Un peu nerveux, Kyo attend le retour de ses parents adoptif, assis sur le canapé du salon. Il s’apprête à leur annoncer après tout une grande nouvelle, à savoir qu’il va déménager et aller vivre dans son propre appartement. C’est une décision qu’il a prise voilà maintenant plusieurs mois. Il ressent en effet le besoin de quitter le nid et de voler de ses propres ailes désormais. Oh bien sûr, il est un peu triste également parce qu’il a la chance de bien s’entendre avec ses parents, mais il estime que c’est plus approprié pour lui, notamment parce que l’appartement qu’il a trouvé est beaucoup plus près de son travail. C’est donc plus facile pour lui. Quitter ses parents, c’est plus difficile cependant qu’il n’aurait pensé. Kyo se plaît vraiment bien chez eux. Il leur sera toujours reconnaissant de l’avoir adopté lorsqu’il avait eu besoin d’un toit à son arrivée dans ce monde, d’autant plus que sa mémoire lui fait défaut. Il lui est ainsi impossible de se souvenir de sa vie passée. Tout ce qui lui reste, c’est son tempérament de feu. Il a en effet tendance à perdre rapidement patience et à s’énerver pour pas grand-chose. Parfois, il a des petits flashs également qui lui reviennent en tête, mais il est incapable pour autant de discerner correctement des personnes ni des faits concrets. Et c’est assez frustrant honnêtement.

Heureusement, l’ambiance chez Missy et Twelve a toujours été chaleureuse et animée. Une ambiance où il s’est senti à l’aise. De plus, ses parents l’ont beaucoup aidé à s’intégrer, notamment pour la langue. D’origine japonaise, il avait dû en effet prendre des cours d’anglais plusieurs fois par semaine. Les faibles connaissances qu’il possédait n’avaient pas été suffisantes pour lui permettre de se débrouiller suffisamment. Désormais, cela remonte à cinq ans et à présent, il est à l’aise avec la langue. Mais comme il est soucieux de faire correctement les choses, il continue de fréquenter son école d’anglais une fois par semaine.
Lorsqu’il entend la porte d’entrée s’ouvrir, le jeune homme se lève avec son verre de lait à la main afin d’accueillir ses parents. Comment est-on censé annoncé son déménagement prochain à ses parents au juste ? En l’annonçant directement telle une tornade ? Ou en commençant par détendre l’atmosphère avec une blague, par exemple ? Bon, il est franchement nul pour faire des blagues, alors autant ne pas tourner autour du pot longtemps.

- Bonjour. Vous allez bien ? Je suis content que vous soyez là. J’ai quelque chose à vous annoncer. dit-il toujours un peu nerveux. Posant son regard sur son père puis sa mère, il leur adresse un petit sourire timide. Même s’il n’a pas grandi avec eux, cela lui fait tout drôle quand même parce que depuis quatre ans maintenant, il considère cet endroit comme sa maison, son foyer et le quitter est difficile. Mais, c’est aussi l’occasion pour ses parents de se retrouver ainsi et puis, ce n’est pas comme s’il partait en ayant l’intention de ne jamais leur rendre visite.

- Heu… je comme je ne suis pas doué pour ça, je ne vais pas tourner autour du pot. J’ai… j’ai décidé de déménager. annonce-t-il en se passant une main, gêné, derrière la nuque. Bien sûr, il avait attendu qu’ils aient enlevé leurs vestes et qu’ils se soient salués correctement.

Kyo ne doute pas de sa décision et quoi qu’il arrive, il ne reviendra pas dessus. Toutefois, il ne nie pas qu’il soit un peu triste. Il aime profondément Missy et Twelve. Ce sont des parents formidables qui ont pris soin de lui et qui ont été à l’écoute. Et puis, on peut être certain de ne jamais s’ennuyer en leur compagnie. La maison a toujours été animée grâce à eux et son tempérament ne manque pas de s’ajouter assez naturellement à le leur. Tous les trois, ils se complètent assez bien. Aussi les quitter l’attriste, c’est vrai. Cependant, Kyo sait que cette décision est la meilleure pour lui. Il ne veut pas être un poids pour eux et il est aussi normal qu’ils souhaitent retrouver leur vie à deux. Mais tous les trois, ils ont noué ce lien fort que rien ne pourra entacher. Il le sait. Il peut revenir ici quand il le souhaitera. Voler de ses propres ailes et avoir son propre toit ne signifie pas la fin d’une relation, bien au contraire. Ce n’est que le commencement. Et le jeune homme se réjouit sincèrement de ce futur. Il a trouvé un travail qui lui plaît, son anglais est devenu bon et sa vie dans ce monde est agréable. Que pourrait-il demander de mieux, honnêtement ?

Kyo ne peut s’empêcher de rire un peu en entendant la conversation de ses parents. De l’extérieur, on pourrait croire qu’ils se disputent vraiment. Mais en réalité, c’est leur façon de s’aimer. Et dans un sens, ça ne manque pas de dynamisme. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils n’ont jamais le temps de s’ennuyer. Ces conversations animées vont d’ailleurs lui manquer un peu. Chaque moment passé dans cette maison à leurs côtés est gravé dans son cœur et jamais il n’oubliera ces cinq belles années. C’est certain.
Quel est le sujet cette fois-ci ? Kyo n’a pas entendu le début de la conversation, mais il mettrait sa main à couper que cela concerne le jardin d’hiver, car cela fait un moment que les deux en parlent et se chamaillent à ce sujet. Et comme la plupart du temps, Kyo ne penche pas forcément pour un côté plus que l’autre. Il rit de bon cœur, mais généralement son avis demeure neutre. Et comme le jardinage n’est pas son truc, il ne prendra pas davantage position cette fois encore.

- Vous n’êtes jamais fatigués de vous chamailler ? ne peut-il s’empêcher de demander tandis que son sourire disparaît progressivement pour retrouver un air sérieux lorsqu’il voit le geste surjoué de sa mère. Typiquement elle ça. Il roule des yeux, néanmoins amusé. Oui, je pense avoir trouvé un appartement convenable à cinq minutes du centre sportif. J’ai même un petit balcon, tu pourras venir installer quelques plantes si tu veux.

Kyo se tourne ensuite vers son père lorsque celui-ci lui demande s’il est certain. Honnêtement, il a passé des semaines avant de prendre une décision, car il se sent vraiment bien ici. C’est juste qu’il pressent que c’est le moment pour lui de prendre son envol, tout simplement.

- Bien sûr que si. Et cela me rend triste de vous quitter, mais comment dire ? Je sens que c’est le moment. En plus, c’est vraiment pratique pour moi. Et puis, vous aurez ainsi tout le loisir pour vous disputer. Mais ne t’inquiète pas trop papa, je viendrai vous voir chaque semaine. Vous ne vous débarrasserez pas de moi ainsi. De toute façon, je reçois les clés à la fin du mois prochain seulement.