Rien. Absolument, rien ne le prédestinait à se retrouver en cet endroit, à cet instant précis. Pas dans cet état, pas face à ce visage. Pas face à.. lui-même ?
DÉBUT DE SOIRÉE 18 h 10:08
Démarche assurée, c'est au travers des ruelles de Lockwood Hill qu'avançait Connor, les mains dans les poches de son jeans. Dédales complexes, inconnus. Arrêt qu'il marque, l'ex androïde pince les lèvres, observe les alentours. Petite panique quant au lieu du rendez-vous. Par prudence et besoin de se rassurer, menotte timide sort de cachette pour venir saisir son téléphone portable, adresse qu'il analyse.
- Le numéro 32, c'est ce qu'elle à dit..
Faciès se relève, avise les plaques dorées, usées, des façades éparses. Nez plissé, Connor ne comprends pas, cela n'a aucun sens.
- C'est bien ça pourtant.
Hésitation balayée, ses pouces pianotes rapidement sur l'écran illuminé de son téléphone afin de demander plus de détails quant au lieu du rendez-vous.
Il avait été contacté plus tôt dans l'après-midi par une jeune femme et ce afin de converser avec elle quant à un éventuel achat de chiot. Celle-ci avait prétexté ne pouvoir ce déplacer et bien entendu, l'ex Rk ayant le coeur sur la main, s'était proposé de la rejoindre quelque part.
Crédule, naïf même. Quelqu'un d'autre aurait sûrement compris, s'en serait douté, aurait su que c'était éventuellement un canulard. Mais pas Connor. Bien que cela faisait à présent trois mois qu'il était humain, beaucoup de choses lui échappait encore. L'humour au second degrés par exemple ou en l'occurrence, le fait de s'être fait avoir.
Il n'y aurait pas de conversation, pas de vente. Rien, il n'y aurait rien. C'est peut-être avec lenteur qu'il l'eut compris et c'est non sans une pointe d'amertume qu'il s'était décidé à tourner les talons, prêt à rejoindre l'arrêt de bus le plus proche et par la suite, son domicile.
Sac à l'épaule, Connor remonte la rue sans un mot, l'esprit perdu dans un tourbillon de pensées. Il ne comprenait pas pourquoi les humains agissaient ainsi, en quoi cela pouvait être amusant. S'il possédait encore une diode à sa tempe, celle-ci serait sûrement jaune à l'heure qu'il est. Mouvement rapide attire son attention à gauche, silhouette le bousculant sans gêne pour détaller à toute vitesse. Réajustant son sac et veston, le brun reprend sa marche, flot de pensée coupé, en suspend. Il ne devrait pas se fatiguer à réfléchir pour s'y peut.
Rue principale remontée, il se glisse dans une ruelle annexe ; raccourcis découvert pour rejoindre la station de bus. Éclat de voix dans son dos, il eut tout juste le temps de se retourner que deux personnes passent, le bousculent. La dernière se fige, le toise d'un air choqué dans un premier temps, bien vite la hargne gagnant ses traits.
“ Enfoiré, tu peux te téléporter c'est ça ?! J'vais te buter, tu feras plus chier personne ! ” - Quoi..?
C'est là tout ce qu'il eut le temps de répondre avant qu'une arme ne soit pointée en sa direction. Connor se fige, que voulait ce type ? Non, qu'avait-il voulu dire par " tu peux te téléporter ? ". Ils ne s'étaient jamais vu, alors pourquoi ?
L'ancien négociateur et traqueur de déviant conserve son calme, d'apparence seulement, l'adrénaline cours sous sa peau, agite son coeur qui a accéléré. Écartant en douceur les mains de son propre corps, il présente ainsi ses paumes dénuées d'armes vers l'autre.
- J'ignore de quoi vous parlez.. Mais je ne suis pas armé, alors ne tirez pas.
Ça voix reste stable, tout comme son attitude. Situation lui rappelant une qu'il eut connu là-bas, à Detroit. Pourtant, Connor devait prendre plusieurs facteurs en compte. Il n'était plus un androïde. Il ne possédait plus ses programmes de pré construction et autres logiciels de calculs. Le moindre faux pas pourraient lui coûter cher, très cher.
Il s'ose à avancer d'un pas et ce malgré le fait qu'il eut compris que l'autre homme était tendu, nerveux. Lèvres s'entrouvrent, prêtes à laisser un nouveau flot de parole s'échapper, mais rien. Juste une douleur sourde et mordante au niveau de son épaule droite. L'autre homme avait tiré.
“ Je vais te crever enfoiré ! ”
Connor était tombé de sa hauteur sous le coup de feu, son fessier retrouvant lourdement le sol humide et froid. C'est par réflexe qu'il vient à porter une main à son épaule afin d'arrêter le flux chaud et carmin qui s'en échappait. L'assurance dont il faisait preuve eut vite fait de voler en éclat. Allait-il y passer ? La voix de l'autre homme semble un bref instant colérique, horrifié avant de se taire. Regard écarquillé et presque craintif, le brun releva les yeux, avisant la silhouette qui se tenait face à lui.
Son coeur manqua un battement, la stupeur et incompréhension parcourant ses traits. Il se tenait devant lui, son reflet. Un autre Rk 800 ? Un autre Connor ? Le détail des yeux bleus et la différence de stature le marqua tout de même, mais passa à la trappe sous l'amas de questions qui grouillait dans son cortex cérébral.
Poussé par le besoin de se préservé, Connor eut vite fait de se relever, ignorant la blessure par balle de son épaule, tout comme le sang qui réchauffait son bras, imbibait les diverses couches de tissus. Allait-il devoir se battre contre lui-même ? Comme ce jour-là, à la Tour de CyberLife.
- Amanda t'envoie me tuer, c'est ça ?
(c) Otsana
Dernière édition par Connor Anderson le Mer 5 Juin - 13:18, édité 1 fois
Nouvelle enquête, du moins, nouvelle poursuite de terrain. Des petites frappes avaient été vues en train de dealer, tant pis pour eux, la justice devait leur faire payer. D’autant que d’après ce que Nines avait pu observer rapidement sur sa tablette connectée à la police, ce n’était par leur premier coup. Ils se pensaient malin, mais c’était sous estimer quelqu’un comme lui. Que croyaient-ils ? Que parce qu’ils ne venaient pas d’ici, personne ne les attraperait ? Personne ne venait d’ici après tout. De cette ville étrange. Oh ça non. A la place, on se retrouvait avec tout un tas de personnes différentes. Dont Nines. Qui non content d’avoir été construit pour poursuivre des “criminels”, l’avait été de façon à ce qu’il mesure deux mètres et soit une montagne de muscles. Et quand on savait que récemment il avait pu récupérer sa force, ça ne présageait rien de bien pour ces criminels qui pensaient pouvoir s’échapper.
Nines avait sorti son badge, son arme, puis, s’était mis à courir sans fléchir, sans froncer un seul instant ses sourcils. Stoïque. Il devait arrêter ces types, point final. Seulement, la rue était quelque peu peuplée, Nines se mit à slalomer entre les gens, ceux bousculés par ces imbéciles qui continuaient de courir.
Il courut sans voir autre chose, et bien vite, ces trafiquants s’arrangèrent pour le perdre. Oh, il savait qu’il allait les retrouver. L’ex androïd n’a peut-être plus ses compétences de calcul ou de reconstitution mentale, mais ça ne l’empêchait pas de rester intelligent. Restant silencieux, il les chercha donc. C’est le coup de feu qui l’aida : il ignorait bien sûr la raison de ce dernier, mais il s’en fichait bien pour le moment. Le brun était à peu près sûr que c’était là qu’il allait pouvoir trouver ceux qui ont pensé pouvoir se cacher de lui.
Reprenant sa course, rapidement, retrouvant ceux qu’il avait perdu. Il vit une personne au sol, et si son cerveau fit déjà les bonnes équations pour résoudre l’identité inconnu de la silhouette de dos, au sol, il préfèra l’ignorer, et s’avancer vers les criminels, arme en main. Pourtant, au passage, en s’avançant, il le vit. Son visage, son corps, il détailla tout et su. Il aurait dû en être surpris, pourtant, le RK900 savait qu’il n’était que la continuité d’un projet, d’un prototype. Que l’homme face à lui était son “prédecesseur”. Un RK800. Un Connor. Probablement peut-être l’originel. Ou celui que Nines devait remplacer. Dans tous les cas, probablement celui dont il possédait les souvenirs. Son regard posé sur lui, il vit sa blessure. Comprenant soudain que les criminels ont dû le prendre pour lui puis tirer sans hésiter. Il se renfrogna un bref instant. Qu’un civil soit impliqué…. C’était déplaisant. Si tant est que Connor en était un. Mais tout l’indiquait. Relevant la tête vers les deux racailles, il garda son arme en main, et s'efforça de rester concentré. Il suffisait d’une balle pour qu’il en désarme un.
Sauf que Connor se mit à parler. Il parla d’Amanda, cette femme avec qui Nines vit, et la pointa comme une commanditaire d’assassinat. Ce qui, en soit, n’était pas idiot, au vu du comportement de la femme avec qui il vivait actuellement. Nines garda le silence, se fit la réflexion que de toute évidence, Amanda pouvait lui demander ça, qu’il ne le ferait pas. Il n’en avait pas envie. Et puis, cette Amanda avec lui, était bloquée dans sa chasse aux déviants, mais plus le temps passait, plus le respect que Nines éprouvait envers elle diminuait. Il ne l’écoutait même plus.
Il tira dans celui qui avait l’arme, le désarmant au passage, hocha la tête, satisfait de son efficacité, et lâcha simplement, sans regarder Connor :
- Je pensais que ton prototype était plus intelligent que ça…. Mais tu ne dois plus avoir tes compétences d’analyse.
Nines, qui avait son badge, accroché à son pantalon, avait dit la seconde partie de sa phrase avec quelque douceur dans sa voix. Il devait s’habituer à sembler plus humain. Même après tant d'années à vivre dans cet étrange endroit.
- En fait y sont deux ! fit celui qui venait de se faire tirer dessus.
Nines eut un soupir en le voyant vouloir récupérer son arme, il alla lui écraser la main quand elle atteint le sol, tout en gardant en joue son “pote”.
- J’ai mieux à faire que de chasser pour Amanda. Et Amanda ne sait pas se renouveler. Enfin, tu n’es pas un “déviant” ici.
Alors, ces paroles prononcées, il esquiva quelques coups, et utilisa sa force pour attraper le poignet d’un des hommes et le tordre. Légitime défense, à ses yeux. Il regrettait malgré tout de ne pas lui, aussi, avoir gardé ses compétences d’android. Après tout, il aurait pu anticiper bien des attaques au lieu de se retrouver stupidement en danger.
La surprise qu'il eut exprimé jusqu'alors vient à se taire, laissant place à une mine réfléchit. Sourcils vaguement froncés, l'ex Rk observait son homologue agir sans le déranger ou même, ne serait-ce lui adresser une fois de plus la parole. “ Mes compétences d'analyses ”.. Oh il les avait encore, bien que plus lentes au vu de la complexité du cerveau humain dont il était munit à présent. Aucun programmes ou logiciels n'étaient là pour traiter en quelques millièmes de secondes le flot d'informations qui l'avait parcourus. Qui plus est, la blessure par balle et la douleur résultante n'aidaient point à tenir le fil de ses pensées.
Pourtant, tout cela devient plus clair, limpide même. Ce soir-là, dans la tour de CyberLife, il avait combattu l'un de ses homologues, un Rk800 - 60. Car bien qu'il aurait aimé l'oublier, Connor était un prototype, le premier d'une lignée d'androïdes policier. Par réflexe, la main maculée de sang recouvra vite la blessure de son épaule, pressant celle-ci de nouveau. Un bref son de douleur franchit ses lippes, noyé par ces nouveau questionnement, ses réflexions. Cet homme, cet autre “Connor” devait donc être son successeur. Plus grand, fort, rapide.. froid.
Baissant les yeux, l'ancien androïde sentit une boule se former au creux de sa gorge, amère, difficile à avaler. CyberLife avait vraiment un coup d'avance sur tout. Qui sait ce qu'il se serait passé s'il était resté là-bas, à Détroit. Peut-être qu'Amanda l'aurait rappelé pour désactivation, que ce nouveau modèle aurait prit sa place. En fin de compte, ce qu'il supposait être une simple idée s'avéra bien plus véridique et douloureuse que prévue. Il n'aurait pu revoir Hank. Jamais. Et au vu du comportement de l'autre, qui sait ce que l'ancien flic lui aurait fait, ou inversement...
Voix en écho à la sienne, d'une octave plus grave, rompit le silence ; apportant avec elle sont lot de nouvelles questions, suppositions. Il connaissait donc Amanda et au vu de ses paroles, celle-ci était.. active. Était t'elle vivante et présente en ce monde ? De ce fait, y avait-il d'autres personnes qu'il connaissait ? Gavin ? Mr Kamski ? Hank..? Un tournis le prit, la faute à ce flot d'informations, la perte de sang, le choc. Sa silhouette eut vite fait de retrouver un mur pour y prendre appuie, laissant le tissu humide et collant de sang se presser contre les briques.
- Pas ici, non.. Mais je dois bien continuer de m'attendre à tout, même dans ce monde. Après tout, j'ignorais jusqu'alors que j'avais un successeur.. Qui sait donc ce qu'il peut arriver.
Il eut un maigre sourire, mélange d'amertume, d'un semblant d'espoir également. Ces émotions ce mélangeaient, créant une forme de chaos cérébral fort heureusement contenu, maitrisé, pour l'instant. Soufflant doucement par les narines, il fit en sorte d'ignorer l'autre individu et ce pour ce saisir de son téléphone portable, composant ainsi le numéro des secours. La voix calme et posée, l'ex Rk demanda une ambulance, ne serait-ce que pour lui et ses assaillants blessés.
Nouveau vertige, il dû se résigner à laisser sa silhouette glisser contre le mur, le fessier retrouvant le sol dur. Au moins, s'il perdait conscience, la chute serait moins importante.
Peut-être que cela n'avait plus d'importance, maintenant, dans ce monde, tout du moins face à un interlocuteur lambda. Mais face à lui-même, un autre Connor, peut-être était-il bon de le préciser. Après tout, il était le premier de la lignée.
- Et toi ? Comment te nommes-tu ?
(c) Otsana
Dernière édition par Connor Anderson le Mer 5 Juin - 13:17, édité 1 fois
Ainsi, Connor, blessé à l'épaule, semblait être toujours sur ses gardes quand il pouvait croiser…Disons un RK900 qui pouvait potentiellement pouvoir l’arrêter. En soit, c’était presque idiot, et en même temps, c’était un comportement logique : la méfiance, et la prudence parce que par le passé ça aurait pu le mettre en danger. Nines appris que Connor ignorait qu’il avait un successeur. Chose qui ne surpris pas le moindre l’androide - qui n’en était plus un non plus -. Après tout… Vu sa réaction il n’avait pas eut l’air de dire “oh hey Nines ça faisait une paye depuis le jardin où tu m’as remplacé” …Pas sûr aussi que Connor ait réagi comme ça en vérité même s’il l’avait connu.
- Je ne t’arrêterais pas, lâcha simplement Nines
Pas un mot de plus, pas une parole qui pourrait préciser ses raisons. Simplement ce fait, auquel Connor pouvait croire. Preuve en est que de toute façon, à cet instant, Nines était plus occupé à arrêter des criminels, les surveillant, les pointant de son arme. Pendant qu’il faisait cela, Connor sembla prendre les devants, appelant les secours, et Nines envoya un message aux patrouilles autour pour les criminels retrouvés.
Du reste, Connor finit par se présenter. Chose idiote, vu que… Nines savait qui il était. Pourtant, si ça semblait idiot, ça ne l’était pas du tout en ce cas. Premièrement, Nines pu apprendre qu’il était le premier modèle des RK800. Celui que Nines avait remplacé n’était pas le 51. Pas même le 60. En vérité il s’agissait du 55. Alors rencontrer l’originel… Etrange. Ensuite, Connor se présenta non pas comme “Connor”, mais comme “Connor Anderson”. Anderson. Cela voulait tout dire. Soit il avait retrouvé Hank, soit il avait pris son nom parce qu’il en éprouvait un attachement assez fort pour s’octroyer ce nom. Un attachement qui décontenança Nines bien qu’il ne le montra pas. Après tout, des souvenirs qu’il avait, Connor s’était rapproché de Hank uniquement pour la mission. Preuve en est, que pour ce dernier, ça ne s’était pas bien fini.
Restant un bref instant silencieux, réfléchissant aux implications de ses paroles, il se reprit. Nines se présenta donc :
- Nines, matricule #313 248 317 - 87. Mais si tu préfères, Nines Stern.
Oh, il n’était pas naïf : il savait très bien ce que le nom “Stern” susciterait chez Connor, si ce dernier avait pris la peine d’observer les portraits dans la salle d’attente d’Elijah Kamski. Justement, ça le rendait curieux de voir s’il réagirait.
- Mes collègues vont arriver. Les ambulances aussi. Mais j’imagine qu’avant ça, on va devoir faire le point sur chacun.
S’approchant de lui, du haut de ses deux mètres, il le fixa. Connor était par terre, bien sûr, puisque blessé.
- Ainsi, avant que tu demandes, oui. Amanda se nomme Amanda Stern. Et oui, je vis chez elle. Mais je l’ai dis : elle ne sait pas se renouveler.
Voilà. Connor avait suffisamment d’informations, ils ne tourneraient pas autour du pot, et Nines pourrait retourner à ses enquêtes. Même si oui. C’était…Si étrange de le rencontrer en chair et en os. De voir celui qui avait constitué 90% de sa mémoire avant d’arriver dans ce monde 5 ans auparavant.
S’il devait tout admettre, Nines aurait bien quelques questions à poser. Mais ça n’arriverait pas.
Le silence n'était interrompu que par l'écho incessant et fracassant de son palpitant à ses tympans. La méfiance toujours de mise malgré un univers différent, une époque différente. Connor pouvait se montrer doux, il avait été avant tout un traqueur de déviants et quelque chose, en son fort intérieur, lui disait de rester sur ses gardes. Bien entendu, avec sa blessure, la perte de sang conséquente, ses plus bas instincts -purement humain- avaient pris la relève. Se préserver, survivre.
Mirettes orientées vers le colosse se trouvant à quelques pas, l'ex androïde attendait une quelconque réaction, réponse. Lorsque cette dernière vient à tomber, il plissa le regard, fronçant de ce fait les sourcils qui apportèrent cette touche de sérieux à ses airs de chiot battu. “ Stern... ” La réalisation soudaine le frappa pour le moins de plein fouet, une moue étonnée passant ses traits. Bride de souvenirs lui revenant à l'esprit, le portrait en coin, accroché discrètement là. Amanda Stern aux côtés d'Elijah Kamski.
Faciès qu'il baisse pour aviser le bitume maculé de sang frais, Connor ferme un instant les paupières. Amanda était donc en vie dans cette réalité. Elément guère négligeable. Soufflant en douceur, il vient à relever les yeux vers son interlocuteur, hochant doucement.
- Je vois...
L'autre s'approchant de lui d'un pas déterminé, Connor se tendit, grimaçant sous la douleur de son épaule. Serrant cette dernière entre ses doigts couvert d'hémoglobine, il demeura immobile, simple observateur. Il ne su s'il devait se détendre devant cette révélation, mais s'y força, ne serai ce que pour donner un peu de répit à son corps déjà en souffrance.
- C'est rassurant, je suppose...
Les sirènes et néons de l'ambulance se firent entendre plus loin, cette dernière les rejoignant assez rapidement. L'ancien androïde fut placé sur une civière puis chargé à l'arrière du véhicule. Tout du long, ses yeux restèrent rivés sur son successeur, ce faciès si familier aux orbes bleues glacées. Portes closes, c'est avec vitesse que reparti le groupuscule.
2 heures après l'incident.
Carcasse étendue entre les draps blancs, Connor ouvrit en douceur les yeux. Sa tête est lourde, sa bouche pâteuse. La micro intervention c'était bien déroulée, la blessure par balle cousue, nettoyée et bandée. Tournant en douceur le crâne sur le côté, il cru apercevoir une silhouette et lorsqu'il réalisa, ce dernier retient un bref instant son souffle. Nines était là, seul, apparemment.
- Tu es venu prendre ma déposition..? Ou es-tu là pour une autre raison ?
Avait il questionné avec prudence, ses yeux demeurant fixés sur sa copie.
Nines avait bien sûr perçu le trouble de Connor, quand il avait prononcé le nom de famille Stern. Il savait presque au mot près ce que Connor avait dû penser à cet instant précis. Probablement, quelque chose comme “Amanda”. Ils étaient liés par cette femme qui bien que morte, subsistait encore comme un programme pour s’assurer que les androïds restent bien sages. Et Connor, ne semblait pas si sage. Pas autant qu’il aurait dû l’être s’il était resté sur la bonne voie. Celle que CyberLife leur avait dessiné.
Enfin, ici, dans ce monde, ça n'avait aucune importance. Et Nines lui fit comprendre ce fait. Puis, il y eut l’ellipse temporelle. Celle où Nines suivi ce qu’il se passa en termes de santé et de justice. Les criminels arrêtés mais placés pour être soignés. Et Connor qui, blessé, fut amené à l'hôpital. Nines aurait pu en rester là. Aller se poser à son bureau, écrire ses rapports, continuer sa vie, ne peut-être plus jamais tomber sur Connor.
Sauf qu’il y avait des incohérences. Entre ses souvenirs et entre ce que Connor avait démontré devant lui. Nines avait cette désagréable impression que ce n’était pas le même. Qu’il manquait des éléments. Que ce qu’il pensait être réel ne l’était pas pour ce Connor précis. Il y avait quelque chose qui n’allait pas, une pièce du puzzle qui ne s'emboîtait pas. A commencer par “Connor Anderson”. Hank Anderson s’était tiré une balle dans la tête. Il n’y avait pas lieu de prendre son nom de famille. Et puis il y avait aussi eu l’étrange douceur dégagée par cet homme aux yeux bruns, contraste clair avec la froideur de Nines.
Alors, désireux de savoir, Nines avait suivi les soins de Connor. Attendant patiemment que ce dernier sorte, ou soit accessible. On l’informa que c’était bon, puisqu’il était un agent de police et avait parlé d’une déposition. Se présentant au lit de Connor, il avait été informé de ne pas trop le secouer. Pourtant… Il avait presque envie. Parce qu’il ne doutait pas que ce qu’il allait dire allait probablement ébranlé un tant soit peu son modèle “inférieur”.
- Tu es venu prendre ma déposition..? Ou es-tu là pour une autre raison ?
Nines ne fut pas étonné de la méfiance qui émanait de la voix de Connor. Mais à ça, il se contenta de rester debout, pupilles bleues glaciales posées sur ce double de lui, plus petit, plus menu, mais pourtant si…
- Les deux, répondit simplement Nines.
Plaçant dans ses mains dans son dos, il toisa Connor. Vu du lit, il devait paraître bien grand.
- Je veux savoir, pourquoi tu es différent de mes souvenirs. Dans ceux-ci, le lieutenant Anderson s’est donné la mort. Mais sûrement pas dans les tiens, sinon tu ne t’appellerais pas Connor Anderson. Sauf en mémoire de lui. Mais, même ici, ça n’est pas logique.
Il prenait son temps pour chaque phrase. Bien que ça ressemblait à une tirade, il parlait lentement, exposant là simplement son raisonnement pour ne pas que Connor soit confus, et qu’il comprenne où il voulait en venir.
- Mais je viens aussi pour ta déposition. Je n’ai pas vu ce qu’il s’est passé pour que tu te fasses tirer dessus.
Même si en vérité, Nines n’était pas idiot : il se doutait du pourquoi du comment.
Silhouette imposante s'étant approchée de lui, l'ex androïde se crispa, orbes noisette plantés sur son interlocuteur. Dans un maigre espoir de retrouver un semblant de contenance ou de sa superbe, Connor ignora la lourdeur de son crâne, la douleur et fourmillement de ses membres afin de se redresser dans le lit. Pouce vient à se presser contre l'une des touches du lit automatisé, obligeant celui-ci à se mettre en position semi-assise. Mieux installé, il pourrait répondre avec plus d'aisance à ses questions.
Mains de nouveau à plat, de part et d'autre de sa silhouette couverte, les lèvres de Connor s'entrouvrirent, mais aucun son n'en sortit. Nines avait engagé la conversation avec une information pour le moins déroutante.
- Hank est mort..?
Son faciès sembla se décomposer, un air choqué arborant ses traits. Le moniteur cardiaque lui étant relié commença à s'emballer, laissant éclater dans la pièce un bip rythmé. Détournant le faciès, l'ancien Rk sembla chercher un point à fixer, celui-ci ayant besoin de taire le flot de ses pensées, apaiser son palpitant chamboulé. L'attention portée sur un trou dans la laine défraîchie de la couverture qui couvrait ses jambes, il plissa les sourcils.
Non, Hank ne pouvait être mort. Ils avaient été séparés lors d'une balade au parc, accompagné de Sumo. Qui plus est, Connor n'avait jamais vu Nines, il avait ignoré -jusqu'à présent- qu'il avait un successeur, un nouveau "Connor" pour le remplacer. Aurait-il été remplacé dans tous les cas ? Que sa mission est réussie ou non ? Bougeant brièvement la tête comme pour chasser cette pensée intrusive, il se concentra à nouveau sur ce qu'il savait. À savoir, que comme beaucoup d'autres personnes.
Ils n'étaient pas du même monde. Pas du même Détroit.
Si l'analyse avait pu sembler longue au sein de son cortex étriqué, en réalité, une simple minute s'était écoulée. Suffisamment "longue", pour que son cœur recouvre un rythme normal, cessant ainsi d'agiter le moniteur cardiaque. Connor observa de nouveau son interlocuteur, l'air plus... détaché. À dire vrai, il avait revêtit cette expression sérieuse, sans émotion, qu'il arborait lorsqu'il devait analyser les choses, enquêter.
“Vieux” aux yeux de CyberLife, mais pas obsolète.
- Cela me semble pourtant évident. Nous ne venons pas du même Détroit, donc, pas du même monde.
Marquant une brève pause, il reprit, ne lâchant pas du regard Nines.
- Là d'où je viens, je n'arrivais pas à accepter le fait que j'étais peut-être un déviant, et ce, bien que le Lieutenant Anderson soulignait à chaque fois les signes évocateurs de la déviance ; comme l'empathie... Une émotion humaine. Affichant un bref mais nostalgique sourire, il reprit. - Je voyais les messages d'erreur quant à mon software s'afficher au coin de mon HUD, encore et encore. Je n'ai pas pu tirer sur cette androïde, chez Monsieur Kamski. Encore moins tuer Markus pour que la révolte prenne fin.
Reposant l'arrière de sa tête contre les oreillers, il conservait son regard sur l'autre.
- Je suis celui qui a libéré les androïdes de la tour de CyberLife après avoir sauvé Hank d'une mort certaine. Je suis devenu son fils adoptif, c'est lui qui m'a recueilli et accepté comme telle une fois que la révolution fût terminée.
Soufflant un petit rire, son faciès retrouva sa douceur, son humanité.
- Voilà pour ce qu'il en est de mon histoire, de mes souvenirs.. Quant à ma blessure, les types que tu poursuivais on cru que j'étais... toi. Alors ils ont paniqués et l'un d'eux à tiré.
Connor retrouva le silence, détendant ses épaules, son être. Demeurant tout de même observateur, il pencha à peine la tête sur le côté.
- En ce qui concerne tes souvenirs... Je pense qu'ils proviennent d'une version de moi où j'obéissais au doigt et à l'œil aux ordres d'Amanda. Mais de ce que j'ai compris... Tu es humain, ici.
Il ne parlait pas de physique, de compétences, mais simplement l'inéluctable fait que Nines était aussi un déviant.
Hank était mort, oui. En tout cas pour les souvenirs de Nines. Et au vu du bip qui s’enchaina et de la réaction du visage de Connor, ça ne devait pas être le cas pour ce dernier. Une anomalie qui faisait encore douter Nines sur l’état actuel des choses. Sur le fait que Connor et lui étaient trop différents pour que ça soit… La même chose. Patiemment, l’ex android face à l’hospitalisé, attendis que ce dernier se calme un peu. Il pouvait bien attendre. Il avait de toute façon besoin de sa déposition. S’étant contenté d’un hochement de tête pour confirmer la tragédie. Nines ne voyait pas ce qu’il fallait faire pour calmer Connor, et il estima que ce dernier saurait bien le faire de lui-même. Ça arriva : le bip se calma, et il sembla au “RK900” que son ancienne version comprenait quelque chose, ses prunelles bougeant légèrement en ce sens. C’était comme se voir en miroir, à la différence près que Nines était plus grand avec des yeux bleus.
- Cela me semble pourtant évident. Nous ne venons pas du même Détroit, donc, pas du même monde.
Assimilant cette information, Nines songea qu’il y avait déjà pensé. Pourtant ça semblait compliqué à accepter totalement. Connor poursuivis. Il décrivit ce que lui avait vécu. Quelque chose de bien différent de ce que les iris azurs en face de lui avaient en mémoire.
C’était une histoire plus… Déviante. Qui dès le départ avait mal commencé pour se maintenir dans le droit chemin programmé. Quand dans la mémoire du géant, ne restait qu’une machine sans pitié, remplacée sans hésitation, car obsolète.
Nines nota le récit de la déposition. En soit, le problème était simple et aussi logique que la différence des mondes d’où les deux provenaient.
- Je suis humain ici, confirma Nines, avant d’ajouter : et de mon côté, oui. Tu as obéi à Amanda. Tu as tiré sur l’androïd de Kamski. Tu as été détruit et remplacé de nombreuses fois. Certains souvenirs en ont d’ailleurs pâti. Puis, quand tu as éteint la révolution en éliminant leur chef, je devais te remplacer.
Le résumé était bien plus bref que celui de Connor. Etrangement, le policier avait omis la mort du lieutenant Anderson. Comprenant sûrement l’impact que cela avait face à l’homme face à lui. Montrant ainsi lui-même de l’empathie. C’était plus facile, quand on était humain. Cherchant peut-être à effacer cette idée, Nines repris le cours de la déposition :
- Pour la déposition, j’ai besoin de savoir : dès qu’ils t’ont vu ils ont paniqué et là ils ont tiré ? Que faisais-tu avant ça ?
Le ton calme de sa voix ne démontrait rien de l’éventuel trouble qui pouvait le posséder. Nines s’efforçait toujours de cacher au mieux toute émotion s’éloignant de la tempérance et de la froideur.
- En ce qui concerne tes soins, le commissariat te les offre. Tu es un dégât collatéral, après tout.
Connor écouta les brèves mais concises explications de l'autre homme, plissant à peine -par moment- les sourcils. Cela lui semblait tellement étrange. Il avait vraiment dû agir comme une machine, dans son monde. C'était... triste. Ce sentiment le parcourus, émotion purement humaine et qui pour une fois, ne lui était pas destinée. Il était triste, oui, pour Nines qui avait donc ces souvenirs là en tête, mais aussi pour les autres Connor qui avaient péris, pour Hank qui c'était donc suicidé, les employés du DPD. Il était triste pour beaucoup trop de monde à dire vrai. Ses poings serrèrent un instant les draps immaculés, la couverture grisonnante de son lit d'hôpital. Soufflant doucement, l'ancien androïde laissa ce sentiment, cette émotion le passer, s'en aller.
Redressant en douceur sa silhouette, le brun prit garde de ne pas tirer sur les câbles de perfusion et autres appareillages. Avisant son interlocuteur, il déglutit en douceur, passant dans un rapide geste, la langue sur ses commissures afin de les humecter.
- Ils ont paniqués oui. Certains on prit la fuite, un seul est resté et m'a pris pour toi. Quant à ce que je faisais.. J'avais rendez-vous avec une femme pour l'adoption d'un chiot.
Il tourne doucement la tête, semblant chercher quelque chose du regard avant de repérer son téléphone portable. L'attrapant en douceur, non sans une grimace, il déverrouilla celui-ci et le tandis au colosse.
- Voici l'échange que j'ai eut avec cette femme..
La suite l'étonna un peu, il haussa un sourcil avant de finalement esquisser un maigre sourire.
- Un dégât collatéral.. Je suis désolé si cela à pu te porter préjudice ou même gêner ton enquête sur l'instant. Mais merci pour la prise en charge de mes soins..
Marquant un instant de silence, Connor l'observa puis ajouta doucement.
- As-tu tout ce qu'il te faut pour ta déposition ?
Prenant avec soin la déposition, Nines, ne possédant plus ses compétences de mémoire poussée, dû écrire attentivement ce que lui disait Connor. Oh, bien sûr, il écrivait juste certains mots qui seraient bien suffisants pour reproduire à l’exacte sa déposition. Notant tout, il compris entièrement ce qu’il s’était passé. Cela le contrariait : qu’on l’ait pris pour Connor, mettait peut-être ce dernier en danger. Il suffisait de croiser les mauvaises personnes pour qu’il arrive quelque chose, non ?
Bon. Tant pis. Pour ça il ne pouvait rien faire…. Il nota aussi l’adoption d’un chiot, et ne compris pas vraiment le rapport. Connor travaillait avec les chiens ? Au vu de l'échange, ça y ressemblait. Il n’était plus enquêteur ? Ca semblait invraisemblable. Nines avait été trop habitué à faire ce qu’on lui demandait et à se tenir sur des souvenirs d’enquêtes pour songer à faire autre chose que détective.
Il nota néanmoins au besoin tout cela, pris rapidement une photo de l’échange, bien que ça ne servirait pas vraiment. Tout ceci tenait sur un dégât collatéral, comme Nines le précisa, et il préféra prévenir Connor qu’il serait remboursé pour les frais d'hôpital au vu de la situation.
Il ne répondit pas sur le “gêner ton enquête”. Il ne voyait pas quoi dire dessus. A la dernière question de Connor, Nines réfléchit. Pour ça oui. La déposition était complète. Et pour son train de pensées sur leur situation si particulière d’humains…Egalement. Quoiqu’il aurait pu demander pour les chiens.
- Oui. Un agent viendra te faire signer la déposition au besoin.
Nines rassemblant ses affaires, se dit qu’il n’avait plus rien à dire sur rien du tout. Peu loquace, il n’arrivait guère que rarement à tenir une conversation. Commençant à se tourner pour partir, il hésita tout de même. Il aurait pu ne rien en faire, se contenter d’un salut et s’en aller. Pourtant, il tourna sa tête vers son prototype inférieur et lâcha :
- Bon rétablissement.
Et ce, avant de s’en aller, après un bref au revoir. Délivrant là, la preuve, qu’il était de toute façon sûrement plus humain qu’il ne voulait bien le vouloir ou le croire.