Les heures sont longues. Ça va bien faire deux heures que tu poireaute dans la salle d'attente de l'hôpital, dans l'attente des résultats de tes examens afin de voir comment tu te portes et si ta cécité en est toujours au même niveau. Et en plus de ton ennui, tu es peinée de voir que tu n'as encore pas pu voir Jane. Ça va faire depuis plusieurs jours que tu n'as pas de nouvelles d'elle. Pas de messages vocales. Tu as fini par laisser tomber, la laisser tranquille. Même si évidemment ça te chiffonne énormément. Tu ne sais pas ce que tu as pu faire exactement pour qu'elle veuille t'éviter à ce point. Pendant ce moment d'attente, tu te souviens du moment passé avec Nancy. Tu as pu lui parler de ce que tu ressentais dernièrement envers El, et elle a su répondre un peu près à tes questions. Aimer Jane plus qu'une amie ? Au-delà de t'aider, ça te perturbe plus que tout. Tu as toujours eu de l'attirance pour les hommes, et dernièrement pour Lucas. Alors aimer une femme... ça te fait bizarre oui. Et pourtant, pourtant... Tu ne peux pas dire le contraire. Tout prouve que l'amitié que tu as envers El s'est transformée en un amour inattendu. Passant une main nerveuse dans tes cheveux, tu aperçoit ton médecin qui t'invite à entrer dans sa salle de consultation pour pouvoir faire le point avec toi. Il se passe bien une petite heure avant que tu ne sortes de là, canne en main. Tes yeux sont toujours incapables de voir, aucune amélioration. Et ça te mine beaucoup. Tu donnerais tellement pour retrouver la vue et pouvoir de nouveau observer chaque traits de tes amis. Ceux d'Hawkins mais aussi ceux que tu t'es fait ici dans cette ville. Toutes ces émotions négatives se bousculent dans ta tête et alors que tu te diriges vers la sortie de l'hôpital, tu aperçoit Nic. Ton infirmière préférée. Elle a l'air préoccupée et pour cause, elle a remarqué les bleus que tu avais sur ton corps et les quelques cicatrices qui parcourent ta peau. Elle a essayé de te questionner mais rien n'y a fait. Tu t'es juste enfui. Tu fais de même actuellement et marche le plus vite en arrivant à ne pas te prendre la porte d'entrée ou quelqu'un qui passait par là.
Sans le savoir, tes pas te mènent non loin d'une salle d'arcade. Tu reconnais les sons des machines de jeux qui te rende nostalgique, tu entends aussi des jeunes crier de joie ou alors rire entre eux. De quoi te donner envie d'y faire un petit tour. Tes mains glissent par moment sur certains bornes d'arcades, beaucoup de souvenirs revenant dans ta mémoire en un claquement de doigt. Le bon vieux temps qui paraît loin, entre les quatre années passé ici et les années sombres d'Hawkins. Tu aurais aimé que le médecin te rapporte une bonne nouvelle concernant tes yeux, car même si tu t'habitues de mieux en mieux à ce nouveau mode de vie, l'angoisse de ne plus avoir aucune chance de retrouver la vue te tord le ventre chaque soir. Au moment où tu te décides de revenir sur tes pas et rentrer chez toi pour te poser, tu crois entendre une voix familière. Une voix qui te fait réagir immédiatement. « El ? C’est toi ? » Demandes-tu en te retournant. Tu pourrais aussi reconnaître son parfum. Seulement, une personne te bouscule et tu te retrouves à moitié au sol. Tu as eu le réflexe de bien te rattraper. La personne en question se précipite rapidement vers toi pour t'aider tout en s'excusant, et ça te soulage de savoir qu'il reste des personnes attentionnées et bienveillantes. Tu la rassures alors avant de passer une main dans tes cheveux roux. Tes yeux ne peuvent pas la voir, mais pourtant ta tête se positionne au bon endroit pour faire enfin face à ton amie que tu n'as pas vu et qui t'as manqué horriblement.
Elle a pris la fuite. Ce n’est pas glorieux, mais c’est ce qu’elle a fait. Plutôt que d’affronter ses sentiments en face et d’accepter leur nature, Jane a fait le choix du lâche… elle a pris ses distances, comme une manière de se protéger par avance de ce qu’elle est convaincue de devoir accuser tôt ou tard… à savoir la non-réciprocité de ses sentiments pour Max. El a-t-elle tout à fait conscience de ce qu’elle éprouve pour sa meilleure amie ? Il serait hasardeux de l’affirmer. Mais elle a conscience, en tout cas, d’éprouver quelque chose… un quelque chose qui la perturbe beaucoup trop fort.
Un quelque chose qu’elle n’avait jamais ressenti ainsi, pas aussi fort, pour personne… pas même pour Mike, qu’elle est convaincue d’avoir profondément aimé. C’est trop compliqué de mettre des mots sur ce qu’elle ressent, c’est trop dur d’envisager la possibilité de perdre Max parce qu’elle aura nourri pour elle des sentiments qu’elle ferait mieux de ne pas éprouver… mais c’est plus fort qu’elle. Elle n’a pas le contrôle là-dessus… et de façon totalement contreproductive, elle s’éloigne par peur de la perdre… par réaction de jalousie, aussi, peut-être. Elle garde en travers de la gorge la relation privilégiée qu’elle entretient avec le frère de Manon. C’est bête ? Oui, bien sûr que ça l’est… mais c’est plus fort qu’elle.
Alors elle a fait la sourde oreille à ses messages. Pas pour longtemps, bien sûr, elle a l’intention de lui répondre tôt ou tard, et surtout l’intention de la voir. Ça ne fait pas si longtemps qu’elles ne se sont pas vues, et c’est déjà insoutenable pour elle, alors, bien sûr qu’elle ne comptait pas non plus faire durer les choses éternellement… mais c’est le hasard qui, finalement, les font se retrouver. Jane était venue dans cette salle d’arcade pour passer le temps… bien sûr, elle avait songé à inviter Max, à la place, elle avait décidé de s’y rendre seule, histoire de tuer le temps d’elle-même avant de revenir à l’institut…. Et Max est là. Elle la reconnaît… à sa voix, sans doute, elle l’interpelle et le cœur de Jane manque un battement. Elle se retourne vers elle, heureuse de la voir… et se sentant stupide, aussi… car pourquoi agir de la sorte, au fond ? Alors qu’elle pourrait passer plus de temps avec elle… alors qu’il a suffi de quelques jours pour qude Max lui manque.
Elle n’a pas le temps de réagir que Max se fait bousculer jusqu’à ce qu’elle soit finalement rattrapée. El se précipite vers elle.
« Max ! ça va, t’as rien ? » El lui attrape le bras par réflexe. « Qu’est-ce que tu fais ici ? T’es toute seule ? »
Elle a envie de la prendre dans ses bras, de s’excuser d’être stupide, de s’excuser d’avoir fait la morte parce qu’elle est trop bête et trop lâche pour lui dire ce qu’elle ressent, mais elle dit rien, absolument rien.
Tu ne sais pas encore ce que tu lui diras, une fois qu’El sera face à toi. Pour ça, il faudrait qu’elle se montre en tout cas. Tu as beau chercher, trifouiller dans ta petite tête, mais tu ne sais pas ce que tu as pu dire ou faire pour la blesser au point qu’elle ne souhaite même plus te parler par sms. Est-ce que c’est à cause de ta relation avec Maxime ? Cette amitié est devenue importante pour toi assez rapidement sans que tu saches réellement pourquoi. Le courant est passé directement avec lui, et pour rien au monde tu ne voudrais arrêter de le voir. Tu as certes appris que sa sœur est méchante avec Jane, depuis le début, mais tu sais qu’il n’est pas comme ça. Puis… Elle ne le connaît pas encore, difficile d’en tirer des conclusions hâtives. Tu as pris pour habitude depuis ces dernières semaines, voire ces derniers mois, de traîner avec ta meilleure amie. Ça te fait énormément de peine de ne plus la voir (façon de parler). Alors inconsciemment, ton corps et tes pas te mènent souvent dans des endroits où tu serais susceptible de la rencontrer. Comme aujourd’hui, dans la salle d’arcades. La matinée à l’hôpital t’a fatiguée, tu ne fais plus tellement attention à ce qui se passe autour de toi si ce n’est cette voix qui fait réagir immédiatement ton cœur. Ce dernier s’emballe tandis que tu te sens tomber au sol à cause d’une bousculade. Ayant un minimum de réflexe, tu as su te rattraper sans te faire de mal et de toute manière, la personne fautive s’excuse gentiment. « Ne vous en faites pas, ce n’est rien. Merci. » dis-tu à cet homme, qui une fois assuré que tu ailles vraiment bien, repart vaquer à ses occupations.
Lorsque tu sens Jane attraper ton bras, tu frissonne délicatement et pose ses yeux vers elle. Elle semble inquiète à l’intonation de sa voix mais tu ne sais pas si tu peux y croire. Malgré le fait d’être contente de savoir qu’elle est là proche de toi, tu ne peux pas t’empêcher de lui en vouloir. « Ça va… » Tu tires sur ton bras, un peu trop fort, pour qu’elle te lâche enfin. « Je suis toute seule, oui. » Un petit silence s’installe avant que tu ne reprennes. « Et toi ? » Ta voix se fait petite alors que tu frottes ton bras, gênée de cette situation. Maintenant qu’elle est ici, que dire ? Tu sais ce que tu peux ressentir pour El, mais le dire rendra ça réel. Est-ce que tu es prête à sacrifier votre amitié comme ça, d’un seul coup ? Non. Baissant instinctivement la tête, tu finis par briser ce silence stressant. « Pourquoi tu m’ignores ? J’ai fait quelque chose de mal ? » demandes-tu enfin, ne sachant pas si tu es capable de tout entendre. Tes lèvres ne s’étirent pas pour sourire. Ton visage est crispé, comme si tu attendais tout de même une bonne raison pour la disparition de Jane de tes radars. « Si tu veux que je disparaisse de ta vie, il suffit juste de me le dire tu sais. » Tu dis ça en sentant un gros pincement au cœur. La musique autour de toi se fait plus forte, et tu finis par faire pareil que ta meilleure amie. Tu fuis. Tu ne fuis pourtant pas loin et te pose simplement sur un banc, à l’extérieur de la salle d’arcade. La température était bien trop chaude là-bas, et ici tu peux souffler un coup. Tu sauras ainsi si El veut vraiment ne plus entendre parler de toi, ou bien si elle t’aime toujours. Si elle te rejoint, tu pourras peut-être avoir le courage de lui dire ce que tu ressens. Mais si elle ne vient pas, ton cœur se brisera à coup sûr. Et tu ne t’en remettras jamais, de cette blessure de l’âme.
El s’en veut… elle s’en veut parce qu’elle se dit qu’elle est passée, par fierté et par peur, à côté d’un moment que Max et elle auraient pu passer ensemble…. Elle n’aime pas ressentir cette sorte de gêne, entre elles… ce ne devrait pas être le cas. Entre elles, tout devrait, bien au contraire, être toujours fluide et naturel. Elles ont toujours été capables de se parler de tout, elles ont toujours su être présentes l’une pour l’autre, elles ont toujours eu cette sorte de lien… fort et naturel, qui se passait d’explications et de mots… Et là… là, elle a vraiment peur que cette situation ne les éloigne… et elle en sera clairement la première responsable. Elle a l’occasion de se rattraper, ici et maintenant… Mais entre sa maladresse naturelle et sa fierté proverbiale… il n’est pas dit que le résultat soit si sûr que cela.
« Euh…oui », confirme-t-elle d’un ton hésitant.
C’est le cas, elle est effectivement seule, mais l’espace d’un instant, elle avait envisagé de s’inventer une excuse, mais elle-même ne sait pas pourquoi. C’est comme si elle fuyait par avance une inévitable déception… mais c’est finalement cette déception qu’elle engendre elle-même et qu’elle leur impose à tous les deux, parce qu’elle ne supporte pas cette situation. Elle envisage de dire autre chose, même si elle ne sait pas vraiment quoi… mais Max la prend de court en prononçant quelques mots qui la prennent immédiatement de court et face auxquels elle se sent désarmée.
Bien sûr que Max avait remarqué qu’elle l’ignorait… ou plutôt, qu’elle essayait de prendre la fuite. Elle n’est pas le genre de personnes à qui l’on peut cacher quoi que ce soit. Elle n’est pas le genre de personnes que l’on peut fuir sans faire face à sa franchise pour le moins désarmante… Et El, déstabilisée, se sent malgré tout soulagée que Max brise la glace, voire même heureuse de lui avoir manqué. C’est cruel, bien sûr, mais c’est probablement ce qu’elle avait voulu, aussi, manquer à Max pour avoir la confirmation que quelque chose les liait bel et bien, toutes les deux. Ce n’est pas sain, c’est certain… elle n’a pas d’excuse pour ça… et elle n’en a pas davantage pour ce qui va devoir suivre, au demeurant.
« Que tu disparaisses de ma vie… ? » Ces mots lui font prendre conscience de tout le mal qu’elle lui a fait… et soudainement, le poids de sa fierté et de ses erreurs lui retombe dessus… « Bien sûr que non, Max… jamais je voudrais que tu disparaisses de ma vie, jamais… » Elle est beaucoup trop importante à ses yeux. Elle est incapable de vivre sans elle. Peut-être qu’elle devrait le lui dire en ces termes, mais elle n’y parvient pas. « Je me suis dit que tu devais me trouver… un peu trop envahissante, que je devais te laisser de l’espace pour… tes autres amis, un petit ami, je ne sais pas… » Elle est plus maladroite à chaque mot qu’elle prononce. « Je comprends, hein. Et puis, moi aussi, j’ai quelqu’un donc… ça me dérange pas, je t’assure. »
Tu la sens différente de la dernière fois. Vous qui aviez l'habitude de vous voir souvent, quasi tous les jours. Faire du shopping, discuter, simplement passer du bon temps ensemble... Ça fait un moment que vous n'avez pas eu cette occasion du fait que Jane ne t’a plus répondu au téléphone. Votre rencontre ici est vraiment une belle coïncidence. Un lieu qui te rappelle la salle d'arcades à Hawkins. Tu ne sais vraiment pas ce qu'il se passe dans la tête d'El, à réagir ainsi. Cependant de ton côté, tu sais ce qu'il se passe et que tes sentiments pour elle sont bien réels. Et que tu as pris le temps d'accepter ça et de l'assumer. Est-ce-que ta qualité de dire les choses sans tourner autour du pot, et être la plus franche possible pourra t'aider ? Aucune idée. Mais maintenant que tu as enfin pu retrouver Jane, tu espères pouvoir la garder près de toi. Qu'elle n'essaie pas de te filer entre les doigts. Tu as beaucoup souffert de son absence : sa voix, son rire, tout te manquait. C'est ainsi que tu as su que tu l'aimais plus que comme une amie. Mais comme un amour évident.
Mais au bout du compte oui, tu commences à craquer et c'est toi qui finis par avoir envie de fuir cette situation compliquée et gênante. Tu penses sérieusement qu'elle a besoin que tu ne sois plus dans sa vie, sinon elle ne t'aurait pas lâché du jour au lendemain n'est-ce pas ? Tes jambes finissent par t'emmener en dehors de la salle pour pouvoir respirer un maximum d'air et reprendre une certaine contenance. Tu ne peux pas pleurer devant elle, pas comme ça. Tu te mords fortement la lèvre au moment où elle revient te voir pour dissiper ce malentendu. Ta tête se tourne vers sa voix si douce, et tu l'écoutes attentivement. Une voix dans laquelle tu ressens une pointe de culpabilité et qui te soulage un tant soit peu puisque cela veut dire qu’elle ne souhaite vraiment pas que tu disparaisses de sa vie. Ton visage encore crispé se détend, et un sourire semble s’esquisser. Et alors que ton cœur se met à battre la chamade, tu tends doucement tes mains pour attraper les siennes. C’est le moment. Le moment pour toi d’être sincère. Si tu ne lui dis pas maintenant, tu ne risques pas de le faire plus tard. Tes doigts serrent les siens et bien que tu ne vois pas, tu essaies de caler tes yeux sur là où tu penses être son regard. Les mots qui suivent te laissent sans voix durant un temps, alors que tu secoues la tête. « Jamais de la vie, tu n’es pas envahissante. Au contraire… Et même si tu l’étais, je m’en ficherais parce que ta présence est… » Tu ne finis pas ta phrase et fronce les sourcils. « Non. Non, je n’ai aucun petit-ami. Je ne sais pas d’où tu sors ça. » Et même si tu as d’autres amis, tu ne laisseras jamais El de côté. Encore moins depuis que tes sentiments vis-à-vis d’elle ont changé. « S’il y a quelqu’un que j’aime, c’est t- » Encore une fois, tu ne finis pas ta phrase. Tu n’as ni le temps, ni le cœur à le dire. Ce qu’elle vient de t’avouer te fait l’effet d’une massue tombant sur ta tête. Elle a quelqu’un ? Encore une fois, ton sourire s’efface.
Tu relâches soudainement les mains de celle que tu aimes plus que tout et recule de quelque pas comme si tu te sentais dégoûtée. « C-Comment ça tu as quelqu’un ? Tu veux dire que… Tu sors avec quelqu’un ? Un garçon ? » Tu ne sais plus quoi penser, tout se mélange dans ta tête. Et l’imaginer avec une autre personne que toi te fait énormément de mal. Tu sens ton cœur se resserrer et cette fois, tu n’arrives pas à retenir tes larmes de naître au coin de tes yeux. « Ça ne te dérange pas ? Donc quoi ? Je ne te suffis plus, c’est ça ?! » Lances-tu plus fort que tu ne le pensais. Oui, ta colère et tes mots dépassent tout entendement mais malheureusement tu ne peux pas aller à l’encontre de tes émotions et de tes sentiments. Tu ris un peu, nerveusement, et passe une main dans tes cheveux roux. « Finalement, je crois que c’est moi qui suis trop envahissante non ? Très bien… Je te laisse alors. J’imagine que ton copain doit être quelque part par-là, n’est-ce pas ? » Lances-tu froidement tout en essuyant les larmes qui coulent sur tes joues. Tu te reprends un peu, n’ayant pas l’envie de paraître plus misérable devant elle. Et à l’aide de ta canne, tu reprends ton chemin pour aller tu ne sais où. Tout ce que tu sais, c’est que tu n’avances pas aussi vite que tu le voudrais. « Fait chier… » Enfin, cette colère se transforme en un sentiment d’impuissance et une tristesse indescriptible. Tu serres ta canne et la balance au sol, celle-ci se cassant à moitié. Tu t’appuies contre un réverbère qui se trouve là, et laisse enfin tes larmes couler complètement. Tu t’accroupis, et cache ton visage entre tes mains. Tu te détestes d’être aussi émotive, toi qui de base est assez forte pour ne pas montrer tes émotions à tout va et craquer à la moindre occasion.
Quelques secondes, rapides, fugaces… quelque chose se passe… quelque chose d’unique, et qui semble hors du temps… La promesse de quelque chose. Leurs mains jointes, Jane contemple chaque détail du beau visage de Max et retient son souffle. L’entendre lui promettre qu’elle n’a absolument pas de petit ami lui retire un poids immense du cœur, et ensuite. Ensuite… Elle s’apprête à lui dire autre chose. Elle est à un rien de prononcer ces mots qui pourraient tout changer, ces mots qui pourraient donner un tournant complètement différent à leur relation… Et c’est bien sûr ce moment que Jane choisit pour tout gâcher. Tout gâcher au prix d’un mensonge stupide. Un mensonge qui n’a pas le moindre sens.
Leurs mains se détachent l’une de l’autre, et Jane a le sentiment qu’un froid immense, comme un gigantesque seau d’eau glacé, s’est déversé dans tout son corps. Max a perdu son beau sourire. Elle est fâchée, contrariée. Jane a menti sans raison, elle a menti pour rien, par peur et pour conserver une sorte de status quo absurde, convaincu du fait que les sentiments de sa « meilleure amie » à son égard ne pouvaient pas être réciproques. Alors, Max explose, et toute douceur s’efface de ses traits pour laisser place à autre chose, quelque chose qui fend le cœur de Jane, et qui la déstabilise beaucoup trop. Il y a des larmes au coin de ses yeux, et de la colère dans sa voix.
« Mais… ça n’a rien à voir », dit-elle, totalement perturbée, quand Max suggère qu’elle ne lui suffirait plus.
Cette pensée lui paraît tellement ridicule ! Bien sûr que Max lui suffit ! Max lui suffit en tout. Elle est juste… Merveilleuse. Elle est parfaite. A tant d’égard, Jane pourrait voir sa vie sans beaucoup d’autres mais jamais sans elle. Elle a besoin de Max, désespérément besoin d’elle. Le coup de colère de Max ressemble de plus en plus à une crise de jalousie, mais El’ n’y voit pas très clair. Elle est juste blessée. Son mensonge est en train de lui retomber sur le coin de la figure. Elle est froide, elle est brutale, elle est en larmes, elle passe son chemin, et Jane hésite… la suivre n’est peut-être pas une bonne idée, mais quand elle la voit s’effondrer, littéralement, s’accroupir au sol, contre un lampadaire, épuisée et en larmes, elle sait ce qu’elle doit faire.
« Pardon, Max… », dit-elle dans un souffle tout en approchant la canne qu’elle a ramassée en chemin de la jolie rousse pour qu’elle referme ses doigts autour. « Je suis idiote. » Elle hésite. Elle ne sait pas quoi faire sinon rétropédaler. « Quand tu m’as parlé de ce Maxime, j’ai vraiment cru que toi et lui… » Elle se racle la gorge. « Je sais pas pourquoi je t’ai dit tout ça… J’étais juste… » Elle détourne le regard, mal à l’aise. « … jalouse, je crois », ajoute-t-elle avec un fin sourire. Elle sait que ça n’excuse rien… Mais que dire d’autre ?
Si tu avais su comment allait se passer cette journée, oui peut-être que tu serais resté chez toi au fond de ton lit. Ravie de retrouver Jane par hasard, c'est la douche froide qui est tombée sur toi. La voir s'éloigner ainsi sans raison te faisait souffrir, alors maintenant qu'elle a pu mettre des mots sur cet éloignement ça te tue. Un petit-ami, n'est-ce pas ? Tu as du mal à y croire sur le coup et tu restes ainsi, pantois. Tu souhaites que ce ne soit qu'un rêve et que tu puisses te réveiller rapidement mais... Non, c'en n'est pas un, loin de là. Tu étais à deux doigts d'être enfin honnête avec elle, et surtout avec toi-même, cependant rien ne se passe comme prévu. Tu as l'impression que tout s'écroule autour de toi et tu lâches les mains de ta meilleure amie, cette sensation si douce que tu adores tant laisse un froid entre vous. Je ne te suffis plus. Oui, la jalousie parle pour toi. Il n'y a pas pire comme phrase à dire quand on ressens une pure jalousie envers une personne. Une personne que tu ne connais pourtant pas, mais que tu hais déjà pour t'avoir voler Jane. Tu souffles un coup, étonnée de te sentir aussi en colère. Ce trait de caractère fait partie de toi mais jamais tu n'as été aussi agressive envers El'. C'est pour ça que tu décides immédiatement de t'en aller de là, n'ayant pas l'envie de la faire souffrir. C'est la dernière chose que tu souhaites.
Fuir est ta seule solution. Fuir où ça ? Aucune idée. Tes pas te mèneront là où ils voudront bien t'emmener. Pour autant la colère ne redescend pas et en plus de ça, c'est un sentiment de tristesse qui te prend soudainement. Ta poitrine te fait mal et d'un geste rageur tu balances ta canne quelque part, au diable si quelqu'un passe à côté à ce moment-là tu n'en as rien à faire. Le seul bruit de la canne qui tombe sur le béton et le silence qui s'en suit prouve que tu es bel et bien seule. Du moins, pour le moment. Accroupie au sol, tu essaies de calmer tes sanglots et essuie les larmes qui n'arrêtent pas de dévaler tes joues. Tu as honte de te montrer comme ça alors tu essaies tant bien que mal de cacher ton visage. Tu ne t'attendais pas à entendre la voix de Jane au plus près. Tu pensais qu'elle était partie tout simplement. Muette, tu écoutes son pardon et ose relever légèrement la tête. " Ouais. T'es idiote... " Dis-tu d'une voix tremblante. Tu passes une main sur ton visage humide et fixe dans le vide, sentant tout de même que ton amie est bien plus proche de toi. " Maxime... C'est juste un ami. Il n'y a jamais rien eu entre nous, tu peux me croire. Je ne l'aime pas de cette manière... " Tu marques une pause et renifle peu gracieusement. " Il est l'un des premiers que j'ai rencontré dans cette ville et qui m'aide à me sentir mieux chaque jour malgré tout ce que j'ai pu traverser. "
Enfin, tu te relèves doucement, la position accroupi n'étant pas des plus confortables. Tes sanglots terminés tu peux enfin prendre une grande inspiration. Désormais tu n'as plus rien à perdre. Ta crise de jalousie était évidente et tu imagines bien qu'El' a deviné qu'il y a quelque chose qui cloche chez toi. " Je n'ai pas de petit-ami. Et je n'en aurais jamais. Parce que... " Nerveusement, tu tires sur les manches de ta veste, geste qui trahit tes émotions. " C'est toi... " Souffles-tu doucement mais assez fort pour qu'elle t'entende. " C'est toi que j'aime. " Cette fois tu as haussé le ton, et tu baisses instinctivement la tête pour ne pas qu'elle te revoit les larmes aux yeux. Pourtant, les mots qu'elle a pu prononcer entre temps te font tilter et tu te pinces la lèvre. " Jalouse ? Alors quoi ? Tu n'as vraiment pas de copain ? Ce n'était qu'un mensonge ? " Ça te surprend un peu dans le sens où Jane n'a jamais menti. En tout cas tu n'as jamais entendu un petit mensonge sortir de sa bouche. Les amis ne mentent pas. Cette phrase qu'elle répète en boucle. Tu es surprise certes, mais agréablement. Savoir qu'elle n'a personne te rassure, bien que tu te sens idiote d'avoir réagi ainsi au quart de tour. " J'ai l'air pathétique, hein ? "
Jane ne se vexe pas, ne cherche pas à répliquer quoi que ce soit, quand Max lui confirme qu’elle est idiote, effectivement. Elle ne risque pas d’en prendre ombrage alors qu’elle en a tout à fait conscience : elle a fait absolument n’importe quoi, et elle n’en est clairement pas fière, pas le moins du monde. Dans son rapport aux autres, elle peut souvent être excessive ou diablement maladroite… ce n’est pas si grave, dans le fond, quand son comportement n’a d’impact que sur elle-même, mais en l’occurrence, elle a fait du mal, beaucoup de mal, à la personne qu’elle voudrait blesser le moins du monde. Bien au contraire. Elle voudrait la protéger de cette douleur qu’elle lui fait à présent éprouver. La voir dans cet état, effondrée, tord son cœur d’une douleur sincère… Ce qu’elle a pu se montrer stupide ! Elle doit se rattraper à tout prix, c’est une certitude.
Max lui confirme que non, Maxime n’est pas son petit ami, et qu’elle n’a jamais rien ressenti de tel envers lui. Même si elle l’avait finalement compris (un peu tard), ça lui fait vraiment du bien de l’entendre. Elle aurait pu le comprendre, elle aurait dû le comprendre. C’est stupide de reprocher à Max d’avoir su s’entourer en son absence. Au contraire, même. Elle mérite de ne pas être seule, et de trouver du soutien moral et émotionnel auprès de personnes dignes de confiance. Jane s’est montrée particulièrement injuste, et elle en a bien conscience. Elle doit à présent se rattraper, même si elle a le sentiment que la tâche est proche d’impossible tant elle a franchement merdé.
Un large sourire étire les lèvres de Jane, et ses yeux s’humidifient quand Max prononce finalement ces mots qu’elle avait eu tant envie d’entendre : c’est elle. C’est elle qu’elle aime. Comme ces mots lui font du bien. Un bien immense. Elle n’est pas folle, ses sentiments sont réciproques… C’est comme si un poids se libérait soudainement de son cœur. Elle se sent légère. Légère comme une plume.
« Non, tu n’es pas pathétique du tout, Max. C’est moi… Regarde, je fais n’importe quoi. » Lui mentir pour un prétexte idiot, juste pour se protéger, juste pour… elle ne sait même pas pourquoi, vraiment… elle trouve ça absolument ridicule… Elle s’est trompée, sur toute la ligne. Mais il n’est pas trop tard pour se rattraper. « Y que toi, Max. » Elle caresse doucement sa joue pour essuyer les larmes qu’elle ne supporte pas de voir couler sur son visage, et pose doucement son front sur le sien. Elle fait preuve de toute la douceur et de toute la délicatesse dont elle a trop cruellement manqué jusqu’alors. « Je t’aime. »
Et pour mettre un terme définitif à ce fichu quiproquo, pour dévoiler à Max la vérité de son cœur, elle vient doucement poser ses lèvres sur les siennes, avec une douceur infinie.
Tu pourrais détester Jane après ce qu’elle a pu te faire ressentir, mais c’est bien plus fort que toi. L’amour que tu portes pour elle balaie tout sur son passage, et malgré la colère qui habite en toi tu ne peux pas t’empêcher de rester non loin d’elle. Tu pourrais partir, t’enfuir, mais une part de toi a envie que ça se passe autrement. Votre relation est étrange depuis ces dernières semaines, il faut y mettre des mots. Il faut que tu assumes enfin les sentiments qui te traversent quand tu es auprès de la jeune femme. Tu as toujours aimé les hommes, et El’ est ta meilleure amie. Tu ne pensais pas que ça allait changer un jour. Comme dirait certains, l’amour ne se commande pas, il est imprévu. Essuyant tes larmes, tu te redresses un peu et affirme enfin que ce qu’il y a entre Maxime et toi n’est qu’une simple amitié. Une belle amitié qui s’est construite rapidement, sans que tu saches comment exactement. Le courant est bien passé entre vous deux et le fait que vos prénoms se ressemblent à une lettre près a aussi un peu joué peut-être. Et évidemment, tu en as beaucoup parlé à Jane. Tu te doutes qu’elle a pu en avoir marre à un moment donné.
Lorsque tu oses enfin lui dire ces trois mots « je t’aime », tu te sens comme soulagée et libérée. L’anxiété est pourtant toujours présente, ayant peur que ça ne brise votre amitié. Tu as peur qu’elle agisse différemment avec toi, qu’elle finisse par s’éloigner de toi définitivement et décide de t’ignorer. C’est tout le contraire de ce qu’il se passe actuellement. Elle te réconforte, te contredit quand tu te penses pathétique. Tu te mords l’’intérieur de la joue. « J’aime pas qu’on me voit pleurer comme ça… C’est pas dans mes habitudes. » Mais il faut savoir qu’au bout d’un moment, tu peux craquer. Comme tout le monde. Tout s’emmagasine en toi et fini par exploser un jour ou l’autre. Serrant doucement ta canne d’une main, tu arrives enfin à te calmer pour pouvoir l’écouter au mieux. Tu crois presque halluciner quand elle vient à son tour confier ce qu’elle ressent à ton égard. Ça semble tellement irréel que tu clignes des yeux, le regard fixer dans le vide, quelques secondes avant de tourner la tête vers le son de sa voix. Les sentiments sont réciproques. Ces trois mots que Jane prononce aussi, qu’elle l’aime, ça te fait frissonner. Silencieusement tu te laisse aller et frissonne encore un peu quand elle glisse ses doigts sur la peau de ton visage. Tes dernières larmes disparaissent grâce à l’aide de la douceur de ton amie, plus si amie que ça désormais. « Tu m’aimes aussi ? » Tu demandes, comme si tu avais vraiment eu du mal à l’entendre.
Elle ne parle plus. Tu sens juste qu’elle bouge un peu, et que son souffle vient caresser tes lèvres. Avant que ces dernières rencontrent celles de Jane dans un baiser d’une douceur incomparable. Tu as encore du mal à y croire, à tel point que tu ne réponds pas tout de suite à son baiser. Les yeux ouverts qui ne voient toujours rien, tu la fixes. Et le déclic se fait, à ton tour tu reviens l’embrasser doucement, cette fois en fermant les yeux. Ta main relâche ta canne qui fini encore une fois par tomber au sol, afin que tu puisses glisser tes mains sur les joues de Jane. Tu fais durer cet instant encore quelques secondes, avant de reculer ton visage. « Je t’aime, El’… » Souffles-tu tout en rouvrant les yeux. C’est là où tu t’aperçois que quelque chose a changé. Tu ne le vois pas, tes yeux reprennent légèrement de la couleur. Tu commences seulement à distinguer des formes, dont la silhouette de Jane. « El’… Je crois que ça revient ! Ma vue… » Pour preuve, tu regardes au sol pour tenter de retrouver ta canne toute seule. Tu y arrives avec bien plus de facilité à la récupérer. Comme si l’amour que vous portez l’une pour l’autre en est pour quelque chose. A moins que ce soit un pouvoir de Jane.
« Je dirais rien à personne », promet Jane avec un fin sourire quand Max observe ne pas aimer qu’on la voie pleurer, chose qu’elle-même est entièrement capable de comprendre…
Et elle n’aime pas davantage voir Max pleurer… encore moins quand elle sait être à l’origine même de cette crise de larmes. A présent, elle compte bien tout faire pour l’apaiser, la rassurer et sécher les larmes qu’elle aura fait couler. Elle se sent libérer d’un véritable poids, à présent qu’elle a osé confesser ses sentiments, et plus encore à présent qu’elle sait qu’ils sont partagés… C’est un sentiment de légèreté comme elle en avait rarement ressenti, et en cet instant, Jane se féliciterait presque que son amie ne puisse pas la voir, parce que le sourire sur ses lèvres et si béat qu’il lui donne probablement l’air un peu ridicule par la même occasion. Oui, elle l’aime aussi, et maintenant que c’est chose dite, à présent qu’elle renonce à cette absurde réserve qui l’encourageait à taire la puissance de ses sentiments, pourtant si forts qu’ils ne pouvaient être contenus, elle aurait envie de les répéter, encore et encore et encore… Et bon sang qu’elle se sent bête d’avoir mis autant de temps à le lui dire… Tout aurait pu être résolu si facilement ! Il aurait suffi qu’elle prenne son courage à deux mains.
Elle peut profiter de tout, à présent, de chaque sensation, de tout ce qu’elle réprimait par peur absurde du rejet. Ce premier baiser est… magique… C’est peut-être idiot à dire, mais ça paraît si évident, et El se sent si bien contre elle et avec elle.. C’est fou comme tant d’émotions peuvent se transmettre sans prononcer le moindre mot, en quelques secondes seulement, et elles auront pourtant, au préalable, passé des mois entiers à tourner autour de leurs sentiments, parce qu’elles se sentaient juste… incapables de faire face à la beauté de ce qui les unissait, et qui avait largement dépassé le statut de simple amitié. Elle sourit de plus belle au moment d’entendre Max lui redire qu’elle l’aime. Elle est convaincue, en cet instant, de ne jamais se lasser de ces mots-là, c’est juste impossible.
« Tu… Vraiment ? Vraiment ? Tu me vois ? » demande Jane, ébahie, alors que Max lui apprend recouvrer doucement la vie. « Dis-moi ce que tu vois », suggère Jane avec probablement trop d’impatience et d’enthousiasme.
Mais comment faire autrement, en même temps ? Elle sait que même si Max avait fini par se faire à sa cécité, car après tout, elle n’avait pas le choix, elle avait le regret du sens qu’elle avait si brutalement perdu. Voilà maintenant qu’elle voit de nouveau, au point même qu’elle parvient à repérer sa canne au sol et à la récupérer sans avoir à tâtonner. Tout ceci ressemble ni plus ni moins qu’à un petit miracle.
« C’est merveilleux ! Il faut absolument qu’on fête ça ! »
Tu ne pensais pas un jour être aussi heureuse. Vivre une vie en toute tranquillité, loin de tous ces drames que tu as pu connaître dans ton monde. Retrouver tes amis, ton amour que tu as essayé de refouler durant tant de temps. Et même si ta santé n’est pas à cent pour cent rétabli, tu peux souffler un coup et retrouver ce sourire qui n’a pas vu le jour depuis plusieurs mois, ici. Désormais, être contre Jane te provoque énormément de sensations. Des sensations plus intenses qu’avant, quand vous partagiez qu’une « simple » amitié. Cette peur qui te tordait le ventre est enfin partie et tu peux maintenant lui prouver ton amour pour elle sans avoir peur qu’elle te rejette. Elle t’aime aussi, et ça, ça n’a pas de prix. Tu aimerais l’embrasser encore une fois, mais ce qui se passe actuellement te perturbe hautement. Tu clignes des yeux, et les formes se dessinent devant toi. Tu as l’impression de rêver, mais ce n’est pas le cas quand tu viens te pincer discrètement la cuisse. Ta vue est en train de revenir, tu en es persuadé. Pour quelle raison ? Tu ne sais pas. Mais ça te fait sourire encore plus. « Je vois encore flou, mais je peux deviner ta silhouette… » dis-tu d’un ton enjoué alors que tu arrives parfaitement à poser tes mains sur les joues de ton amoureuse. Par la suite, tu lui décris les couleurs de sa tenue, pas précisément mais tu arrives aussi à percevoir quelques couleurs vives. « C’est toi. C’est toi qui m’as guéri, on dirait… » Souffles-tu en te doutant que ça peut être difficile à croire.
Pourtant, les pouvoirs d’El pourraient en être la cause, mélangé à cet amour si puissant qui vient d’être échangé. Certes ça ressemble à un conte de fées, voire à un miracle mais y croire ne te fait pas peur. Au contraire. On finit tous par s’y faire à la cécité au bout d’un temps, mais ce n’est pas pour autant que l’espoir que les choses redeviennent comme avant avait disparu de ton esprit. « On va fêter ça, oui ! Il faut que je le dise aux autres aussi ! » Et possiblement aussi retourner à l’hôpital pour s’assurer que la guérison est en route. Tu serres cette canne dans ta main, cette canne qui ne te servira plus à rien. Mais tu ressens un pincement au cœur en pensant à ton chien guide. Ça veut aussi dire qu’il ne sera bientôt plus à tes côtés. Le meilleur ami à boule de poils que tu t’es fait. Tu reviens doucement attraper la main de Jane, tout en te rapprochant d’elle de quelques pas. « Maintenant, je ne te lâche plus. »
Que de drame inutile pour un bonheur si simple ! Jane se sent plus ridicule que jamais d’avoir menti et dit et fait absolument n’importe quoi par pure jalousie et incapacité totale à assumer des sentiments qui sont pourtant ce qu’il y a de plus simple au monde à apprécier quand on décide de totalement les embrasser… Bien sûr qu’elle aime Max, et bien sûr qu’elle ne voudrait être avec personne d’autre. Elle a une immense tendresse pour Mike, et ce sera toujours le cas, mais ce qu’elle ressent à l’adresse de Max est encore quelque chose de différent. Ça la transcende, quelque part, et la réciprocité de ces émotions, de ces sentiments évidents et pourtant si complexes en même temps, ne les rend que plus beaux à ses yeux. Et comme si la magie de cet instant avait un effet incroyable, improbable sur elles, voilà que Max semble retrouver progressivement la vue… Elle distingue des formes, des couleurs, des silhouettes… un miracle incroyable, et qui transporte Max d’une joie sincère.
« J’en reviens pas… »
Est-ce que c’est vraiment elle qui serait parvenue à guérir Max d’un simple baiser ? El est capable de beaucoup, et elle n’est pas entièrement certaine d’avoir encore fait le tour de la multitude de ses capacités… mais ça, elle n’y aurait pas cru… Mais après tout… est-ce si improbable ? Et après tout ce qu’elles ont vécu, l’une et l’autre, peuvent-elles, quoi qu’il en soit, considérer quoi que ce soit comme improbable pour commencer.
« Si j’avais su qu’il suffisait de ça, je t’aurais embrassée beaucoup plus tôt », ajoute-t-elle malicieusement. « Viens, on va aller prendre un verre, juste pour célébrer, et après, on retourne à l’hôpital, voir ce que les médecins en pensent », propose-t-elle, tout sourire, plus enthousiaste que jamais.
Max attrape sa main et Jane la serre le plus fort possible dans la sienne. Hors de question de la laisser, sous quelque prétexte que ce soit. Non, Jane a la ferme intention de ne plus jamais quitter cette main dont les doigts s’entrelacent si parfaitement aux siens… La présence de Max à ses côtés donne un goût de perfection à son existence. Elle n’y renoncera pas si facilement.
« Comme si je te laissais le choix », répond El alors que Max promet de ne plus la lâcher à partir de maintenant. Elle sourit et baisse les yeux sur le chien guide de sa… petite amie ? « Tu crois que tu pourras le garder quand même, quand tu seras totalement guérie ? »
Tu avais l’espoir de revoir un jour oui, mais tu ne pensais pas revoir aussi vite. Un miracle ou bien une prouesse des super pouvoirs de Jane, tu ne sais pas trop. Après tout ce que vous avez vécu, ça ne t’étonnerait pas au final. Bien que ça reste beau à imaginer, un baiser d’amour qui guérit la personne aimée. Tu te retiens encore une fois de pleurer, tu l’as beaucoup fait ces derniers temps. Aucune idée d’ailleurs de comment c’est possible qu’il te reste encore des larmes en réserve. Tu les garde pour les moment heureux désormais, ils seront nombreux à venir à partir de maintenant. L’idée de revoir le visage de tes autres proches te comble de bonheur et tu as du mal à cacher ta joie. Tu sens encore le doux contact des lèvres d’El contre ta bouche, et tu rougis rien qu’à cette pensée. Oui, c’est la première fois que tu embrasses une fille. Et ce baiser confirme totalement les choses : tu es amoureuse de Jane Hopper. Qui l’aurait cru ? Tu souris un peu plus et rigole à la remarque qu’elle fait. « Si tu m’avais embrassé plus tôt, j’aurais été encore plus aux anges et je n’aurais pas autant attendu pour t’avouer mon amour. » Dis-tu doucement, alors que tu serres délicatement sa main dans la tienne. Fêter cette grande nouvelle est une bonne idée, ça vous permettra en plus de ça de discuter plus tranquillement de ce qu’il vient de se passer et de la suite des choses. L’hôpital attendra bien encore quelques heures.
Ton regard se pose sur ton chien, Kang-ho, et tu te mordilles la lèvre en écoutant le questionnement d’El. « Je ne sais pas… J’aimerais bien. Je me suis beaucoup trop attachée à lui. » Tu marques une pause, et reprend. « Mais étant donné que c’est un chien fait pour les aveugles, je n’aurais techniquement plus besoin de lui quand j’aurais recouvert la totalité de ma vision. » Et ça t’embête beaucoup. Tu n’as pourtant pas envie de ruminer et de penser aux choses négatives. Tu secoues donc doucement la tête et tente de sourire un peu malgré tout. « Je le saurais en tant voulu. Je te tiendrais au courant. » Car pour le moment, un verre vous attend dans l’un des bars de cette grande ville. Tu ne sais pas où aller alors tu fais confiance à El qui reprend la marche, main dans la main. Ton sourire ne se fane pas, au contraire. Plus ça va et plus il illumine ton visage. Tu arrives à marcher sans la canne, aux côtés de ton chien, mais tu restes tout de même très lente. Ta vision n’est pas si bonne que ça et tu as peur de te manger un poteau encore une fois.
Au bout d’un moment, tu romps ce doux silence qui s’était installé entre vous. Tes yeux se tourne légèrement vers elle. « Ça veut dire que maintenant… Je suis ta petite-amie ? » Ose-tu demander en serrant un peu plus la main d’Eleven. Petite-amie. Ça te fait bizarre et ça te rend toute chose. Tu as l’impression de retomber dans la pré adolescence, de revivre ta première histoire d’amour. Enfin, ça pourrait l’être d’un côté. Car Jane est bien la première fille que tu aimes. Tu te stoppes soudainement, tirant légèrement sur son bras. « Je peux t’embrasser encore une fois ? » Une demande particulière et un peu étrange certes. Tu attends sa réponse qui te revient positive et tu t’approches alors d’elle, glissant une main sur sa joue. L’autre se glisse sur sa taille et tu viens lui offrir un baiser un peu plus profond tout en fermant les yeux. Tu le fais durer quelques secondes alors que ton chien s’assoit et vous regarde en penchant la tête. Il aboie une fois, de quoi t’aider à rompre le contact et rire doucement. « Je crois qu’on a un fan du couple Elmax… » Eleven et Max.
Elles auraient pu faire autrement, se le dire bien avant, éviter ces quiproquos absurdes et tous ces moments de confusion au cours desquels elles n’avaient pas osé se dire les choses, mais au fond, ce n’est pas si important. Ce qui compte, ici et maintenant, c’est le fait qu’elles sont ensemble, et à présent qu’elles ont tout à fait conscience de ce qu’elles sont l’une pour l’autre… Et Jane compte bien profiter de chaque moment… avec d’autant plus de bonheur que cet instant si parfait s’accompagne de ce qui ressemble à un miracle.
« Je ne t’imagine plus sans lui non plus », confirme Jane avec un léger sourire tout en caressant doucement le sommet du crâne du chien de Max… Evidemment, un chien d’aveugle qui n’a plus l’opportunité de remplir sa fonction ne peut plus aider une autre personne atteinte de cécité, qui en aurait peut-être besoin… Mais en même temps, y a-t-il quoi que ce soit de plus terrible que de séparer un animal de son maître ? Jane ne sais pas comment ces choses fonctionnent. « Si le moment venu, tu veux qu’on joue la carte du chien qui a mystérieusement disparu, je pourrais le garder chez moi le temps de », suggère-t-elle malicieusement, déjà prête à fomenté l’un ou l’autre plan alambiqué afin de permettre à sa petite amie (oh, comme ce mot lui plaît déjà si fort) d’avoir précisément ce qu’elle veut.
En attendant, ces considérations sont encore loin, et il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs non plus… Max est encore loin d’être guérie, et en ce qui les concerne, il est essentiel qu’elles savourent, avant toute chose, tous les moments qu’elles peuvent passer autour d’un verre….
« C’est exactement ce que ça veut dire, oui », répond Eleven avec on sourire, en serrant plus fort sa main dans la sienne. Maxine Mayfield est sa petite amie.
Et ça fait du bien de le dire, de le penser… ça lui fait du bien de pouvoir exprimer leurs sentiments aussi fort. Ça lui fait tellement du bien de pouvoir le dire. Ce sera encore un peu étrange, au début, car El avait tant répété que Max était sa meilleure amie qu’elle avait plus ou moins cherché à se convaincre que c’était vrai.
« Et tu peux m’embrasser autant de fois que tu veux… » Et l’instant s’après, elles s’embrassent de nouveau, sous l’aboiement du chien d’aveugle. « Moi je crois surtout qu’il est jaloux. Je le comprends, regarde-moi, comment tu veux qu’il rivalise », s’amuse-t-elle tout en glissant ses doigts dans les cheveux roux de sa petite amie. « Elmax… ça en jette. » Elle sourit. « Attends que Jim soit au courant. J’ai hâte de voir sa tête », ajoute-t-elle en riant à son tour.
Ton chien Kang-ho est en effet devenu un fidèle compagnon pendant plusieurs mois. Vivre sans lui désormais te parait inimaginable alors tu espères qu’on pourra accepter ton envie de le garder auprès de toi, le jour où tu retrouveras complètement la vue. Tu rigoles un peu à la proposition de Jane qui pourrait le garder chez elle pour faire croire à sa disparition. Tu souris ensuite et fixe ton ami à quatre pattes qui vous suit tranquillement sans aller trop loin. « Je ne dirais pas non à ça. Il t’aime déjà énormément, ça ne le dérangerait pas non plus… » Comme s’il vous écoutait et qu’il comprenait vos mots, il se met à aboyer joyeusement avant de venir lécher l’autre main de ta petite-amie. Même si désormais tu dois te concentrer sur cette voie de la guérison qui semble plus si loin que ça maintenant, tu as envie de profiter au maximum des jours qui suivent pour rester coller à Jane. Passer de meilleures amies à amoureuses fait bizarres mais c’est ce que tu attendais depuis longtemps, tu ne peux pas le nier. Ça n’allait plus entre Lucas et toi, et même s’il s’est montré courageux et présent à tes côtés lorsque Vecna voulait ta peau, il y a ce quelque chose qui ne peut plus se réparer. Et cet amour pour El est trop fort pour que tu puisses retourner en arrière. A ta demande, elle accepte et tu viens encore une fois goûter ses lèvres. Tu pouffes de rire. « Jaloux, c’est vrai. Faut qu’on lui trouve une copine aussi à ce toutou. » Tu frissonnes en sentant les doigts de ton bout de femme glisser dans tes cheveux, et tu glisses les tiens sur sa joue. Tu grimaces en pensant à Jim bien que ça t’amuse aussi d’imaginer sa réaction. « Alors là… Il va pas en revenir ! Je pense même qu’il va rien se douter au début, on sera pas obligée de laisser la porte entrouverte. » En même temps de dire ça, tu entres dans un petit bar qui n’est pas encore trop rempli. Tu arrives à avancer, mais l’aide de ta copine et de ton chien reste avant tout primordial. Tu n’es plus habitué à voir quelque chose, ça te perturbe grandement. « Tu voudrais boire quoi ? » Lui demandes-tu tout en venant t’asseoir à une table, ordonnant gentiment à Kang-ho de se coucher à tes pieds et pour ne pas qu’il gêne le passage.
Jane ne peut s’empêcher de sourire face à la réaction adorablement enthousiaste de cet adorable toutou pour lequel il serait difficile de ne pas se prendre d’affection… d’autant plus que la jeune femme associe naturellement cette charmante boule de poil à l’image de celle qu’elle ne saurait plus qualifier de meilleure amie à présent, mais dont il faut qu’elle s’habitue à appeler « petite amie ». ça lui fait encore bizarre, elle doit bien le dire… mais en même temps, c’est si naturel. Maintenant qu’elle sait ses sentiments réciproques, c’est comme si elle s’était ôtée un poids du cœur, elle se sent légère comme une plume, et elle veut savourer chacun des instants qu’elle peut passer avec elle. C’est si simple, si beau et si… nécessaire d’aimer comme elle aime Max. Elle n’échangerait cela pour absolument rien au monde.
« Je peux le comprendre », remarque El avec un fin sourire quand Max admet la jalousie du pauvre toutou qui lui aussi aurait probablement bien besoin d’une copine.
Et pour cause, qu’elle peut le comprendre. Si Jane pouvait faire mine de ne pas être d’un naturel jaloux, elle avait perdu toute crédibilité il y a quelques minutes… mais bon, ce n’est pas nouveau, en réalité… et ça l’amuse assez de se dire qu’à une époque, pendant un court moment, elle avait bel et bien jalousé Max. Jamais, à cette époque, elle ne se serait imaginée que leur relation prendrait cette tournure.
« C’est difficile d’accepter de te partager, tu sais », elle ajoute avec humour, certes, mais non sans une certaine franchise, dans le fond.
Et même si, à présent que leur relation est plus claire, Jane se promet de ne pas se montrer aussi bête et impulsive concernant l’entourage de sa petite amie, elle ne peut pas totalement promettre non plus de ne pas retomber de temps à autre dans certains de ses travers.
Sur quoi Jane évoque ce que sera la réaction de Jim quand il apprendra la nouvelle. Jane préfère s’en amuser plutôt que de s’en inquiéter, mais elle sait d’avance que, quand viendra le moment de lui en parler, elle ne sera absolument pas sereine, c’est même sûr et certain. Elle grimace quand Max ajoute, à juste titre, que son père de cœur leur demandera probablement de garder la porte entrouverte… Elle voudrait que ce soit juste une plaisanterie, mais elle connaît suffisamment Jim pour savoir qu’il n’en est rien.
« Il va être insupportable avec ça… Il a pas vu les années passées. Il me traitera toujours comme si j’avais dix ans de moins que mon âge », elle dit sans vraiment se plaindre, avec plus de tendresse qu’autre chose.
Toutes les deux se rendent dans un bar, qui à cette heure de la journée n’est pas encore trop fréquenté.
« Qu’est-ce que tu dirais de se prendre de cocktails ? On doit fêter ça dignement. »
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