I've got you, I won't let go again (ft Scorpius)

Scorpius avait toujours aimé l’école. Etudier était un véritable plaisir pour lui que ce soit au niveau des matières magiques que moldues. En effet, elles étaient bien les seules à pouvoir étancher sa soif de connaissance et sa curiosité sans limite. Maintenant, c’était plutôt une obligation, presque une corvée. Tout ce qu’il voulait, c’était retourner chez lui pour poursuivre ses propres recherches et tenter de percer les secrets de l’horcruxe qu’il avait en sa possession. Ses allées et venues à Poudlard étaient aussi un plaisir tout particulier, mais uniquement parce qu’elles concernaient ses recherches personnelles. Il aurait été tout aussi ennuyé par ses cours à l’école de magie s’il y était encore, avec de telles préoccupations en tête. Il n’y avait plus que la destruction de Voldemort qui lui importait. Pour venger Albus.

Toutefois, sa présence à l’université était malgré tout un bon signe. N’oublions pas que pendant presque un an, Scorpius en avait déserté ses bancs à cause de la déprime qui l’avait dévoré à la suite de la disparition d’Albus. S’isoler dans cette maison au bord de la plage lui avait fait le plus grand bien puisqu’il pouvait laisser libre cours à ses émotions sans qu’on vienne l’irriter avec du pathos convenu dont il avait horreur. Il ne voulait pas être plaint ou pris en pitié. Il voulait qu’on le laisse seul avec sa détresse et ses remords et qu’on lui laisse le temps de les vivre sans retenue. Il n’avait jamais supporté le silence de son père face au deuil de sa mère alors, ce n’était pas pour se l’appliquer à lui-même. Tout ceci pour dire que, s’il était enfin de retour à la fac, c’était signe qu’il remontait doucement, mais sûrement la pente et qu’il avait retrouvé gout aux études en dépit de sa passivité. Il était encore loin de se douter que cette nouvelle journée lui donnerait une énième raison de s’accrocher.

Sa journée de cours touchait à sa fin et il lui tardait de regagner son domicile pour se replonger dans ses recherches. Si autrefois Scorpius s’attardait à la fin des cours avec ses professeurs pour leur poser un nombre incalculable de questions toutes plus intéressantes les unes que les autres, depuis la rentrée, il se contentait de fourrer en vrac ses affaires dans son sac et de s’en aller aussi sec qu’il était entré. Ses enseignants regrettaient ce renfermement sur lui-même et le peu qui avait osé évoquer le sujet avec lui s’était pris une volée de bois vert en retour. Alors, plus personne ne se risquait à lui demander quoique ce soit. Ça lui reviendra… Aujourd’hui n’échappait à la règle : dès qu’il entendit la sonnerie retentir, il s’échappa de la salle mêlé à la nuée d’élèves. Alors qu’il empruntait à peine le couloir, il s’arrêta net, se faisant bousculer au passage par deux trois élèves qui n’avaient pas anticipé son arrêt. D’autres le contournèrent simplement. « Scorpius ! » Ça lui avait serré le cœur. Ça l’avait secoué tout court au point qu’il doutât que ses jambes puissent le tenir encore longtemps. Il n’osait bouger ni même se retourner de crainte de reconnaitre qu’il fut victime d’un mirage. Son mal-être était si profond qu’il se mettait à avoir des hallucinations maintenant ? Mais Scorpius était trop curieux pour se retenir plus longtemps de se retourner.

Sa mère se tenait devant lui, à quelques pas. Il n’osait toujours pas bouger, priant en son for intérieur pour qu’il ne soit pas en train de rêver. La tristesse se mêlait à l’inquiétude — avoir Astoria devant lui lui fit prendre conscience que, certes, il n’avait pas oublié le son de sa voix, mais le temps avait malheureusement égrené le souvenir de son visage dans sa mémoire. Et se prendre un tel constat en pleine figure était incroyablement douloureux au point que lui aussi se mit à pleurer. Il était heureux de revoir sa mère après presque sept ans de deuil impossible, mais triste de voir que son souvenir commençait à lui échapper. Il aurait pu rester longtemps planté-là avec ses doutes et ses craintes si l’enfant en lui, désireux de retrouver sa maman, ne l’avait pas poussé à courir vers elle afin de réduire à néant les quelques mètres qui les séparaient. « Maman ! » criait-il, libérateur, noyé dans ses larmes lorsqu’il la prit dans ses bras. Scorpius ne ressemblait plus au fils qu’elle avait laissé — il avait muri, grandi. C’était même une grande asperge maintenant, ce qui rendait sa fragilité encore plus attendrissante. « Tu m’as tellement manqué, maman ! Tellement, tellement, tellement… » Leurs sanglots mutuels attiraient les regards voyeurs des gens autour d’eux, mais Scorpius s’en moquait. Personne ne lui arracherait la volupté de ce moment. « J’ai tellement rêvé de te revoir un jour, ne serait-ce qu’une mini-seconde… Tu m’as trop manqué, c’était si dur… » Il la serrait plus fort contre lui. Il était à un moment de sa vie où il avait terriblement besoin de soutien pour se relever alors, sa mère était le meilleur des cadeaux. Et puisqu’il avait malheureusement l’habitude que son bonheur lui soit arraché, il murmurait, timidement et presque craintif : « T’es pas un rêve hein… ? Tu ne vas pas t’envoler… ? » Il avait beau avoir dix-neuf ans, dans ses bras, il redevenait le petit garçon de treize ans qu’elle avait dû laisser à contrecœur.