feat   @Bruni Salamander  

Je me souvenais de la question de Bruni sur le destin alors que je continuais à manipuler les circuits internes du congélateur. Le cliquetis des outils contre le métal résonnait dans la petite boutique, créant une ambiance presque musicale, rythmée par le vrombissement doux des machines et les mouvements précis de mes mains. Je me sentais étrangement calme ici, entouré par le froid que je connaissais si bien. Ce n’était pas seulement une question de profession ; c’était une partie de moi, ancrée profondément dans mon être.

Bruni me regardait avec cette curiosité caractéristique, ses grands yeux brillants, pleins d’attente. Lorsqu'il m'avait demandé si je croyais au destin, j'avais pris un moment pour réfléchir. La question en elle-même portait un poids que je n'avais pas vraiment anticipé. Après tout, le destin avait été un compagnon insidieux dans ma vie, m'amenant à rencontrer Sven, Anna, Olaf, puis Elsa, et enfin Bruni.

« Tu sais, Bruni, » dis-je en jetant un coup d'œil dans sa direction, « j'ai souvent pensé que le destin était comme ce froid que je connais si bien. Parfois, il te surprend quand tu t'y attends le moins, et parfois, il te guide, te pousse à faire des choix que tu n'aurais jamais imaginés. » Je me redressai, essuyant mes mains sur un chiffon. « Quand j'étais plus jeune, je n'aurais jamais pensé que je finirais ici, à travailler avec le froid dans un monde qui change si vite. Et pourtant, me voilà. »

Je pris une inspiration, sentant l'air glacé de la boutique emplir mes poumons. Ce sentiment de familiarité était toujours là, comme une présence invisible qui liait Bruni et moi. Je me demandais s'il ressentait la même chose, si quelque part dans sa mémoire, il se souvenait d'une vie passée, d'une époque où le froid et la glace étaient bien plus que des éléments naturels pour nous deux.

Bruni me tendit un pot de glace, une nouvelle saveur qu'il venait de créer, avec cet enthousiasme contagieux qu'il avait toujours. Je pris le pot avec un sourire et le portai à mes lèvres, savourant la fraîcheur sucrée du dessert. C'était étrange, mais il y avait une sorte de réconfort dans cette glace, comme si elle contenait un fragment de notre passé partagé.

« Tu as un véritable talent, » lui dis-je en toute sincérité. « Tes glaces sont comme… des souvenirs gelés… Un peu comme si chaque bouchée me ramène à un moment, à une sensation. » Je marquai une pause, observant ses réactions. « Peut-être que c'est ça, le destin. Des fragments de notre vie qui se cristallisent, attendant le bon moment pour se révéler. »

Il sembla pensif un instant, puis il parla de sa passion pour le froid et la glace, de la manière dont il avait découvert ces délices glacés qui capturent l’essence de la neige. Ses paroles me touchèrent, car je comprenais exactement ce qu'il ressentait. Le froid avait une manière particulière de faire partie de toi, de s’insinuer dans chaque fibre de ton être jusqu'à ce qu'il devienne une seconde nature.
« Je te comprends parfaitement, » répondis-je avec un sourire chaleureux. « Le froid, c’est comme une vieille amie. Toujours là, silencieuse, mais présente. Elle nous façonne, nous teste, et parfois, elle nous récompense avec des merveilles comme tes glaces. »

Je repensais à tout ce que nous avions traversé, à cette étrange alchimie entre le passé et le présent. Était-ce vraiment le destin qui nous avait réunis ici, dans cette boutique, ou simplement une série de coïncidences ? Peut-être que ça n'avait pas d'importance. Ce qui comptait, c'était ce moment, partagé autour d'une glace, un simple acte qui en disait long sur la complicité que nous pouvions développer.

Je croquai une nouvelle cuillerée de glace, savourant chaque instant, chaque saveur. Bruni m’observait toujours avec cette expression mi-intriguée, mi-amusée, et je ne pouvais m'empêcher de penser que, d'une manière ou d'une autre, nous étions tous les deux en quête de quelque chose. Peut-être un sens, peut-être un souvenir perdu, ou simplement la joie de découvrir de nouvelles saveurs dans ce monde moderne.

Il y avait tant à dire, tant à partager, mais pour l'instant, ce silence complice entre nous valait bien plus que des mots. La glace fondait lentement dans ma bouche, mais le moment, lui, semblait figé dans le temps. Un instant suspendu, où le passé et le présent se rejoignaient, créant un pont fragile entre nos deux existences.

Bruni, sans doute, devait ressentir quelque chose de semblable, mais comme moi, il ne cherchait pas à l'expliquer. Après tout, certaines choses ne peuvent être comprises que par le cœur, et non par la raison.

Je terminai ma glace, un sourire sur les lèvres, prêt à reprendre le travail. Mais cette fois, je savais que quelque chose avait changé. Le destin, ou quoi que ce soit d'autre, avait laissé son empreinte sur ce moment, le rendant unique, inoubliable.

Et c'était tout ce qui comptait.

feat   @Bruni Salamander  

Je m’arrêtai un instant, le souffle presque figé, touché par la simplicité des mots de Bruni. Il était là, devant moi, humain par l’apparence mais encore habité par cet éclat d’esprit de feu, une chaleur qui semblait brûler doucement sous la surface glacée de sa boutique. Je posai un regard pensif sur lui, observant son enthousiasme presque naïf, mais sincère, quand il parlait de sa passion pour les glaces.

« Tu sais, » dis-je en choisissant soigneusement mes mots,  « j’ai moi aussi eu du mal à accepter que le destin me mène là où je suis aujourd'hui. Ce n'était pas vraiment mon choix de devenir... frigoriste. J’étais vendeur de glace, en blocs, et tout ce froid... c’était comme une seconde peau pour moi, tout comme toi avec le feu. Alors, l’idée de contrôler des frigos, de protéger la fraîcheur des glaces, ça a fini par me paraître... naturel. » Je lâchai un petit rire, un peu pour moi-même. « Étrange, hein ? »

Je m’adossai contre un de ses congélateurs, appréciant le froid contre mon dos, comme un rappel de mes jours passés à Arendelle, où la glace n’était pas seulement une matière mais une véritable alliée. Le froid me parlait d’une manière que la chaleur ne pourrait jamais comprendre. Bruni m’avait confié qu’il avait du mal à imaginer que tout cela puisse faire partie d’un destin quelconque, que cette transformation en humain et ce nouvel amour pour la glace étaient quelque chose de prédestiné.

Je repris, en haussant légèrement les épaules, « peut-être que ce n’est pas vraiment une question de pouvoir, de cristaliser les souvenirs dans la glace ou non. Peut-être que c’est simplement... toi. Tes glaces, elles reflètent ce que tu es, ce que tu ressens. Un peu comme des souvenirs qu’on oublie mais qu’on redécouvre sous une autre forme. » Je lui adressai un sourire, un de ces sourires sincères qu’on partage entre amis.

Puis, Bruni me surprit en lançant la question avec une innocence désarmante. Inviter quelqu’un à venir déguster ces glaces…
Ah, là, c’était habile... ou du moins, cela aurait pu l’être s’il l’avait fait exprès. Mon esprit vagabonda un instant vers Anna. J’eus une image fugace de son visage rayonnant, de ses yeux pétillants et de son rire contagieux. Chaque fois que je pensais à elle, une chaleur inattendue me réchauffait de l’intérieur, même quand j’étais dans une chambre froide, malgré le froid ambiant.
« Eh bien... » Je me raclai la gorge, un peu gêné.  « Ma fiancée… Anna... Elle adore les glaces… Elle serait sûrement ravie de venir goûter tes créations. » L’idée de l’inviter ici avec elle, de la voir déambuler dans cette petite boutique colorée, m’apporta un sentiment de joie inattendue.

Mais, avant de perdre le fil de la conversation, je repris. « Tu fais goûter tes glaces à des proches, avant de les mettre en vente ? »