(abandonné) Hi, it's me, I'm the problem (ft. Rhaenyra)

Les journées au poste apportaient toujours leur lot d’action et étaient certainement la partie du module de formation que Rhaenyra préférait. En dépit de certains collègues plus expérimentés qui semblaient décidés à prendre les stagiaires (particulièrement féminins) de haut, elles lui donnaient toujours l’impression d’avoir un aperçu de ce à quoi ressemblait la cour des grands. Aujourd’hui ne faisait pas exception : entre le dealer arrêté pour la xième fois après avoir une nouvelle fois tenté de vendre sa marchandise aux élèves de l’université sans même tenter de s’en cacher, le couple d’alcooliques qui se battait pour une histoire de voiture mal garée sur la voie publique et le type ayant déclenché une bagarre dans la file d’un café simplement parce que le serveur avait eu le malheur de mal orthographier son prénom ; ce Mardi avait indéniablement réservé son lot de surprises.

Son attention se retrouvant captée par son maître de stage du jour qui s’affairait à lui montrer comment remplir un constat dans le cas où les parties n’arrivaient pas à s’entendre pour un accord à l’amiable, elle ne vit pas tout de suite l’étrange jeune homme qui venait d’être amené dans les locaux. Si lors de ses premiers jours elle avait été attentive aux moindres allées et venues en pensant qu’une vigilance constante faisait partie du métier, l’agitation incessante des lieux avait fini par l’habituer à une quasi indifférence du bruit ambiant. Ce fut pourtant en sortant du bureau où elle était installée qu’elle se rendit compte que quelque chose clochait : les regards de certains collègues se dirigeaient avec un peu trop d’insistance dans sa direction alors qu’ils avaient baissé le ton dès son arrivée comme s’ils voulaient à tout prix éviter qu’elle entende leurs conversations. Etrange.

Décidant d’abord de ne pas y prêter trop attention, ce fut en se dirigeant vers la machine à café située au fond du couloir que son attention fut retenue par un jeune homme dont le physique la laissa littéralement estomaquée. A condition de mettre de côté le fait qu’il n’ait qu’un unique œil, elle aurait presque pu jurer qu’il s’agissait de son oncle lorsqu’il était plus jeune. Jamais n'avait-elle encore croisé auparavant une personne qui lui était de toute évidence inconnue et qui lui semblait pourtant à également si familière et c’était une sensation pour le moins… déstabilisante. Et à en juger par la façon dont il l’interpellait sans la quitter du regard, la confusion semblait partagée.

« Qui êtes-vous ? »

Lui demanda-t-elle d’une voix directe dés l’instant où elle se retrouva pratiquement à sa hauteur, ne se permettant habituellement pas de faire la discussion aux personnes se trouvant dans sa position ; n'étant encore qu'une simple stagiaire pour l'instant, son expérience n’était pas encore jugée suffisante que pour lui permettre d'intervenir dans ce cas de figure. Pourtant, son attitude habituellement studieuse semblait être mise au placard pour cette fois : trop de choses étranges s’étaient produites ces dernières semaines et trop de personnes issues de son monde et de son passé semblaient avoir refait surface que pour ignorer cette énième rencontre incongrue.

Du haut de sa courte expérience, Rhaenyra pouvait affirmer une chose : sa posture était celle des personnes qui avaient tendance à l’horripiler au plus haut point dans le cadre de ses fonctions. Pire encore que ceux qui tentaient de se clamer innocents alors que toutes les preuves pointaient en leur direction, il y avait ceux qui se comportaient comme si tout leur était dû. Si certains pouvaient éventuellement avoir des réactions plus imprévisibles voir carrément menaçantes sous l’effet de la panique de se retrouver dans un tel environnement, eux semblaient toujours incroyablement sereins peu importe les charges retenues contre eux. D’une façon complètement insolite et déstabilisante, bon nombre d’entre eux parvenaient même à vous faire sentir comme si vous étiez la personne en tort simplement pour avoir eu l’audace de déranger leur quiétude.

Le silence qu’il impose avant de daigner réponse suffit à lui faire serrer les dents – si lui semble s’amuser de la situation, c’est loin d’être le cas de la jeune femme. En cet instant, elle ne pouvait d’ailleurs que remercier le sang-froid qui lui avait été inculqué depuis son arrivée dans le milieu qui l’empêchait de le secouer au sens propre du terme. Après ce qui lui semble être une éternité, la preuve qu'il lui manquait pour s'assurer que son intuition était la bonne finit par sortir : si la prononciation de certains mots semble un peu rouillée, il est désormais évident qu'ils ont dû recevoir une éducation à peu près similaire pour qu'il ait connaissance d'une langue aussi peu enseignée que le haut valyrien. De toute évidence, ils avaient bien davantage en commun que leur couleur de cheveux. « Skoros's aōha brōzi ?* » La prochaine question qu'il lui pose a le don de l'interloquer. De toutes celles qu'il aurait pu lui poser, c'était une interrogation concernant un des gardes royaux qui lui venait le plus spontanément ?

« Familière est un bien grand mot. » Tempère-t-elle, bien loin de se douter des lourds sous-entendus qui pèsent dans cette intonation cynique. « Il faisait partie de la garde de mon père autrefois alors naturellement, nos chemins se sont croisés à quelques reprises. » Notamment lors de la dernière nuit qu’elle avait passée à Westeros au milieu des gens du peuple, d’ailleurs. À cette pensée, ses sourcils se froncent légèrement : se pourrait-il qu’il soit impliqué d’une quelconque façon dans le rituel qui les avait conduit ici ? L’existence de la magie n’avait jamais été quelque chose qu’elle était prête à réfuter, mais quelque chose ne sonne pas tout à fait juste dans cette interrogation et la Targaryen le sait dès qu’elle lui effleure l’esprit. « Comment le connais-tu ? » Lui retourne-t-elle finalement la question, appuyant volontairement sur le dernier mot. S’il était de notoriété publique que leur famille possédait de nombreuses branches et que de nombreux rejetons plus ou moins légitimes devaient courir le royaume, cet étrange sentiment de familiarité combiné à la désagréable impression que son interlocuteur avait davantage la mainmise qu’elle sur toute cette situation lui faisaient dire qu’il ne pouvait pas simplement être un cousin éloigné dont elle n’aurait mystérieusement jamais croisé la route par le passé.

Citation :

* quel est ton nom ?