Say Amen ! It's saturday night ! (Asmodeus)

▿ Date de naissance : 06/01/1987

Say Amen ! It's saturday night !

Après chaque concert, on en revenait inévitablement au même putain de refrain. Le retour à la réalité était toujours aussi violent. Adam avait beau reporter ce moment à plus tard, traîné un peu avec le groupe, boire un dernier verre et autres diversions du même genre, le calme et la solitude venait le prendre invariablement à la gorge sur le chemin du retour. Calme et solitude, deux choses qu'il n'avait jamais eues à craindre au Paradis. À cette époque, le coup de blues des journées post-extermination pouvait être comblé sans problème avec des briefings bidons, des concerts ou des fêtes. Adam n'était jamais seul au Paradis. Il n'avait pas à se soucier d'argent non plus. Il pouvait se maintenir occupé, prolongé indéfiniment l'instant présent dans une fuite vers l'avant aussi bruyante que divertissante. Au pire, il profitait des réunions assommantes d'ennui de Sera pour rattraper son retard de sommeil, sans se soucier d'être discret, et comptait à chaque fois sur Lute pour lui reporter les points importants ou intéressants de la dite réunion. Il n'était jamais seul non plus, parce qu'on cherchait sa compagnie, ou il pouvait l'ordonner. Jamais la mendier.

Ici, s'il avait pu compter sur un retour progressif de ses anciens pouvoirs, il n'avait, en revanche, pas su retrouver son ancien quotidien. Il devait faire sans cesse attention. S'il buvait trop, il ne resterait plus rien du salaire gagné pour le concert. (Et, même s'il avait décidé de s'en foutre, il y aurait une limite fixée par le montant du dit salaire qu'il ne pouvait pas dépasser). S'il revenait trop tard, il serait dans un état déplorable le lendemain et serait incapable de se lever tôt pour déposer Lute au travail. Etc. Etc. Autant de détails à la con qu'il devait prendre en compte. L'ancien ange le nierait, mais, il avait appris à faire avec, à bâtir de nouvelles habitudes, à d'autant plus savourer ces moments joyeux qu'il était rare et éphémère. Mais, pour l'heure, il se trouvait dans l'entre-deux entre ces instants en question, avec juste le putain calme et cette foutue solitude de merde pour accompagner ces pas.

Le silence de la ruelle où il marchait était insupportable. Avec un grognement contrarié, Adam leva la tête pour inspecter le ciel nocturne. Il pouvait faire le trajet de retour en un battement d'ailes. Littéralement. Il pourrait aussi invoquer un portail pour rentrer directement, s'il voulait s'éviter le vent froid nocturne. L'ancien ange s'arrêta et tendit les bras devant lui en mimant un cadre avec les doigts. Tête penchée sur le côté, et moue songeuse sur la bouche, il semblait se concentrer sur le décor qui se trouvait dans l'espace entre ses mains. Lorsqu'il écarta les mains, une petite sphère d'observation s'était formée. "Bingo." Se félicita-t-il avec un sourire satisfait. Il se pencha ensuite sur la sphère pour mieux observer le décor paisible de l'appartement. Un mouvement de poignet et la scène changea pour montrer la chambre. Lyra squattait le lit vide, avec toute l'impudence féline possible. Cette chatte commençait à prendre trop de ses mauvaises habitudes. Devait-il commencer à s'en inquiéter ? D'un nouveau mouvement de poignet, il retourna à son observation du salon, et zooma sur le frigo. L'horaire qui y était placardé annonçait que Lute travaillait.

Adam se détendit un peu. Au moins, il pouvait arrêter de râler sur le fait que Lute n'était pas venue au concert ! Elle avait une bonne excuse. Quoi que, sa lieutenante avait une excuse encore meilleure pour justifier son absence : il ne l'avait pas invité. Pire, il ne lui avait parlé ni de ce concert, ni de ceux précédents, encore moins du job de guitariste qu'il avait dégoté. D'ailleurs, ce n'était pas un 'job'. Il faisait du dépannage occasionnel... Et avait trouvé un poste fixe depuis quelques semaines... Mais ce n'était toujours pas un putain de job. Du moins, il arrivait à s'en convaincre tant qu'il ne creusait pas trop la question.

Le Premier Homme fit disparaître la sphère avec un grognement agacé. Il était encore moins pressé de rentrer, maintenant qu'il savait que personne ne l'y attendait. (Lyra ne comptait pas vraiment. Il savait que rien ne la ferait bouger de sa sieste, parce que lui-même réagirait exactement ainsi.) Non, décidément, ce soir, il ne pouvait pas se contenter de rentrer bien sagement. Un sourire s'étira sur ses lèvres, en même temps qu'une idée fit son petit bonhomme de chemin dans ses pensées. D'un claquement de doigts, il ouvrit un portail qu'il referma aussitôt derrière lui après l'avoir franchi.

La musique de l'Ozzie's trancha net et sans transition avec la trop grande tranquillité de la ruelle qu'il venait de quitter. Adam se laissa envelopper par l'ambiance avec un soupir soulagé presque nostalgique. Depuis combien de temps n'avait-il pas mis les pieds ici ? Une éternité, ou son équivalent, très certainement. Dire qu'il y a un peu plus de deux mois, il y venait quasiment tous les soirs ! L'ancien ange se laissa bercer par l'ambiance tout en prenant le chemin du bar. Son regard se porta, inconsciemment ou non, sur les personnes présentes et s'attarda plus précisément sur les femmes qui étaient, de toute évidence, seules et en manque de compagnie. Ce vieux réflexe constituait son quotidien avant d'avoir retrouvé Lute, et s'était la raison qui l'avait fait passer la porte du Ozzie's aussi régulièrement à l'époque. Le club était devenu rapidement son terrain de chasse le plus pratique.

Que penserait Lute s'il venait à découcher pour ce soir ? La pensée le prit totalement en traître, accompagné du souvenir du regard furieux de sa lieutenante, lors de leur retrouvaille, durant laquelle, pour résumé, une choriste s'était montré très entreprenante envers sa personne, ce qui avait bizarrement provoqué la colère de l'ancienne exorciste. Une pensée qui fit aussitôt suivie d'une bouffée d'orgueil. Putain ! Qu'est-ce qu'il en avait à foutre de ce que Lute penserait du fait de ne pas rentrer à l'appart ce soir ? Il était Adam, le putain de Premier Homme ! S'il avait envie de draguer, ce soir, et de dormir ailleurs, il avait parfaitement le droit de le faire ! Et, au moins, il pourra dormir dans un putain de lit plutôt que cette connerie de canapé inconfortable qu'il se coltinait ! Pourquoi il se sentirait coupable, ou une autre connerie sentimentale du même genre ? Il était parfaitement dans son droit !

Avec un grognement contrarié, il s'accouda au bar. "Comme d'habitude." Lança-t-il au barman, croyant avoir encore ces marques dans cet endroit. Raté. Le barman le regardait comme s'il venait de débarquer de la planète Mars. À la réflexion, sa gueule ne lui disait rien non plus. L'humeur maussade de l'ancien ange grandit d'un cran. Deux petits mois d'absence et tout était à refaire ici. Heureusement qu'il était entré par un portail angélique. Vu l'ignorance du serveur, le bouffon de la sécurité à l'entrée aurait été capable de lui interdire l'accès s'il s'était présenté de manière conventionnelle. "Une putain de bière. La Blue Moon. Grouille." Ordonna-t-il entre ses dents.

Adam poussa un nouveau soupir frustré. En attendant sa boisson (et, putain, le barman avait intérêt à ne pas se gourer dans sa commande), il sortit son téléphone de sa poche. Après quelques mauvaises manipulations, il arriva enfin à surfer sur les réseaux, passant en revue le hashtag du concert. Il s'était créé un compte au nom cryptique dont il n'avait même pas pris la peine de charger un photo en avatar, uniquement pour pouvoir suivre ce genre de chose. Concentré sur sa lecture des premières impressions du public face à la performance du groupe, il ne réalisa pas qu'il était bien loin de ce qu'il avait décidé de faire en venant ici. Encore moins qu'il n'était plus du tout dans l'ambiance des lieux.

LYA

I roar! And you cry! I'm the reason you run and hide! You better leave your hopes behind, no one's gonna stop me! You won't defeat my kind. A predator of my size. You better hope you're out of sight or you're doomed to be my victim. You can watch as I rise!
I will claim what is mine. I'm a literal monster !

▿ Date de naissance : 11/10/1975

La vie était quand même pleine de surprise. Un jour, on s'endormait comme le démon de la luxure, le lendemain, on était un simple humain dans un monde étrange qu'il n'arrivait pas tout à fait à comprendre, sans plus aucun pouvoir. Asmodeus avait donc commencé à refaire sa vie, il n'était plus le démon de luxure, mais son comportement n'avait pas beaucoup changé pour autant, il continuait à répandre le plaisir parce qu'à ses yeux, c'était bien un des rares trucs qui valait la peine quand on était un être humain. Sinon, que pourrait-il faire d'autre à la place ? Monter une comédie musicale niaise à la place ? Ah ! Il ferait beau voir, tiens. Comme si c'était son genre, déjà qu'il ne supportait pas les petits couples avec leurs manières. Il essayait de faire un effort quand il en voyait dans son club, mais parfois, il avait l'impression qu'on le faisait exprès sous son nez pour le provoquer. La perte - certes, momentanée - de Fizzarolli n'avait pas franchement améliorer son humeur, lui qui était déjà un peu soupe au lait, sans son petit Fizzy adoré, c'était presque une perte de temps d'essayer de lui parler.

Avec ces longs mois de mornes désespoirs et de peu d'envie ( et comble de tout : peu de plaisir ), il avait eu largement le temps de se faire à cette vie, aussi peu intéressante soit-elle, il ne savait cependant pas si c'était vraiment cette vie qui ne lui inspirait aucune passion ou si c'était parce que son cher Fizzy n'était pas à ses côtés. Peut-être un peu des deux ? Il se posait beaucoup de questions, il faut dire, plus que lorsqu'il était en enfer et que tout paraissait si simple. Être humain semblait réveiller quelque chose dont il avait l'impression que ce n'était pas là avant, tout comme des angoisses qu'il n'avait jamais eues. La vie des mortels semblaient bien compliqués. Il avait ouvert ce club, en espérant y trouver le réconfort qu'il voulait et faire taire les petites voix dans sa tête, pourtant il avait l'impression que c'était vint et qu'il ne pouvait rien faire d'autre que supporter cela jusqu'à... soit sa mort ou soit qu'il soit retourné dans son monde. Mais s'il mourait, reviendrait-il en enfer ? ça, c'était une très bonne question.

Il avait rapidement trouvé une sorte de routine pour se maintenir un peu la tête sous l'eau, surtout qu'il n'hésitait pas à profiter de l'alcool pour oublier quelques instants la tournure dramatique qu'avait pris sa vie actuellement. Il s'installait dans son propre club, un verre à la main, et regardait les gens passer, c'est comme ça qu'il avait repéré quelques clients réguliers, il avait même commencé à parler avec certains d'entre eux, comme si leur vie misérable l'intéressait vraiment ! Mais bon, au moins il avait l'impression de ne pas être le seul dans la merde et malheureux, donc ça l'apaisait un peu, il en était plutôt satisfait. En plus, ça lui donnait une très belle occasion de leur ouvrir les yeux sur les plaisirs qui se présentaient sous leurs yeux. Il profitait de chaque occasion pour que son commerce soit florissant, mettre à profit le malheur des gens en faisait évidemment partie, même si c'était le cas jusqu'à un certain point. Il n'irait pas non plus jusqu'à les rendre plus misérables, il n'était pas non plus cruel, fort heureusement. Il avait son petit caractère et il lui arrivait d'être parfois un peu piquant dans ses paroles, il n'était pas cruel, ce n'était pas dans sa nature. Généralement, il faisait peur autrement qu'en se montrant impitoyable, même si effectivement, on avait très peu envie de le voir en colère.

Ce soir était quand même un peu mieux, en partie, en très grande partie parce qu'il avait retrouvé Fizzarolli, ce qui améliorait considérablement son moral, mais tout le monde ne s'en portait que mieux étant donné que Asmodeus, lorsqu'il était de mauvaise humeur, pouvait être aussi chiant qu'un môme qui boude et fait des caprices à tout bout de champ, même si bon, il n'en était pas à casser la vaisselle comme certaines personnes totalement incontrôlables. Il savait que la vaisselle coutait cher et il était un homme d'affaires avant tout, il pouvait s'emporter, mais toujours avec une certaine modération, tout le monde n'est pas complétement taré au point de se laisser complétement aller à ses pulsions. Il préférait de loin avoir des pulsions sexuelles, avec des personnes consentantes, faire hurler des gens de plaisir. Le démon de la luxure aimait ce genre de défi, c'était bien plus intéressant que simplement s'énerver sur des gens qui ne lui ont rien fais.

Alors qu'il trainait dans le club, observant les gens autour de lui comme il le faisait très souvent, se baladant l'air de rien entre les tables, il remarqua cet homme. Un client régulier.. Enfin, avant, parce qu'il ne l'avait clairement pas vu depuis des semaines. Il s'était demandé où il était passé, mais sans plus, il lui était arrivé de discuter un peu avec lui, mais ce n'était pas non plus devenu son meilleur ami pour la vie, et il n'avait pas son numéro. Pourquoi lui aurait-il demandé ? Asmodée était sociable... dans une certaine mesure. Il ne vivait pas vraiment entouré d'amis, il aimait son statut de "Big Daddy" imposant qui faisait que personne ne l'approchait vraiment. En tout cas, personne ne le faisait pour autre chose que prendre son pied et honnêtement, lui non plus, la plupart du temps. Il savait que ce client-là, n'était pas intéressé par sa marchandise, c'est peut-être pour ça qu'il ne l'avait jamais approché plus que ça non plus, le laissant trouver son bonheur ailleurs. Pourtant, il semblait vouloir trouver autre chose que du réconfort dans les bras de quelqu'un ce soir. Il était visiblement agacé, impatient, et n'hésitait pas à le montrer. Asmodeus ne pouvait que comprendre cela, étant lui-même peu prompt à la patience.

- Tu m'as l'air bien énervé, mon cher Nathan.

L'aborda-t-il de façon nonchalante en s'installant à côté de lui, il paya néanmoins sa consommation au barman et lui fit signe de lui servir un cocktail, lui aussi avait bien besoin d'un petit remontant après tout. Et non, il ne savait absolument pas qu'il s'était trompé de prénom, vous pensez vraiment qu'il retient les prénoms de tous ses clients ? De tous ses employés ? C'est déjà bien qu'il retienne celui de Fizzarolli, il ne fallait pas trop lui en demander, Asmodeus était une petite tête après tout. Il ne retenait que les choses vraiment importantes. Il posa son regard sur Adam qui ne semblait pas du tout dans le mood du lieu, se demandant ce qu'il venait faire ici. Bien que l'idée, fugace, qu'il n'ait nulle part ailleurs où aller lorsque ça ne va pas, s'insinua dans son esprit.

- Pardonne mon barman, il faut avouer que ça fait un sacré moment qu'on ne t'avait pas vu, et tu nous reviens tout ronchon. Tu veux en parler à Big Daddy ?

Une voix enrobante, et pourtant, on avait n'impression qu'il parlait à un enfant de cinq ans, pas sûr qu'Adam le prenne très bien entre ça et le fait qu'il ne sache pas comment il s'appelle. Il ne le faisait même pas exprès, pour une fois, et c'était certainement ce qu'il y avait de plus drôle dans l'histoire, l'intention réelle d'Asmodeus de vouloir l'écouter et s'y prendre comme un manche. Et pas le bon manche, en plus.