This is the TARDIS... and it's mine [PV Sarah Crewe]

Lorsque son tournevis sonique s’était remis à fonctionner, le Docteur avait d’abord été trop fasciné par le phénomène pour trop y réfléchir. Il avait savouré de pouvoir analyser à nouveau tout ce qui était sur son chemin. Et maintenant, il aurait plus de facilité à tout découvrir sur cette ville. Il avait cru sincèrement pouvoir lever tous les mystères de cet univers pendant une grosse semaine avant de se rendre compte à quel point c’était illusoire de le penser. La ville était vaste et si rien n’avait été trouvé pour expliquer le phénomène depuis trois ans, il n’allait pas débloquer ça en une semaine.

Mais ce dont il ne prit conscience qu’une semaine plus tard, c’était que son tournevis sonique s’était réactivé pour une bonne raison. Il avait repéré quelque chose et ce quelque chose ne pouvait être que son TARDIS. Le tournevis était lié au TARDIS, c’était lui qui le lui fournissait après tout. Donc, il n’était pas idiot de penser que le tournevis sonique pouvait s’activer parce que le TARDIS avait repris une certaine vie. Et il ne restait plus qu’à le trouver et à en reprendre possession. C’était la nouvelle aventure du Docteur : Trouver le TARDIS et se le réapproprier.

D’aucuns pourraient dire que ce n’était pas lui qui avait volé le TARDIS mais le TARDIS qui l’avait volé. En tout cas, c’était ce que son âme avait prétendu lorsqu’elle avait eu l’occasion de communiquer au travers d’un corps humain. Mais le Docteur n’avait pas envie de lui donner raison sur ce point. Il était celui qui avait contrôlé la situation. S’il était sincère avec lui-même, ils formaient probablement une bonne équipe depuis le tout début. Le Docteur dans son TARDIS, le Docteur et sa petite boîte bleue. Le Docteur face au monde, juste avec elle. Elle était sa belle, et il lui fallait la retrouver.

Armé de son tournevis sonique, il se dirigea dans la direction que celui-ci lui indiquait et se retrouva sur la plage de la ville. Il y avait principalement des promeneurs avec leurs chiens. Le Docteur poursuivit le chemin, guidé par son tournevis et soudain, il l’aperçut au loin. Il se figea, un instant incrédule, avant de se précipiter vers la porte de bois bleue aux couleurs de la police anglaise. Il posa la main sur la porte, comme s’il s’apprêtait à caresser une maîtresse. Il était figé par l’émotion. Il l’avait retrouvé, il avait retrouvé son TARDIS.

« Mon TARDIS, ma belle, c’est toi ! Et tu n’es même pas abîmée. Regarde-toi, mais regarde-toi… », marmonna-t-il avant de se rendre compte d’un détail et de poser son front sur la porte en bois. « Je n’ai pas ta clef… »

Mais la porte en bois s’ouvrit alors sans clef. Le TARDIS ouvrait à son Docteur, son Voleur, celui qu’elle accompagnait dans ses voyages, pour de nouveaux voyages. Il s’était ouvert pour lui, et il allait enfin pouvoir repartir pour de belles aventures à bord de son moyen de transport préféré, celui qui lui promettait toujours mille et une aventures.

Entrer dans le TARDIS donnait l'impression au Docteur de rentrer chez lui. Le décor était exactement le même que lorsqu'il l'avait quitté, cette version moderne qui avait suivi le départ de Rory et Amy après l'arrivée de Clara. Toutes ces personnes qu’il avait retrouvé allaient pouvoir repartir en vadrouille avec lui, à condition que le TARDIS accepte de refonctionner. Mais il lui avait ouvert la porte. Il n'allait donc pas lui faire un caprice maintenant, n'est-ce pas ? D'ailleurs, le Docteur avait bien envie de faire un petit voyage pour le roder et s'assurer que tout marchait bien, ne serait-ce que jusqu'à la lune, par exemple.

Mais pour le moment, il était comme un amant qui retrouve une maîtresse qu'il n'a pas vu depuis très longtemps. Il caressa chaque console et parla doucement à chaque manette du vaisseau. Il minauda comme s'il venait de retrouver celle que son cœur avait choisie. Ce qui ressemblait peut-être à un vaisseau pour les autres était beaucoup plus pour le Seigneur du Temps. Son amie, sa compagne du premier jour, celle avec qui il avait vécu tant d'aventures et connu tellement de gens. Tous ses compagnons qu'il avait eus et perdus, il les partageait avec le TARDIS.

« Ma belle, ma toute belle, m’emmèneras-tu en voyage loin d'ici ? »

Mais alors qu'il était sur le point de choisir une destination pour tester les rouages, il aperçut la petite fille qu'il n'avait pas remarquée jusqu'à présent, du fait de son silence. Elle était tellement étonnée de ce qu'elle venait de trouver qu'il ne savait plus quoi dire. Ce n'était pas la première fois une personne pénétrait dans le TARDIS sans que le Docteur ne s'en aperçoive, mais cela restait quelque chose de rare. Mais comme il avait été surpris par la rencontre avec sa machine, cela pouvait expliquer son inattention. En tout cas, il n'avait pas l'intention de lui faire peur.

Il s'approcha donc de la jeune fille en douceur, afin de ne pas la brusquer et lui fit un sourire. Ce n'était pas la première fois qu'il rencontrait de jeunes enfants et il avait toujours beaucoup aimé leur capacité à s'émerveiller et à partager la féérie qu'il pouvait avoir en lui-même. C’était la raison pour laquelle il les accueillait bien volontiers dans le TARDIS, à condition qu'ils respectent des règles élémentaires de base. Parce que les enfants c'était très curieux et cela touchait à tout. Et le TARDIS était définitivement un endroit où il ne fallait pas toucher à tout.

« Bonjour toi, je ne t'avais pas vue entrer. N’aie pas peur je ne vais pas te gronder, mais ne touche à rien d'accord  ? »

Quand on regardait le Docteur avec son TARDIS, on avait presque l'impression de voir un amant retrouver sa belle. Cela faisait tellement de temps qu'ils voyageaient ensemble que cette machine était bien plus pour le Docteur qu’un amas de vis et de boulons, c'était sa compagne de la première heure, d'autant plus depuis qu'elle s'était incarnée et qu'il avait pu discuter avec elle. Il avait eu la preuve qu'il y avait un véritable être à l'intérieur une âme, une personnalité, un être qui lui était cher et à qui il était cher également. Et cette complicité durait depuis le premier jour où il l'avait choisie alors qu'il était ce vieillard qui voulait fuir tout ce qu'il exécrait chez lui.

Pour cette raison depuis cette découverte, dès lors qu'il la perdait, la douleur et la crainte étaient la même que s'il s'était agi de la perte d'un ami. Et cela faisait trois ans qu'il évoluait dans cette ville en ne sachant absolument rien de ce que le TARDIS était devenu. Il l'avait vécu comme un véritable cauchemar, et il avait maintenant l'impression de respirer à nouveau comme s'il avait retenu son souffle jusqu'à cet instant. Personne ne pouvait imaginer jusqu'à quel degré un Seigneur du Temps était capable de retenir son souffle, mais il n'était pas si ridicule d'utiliser cette image qu'on aurait pu le penser au départ, y compris pour une durée de trois ans.

Cela expliquait qu'il n'ait pas entendu la petite fille entrer et qu'il ne se soit pas aperçu qu'il n'était plus seul dans la pièce. Il aurait pu la chasser mais cela allait à l'encontre de sa façon de faire depuis la première fois qu'un humain avait posé les yeux sur sa machine et était entré dedans. Il n'avait pas emmené les premiers avec lui de gaieté de cœur, c'était plutôt pour leur prouver quelque chose, mais le fait était là, le Docteur n'avait jamais réellement chassé quelqu'un du TARDIS. Enfin, non, ce n'était pas tout à fait vrai, il avait refusé certaines personnes parce que leur état d'esprit ou ce qu'ils étaient ne correspondait pas à ce qu'il pouvait leur donner à bord.

La fillette semblait docile et déterminée à lui obéir en ne touchant à rien. De fait, elle était la bienvenue. Bien évidemment, elle ne put se retenir de lui poser diverses questions en rapport avec sa mystérieuse boîte bleue. Compte tenu qu'elle se conduisait bien et qu'elle n'avait fait aucun dégât, le Docteur ne voyait pas de mal à lui raconter cela. Il sourit d’un air mystérieux, faisons son show comme d'habitude. Face à une enfant il était certain que cela l'amuserait. Il se mit à faire de grands gestes en montrant l'espace autour de lui, visiblement très fier de ce qu'il lui montrait.

« Ceci, ma chère petite, est le TARDIS, et je suis le Docteur. C’est effectivement un moyen de transport, qui permet de voyager dans le temps et l'espace. Tu aimes les livres ? Tu imagines pouvoir visiter n'importe quelle scène que tu as lu dans tes ouvrages historiques ? Bon, il ne faut pas faire n'importe quoi. Mais avec moi aux commandes, on peut aller se balader. »

La jeune fille ne manquait pas d'être observatrice et elle avait visiblement remarqué que le Docteur tenait beaucoup à sa boîte bleue. Elle était mignonne. Du coup, Il décida de lui parler franchement afin qu'elle comprenne pour quelle raison il avait été aussi emballé en retrouvant le TARDIS et en se réfugiant à l'intérieur. Elle ne savait pas encore à quel point il pouvait être une personne à part entière, et le Docteur n'avait certainement pas l'intention de le lui dire aussi précisément mais cela ne l'empêche est pas de lui avouer une partie de la vérité.

« Vois-tu, le TARDIS n'est pas juste une machine, elle a une âme. Et c'est mon amie depuis très longtemps maintenant. Alors j'étais triste de ne pas savoir où elle était. Et je suis heureux de la retrouver, tu comprends ? »

Cette petite était décidément très maline. Elle était tout à fait le genre d'enfant auquel le Docteur se serait forcément intéressé tôt ou tard. Elle allait être sacrément déçue en apprenant qu’aucun des voyages qu'ils pouvaient faire ensemble actuellement ne pourrait l'emmener voir des époques historiques différentes. Mais le potentiel de base du TARDIS avait de quoi fasciner. Il se demanda s'il allait oser discuter de mécanique temporelle avec une fillette qui ne devait pas avoir plus de quatorze ou quinze ans. Mais la façon dont il gérait les choses était un peu différente de ce que l'on pourrait imaginer au départ et généralement, différente également de ce qu'il prétendait lui-même.

« Evidemment il faut faire très attention à ce qu'on fait avec le temps. Tu imagines si quelqu'un s'amusait à aller rencontrer la reine vierge et à la demander en mariage. Cela pourrait complètement changer l'histoire. »

Non, ce n'était pas quelque chose qu'il avait fait. Et puis d'ailleurs, ce qu'il avait fait dans une autre réincarnation était l'affaire de cette réincarnation. Dans tous les cas, il valait mieux que la petite ne crois pas une seule seconde que l'on pouvait impunément changer le cours du temps. Sa gentille façon de lui dire qu'elle était sincèrement heureuse que le TARDIS et lui se soient retrouvés, cela fit chaud au cœur du Docteur. Il ne savait pas qui était exactement cette enfant mais elle était pleine de générosité et c'était le genre de choses qui lui plaisaient beaucoup.

« C'est très gentil ce que tu dis là. »

Il réfléchit un instant à ce qu'elle venait de lui demander. Il y avait beaucoup de choses qu'il valait mieux éviter de faire lorsqu'on parcourait le temps, mais il les avait toutes faites pour la plupart. Évidemment, il était de notoriété publique que le Docteur mentait. Restait qu'il avait quelques scrupules à mentir à une fillette qui semblait aussi sincère et aussi pure que celle qu'il avait sous les yeux. C’était le genre d'enfant qu’il aurait été prêt à emmener en balade mais à un endroit tout à fait sécurisé évidemment. Il n'aurait jamais mis en danger un innocent enfant, du moins, pas volontairement.

« Je ne vais pas te mentir, d'ailleurs tu ne m’as même pas dit ton nom, moi on m'appelle le Docteur. Je ne vais pas te mentir donc, il y a beaucoup de choses qu'on ne devrait pas faire mais que je fais quand même parce que c'est beaucoup plus amusant comme ça, mais ne le répète à personne surtout », lui dit-il sur le ton de la confidence en mettant un doigt sur ses lèvres.

Ce n'était pas parce que le Docteur se comportait comme un imbécile en jouant avec le temps qu'il pouvait se permettre de suggérer à une fillette d'en faire autant. Jouer la carte de la sécurité et lui dire qu'il valait mieux ne jamais essayer d'altérer le temps était sans doute la meilleure chose à faire. Il avait en plus affaire à une fillette sage qui approuvait son opinion sur la question. Voilà qui rassérénait le Docteur, même s'il savait bien qu'il donnait des consignes qu’il ne respectait pas lui-même. C’était ainsi qu'il fallait agir quand on avait affaire à des personnes influençable et de moindre sagesse que soi.

Mais quel que soit le degré de sagesse de cette jeune fille, cela ne changeait pas le fait qu’elle était vraiment très gentille. La façon dont elle se réjouit des retrouvailles entre le TARDIS et le Docteur en était la preuve. Quand elle se présenta à lui en s'excusant de ne pas l'avoir fait avant, il lui accorda un franc sourire car ce n'était pas si grave. il pensait même que c'était normal qu'elle ait été fascinée par la situation sur laquelle elle n'avait effectivement que peu de connaissances et de capacités pour la comprendre. Avec les explications du Docteur, cela devenait forcément beaucoup plus facile.

« Eh bien je suis enchanté de vous connaître, Hey Mademoiselle Crewe ! »

Malgré tout, il ne pouvait pas s'empêcher de vouloir titiller l'admiration de cette petite fille. Ce fut la raison pour laquelle il lui avoua qu'il avait déjà manqué aux règles qu'il venait de lui énoncer. Il n'était pas forcément facile de respecter le règlement et il se demanda si la petite fille allait le juger. mais elle partit d'un simple constat qui était que certaines personnes n'appréciaient pas forcément de respecter le règlement. C’était la vérité pure et simple, mais cela ne changeait pas le fait que le Docteur n'était pas forcément fier de transgresser les règles, quand bien même il ne pouvait pas s'empêcher de continuer à le faire.

« C'est vrai. Mais ce n'est pas bien, alors il ne faut pas faire comme moi. »

Le Docteur se fit demander de raconter une histoire de l'une de ses épopées. Il ne savait pas laquelle choisir pour ne pas effrayer la petite aventurière. Elle était sans doute bien mignonne, mais cela ne voulait pas dire qu’elle allait pouvoir supporter l'horreur de n'importe laquelle des situations. Il réfléchit pendant un moment avant de choisir l'endroit qu'il avait justement utilisé pour offrir un cadeau de Noël à des enfants qui ne devaient pas être beaucoup plus jeunes que Sarah. Ce serait donc très certainement une bonne idée et quelque chose qui ne devrait pas lui faire trop peur.

« Une fois, j'ai proposé un voyage à deux enfants dans une forêt où poussaient des arbres qui fabriquaient comme des grosses boules. C’était un peu comme des arbres de Noël qui pousseraient au naturel. Mais en réalité, c'était une forêt avec une âme. Et les âmes de tous les arbres ont voyagé dans la tête d'une femme, plutôt d'une mère, pour rentrer chez eux. Le plus beau de cette histoire, c'est que cela a permis à cette femme de sauver son mari, censé s'être perdu en mer. N'est-ce pas une jolie aventure ? »

Il ne put faire autrement que d'éclater de rire quand elle lui demanda s’ils se trouvaient dans la seule et unique pièce du TARDIS. Ce n'était pas seulement plus grand à l'intérieur, c'était encore plus énorme que ça et il était évident que le Docteur ne savait pas lui-même combien de salles il y avait en ce moment précis. Le TARDIS avait parfois une façon bien à lui de se reconfigurer sans lui demander la permission, même si cela arrivait plus fréquemment juste après une régénération, ou alors si le TARDIS avait besoin d'espace pour une autre raison.

« Il y a énormément de pièces, je ne saurais même pas dire moi-même combien il y en a. Il doit y avoir une piscine et une bibliothèque, et si tu voyageais avec moi, tu aurais évidemment ta propre chambre. Ça te dirait d'aller faire un tour ? »  

S'il y avait bien une chose qui faisait plaisir au Docteur, outre fait que les visiteurs admirent son TARDIS, c'était qu'ils se passionnent pour ses aventures et qu’ils partagent son enthousiasme à l'évocation de celles-ci. La fillette qui l'avait suivie au moment où il retrouvait le TARDIS appartenait à ces deux catégories. Il s'était douté que le cadeau de Noël qu'il avait prévu pour ces enfants plairaient à la petite invitée surprise de la boîte bleue, puisqu'elle était elle-même une enfant. Mais il ne pouvait pas se douter qu’elle aimerait suffisamment les histoires pour être aussi enthousiaste face à celles du Docteur. Elle était vraiment faite pour passer un moment avec lui dans cet endroit extraordinaire.

En voyant ses yeux briller, il était convaincu qu'elle méritait une petite balade dans son TARDIS. Mais il ne tenait pas à la forcer ou à lui faire peur. Pour le moment, il se contentait donc de lui raconter des histoires et de l'émerveiller par les possibilités que sa machine pouvait avoir. Il n'avait jamais considéré les enfants comme des compagnons potentiels pour l'accompagner dans ses voyages, jusqu'à ce qu'il rencontre Amy. Et s'il ne l'avait pas emmenée enfant à cause d'une erreur de calcul de sa part, il devait bien admettre qui n'appréciait pas le fait qu'elle ait dû l'attendre aussi longtemps.

Il était surpris qu'elle s'intéresse d'aussi près à sa bibliothèque. Il était presque certain que la bibliothèque n'avait pas réellement été fouillée depuis que Clara et lui avait fait une plongée imprévue au cœur du TARDIS et ce jour-là, il ne pouvait pas vraiment dire qu'il avait pris le temps de faire l'inventaire de tout ce que la bibliothèque pouvait contenir. Il n'avait donc aucune idée des titres qu'elle pouvait renfermer. Il les avait probablement mis là à un moment ou à un autre mais c'était le genre de souvenirs qui s'estompait avec le temps. Heureusement, que ce n'était généralement pas le cas de leur contenu.

« Ouh là là, je ne saurais pas vous énumérer tout ce qu'il y a dans ma bibliothèque. Je ne suis même pas sûr de l'endroit où elle se trouve. Mais je sais qu'à une époque, il y avait une piscine dedans. »

Dans quel monde le TARDIS avait décidé de placer une piscine dans la bibliothèque, le Docteur n'avait pas la réponse à cette question, mais cela ne l'avait pas dérangé plus que ça. Évidemment, c'était sûrement plus étrange pour des personnes humaines qui n'avaient pas l'habitude des excentricités de la machine bleue. Mais c’étaient des anomalies que le Docteur ne percevait jamais comme telles. Il se contentait donc de les énoncer comme un fait. Pour le moment, la question serait surtout de savoir comment se rendre dans cette bibliothèque que la jeune fille avait envie de voir. Il savait qu'elle existait mais il n'était pas sûr de l'endroit où elle se trouvait actuellement.

« Je vous la montrerai mais il faut d'abord que j'étudie les plans. Fort heureusement, le TARDIS à la bonne idée de les faire évoluer en même temps que sa propre structure. Sinon, je ne m'y retrouverais jamais. »

Elle semblait d'accord pour partir en balade et le Docteur sans montra ravi. Il n'était pas certain que le TARDIS puisse circuler normalement, car il n'avait pas vérifié dans quel état il se trouvait. Mais ce n'était pas nouveau pour le Docteur de faire des promesses sans savoir s'il allait pouvoir les tenir. Comme elle disait oui, il se mit à tourner les rouages sans programmer de destination précise. Il voulait voir ce qui inspirait sa machine en cet instant, et le seul moyen, c'était d'y aller sans se poser trop de questions. La machine se mit à tourner de tous ces gonds et les passagers à remuer violemment et ce ne fut qu'une fois arrêté que le Docteur se tourna d'un air victorieux vers la fillette.

« On va voir où il nous a fait atterrir ? » proposa-t-il.

La petite fille était plutôt surprise par ce que le Docteur lui disait, mais ce n’était pas étonnant. Il surprenait beaucoup de monde. Il fallait avouer que, que ce soit pour le Docteur ou pour son TARDIS, il n’y avait rien de bien coutumier dans sa façon de faire les choses. Mais cela ne le dérangeait pas et le fait d’être hors du commun lui mettait le sourire sur les lèvres. C’était comme ça qu’il vivait sa vie, sans tout expliquer et à cent à l’heure. C’était pour cette raison qu’il lui fit un sourire assez naturel et qu’il haussa les épaules comme si tout ceci n’avait aucune importance.

« Pourquoi faudrait-il qu’il y ait une raison pour tout ? La vie est bien plus amusante avec une petite note de fantaisie, vous ne croyez pas, mademoiselle Crewe ? »

Même si le TARDIS avait sa fantaisie, il ne changeait heureusement pas tous les jours. Sinon, le Seigneur du Temps ne saurait plus où donner de la tête. Il se refaisait fréquemment une beauté après chaque régénération, et quelquefois, il s’amusait entre-deux, mais il ne changeait pas beaucoup. C’était surtout quand il y avait un besoin spécifique qui se dessinait. Dans tous les cas, il s’était passé plusieurs années et il ne savait pas si le TARDIS en avait profité. En tout cas, il n’y avait rien de flagrant. Mais c’étaient les petits changements qui étaient les plus perturbants. Ils n’aidaient pas à s’y retrouver.

« Pas trop souvent, heureusement, mais le TARDIS s’amuse à sa guise », avoua-t-il avant qu’elle ne lui demande de voir les plans actuels. « Venez par ici. »

Il lui afficha les plans sur un écran. Il ne savait pas si elle pourrait les comprendre, mais il était content qu’elle s’y intéresse. Elle était mignonne, cette petite, et pleine de curiosité. Oui, c’était totalement le genre d’enfant que le Docteur pourrait vouloir emmener en balade. Elle avait l’air tout particulièrement fûtée pour comprendre les mystères du monde et pour s’adapter. Elle était peut-être jeune, mais elle avait du potentiel, le potentiel de devenir une compagne. Il mit en route le TARDIS pendant qu’elle regardait les plans et lui proposa ensuite de sortir.

Il ne savait pas ce que la machine aurait décidé de faire. Il devait avouer qu’il espérait être parti loin et avoir découvert un autre monde plein de promesses. Mais lorsqu’il ouvrit la porte, ils se trouvaient au milieu de la forêt, et il ne savait pas si c’était au même endroit ou pas. Pour le moment, il n’avait aucun moyen de le savoir. Il aurait pu analyser et scanner, mais il avait généralement la bougeotte. Il attendit de voir comment Sarah réagirait à l’environnement qui les entourait. De toute façon, il n’y avait rien à voir de particulier, donc a priori pas de danger potentiel.

« Nous sommes au milieu de la forêt », lui annonça-t-il tout-de-même.

Le Docteur n'avait jamais réfléchi au bien-fondé de l'organisation du TARDIS, étant donné que cette organisation ressemblait plus à un accord entre la machine et le Seigneur du Temps qu’à une décision unilatérale. Il y avait donc certaines choses qu'il ne contrôlait absolument pas. En ce qui concernait le TARDIS, il devait admettre qu'il y avait, en fait, beaucoup de choses qu’il ne contrôlait pas. C'était sans-doute pour ça qu'il trouvait aussi amusant de voyager à son bord. On ne pouvait pas vraiment dire que c'était une décision mûrement réfléchie, mais il aurait répondu que les décisions mûrement réfléchies n’étaient généralement pas les meilleurs ni les plus amusantes.

« Oui, ce n'est pas faux, je devrais peut-être le préciser au TARDIS pour la prochaine fois qu'il fera des changements. Mais il faut garder une piscine. Ça peut être très utile quand quelqu'un saute d'un immeuble et qu'il faut la rattraper. »

Il était vrai qu'il n'y avait guère que River pour faire ce genre de choses. Mais il était certain qu’elle risquait de le refaire s'il s'avérait qu'elle était présente dans ce monde. Il était même étonné de ne pas avoir déjà vu un message quelque part dans un langage que lui seul pourrait comprendre. Elle était douée pour détériorer les choses précieuses afin de lui envoyer des messages. Alors que la fillette et lui regardaient les plans, elle désigna un symbole sur une pièce dont elle s'en demandait ce que cela signifiait. Le Docteur regarda la marque d'un air distrait. On ne pouvait pas vraiment dire qu'il avait une réponse précise à cette question mais il ne l'avouerait pas.

« Qu'il ne faut pas manger dans la pièce je crois, ou alors qu'il y a un lapin cornu qui se balade en liberté et qu'il faut penser à lui apporter de la salade et des carottes lorsqu'on y va. Dans tous les cas, ça ne doit pas être bien important. »

Quand la porte s'ouvrit sur la forêt, le Docteur savait qu'ils étaient dans les environs de la ville parce qu'il n'avait jamais réussi à aller au-delà. Mais il ne connaissait pas les raisons qui avaient poussé sa machine à les emmener à ces endroits précis. Comme elle le suggérait, il aurait pu demander à la machine d'analyser les alentours, mais il devait bien avouer qu'il ne trouvait pas ça très amusant. L'exploration avait toujours ceci de passionnant qu'on ne savait pas où on allait mettre les pieds. Aucune hésitation, c'était le chemin qu'il avait envie de suivre.

« Allons explorer les environs, je suis sûr que nous trouvons quelque chose d'intéressant. »