Choisir ou mourir | Kara

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Mary venait d'ouvrir les yeux dans un endroit qu'elle n'avait jamais vu avant aujourd'hui. Comment elle était venue jusqu'ici ? Elle n'en avait aucun souvenir. Pourquoi ? Elle l'ignorait. Tout ce qu'elle avait un choix à faire. Enfin, c'était ce que l'écran face à elle indiquait. Il n'y avait que trois mots notés dessus : choisir ou mourir. Et juste en dessous de l'écran et donc juste face à elle, il y avait une petite table, couverte d'une nappe blanche, dessus deux assiettes avec deux plats différents. Devaient-elles choisir entre ces deux plats ? Et si elle ne choisissait pas, alors elle allait mourir ? Était-ce une blague ? Une plaisanterie de mauvais goût ? Mary ne trouvait pas cela amusant et elle ne comprenait pas l'intérêt d'une telle mise en scène pour si peu de chose. « Vous savez ce que l’on fait ici ? Sommes-nous vraiment obligées de choisir entre ces deux plats ? Je trouve cela absurde. » Mary attendait les indications de la jeune femme qui se trouvait avec elle dans la pièce, jeune femme qu’elle n’avait pas vue en se réveillant, sans doute trop prise par ce mystérieux écran et cette mystérieuse consigne.

Puisque Mary ne voulait prendre aucun risque inutile, elle s’était approchée de la table pour observer les deux assiettes. Et dire qu’elle n’avait jamais eu à vivre ce genre d’aventure durant presque cinq années et qu’elle était désormais en train de vivre la deuxième en l’espace de quelques jours à peine. Est-ce que sa vie allait ressembler à cela désormais ? À une succession de tests et d’aventures de ce genre ? « Alors je choisis celle-là. » Dit-elle en désignant l’assiette à sa droite. Elle n’avait rien goûté – par peur d’être empoissonnée sans doute – mais elle avait choisi celle qui semblait meilleure et plus jolie. Et puisqu’il ne se passait rien, Mary se tourna vers l’inconnue. « Je crois que vous devez faire un choix vous aussi. » Mary savait que ce n’était pas le cas, mais elle espérait pouvoir sortir de cette mascarade une fois le choix de l’inconnue fait. Elle n’avait pas envie de rester enfermer ici à devoir faire des choix aussi absurdes, sans savoir ce qui l’attendait vraiment si elle ne choisissait pas ou si elle faisait le mauvais choix – si cela était possible.

Kara ignorait tout de ce qui était en train de se passer - mais elle n'en était pas à sa première expérience étrange, elle allait finir par en prendre l'habitude. Elle s'était plutôt rapidement adaptée à l'endroit. Ses yeux s'étaient vite posés là il fallait et elle avait facilement compris ce qu'on lui demandait - ce qui n'était pas difficile puisque, pour une fois, les choses étaient plutôt explicites. De plus, elle avait rapidement remarqué qu'elle n'était pas seule. La situation analysée globalement, elle s'était approchée des deux assiettes, à son tour. « Je l'ignore, mais je pense que oui. » Kara n'avait aucune certitude. En revanche, si cet écran leur demandait de choisir, il fallait choisir. Le risque était trop grand en refusant de le faire.

La jeune femme avait donc observé les deux assiettes et avait fait, très rapidement, un choix. Kara, elle, n'avait rien fait. Elle attendait de voir ce qui se passait. Sauf qu'il ne se passait rien. L'inconnue lui demanda alors de choisir également. Peut-être, en effet, que c'était ce qu'elle devait faire. Difficile à dire, malgré tout. Kara observait les deux assiettes à son tour. Elle n'hésita pas longtemps et se mit à choisir la même assiette que sa compagne. Elle ignorait si le choix était plus judicieux ou non, mais elle avait écouté son estomac plutôt que sa raison. « Je choisis celle-ci. » Dit-elle alors à voix haute en désignant la bonne assiette.

Rien. A nouveau, il ne se passait rien du tout. Le silence. Le calme. Le vide. Au fond d'elle, Kara savait ce qu'il fallait faire. Elle n'était pas stupide et sa petite voix intérieure lui soufflait que les choses allaient être bien plus difficiles que simplement avoir des choix à faire. « Nous devons manger. » Souffla-t-elle simplement en tournant son regard vers son interlocutrice, sans une explication supplémentaire.

Qu’est-ce que tout cela signifiait ? Y avait-il un réel but à cette étrange aventure ? Quel intérêt y avait-il à devoir choisir entre deux plats ? La ville avait su se montrer plus imaginative par le passé. Mary trouvait tout cela absurde, pourtant, elle avait fait son choix. Elle avait choisi le plat qui lui semblait le plus agréable à l’œil, celui qui lui semblait – d’apparence – meilleur. Bêtement, elle imaginait que ce choix serait le seul qu’elle aurait à faire. Alors elle n’avait pas pris le temps de réfléchir, elle s’était contenté de choisir. Puisque rien ne se passait, elle supposait que la jeune femme qui se trouvait à ses côtés devait faire un choix elle aussi. Seulement, lorsqu’elle fit un choix à son tour, rien ne se passa. Alors que devait-elle faire ? Les règles semblaient pourtant simples. Elles n’étaient que deux dans cette pièce et il n’y avait rien en dehors de ces deux assiettes et de cet écran.

« Bien évidemment. » Lâcha-t-elle en levant les yeux au ciel. Elle devait manger cette chose. Se contenter de choisir aurait sans doute été trop simple. Même si le plat lui semblait bon, elle n’avait nullement envie d’y goûter, ne sachant pas de quoi il était composé. N’ayant, pourtant, pas d’autres choix, la jeune femme attrapa un petit morceau – avec les mains, puisque les couverts n’avaient pas été fournis – et le porta à sa bouche. « C’est infect. » Lâcha-t-elle, grimaçant de dégoût. Les apparences étaient donc trompeuses. Ce plat semblait bon, en réalité, il n’en était rien. « Qui pourrait avaler une horreur pareille ? » Personne, elle en était certaine. En tout cas, elle ne comptait pas en avaler une boucher de plus. « À votre tour. » Dit-elle, avec une légère grimace toujours présente sur le visage.

Lorsqu’elles eussent mangé un morceau chacune, une porte se dessina dans le mur, les laissant apercevoir une autre pièce. Sans un mot, Mary s’était avancée pour s'y rendre, comprenant que le jeu n’allait peut-être pas être aussi simple qu’elle ne l’avait imaginé.

De toutes les personnes avec qui Kara aurait pu vivre cette aventure, elle devait la vivre avec une personne particulièrement... Désagréable ? Il n'y avait aucune chaleur dans sa voix, presqu'une pointe naturelle d'agacement - en y regardant de plus près, elle était plus proche d'une androïde que Kara.

Puisqu'elles avaient toutes les deux fait un choix et que rien ne s'était passé, Kara avait supposé qu'elles devaient manger. Son interlocutrice, en levant les yeux au ciel, avait répondu comme une évidence. Si c'était si évident alors, pourquoi n'avait-elle pas commencé à manger ? Kara ne répondit rien. Elle préférait ne pas se mettre l'inconnue à dos. A la place, elle lui laissait l'honneur de goûter à ce plat la première. Si les mots qu'elle prononçait n'étaient pas suffisants - mais ils n'étaient - il suffisait de voir sa grimace de dégoût pour comprendre que ce plat n'était bon que d'apparence. « Nous. » Répondit-elle pour détendre l'atmosphère chargée, tandis qu'elle portait, à son tour et sans perdre une seconde, un morceau de cette nourriture dans sa bouche. Sa grimace fut la même que celle de sa compagne, mais elle mâcha et avala sans faire d'histoires. Perdre du temps n'était pas dans ses habitudes, encore moins dans une situation comme celle-ci.

A peine eut-elle avalé qu'une porte était apparue, se dessinant mystérieusement dans un mur face à elles. Kara était surprise, mais ne laissait rien paraître. A la place, elle s'était simplement contenté de suivre la jeune femme dans cette autre pièce. Leur calvaire n'était, semblait-il, pas terminé.

En entrant, les yeux de Kara s'étaient mis à la recherche de la prochaine épreuve. La porte derrière elles avait disparu. Il ne restait qu'un nouvel écran et une table, comme dans la pièce précédente. Sur cette table se trouvaient deux boites à la taille et à la couleur identiques. Rien ne pouvait les différencier visuellement et, en s'approchant, elles ne pouvaient rien voir de leur contenu non plus. « Un nouveau choix. » Souffla-t-elle plus pour elle-même que pour sa compagne. « Cette fois-ci, impossible de nous fier à notre vu. » Les apparences n'y étaient pour rien ici, elles devaient se fier à autre chose, mais à quoi ? « Peut-être que... » Dit-elle en attrapant la boite la plus à gauche avant de la secouer légèrement et de la reposer. Elle ne faisait aucun bruit particulier, mais elle était très légère. Elle prit ensuite la seconde boite et fit de même. Celle-ci était nettement plus lourde, mais tout aussi silencieuse. « Je choisis celle-ci. » Affirma-t-elle en désignant la boite la plus lourde. Naturellement, elle avait eu envie de se diriger vers celle qui était très légère, mais contrairement à la première pièce, elle préférait ne pas écouter son instinct et dire le contraire de ce qu'elle pensait. Peut-être que les choses fonctionneraient mieux ainsi ?

Si les choses étaient simples, un seul choix aurait suffi, mais bien évidemment, cette ville aimait se jouer de ses habitants. Les deux femmes avaient alors fait leur choix. Elles avaient chacune choisie le plat qu’elles semblaient préférer - d’apparence du moins, puisqu’elles n’y avaient pas goûté - mais ce n’était pas suffisant. En plus de choisir, elles avaient dû manger une cuillerée. Un pur délice, bien évidemment, la grimace de Mary en était la preuve.

En tout cas, une nouvelle porte s’était ouverte. Lorsque les deux femmes s’étaient avancées, lorsqu’elles étaient entrées dans l’autre pièce, la porte s’était aussitôt refermée derrière elles, avant de disparaître. Cette fois-ci, elles ne devaient pas choisir entre deux plats, mais plutôt entre deux boîtes. Le problème étant qu’elles étaient parfaitement identiques. Elles avaient la même forme, la même taille… Sa compagne d’aventure les avait prises une par une et les avait secouées. En l’observant, Mary en avait déduit qu’une des deux était lourde, contrairement à l’autre, qui semblait très légère. Sans perdre de temps, l’inconnue avait choisi la boîte la plus lourde. « Alors je choisis celle-là. » Puisque la jeune femme avait choisi l’autre, elle n’avait plus vraiment le choix. Mais rien ne se passait. Leur choix n'avait pas été suffisant, une fois encore. « Bon, je suppose que nous devons ouvrir la boîte. » Dit-elle en s’avançant vers la boîte en question. « Sérieusement ? Cette boîte est vide. » Dit-elle, toujours agacée par la situation. Elle ne comprenait pas à quoi tout cela rimait. Choisir entre deux assiettes de nourriture, entre deux boîtes… C’était quoi la suite. Quelles étaient les autres absurdités qui les attendaient ? « Que contient votre boîte ? » Demanda-t-elle, sans savoir si elle avait vraiment envie d’en connaître le contenu.

Une fois encore, mais complètement à l'aveugle cette fois-ci, les deux femmes devaient faire un choix face à deux boites. L'une était légère et silencieuse. L'autre était un peu plus lourde, mais toujours aussi silencieuse. Autant dire que secouer les deux boites n'avaient pas été d'un très grand secours, mais elle avait voulu tenter quelque chose. Son instinct la poussait à prendre la boite vide, alors elle avait choisi l'autre. Histoire de tenter quelque chose puisque la première fois suivre son instinct n'avait pas forcément été une bonne chose.

Mary, quant à elle, avait choisi l'autre boîte. Malgré les choix, rien ne s'était passé. Il fallait toujours en faire davantage pour espérer obtenir un résultat. La jeune femme s'était donc approchée pour ouvrir la boîte qu'elle avait choisie. Elle était complètement vide. Ce constat agaça profondément la jeune femme, Kara avait pu le remarquer. A son tour, elle avait donc ouvert la boîte qu'elle avait choisie. Lentement, le coeur battant à tout rompre, elle avait soulevé les différentes parties pour trouver, au fond de la boîte, scotchée, une arme. Doucement, sans mouvement brusque, elle avait retiré le ruban adhésif pour la sortir et la montrer à sa compagne de mésaventure. « Une arme. » Etait-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle ? Un moyen de se défendre ou une incitation à se débarrasser l'une de l'autre ? Les pousserait-on à bout pour qu'elles s'en servent ?

Qu'importe. La question n'était pas encore là. Une nouvelle porte s'était dessinée dans le mur, face à elles. La troisième épreuve allait, semblait-il, commencer. Alors, arme dans la main, même si elle n'aimait pas cela, Kara se dirigea vers cette dernière. « Prête ? » Demanda-t-elle à la jeune femme qui l'accompagnait avant d'en franchir le seuil.

Comment faire un choix entre deux boîtes parfaitement identiques ? L’une semblait, certes, plus lourdes que l’autre, mais cela ne voulait pas dire grand-chose. Lorsque Kara les secouées, il n’y avait aucun bruit. C’était comme si les deux boîtes étaient vides. Seul leur poids semblait être différent. Alors lorsque Kara avait fait son choix, Mary s’était contenté de désigner l’autre boîte, pensant que cela n’avait aucune importance. Et cela semblait se confirmer, puisque la boîte de Mary était vide. En revanche, celle de Kara contenait une arme. Pourquoi une arme ? Qu’allait-elle devoir en faire ? La première fois, elles avaient dû goûter le plat. Et si cette fois, elle allait devoir se servir de l’arme ? Mais contre qui ? Contre un ennemi ? Ou contre Mary ? Accompagné d’un geste de recul, Mary avait levé une main - comme si ce geste allait la protéger contre cette arme - mais elle n’eut pas le temps de dire quoi que ce soit puisque la prochaine porte s’était ouverte. Soulagée, Mary avait baissé la main, elle n’allait pas mourir, pas encore. « Prête ! » Répéta-t-elle alors avant de s’avancer.

Cette fois-ci, il n’y avait rien. Pas de table, pas d’assiettes, ni de boîtes. Il n’y avait que deux portes. Voilà le choix qu’elles devaient faire. Elles devaient choisir la prochaine pièce dans laquelle elles allaient devoir se rendre. Comment choisir sans savoir ce qui les attendait derrière ? C’était impossible. Une fois encore, elles allaient devoir faire le bon choix. Une fois encore, elles allaient devoir faire confiance en leur instinct et au hasard. « Comment choisir entre ces deux portes ? » Ce n’était pas une vraie question, seulement une plainte causée par la peur et l’agacement face à la situation. Les deux portes étaient totalement identiques et il n’y avait aucune inscription, aucun détail pouvant les aider à choisir. « Laquelle vous inspire le plus ? » Demanda-t-elle, incapable de faire un choix. « On empruntera cette porte. » La porte qui inspirait le plus Kara, après tout, il n’y avait pas beaucoup de façons de faire un choix.

Kara avait remarqué le léger mouvement de Mary à la vue de cette arme, et elle ne pouvait pas lui en vouloir de ne pas lui faire entièrement confiance. Après tout, elles ne se connaissaient pas et Kara aurait pu avoir à s'en servir. Heureusement pour elle, ce n'était pas dans ses intentions de le faire. Elle, tout ce qu'elle voulait, était de rentrer chez elle, au plus vite.

Arme en main, Kara se dirigeait vers la nouvelle porte qui était apparue non loin d'elle. Une nouvelle épreuve semblait encore les attendre. Ça n'en finirait donc jamais ? Deux portes s'offraient à elles, cette fois-ci. Le choix résidait là. Entre ces deux portes. Deux portes que rien ne semblaient différencier. Elles semblaient parfaitement identiques et rien dans la pièce ne leur indiquait celle qu'elles devaient choisir. A la question de Mary, Kara n'avait rien répondu parce qu'il n'y avait rien à répondre. Il n'existait pas de bon moyen de choisir, mais il fallait choisir, malgré tout. Il n'y avait que le hasard pour les aider.

Kara n'osait pas toucher les portes, de crainte que seul le toucher suffise à faire un choix. Alors, elle se contentait de les observer, attendant une réponse miraculeuse à ses questions silencieuses. Mary avait alors repris la parole pour lui demander celle qui l'inspirait le plus. A vrai dire, aucune. En revanche, lorsqu'elle avait poursuivi, Kara s'était tournée brusquement vers Mary. « Attendez, quoi ? » Pourquoi lui mettait-elle toute cette responsabilité sur le dos, sans lui demander son avis d'abord ? « Je ne veux pas être responsable d'un mauvais choix ! » Il aurait été préférable d'en discuter d'abord, non ? Apparemment pas, selon la jeune femme face à elle.

Kara prit donc une longue inspiration pour se donner du courage. Elle avait fermé les yeux et avait écouté son instinct. Celui qui se trouvait au plus profond d'elle-même - et elle regrettait ses dons d'androïde qui lui auraient été bien utiles aujourd'hui, dans cette situation. « Très bien. » Avait-elle soufflé, en se concentrant. « Celle-ci ! » Avait-elle soufflé, hésitante et pleine de crainte, en désignant la porte de gauche. Doucement, sa main s'était approchée de la poignée, sans la toucher. Elle restait en suspens, juste au-dessus. « Vous êtes prêtes ? On le fait ensemble. » Hors de question qu'elle ouvre cette porte seule. Ouvrir une porte pouvait devenir un acte terrifiant dans une situation comme celle dans laquelle elles se retrouvaient. Il fallait dire que derrière cette porte pouvait se trouver absolument tout et n'importe quoi. Alors, elle tenait à ce qu'elles le fassent toutes les deux, en même temps.

Comment choisir entre deux portes identiques ? Deux portes parfaitement identiques que rien ne différenciait. Mary était incapable de faire un choix. Ou plutôt, elle ne savait pas quoi choisir. Celle de droite ou celle de gauche, cela ne changeait rien. Enfin si, l’issue était sans doute différente, mais le choix resté le même. Alors elle avait laissé Kara choisir. L’une des portes lui inspirait peut-être plus confiance. L’une lui donnait peut-être plus envie d’être ouverte. « Argh ! Ce n’est qu’une porte, elles se ressemblent parfaitement. Personne ne vous en voudra d’avoir fait le mauvais choix. » Pourquoi réagissait-elle ainsi ? Il n’y avait rien qui différenciait les portes, alors elle choisissait et si elle avait raison, c’était tant mieux, si elle se trompait elle n’y pouvait rien, même Mary pouvait le comprendre.

Kara avait fini par céder et avait choisi une porte. Comme quoi le choix n’était peut-être pas si compliqué finalement. Elle avait fermé les yeux et avait choisi, laissant certainement parler son instinct. Qu’importe, le choix était désormais fait. C’était donc la porte de gauche qu’elles allaient choisir. « Très bien. » Dit-elle en souriant légèrement. Kara avançait la main vers la poignée, mais s’était arrêtée avant de toucher la porte. Elle préférait qu’elles touchent la porte à deux. À vrai dire, Mary était d’accord avec elle. Ne pas toucher la porte en même temps que Kara était peut-être dangereux pour elle. Alors autant le faire en même temps. « D’accord, on le fait ensemble. » Dit-elle en s’approchant de la porte. Mary et Kara avaient donc ouvert la porte ensemble. Et le choix semblait être le bon. « Vous avez fait le bon choix visiblement. En tout cas, les Enfers ne se cachent pas derrière cette porte. » Dit Mary souriant légèrement, avant d’entrer dans la pièce suivante, impatiente et craintive de savoir ce qui les attendait par la suite.

Cette jeune femme n'était pas agréable. Sur certains points, elle se montrait même particulièrement détestable. Si personne ne lui en voudrait de faire le mauvais choix, pourquoi ne le faisait-elle pas elle-même ce fameux choix ? Pourquoi l'imposait-elle à Kara, qui était tout aussi perdue qu'elle ? Sans doute était-elle bien trop peureuse pour oser le faire. Alors, sans perdre de temps à lui répondre quoi que ce soit - et pour éviter de se prendre la tête avec - Kara avait choisi. Elle avait laissé son instinct choisir, parler.

Son choix était fait. La porte de gauche. Ensemble, puisque Kara préférait qu'elles l'ouvrent en même temps pour éviter toute mauvaise surprise, les deux femmes tournèrent donc la poignée de la porte. Lentement. Derrière, il ne semblait y avoir ni démon, ni flammes de l'enfer. C'était déjà une bonne chose. Cependant, elles ne devaient pas se réjouir trop vite. Il ne fallait jamais se réjouir trop vite dans ce genre de situation parce que c'était à ce moment-là que le pire arrivait.

En entrant, dans un premier temps, Kara n'avait rien remarqué de particulier. Rien jusqu'à apercevoir deux noms gravés sur l'un des murs. En dehors de ces noms, la pièce était entièrement vide. De ces noms, Kara n'en reconnaissait qu'un. Un nom précieux pour elle. Important. Un nom essentiel même. Un nom pour qui elle était prête à tout. Absolument tout. Alice. Aussitôt, sans toucher à rien, juste au cas où, Kara s'était approchée pour signaler : « Il s'agit du prénom de ma fille. » Au vu des circonstances, il y avait fort à parier que l'autre nom sur ce mur était aussi important. Pas pour elle, non, mais pour cette inconnue, pour cette femme à ses côtés. Le choix risquait donc d'être là. Choisir un prénom. Choisir un prénom sans savoir pourquoi. Choisir un prénom sans savoir si c'était pour les bonnes ou les mauvaises raisons. Choisir un prénom au détriment de l'autre. Faire un choix qui protège ou qui sacrifie, sans le savoir à l'avance.

Kara avait fait son choix. Elle avait choisi la porte à emprunter. C'est à deux que les jeunes femmes l'avaient poussée, craignant que quelque chose de mal n'arrive si elles ne le faisaient pas ensemble. Mary avait craint que quelque chose de mal se cache derrière. Elle avait eu peur d'avoir laissé Kara faire le mauvais choix. Peur que cette porte ne les emmène vers quelque chose de mauvais. Fort heureusement, il ne s'était rien passé. Elles avaient sans doute fait le bon choix. Ou peut-être que derrière l'autre porte, il n'y avait rien eu de mauvais. Peut-être même que la sortie se trouvait derrière cette autre porte.

Dans cette nouvelle pièce, il n'y avait rien. Aucun objet, aucune porte. Contrairement aux précédentes pièces, il n'y avait que deux noms inscrits sur le mur. Si Mary avait immédiatement reconnu le prénom de son fils, elle ne savait pas qui était cet autre nom. Il était presque évident qu'il s'agissait d'un proche de Kara, peut-être même de son enfant. Mary n'eut pas à attendre très longtemps, elle n'eut pas non plus à poser la question, puisque la jeune femme avait répondu à sa question. Alice était sa fille. En entendant cette phrase, Mary sentit son cœur se serrer. Pour son enfant, elle était prête à tout. Elle était prête à tous les sacrifices du monde pour le garder en vie, pour le protéger. Mais que devait-elle faire alors ? Choisir le prénom de son fils signifiait le sauver ou le tuer ? Et si Kara était une bonne mère, alors elle allait se battre pour sa fille. Alors quoi faire ? « Choisir un nom signifie le sauver ou le condamner ? » Demanda-t-elle tout en sachant qu'elle n'obtiendrait aucune réponse sûre. « Je sauve George ! » Lâcha-t-elle sans prendre le temps de discuter avec Kara. Elle ne voulait pas que du mal soit fait à l'enfant de cette femme, mais elle refusait de perdre son fils. Alors, elle se montrait égoïste, peut-être, mais elle s'en fichait sincèrement. Elle savait que Kara allait aussi choisir de sauver sa fille.

Deux prénoms. Alice. George. Deux prénoms qui risquaient de tout changer à cette situation - difficile de continuer à s'entraider dans un tel cas. La première était la fille de Kara. Le second était le fils de Mary. Tout naturellement, chacun voulait protéger son enfant. Chacun était prêt à tout pour sauver son enfant. Mais choisir le prénom, était-ce le sacrifier ou le sauver ? Rien ne leur indiquait. Mary se posait la même question. Mary n'avait pas les mêmes réponses. Il était impossible de savoir. Il fallait prendre une décision à l'aveugle... Il fallait jouer avec la sécurité de leur enfant. Le devaient-elles vraiment ?

Kara s'apprêtait à répondre quelque chose. S'apprêtait à refuser de choisir parce que personne ne pouvait faire une telle chose, un tel choix. Pourtant, Mary faisait un choix. Rapide. Irréfléchi. Guidé par son instinct de mère. « Non ! » Avait rétorqué Kara, sans réfléchir à son tour. « Non ! Vous ne pouvez pas faire ça ! Nous devons discuter, nous devons trouver une solution... » S'emportait la jeune femme, refusant que sa fille soit sacrifiée ou condamnée à elle ne savait quoi. Alice méritait d'être en sécurité comme ce George, mais si Mary ne lui laissait pas le choix, alors... « Je ne voulais pas faire ça... » Souffla-t-elle en sortant l'arme qu'elle avait trouvée précédemment pour viser son interlocutrice avec. « Je ne vous laisserai pas sacrifier ma fille ! » C'était hors de question. C'était impensable. Pour autant, elle n'avait pas l'intention de lui tirer dessus, elle voulait simplement la raisonner, la pousser à faire les choses autrement. Kara ne voulait pas non plus sacrifier l'enfant de cette femme, bien sûr. Elle ne voulait faire aucun sacrifice, aucun choix. Elle voulait être raisonnée et faire céder cet endroit sans qu'elles, elles ne doivent céder. Elle voulait mettre fin à ce jeu parce qu'elle ne supportait plus d'en être la marionnette.