J’me réveille dans ma piaule récemment terminée. Ou plutôt celle que j’ai fait reconstruire dans un semblant d’château pour moi et les autres. Ça me fait encore tout drôle. Déjà parce que l’odeur de peinture me donne un mal de trogne pas possible. Mais aussi parce que malgré tout ça, ça n’a pas la même gueule qu’avant. Même si j'm’en doutais que et j’m’y étais préparé. Quelques-uns de mes anciens chevaliers sont avec moi. J’y ai invité par pitié les deux plus gros glandus de Camelot. Faut dire qu’avec eux j’me sens largement moins dépaysé. Guenièvre peut séjourner avec moi. L’autre Arthur et son Merlin sont les bienvenus lorsqu’ils seront décidés. Mais pas plus.

Faut dire que le royaume ressemble plus à plusieurs petites dépendances qu’à un vrai château comme à notre époque. Mais ça suffit pour mettre un toit sur la tête à plus d’un et donner un semblant d’confort à tous. C’qui me manque le plus, c’est peut-être les boniches pour s’occuper de la plus grosse partie. Pour ça il faudrait que j’engage des femmes de ménage mais le budget est encore assez serré. Alors j’vais ouvrir mes rideaux moi-même. Et en y regardant de plus près, j’aperçois au loin une silhouette toute fine d’une personne qui s’présente aux portes. J’y reconnais Merlin. Le bon Merlin. J’me décide à m’habiller et à le rejoindre pour l’accueillir moi-même. J’tiens pas à ce qu’il tombe accidentellement sur Perceval. Ou pire: Karadoc.

Ce Merlin a réussi à m'impressionner au recrutement avec sa magie. Faut dire que c'était pas si difficile que ça quand on sait qu’j’ai eu un boulet à la place pendant tout c’temps. Il m’a appris pour les multivers, sa magie et surtout son Arthur et c’qu’il en pensait. Alors j’lui ai offert une place parmi nous sachant qu’il serait en sécurité entre mes murs. J’lui ai fait construire comme pour mon ancien “sorcier” un atelier attenant à la maison principale. Et j’ai espéré que ça lui plaise en lui ouvrant la grande porte de mon nouveau chez moi. Il est encore tout aussi chétif. J’en viens à m’demander s’il mange assez. C’est p’têt le premier truc que j’lui offrirai: de bons repas s’il bosse pour moi. J’porte pas de couronne pour me proclamer comme roi mais comme il l’a si bien dit: il est né pour protéger Arthur et je suis probablement né pour unifier les nations. C’est p’têt un début pour rentrer chez nous. J’lui adresse un petit sourire accueillant.

- Bienvenue à Camelot. Ou chez vous, si vous voulez l’appeler comme ça.

Je me déporte de l’entrée pour lui laisser la place de passer.

- Avant tout, j’tiens à vous dire que j’ai rencontré votre Arthur. Il est visiblement revenu. Il vous cherchait. J’lui ai donné vos coordonnées. Même si la magie a été l’un des sujets principaux de notre conversation, j’lui ai rien dit sur vous. J’le garderai si ça vous met dans une situation délicate.

J’observe attentivement les traits d’son visage. J’ai vu au recrutement qu’ça l’avait secoué, de perdre son Arthur. Et tout le vécu autour de cette histoire de haine de la magie a dû le traumatiser. J’tiens pas à faire pareil.