des films sur la fin du monde jusqu’à ce que ça soit la fin du monde », remarque-t-elle alors, d’un ton un peu trop défaitiste – mais il est difficile de rester optimiste dans cet endroit et dans ces conditions. « C’est un peu triste », remarque-t-elle ensuite simplement.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
La brune arqua un sourcil, perdue quant aux explications données par Pearl sur ses recherches. Pourquoi vouloir faire des recherches sur cette île ? Pourquoi vouloir la situer, comme s'il y avait quelque chose d'anormal avec leur habitat... Ce qui, si elle y réfléchissait bien, n'était peut-être pas si improbable. Un sentiment vertigineux la saisit soudainement. Elle baissa la tête et ferma les yeux pendant que, dans son esprit, des souvenirs de deux vies différentes se mêlaient et s'ajoutaient à ce sentiment de confusion qu'elle éprouvait subitement. Elle avait toujours vécu ici, elle le savait. Alors pourquoi, si elle s'attardait sur les propos de Pearl, ceux-ci ne lui semblaient finalement pas si dénués de sens ?
Tout à ses contradictions silencieuses qu'elle était, elle perdit un instant le fil de la discussion et ne parvint à se reconcentrer sur son interlocutrice que lorsque celle-ci commenta l'effet des films apocalyptiques. Andréa esquissa un sourire désolé et releva la tête tout en rouvrant les paupières pour regarder la jeune femme dans les yeux.
- C'est vrai, c'est triste. Mais ces films éveillent peut-être certaines consciences aussi. Progressivement. C'est également à ça que servent ces films là, comme les dystopies, aussi. A informer sur un futur probable. A encourager la masse à trouver des solutions.
Elles avaient beau parler de cinéma, les réflexions de Pearl sur cette île continuaient de l'intriguer et de la faire réfléchir. Elle se tut, encore une fois bouleversée par les effets de cette amnésie qu'elle ignorait, car trop partielle. Il y avait sans doute une grande part de déni, dans cela. Un déni qui commençait à être sérieusement endommagé par cette conversation.
Contrariée par ses propres pensées, qu'elle pensait être ridicules et certainement l'effet de bien trop de films visionnés ces dernières années, elle décida que le plus simple était de continuer à interroger son interlocutrice.
- Excusez-moi, je ne veux pas être insistante ou vous mettre mal à l'aise mais... Je ne comprends pas. Et je crois que j'ai besoin de réponses. Qu'est-ce qui n'irait pas, avec cet endroit ?
Invité
Lun 22 Nov - 19:06
Journée sur un décor de film.
Il semble à Pearl que quelque chose a changé chez Andréa. Elle ne saurait dire quoi exactement, ni d’où cela lui vient, mais elle le ressent, elle le lit sur son visage et dans son attitude : comme si elle était perdue, désorientée. Ce comportement l’inquiète un peu. A-t-elle dit quelque chose qu’elle n’aurait pas dû ? Possible. Certains n’aiment pas être placés face à leur situation et préfèrent l’occulter pour ne pas devenir dingue. Quand ne pas comprendre est insupportable à d’autres, chercher des réponses est une vraie source d’angoisse pour certains. C’est compréhensible. Cet endroit met à l’épreuve votre perception des choses, vos conceptions préétablies de toutes vos connaissances… il y a largement de quoi se sentir angoissé avec tout ça.
Finalement, quand Andréa reprend la parole, après avoir esquissé un sourire que Pearl trouve un peu rassurant, même si désolé, l’ancienne gemme se sent un peu soulagée. Elle avait craint de créer un malaise, sans savoir ce qui aurait exactement provoqué ce même malaise. Elle l’écoute alors défendre les films catastrophes pour les consciences qu’ils éveillent peut-être. Pearl en doute fortement. Si vraiment l’humanité en avait quoi que ce soit à faire, elle ne courrait pas à sa perte comme c’est le cas depuis une éternité à présent. Malgré tout, elle ne veut pas se montrer trop défaitiste. Elle ne sait même pas si la situation du monde dans lequel elles évoluent est vraiment aussi catastrophiquement chaotique que celle de la Terre qu’elle a quitté. Cette ville, par plus d’un aspect, lui fait penser à Beach City, et par d’autres à Empire City, mais elle ne peut, à ce stade, ignorer combien ses codes sont différents. Alors, plutôt que de débattre sur un sujet qu’elle maîtrise de toute façon trop mal, elle préfère adresser à son interlocutrice une réponse assez évasive. « Vous avez sans doute raison. »
Et dans sa tête, ça s’agite déjà, en quête d’un nouveau sujet de conversation pour remplacer le précédent. Elle ne veut pas laisser de vide, de blanc, elle a peur que si c’est le cas, son interlocutrice la trouve inintéressante, et en même temps, elle ne va pas non plus parler pour ne rien dire… chose si vite arrivée quand il est question d’elle. Mais elle n’a pas à se creuser la tête bien longtemps, car Andréa lui pose une question qui la prend alors au dépourvu, mais confirme ce trouble initial qu’elle avait ressenti. Elle ne comprend pas. Et Pearl ne comprend pas. Comment peut-on se trouver ici sans se demander ce que l’on fait ici ? « Qu’est-ce qui n’irait pas… ? Vous… Vous n’êtes pas née ici, n’est-ce pas ? Vous aussi vous êtes arrivée ici sans savoir comment, pas vrai ? »
Est-ce qu’elle aurait affaire à une native ? Est-ce que ce serait vraiment possible ? Elle se sent décontenancée, prise au dépourvu. Elle ne s’attendait vraiment pas à une chose pareille.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Le défaitisme de son interlocutrice eut le temps de toucher Andréa, avant que cette dernière ne se donne la peine d’exprimer ses doutes. La pauvre Pearl avait eu le malheur de prononcer les quelques mots qui alimentaient les soupçons déjà présents, mais refoulés, d’Andréa. Et, même si cette dernière avait conscience que c’était un peu… Extrême que de perdre toute retenue face à une personne qu’elle venait tout juste de rencontrer, aussi charmante soit-elle, elle n’avait pas suffisamment de tact et de patience pour s’abstenir.
Elle devint blême, manquant de faire tomber sa tasse de thé, qu’elle laissa tomber sur sa coupelle dans un bruit qui attira vers elles les regards alentour. Quelques gouttes de thé s’échouèrent sur le bois de la table et sur sa main, mais elle n’en avait cure. Elle fixait Pearl avec une attention qui en devenait presque démente, tant son regard était chargé d’intensité, de désespoir et de blessures que son coeur avait conservé sans que son esprit ne sache en déterminer la source exacte.
Les souvenirs de deux vies se mêlaient pour s’imposer à sa conscience, et elle crut sincèrement qu’elle devenait folle.
Ayant tout juste la retenue de rester à peu près calme – à savoir, de ne pas succomber immédiatement à l’hystérie dont elle était capable -, elle balbutia :
- Je… J’en sais rien.
Elle se passa la main dans les cheveux, commençant à perdre contenance.
C’était un constat difficile. Yeux écarquillés, elle continua de dévisager Pearl, comme si celle-ci pouvait lui donner la réponse à toutes les questions qui se bousculaient dans son esprit.
- J’ai… L’impression d’avoir toujours connu cet endroit, et ma vie actuelle. Mais… Parfois, j’ai des souvenirs que je ne comprends pas, expliqua-t-elle d’une voix blanche, plus bouleversée qu’elle ne voulait bien l’admettre, mais plus calme à mesure qu’elle s’exprimait.
Elle souffla. Elle n’était pas prête, absolument pas prête à se confronter à la réalité des choses. Malgré tout, elle continua de se servir de Pearl comme point de repère parmi toute cette confusion et s’adressa à elle d’une voix suppliante :
- Si... Ce que vous dites est vrai... Racontez-moi. Pour vous, racontez-moi comment ça s’est passé. S’il vous plaît, avant que je fasse une syncope.
Invité
Jeu 25 Nov - 18:17
Journée sur un décor de film.
A voir la réaction d’Andréa, Pearl s’en veut immédiatement d’avoir ainsi mis les pieds dans le plat sans même s’en rendre compte. A force de discuter de cette situation avec quiconque voulait bien l’entendre et de toujours recueillir l’incompréhension et la frustration de celles et ceux qui se retrouvaient ici loin de leurs proches et sans croire encore qu’il leur serait possible de rentrer chez eux, elle n’avait pas envisagé que d’autres puissent ne pas avoir la même vision de la situation. Elle vient peut-être de briser quelque chose chez cette femme… et l’avoir fait avec si peu de considération lui serre terriblement le cœur. Certes, si elle n’était pas au courant, allez savoir comment, c’est finalement une bonne chose qu’elle l’apprenne, mais peut-être pas dans des circonstances aussi… complexes et chaotiques.
Pearl est presque tentée de faire une réflexion sur le langage franchement grossier de son interlocutrice (un vieux reste de l’éducation qu’elle a cherché à inculquer à Steven), mais elle se retient. Andréa est une grande fille, elle dit ce qu’elle veut, et par ailleurs, Andréa, dans l’état où elle est, si vraiment elle est en train de réaliser cette situation, a bien mérité de prononcer un ou deux jurons en cet instant… Pearl ferait sans doute pareil… encore que ce qu’on pourrait l’entendre dire de plus grossier serait certainement le mot « mince », pas davantage.
Bref, elle comprend qu’en effet, Andréa ne savait rien. Quelle sensation étrange ça doit être que d’avoir le sentiment d’avoir toujours vécu ici… et en même temps, si elle accepte de croire Pearl si facilement, c’est que bien souvent, elle doit réaliser que certaines choses ne collent pas. Certains ont souffert d’amnésie à leur arrivée ici, c’est une chose que Pearl a déjà entendue, mais elle ne s’attendait pas à ça pour autant. Pearl hésite, elle comprend qu’elle doit lui parler, mais comment lui expliquer l’inexplicable ? Comment faire en sorte que la pauvre Andréa ne cède pas d’office à la panique. Pearl cherche ses mots… parler de sa propre histoire pour la faire comprendre lui semble être le plus approprié, mais dans le même temps, elle sait bien que si elle doit tout lui dire, lui apprendre qu’elle est issue d’une autre planète, ou encore qu’elle est une gemme, elle va vraiment perdre la pauvre Andréa pour de bon. « Avant, je vivais sur une ville qu’on appelle Beach City, assez différente d’ici, j’avais… mes amis, ma famille... »
Sa gorge se serre un peu.
« Une nuit, le ciel est devenu écarlate, la Lune était tellement rouge… J’ai fermé les yeux, et en les ouvrant, j’étais ici. Sans mes proches, seule… »
Et sans ses pouvoirs, dans un corps d’humaine auquel elle a bien du mal à s’adapter, mais elle ne pense pas qu’Andréa soit capable d’intégrer cette information-là pour le moment.
« C’est arrivé il y a presque trois ans… Toutes les personnes que j’ai rencontrées depuis ont vécu la même chose, elles viennent d’endroits très différents mais… tout le monde a été transporté ici sans raison apparente… Et aucun de ceux qui ont cherché à quitter l’île n’y sont parvenus. »
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Andréa écoutait attentivement Pearl lui donner les détails de... Son ancienne vie, visiblement. Une part d'elle était fascinée par ce qu'elle entendait, et par les implications que ce récit avait sur ce qu'elle pensait connaître de sa réalité. La part d'elle qui était visible, elle, était ouvertement en état de panique difficilement contenue. Ce qui, chez Andréa, se trahissait par une mâchoire crispée, un regard presque noir et une main qui soutenait sa tête, ses doigts crispés dans ses cheveux. Tout au long des explications de Pearl, elle fixa cette dernière.
A la fin de son discours, l'agente resta silencieuse. Songeuse, elle continuait de fixer le beau visage de son interlocutrice, recherchant dans ces traits bienveillants un quelconque signe de mensonge ou de duperie. Elle n'en trouva pas, ce qui ne la réconforta pas, bien au contraire. Si Pearl était sincère, alors il lui fallait accepter d'ôter son voile de déni et de s'interroger sur tous ces détails qui lui paraissaient être curieux, au quotidien. Le fait qu'elle ne se souvienne pas de ses parents, ni d'une quelconque enfance passée sur cette île, par exemple. Le fait, tout simplement, qu'elle ne se souvienne pas de grand-chose avant ces deux dernières années... Elle avait la certitude d'avoir fait des études, d'avoir eu une vie sociale, d'avoir enchaîné les conquêtes et les tournages, mais... Aucun souvenir précis.
- Donc si je vous suis bien, tout le monde ici est arrivé en même temps ? Et viendrait de... D'ailleurs ?
A bien y réfléchir, ce ne serait pas si étonnant. Cela expliquerait le comportement étrange de certaines des personnes qu'elle avait pu croiser jusqu'ici. Cela expliquerait cette frustration qu'elle ressentait chaque fois qu'elle recherchait un film qu'elle savait aimer mais qu'elle ne trouvait nulle part. Ce serait donc un souvenir issu de son ancienne vie ? Beaucoup d'éléments restés jusque-là mystérieux faisaient soudainement sens.
Elle était suffisamment attentive aux détails, y compris dans son état actuel de détresse émotionnelle, pour remarquer que l'évocation de la famille et des amis de Pearl avait attristé son interlocutrice. Dans un geste compatissant, elle posa sa main sur la sienne et la serra délicatement, brièvement.
- Je suis vraiment désolée pour vos proches. Ca doit être l'enfer que de se savoir coincée ici.
Elle avait eu cette "chance" relative que d'être épargnée par la souffrance d'avoir été séparée de ses êtres chers. Malheureusement, c'était une souffrance qui s'apprêtait à la heurter de plein fouet.
Car l'évocation d'une famille lui fit soudainement songer à ces rêves récurrents qu'elle avait. Des rêves impliquant une femme blonde, sublime, et un bébé. Leurs visages s'imposèrent à son esprit et elle en fut si brusquement saisie qu'elle faillit en faire vaciller sa tasse.
Blême, sourcils froncés, elle fixa le bois de la table comme si elle voulait incendier celui-ci avant de reprendre, d'une voix tremblante :
- Je crois que j'ai une fille. Et une femme. Quelque part...
Anéantie par cette prise de conscience, elle se prit la tête dans les mains, vaguement consciente que ce devait être pour la pauvre Pearl un rendez-vous bien désastreux.
Ne voulant pas prendre le risque de "péter un câble" immédiatement, pas en public, pas devant Pearl, Andréa soupira longuement et releva le regard vers celle qui lui faisait face. Par instinct de préservation, elle étouffa ses émotions les plus douloureuses et les remplaça impulsivement par un réflexe de drague.
- Je suis désolée. Ca craint, moi qui voulais vous séduire, vous vous retrouvez à devoir me supporter. Vous avez le droit de fuir, je ne vous en voudrai pas.
Invité
Dim 28 Nov - 20:56
Journée sur un décor de film.
Pearl hoche la tête quand Andréa fait de la situation un résumé succinct mais effectivement approprié. La perle n’aimait pas devoir apprendre ce genre de choses à la pauvre agente, elle ne se souvenait que trop bien de ce qu’avait été sa propre réaction au moment de comprendre ce qui lui arrivait. Et encore, peut-on vraiment affirmer qu’elle a un jour compris ce qui lui arrivait ? Pas vraiment, non. Elle s’emploie, quotidiennement, à faire la lumière sur cette situation, mais le fait est qu’elle est loin de tout comprendre même si elle a au moins dépassé le stade de se sentir totalement démunie comme elle sent que c’est le cas pour son interlocutrice. Au moins, elle accepte de croire dans son discours sans le remettre en question d’entrée de jeu et veut bien entendre que oui, ils viennent d’ailleurs, et oui, cela fait trois ans.
Elle ne dit rien quand Andréa s’excuse concernant ses proches. Oui, elle a raison, et Pearl ne le décrirait pas autrement, c’est effectivement un véritable enfer que d’être ainsi isolé de tous ses proches, de toutes les personnes que l’on aime, mais elle ne pense pas que sa situation soit davantage à déplorer que celle de son interlocutrice, néanmoins. Elle a eu le temps d’encaisser le choc, et même si elle n’a toujours pas cessé de vouloir comprendre cet endroit, rentrer chez elle ou au moins retrouver Steven, elle a tout de même réussi à vivre un semblant de vie ici… Même si ça ne ressemble qu’à un vague sursaut d’existence la plupart du temps.
Andréa est si blême, tout de suite, elle a tout perdu de ses allures confiantes ou de son sourire séducteur, et Pearl se sent terriblement mal pour elle. Plus mal encore quand elle lui confie qu’elle pense avoir une femme. Et une fille.
« Oh… »
Le léger pincement au cœur qu’elle ressent à l’idée que le cœur de cette femme ne soit pas disponible (comme si le sien à elle l’était vraiment alors qu’il battait – métaphoriquement – pour le même diamant depuis pour ainsi dire toujours) s’efface bien sûr au profit d’un sentiment de totale compassion. Non seulement, elle a perdu ses proches, mais elle n’en garde un souvenir que très flou, trop flou peut-être pour réussir à les retrouver. « Oh non ne vous en faites pas, c’est… » Et voilà que Pearl est de nouveau rouge comme un rubis alors qu’Andréa parle d’avoir voulu la séduire avant d’aboutir à ce fiasco. « C’est moi qui suis désolée… Je n’aurais pas dû vous l’apprendre de cette manière… » Elle baisse les yeux. « Peut-être que je peux vous aider à les retrouver ? Votre femme et votre enfant ? » suggère-t-elle avec un très fin sourire. « De quoi est-ce que vous arrivez à vous souvenir ? »
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Malgré sa détresse émotionnelle indéniable, Andréa prit grand soin de noter le rougissement de Pearl. Elle ne perdait pas le nord, y compris dans des situations telles que celle-ci. Car si elle avait désormais conscience que ses rêveries quotidiennes et ce sentiment de manque n'étaient pas si imaginaires que cela, ses souvenirs restaient trop vagues pour qu'elle se rende réellement compte de la souffrance qu'elle devrait ressentir à être séparée de Colette et de Flora.
A présent que le filtre qui l'empêchait de se rendre compte de l'horreur de situation était fissuré, Andréa prenait peu à peu conscience de tout ce qui n'allait pas dans cette existence qu'elle pensait avoir toujours connue. Des collègues à qui elle ne parlait presque jamais, des films qu'elle ne retrouvait pas, des habitudes qu'elle avait perdues... Et, bien sûr, sa vie de famille.
La proposition de Pearl pour l'aider était si dénuée d'égoïsme qu'elle coupa un instant le souffle à Andréa. Son interlocutrice était définitivement trop bienveillante pour son propre bien. Une ébauche de sourire triste rompit l'expression de choc d'Andréa.
- Ce n'est pas de votre faute. Je devrais plutôt vous remercier. Je me voilais complètement la face.
Alors qu'un serveur passait auprès de leur table, Andréa l'aborda :
- S'il vous plaît ! Il me faudrait un shooter. Ou plutôt... Un mètre de shooters. Ouais, un mètre c'est bien. Les goûts que vous voulez.
Une décision impulsive, certes, mais une manière d'encaisser le choc comme une autre. Elle ne pouvait pas fumer, mais elle pouvait boire. Et l'heure n'était plus à faire bonne impression à sa charmante interlocutrice, par ailleurs.
A la question de Pearl, elle prit le temps de la réflexion. De quoi se souvenait-elle ? De trop peu de choses, en vérité. Si elle se concentrait sur ses rêves récurrents, il lui semblait voir le visage de Colette, et la bouille de Flora. Mais c'étaient des réminiscences, trop légères pour qu'elle en tire quoi que ce soit de concret à part un sentiment certain de nostalgie.
Quand son mètre de shooters arriva, elle ne perdit pas de temps et en prit immédiatement un. La force de l'alcool lui donna un coup de fouet nécessaire à ce qu'elle se ressaisisse. Mais pour être certaine de tenir le coup, elle enchaîna aussitôt avec un deuxième qu'elle avala d'une gorgée.
- Ah, ça va mieux. Vous en voulez ? Servez-vous.
Le goût de la vodka lui restait en bouche, et lui permettait de se concentrer sur ses sensations physiques pour mieux refouler sa vulnérabilité.
- Je me souviens de leur nom. Flora, ma fille, et Colette. Colette a des cheveux blonds, une peau diaphane, presque transparente...
Elle fronça les sourcils. Elle avait déjà prononcé ces paroles, sur ce même ton de nostalgie. Et, associée à ces mots, elle se souvenait d'une profonde tristesse. A bien y réfléchir, le sentiment qu'elle avait en évoquant le souvenir de Colette était doux-amer. Comme si leurs derniers instants n'avaient pas été si joyeux qu'ils auraient dû l'être.
- Je crois... Je crois que nous sommes séparées, elle et moi, supposa-t-elle donc à voix haute.
Elle croisa le regard de Pearl, le sien s'adoucissant considérablement. La pauvre continuait de supporter ses états d'âme avec une bonté qui ne laissait pas Andréa indifférente.
- Ce qui ne m'étonne pas. Je ne suis pas facile à vivre, souffla-t-elle comme un avertissement.
Invité
Mar 30 Nov - 20:22
Journée sur un décor de film.
Non, en effet, ce n’est pas de la faute de Pearl, mais ça ne l’empêche pas de culpabiliser complètement. Elle sait qu’elle aurait très certainement pu s’y prendre différemment, et elle regrette plus que sincèrement de l’avoir mise dans un tel état sans l’avoir, au moins au préalable, préparée mentalement à ce qui l’attendait. Enfin, c’est trop tard pour ça, à présent, et le mieux que peut faire Pearl, c’est encore de s’assurer qu’Andréa encaisse le coup, ce qui ne va évidemment pas être simple pour elle… Quand elle décide de commander un mètre de shooters, Pearl l’observe avec des yeux ronds. Elle a vraiment l’intention de boire tout ça ? Elle aurait envie de faire une remarque, mais elle s’abstient, qui est-elle pour lui interdire de boire son étendue infinie de verres (elle exagère à peine) si c’est ce qui peut l’aider à encaisser le choc, après tout. « Non merci… on n’est pas très amis, l’alcool et moi », répond Pearl avec un léger sourire embarrassé.
Pour ne pas se donner l’air trop coincé, elle aurait presque envie de donner un coup de pied à ses habitudes et de céder malgré tout à l’invitation d’Andréa, mais elle se connaît. Toute perle qu’elle est, elle ne buvait même pas d’eau, dans son ancienne vie, elle a encore du mal à savoir boire et s’alimenter correctement, alors l’alcool n’en parlons pas. Sa seule expérience avec l’alcool ici a été proprement désastreuse, et elle n’est pas prête d’oublier l’état dans lequel elle s’est retrouvé le lendemain. Alors oui, même pour impressionner la belle agente, elle ne se couvrira pas de ridicule. De toute façon, elles ne peuvent plus être dans l’optique de se séduire. Andréa a une femme, et une fille. C’est ça qui compte, qu’elles réussissent à les retrouver. « C’est un très joli nom, Flora », répond-elle doucement avec un fin sourire qui s’efface un peu quand elle évoque la femme qui a partagé sa vie. C’est si évident, quand elle en parle, et même si ses souvenirs sont flous, qu’elle a compté pour elle.
« Que vous soyez séparées ou non, je pense que c’est important pour vous de la revoir, non ? Et puis… Flora est sans doute avec elle. »
Ou bien ni Flora, ni Colette ne sont là, et c’est une éventualité qu’il faut accepter aussi, même si ce n’est pas chose simple. Ceci dit, ce n’est pas le genre de mentalité auxquelles Pearl veut se plier. Parce qu’accepter cela, c’est aussi accepter qu’il en est de même pour Steven, et ça, c’est difficile à encaisser. « Vous cherchez votre fille… Moi c’est mon fils que je cherche. On pourrait peut-être s’entraider ? »
C’est un raccourci bien rapide, évidemment, que de parler de Steven comme s’il était son fils, ceci dit, c’est ainsi qu’elle le considère, et il sera toujours plus simple de l’exprimer ainsi que de rentrer dans des détails que, clairement, Andréa n’est pas prête à entendre pour le moment, ça ne fait aucun doute.
"Quand je suis passée des mecs aux filles, j'ai eu l'impression de passer du bac à sable à un terrain de foot."
Elle hocha la tête avec agitation après que Pearl ait décliné son offre au sujet des shooters d'alcool. Elle n'était pas véritablement étonnée.
- Je vois. Tant pis, je suppose que je vais devoir boire tout ça. Ca me portera peut-être jusqu'à chez moi sans trop de dommages, qui sait.
Enfin, "chez elle"... C'était une affirmation qui n'avait plus de sens, désormais. En toute honnêteté, elle était partagée. Sa vie, dans cette ville, n'était pas désagréable. Bien au contraire. Elle enchaînait contrats et conquêtes. Il lui manquait, certes, des amis. Ses collègues étaient d'une platitude affligeante. Et, malgré ses mauvaises habitudes, le manque de sentiments amoureux se faisait quelques fois ressentir. Ceci étant, elle avait été certaine de sérieusement en pincer pour celle qui lui faisait face avant que celle-ci ne lui fasse prendre conscience de ce qu'elle avait oublié.
Entre choc et confusion, donc, Andréa avait bien de la peine à se concentrer. Et, surtout, à réfléchir posément.
Le compliment de Pearl au sujet du prénom de sa fille la fit sourire, d'un sourire machinal qu'elle n'avait plus eu depuis... Près de trois ans.
- Peut-être... Ou peut-être que Colette a refait sa vie, et qu'elle s'occupe mieux de Flora que je ne pourrais le faire. Et même si je les retrouve... Si elles ne se souviennent pas de moi, comment on fait ? Je peux pas chambouler leur vie comme ça.
Elle énonçait des éventualités qui, bien sûr, étaient peu probables. Tout simplement car la possibilité qu'elle les retrouve réellement un jour était très faible. Mais, portée par l'alcool et par son agitation naturelle, elle ne parvenait pas à s'empêcher de penser à voix haute.
Et elle aurait pu continuer longtemps, si la dernière phrase de Pearl ne l'avait pas prise de court. Elle lui adressa un regard surpris, avant de la dévisager. Elle ne l'aurait pas imaginée avec un enfant, mais à bien y réfléchir, ce n'était pas si aberrant. Son caractère lui semblait être idéal pour élever un enfant avec amour.
- On s'est bien trouvées, alors, remarqua-t-elle sans pouvoir contenir ses mots qui pouvaient passer pour indélicats. Donc, vous avez un fils. On pourrait s'entraider, oui. Quel âge a-t-il ? Et il s'appelle comment ?
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