Une famille brisée par l'absence [PV Sarah Crewe]

Ce qu'il y avait de difficile dans la situation actuelle, c'était de ne pas savoir ce qui s'était réellement passé et où se trouvait exactement Minnie. Elle avait été une des personnes auxquelles Penny s'était le plus attachées. Et puis un jour, elle avait disparu soudainement, sans prévenir et sans raison particulière. Elle ne pouvait même pas supposer que celle qu'elle aimait était morte puisqu'on avait pas retrouvé son corps. Elle avait disparu soudainement, aussi soudainement qu'ils étaient tous apparus. C’était peut-être un autre des tours joués par la lune rouge, mais elle le trouvait tout particulièrement cruel. Elle avait retrouvé un peu d'amour alors qu'elle pensait avoir tout perdu, et cet amour lui était brutalement enlevé comme s'il n'avait jamais existé.

Ce n'était pas pour elle que c'était le plus difficile. Minnie avait noué une relation filiale précieuse avec une petite fille de l'orphelinat. La priver de la complicité qu'elle avait avec Sarah, mais aussi la famille qu'elle lui avait donnée alors que l'enfant n'espérait plus en avoir relevé de la simple cruauté pour Penny. C’était peut-être une famille supplémentaire qu'on retirait à une enfant qui n'en avait déjà que trop perdu et on lui demandait de comprendre qu’elle ne pourrait plus jamais la retrouver. Penny se sentait triste, mais cette tristesse n'avait rien de commun avec celle qu'elle éprouvait à l'égard de la petite Sarah envers qui est elle compatissait de tout son être.

Elle ne blâmait pas Minnie pour sa disparition. Il était plus que probable que la pauvre n'avait pas eu le choix. Les événements qui se passaient dans cette ville étaient suffisamment étranges pour que la sorcière soit certaine que cela dépassait la volonté simple des gens. Le seul espoir qu'elle pouvait encore avoir, c'était que celle qui avait su voler son cœur avait pu retrouver des êtres aimés et se trouvait à un endroit où elle était heureuse. Mais elle savait qu'elle ne la reverrait probablement jamais. Cependant, au lieu de la pleurer, elle avait trouvé un autre moyen de combattre la détresse.

Il y avait cette enfant. Sarah avait été adoptée et il lui serait sans-doute difficile de retourner à l'orphelinat et de sentir à nouveau qu'elle était seule au monde. Pour Penny, ce n'était pas le cas. Sarah n'avait peut-être pas de pouvoir magique et il était plus que probable qu’elle serait différente des membres de la famille Halliwell. Mais cela n'empêcherait pas sa fille et ses petites-filles de l'accueillir comme un véritable membre de la famille. Elles avaient toutes les deux aimé Minnie, elles allaient pouvoir faire le deuil de son absence ensemble. Il n'y avait pas de meilleure façon de construire une famille.

Ce soir, elle était allée chercher Sarah à l'école après avoir officiellement obtenu l'autorisation de la part de la directrice de l'orphelinat de prendre la relève de Minnie. Il était vrai que leur couple n'était pas officiel et qu'elle n'avait aucune raison de revendiquer cette adoption, mais elle avait expliqué la situation à la directrice et expliqué également quel attachement elle avait pour l'enfant. Par chance, il s'avérait que la directrice avait déjà discuté avec Sarah qui lui avait parlé de Penny, ce qui corroborait ses dires. Elle avait donc obtenu l'autorisation de la récupérer dès à présent et on lui avait même confié ses affaires.

« Bonsoir Sarah », dit-elle à la petite dès qu'elle l'aperçut à la sortie de l'école. « J'ai une bonne nouvelle pour toi. Tu ne retournes pas à l'orphelinat. À partir de ce soir, tu vas habiter avec moi. Tu es contente ? »

Penny savait parfaitement que la fillette l’accueillerait avec plaisir. Elle s’était bien entendue avec l’enfant quand elle lui avait été présentée. Mais il était vrai que c’était le projet de Minnie d’adopter, mais Penny n’avait pas envie de laisser cette enfant seule. Elle avait mérité d’avoir une famille qui l’aimait. Penny avait eu envie de faire partie de cette famille, et maintenant qu’elle en avait l’opportunité, elle ne voulait pas y renoncer, même si cette famille avait vu disparaître un de ses membres les plus chères. Minnie leur manquerait à toutes les deux, mais elles affronteraient cette perte ensemble. C’était le cadeau qu’elle voulait lui faire.

L’enfant la regarda avec incrédulité au moment où elle lui annonça qu’elle allait l’adopter et qu’elles allaient vivre toutes les deux. Elle semblait penser, avec logique, qu’avec la disparition de son adoptante, elle était destinée à passer une vie d’orpheline, seule dans cette ville de misère. Mais elle ne voulait pas qu’elle soit seule. Elle ne voulait pas qu’elle soit orpheline. Elle ne pouvait pas se considérer réellement comme une mère, elle était un peu vieille pour cela, mais Sarah avait l’âge d’être sa petite-fille, et elle l’aimerait réellement de cette façon là. Penny avait envie de cette relation avec Sarah.

« Oui, enfin, je dirais, vu mon âge, que je ressemble plus à une Grand-mère adoptive, hein, mais je suis ta tutrice légale à-partir de maintenant et tu fais partie de ma famille. Te voilà une Halliwell. Tu n’auras qu’à m’appeler de la manière qui te parlera le mieux. »

Elle lui prit la main avec tendresse pour prendre le chemin de sa demeure. Elle ne pouvait pas faire autrement que d’espérer que Sarah accepte de venir avec elle. Elle ne lui avait pas demandé son avis avant d’essayer de l’adopter mais elle ne voyait pas pour quelle raison elle n’en aurait pas envie. La sensation de chaleur liée à l’affection qu’elle lui portait était un signe pour elle qu’elle avait fait le bon choix. Elle pencha la tête en direction de la fillette avec un petit sourire tendre. Elle avait vraiment envie de la rassurer sur cette chance qui advenait.

« Nous pourrions faire une petite fête entre nous, ce soir, pour célébrer ça, tu ne crois pas ? »

La fillette semblait particulièrement troublée par cette famille qu'on lui offrait sur un plateau d'argent mais Penny ne s'en offusqua pas. Elle savait que la surprise était totale pour la fillette, d'autant plus qu'elle n'avait pas voulu venir la voir et lui en parler pour ne pas lui donner de faux espoirs. Mais le résultat était là et elles étaient ensemble. Elles resteraient ensemble tant que la petite voudrait bien d'elle. Penny avait conscience de ne pas être la personne idéale pour être le mentor d'une jeune fille, mais elle avait le mérite de ne pas avoir l'esprit aussi vieux jeu que d'autres personnes de son âge.

« Je suis persuadée que, quelle que soit la façon dont tu choisiras de me voir, tu seras bien avec moi. En tout cas, je ferai tout pour que tu le sois. Pour ce qui est de ta façon de me parler, je ne vois aucune raison de se vouvoyer entre membres d'une même famille, à moins que tu ne le souhaites, bien évidemment. »

L'acte de tendresse de la fillette émut la vieille dame. Cette chaleur qu'elle ressentait lui rappelait l'époque qu’elle avait quitté où ses petites filles n'étaient encore que des fillettes qui offraient à leur grand-mère leur tendresse naturelle. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas eu l'impression de ressentir cette chaleur et cette affection, même si cela était un peu différent depuis qu'elle avait retrouvé ses filles. Bien entendu, elles étaient adultes. Mais cela ne les empêchait pas de se tourner vers elle quand le besoin s'en faisait sentir. Ce n'était pas pareil qu'une petite fille comme Sarah qui allait vraiment avoir besoin d'elle, mais c'était tout de même un joli cadeau que la ville lui avait fait.

« Je n'allais pas t'abandonner », dit-elle en caressant son dos doucement. « Tu fais partie de la famille, maintenant. »

Quand elle parlait de faire la fête, Penny ne songeait pas à quelque chose de grandiose avec des feux d'artifice et des explosions, ce qui d'ailleurs, ressemblait davantage à une chasse aux démons qu’à une fête. Mais elle avait tout de même l'intention de préparer un repas, de mettre un peu de musique et célébrer le fait qu'elle voulait construire une nouvelle famille avec cette petite fille. Elle lui demanda si elle avait retrouvé d'autres membres de sa vraie famille et Penny sourit. Elle avait eu cette chance et c'était aussi pour ça qu'elle ne redoutait pas de devoir éduquer la demoiselle car elle allait avoir du soutien dans ce domaine.

« J'ai retrouvé plusieurs de mes petites-filles et arrière-petits-enfants. Tu viens d'intégrer une grande famille Sarah, et je te promets que tu y seras toujours la bienvenue. »

Une façon de faire comprendre à cet enfant que le temps de l'instabilité était fini et qu'elle avait trouvé un toit duquel elle ne risquait pas de partir. C’était aussi une façon de lui démontrer qu'elle aurait des gens pour prendre soin d'elle si le drame qui avait emporté Minnie se reproduisait.

Penny désirait plus que tout que Sarah se sente chez elle avec elle et qu’elle se considère comme en famille. Il était toujours compliqué de nouer une relation en se basant sur le reste d’une relation établie au-travers d’une personne aimée aujourd’hui disparue. Mais la matriarche était déterminée et son cœur était celui d’une mère et d’une grand-mère. Inclure l’enfant dans sa famille ne lui serait pas difficile si celle-ci acceptait qu’elle lui ouvre les bras comme elle s’efforçait de le faire. Elle espérait que la petite et elle seraient sur la même longueur d’onde et qu’elles pourraient construire quelque chose à deux.

L’acceptation de la part de Sarah pour ce qui était de tutoyer sa nouvelle tutrice ravit Penny. Elle savait que la fillette venait d’un monde de niveau assez huppé et dans ce milieu, les enfants étaient plus respectueux envers leurs parents que ne le nécessitent la simple norme. Mais apparemment, les parents de Sarah mettaient davantage l’accent sur le bien être de leur fille et la complicité des membres entre eux. Penny approuvait cette façon d’être et comprenait d’autant pour quelle raison Sarah était une fillette aussi douce et gentille. Elle était heureuse d’avoir décidé d’en faire un membre de sa famille.

« Tes parents ont l’air d’avoir été d’excellentes personnes. Je suis triste que tu aies dû les perdre. Je sais que je ne pourrai pas définitivement les remplacer, mais je ferai de mon mieux pour que tu sois bien avec moi. »

Penny lui parla de sa famille, ceux qui seraient à-présent les siens. Elle n’imaginait pas la famille qu’elle avait croisée lors de la réunion refuser d’accueillir en son sein une petite fille aussi mignonne et douce que Sarah. Elle était certaine que la petite allait conquérir les cœurs de toute la famille. Penny avait toujours pensé que les Halliwell étaient accueillants et bienveillants et elle avait été fière de constater que cela semblait être le cas, à l’âge adulte. Car tous étaient désormais adultes. Penny avait ce triste sentiment d’avoir perdu la partie de sa vie où elle contribuaient à les élever alors la présence de Sarah pansait un peu cette peine.

« Tous. Mes petits-enfants et mes arrière-petits-enfants sont tous arrivés ici à l’âge adulte. Cela fait drôle car, quand je suis partie de chez moi, Piper et Prue étaient encore enfants. Et là, elles sont adultes, elles ont deux jeunes sœurs et des enfants adultes. C’est assez déroutant. »

Il était difficile d’être à la hauteur de parents qui avaient été aimés et chéris. Sarah avait vécu de beaux moments auprès de son père, et même si sa mère n’avait pas fait partie de sa vie assez longtemps, elle avait une opinion d’elle à la hauteur de sa qualité. Penny allait devoir prendre soin de Sarah dans le respect de cet amour qu’elle avait pour ses parents. Elle n’était pas là pour prendre la place de qui que ce soit, mais seulement pour apporter un peu de tendresse et une famille solide à cette enfant. Elle en était capable.

En tous les cas, elle était confiante et voulait avant tout se concentrer sur Sarah. Elle l’écouta attentivement parler de son père et de sa mère. Il semblait que ce soit un couple heureux et plein de bonté et de générosité. De fait, elle avait eu une jolie base pour commencer sa vie, mais elle avait dû le faire ensuite toute seule. Penny allait faire en sorte qu’elle n’ait plus à vivre seule. Il n’y avait rien de plus précieux que cela. Donner une famille à l’enfant que le cœur de Minerva avait choisi était le meilleur moyen de saluer ce qu’il y avait eu entre eux. Et par ailleurs, elle affectionnait sincèrement la petite. Elle appuya son assurance en la serrant contre elle.

« Embellissons notre vie ensemble, alors ma petite chérie. »

Sarah était évidemment curieuse de sa nouvelle famille et Penny lui partagea ce qu’il pouvait y avoir de troublant à voir arriver toute une famille de générations différentes, tous dans une tranche d’âge de 20 à 45 ans. Il y avait là trois générations de Halliwell qui se regroupaient à peu près dans les mêmes âges. C’était troublant et perturbant, mais dans un autre sens, cela lui permettait d’avoir une belle et grande famille avec qui partager beaucoup de choses. Et malgré leur âge, elle avait découvert que ses descendants avaient encore besoin d’elle, ce qui lui faisait du bien.

« Ce ne sont pas les mêmes rapports, mais c’est enrichissant. Ma petite-fille m’a demandé d’être son mentor. Elle veut que je l’aide avec ses pouvoirs. »

La fillette s’intéressait beaucoup à sa nouvelle famille. Elle demanda à Penny ce que faisaient les autres membres de la famille, et elle devait bien avouer qu’elle ne se rappelait pas tout. Elle n’avait eu que peu d’échanges avec la plupart, pour l’instant, et elle ne s’était guère intéressée à la partie mâle de la famille. Mais elle n’était pas vraiment objective sur la question. A un moment donné, il faudrait pourtant qu’elle s’intéresse à eux, ne serait-ce que pour s’assurer de leurs choix. Il ne faudrait pas qu’ils deviennent de mauvais sorciers.

« Je sais que Melinda est étudiante et Piper est chef dans un restaurant. Mais je ne sais plus ce que font les autres. Cela dit, tu pourras leur demander quand tu les rencontreras. »

Elle était vraiment impatiente de présenter la fillette à toute la famille.

Penny accorda un sourire à la fillette alors que celle-ci semblée d'accord avec son envie de partager de belles choses toutes les deux dans le futur. La quadragénaire n'aurait sans doute pas pensé à adopter un enfant si elle n'avait pas rencontré Minnie, qui avait déjà adopté la petite Sarah. Mais à partir du moment où elle avait choisi de l'inclure dans sa vie, il ne faisait aucun doute qu’elle continuerait à l’y garder précieusement et puisqu'il en était ainsi, elle ferait tout ce qu'elle pourrait pour que leur vie commune soit belle, plan qui convenait visiblement à la concernée directe.

Il n'avait pas été facile pour la matriarche de faire la connaissance de membres d'une famille qu'elle ne connaissait pas et de se rappeler de tout le monde. Il lui était facile de se rappeler le parcours de Melinda puisqu'elle la connaissait depuis plusieurs années. Elle avait aussi eu un regard particulier sur Piper, qui était un des rares membres de la famille dont elle connaissait l'existence avant de venir dans cette ville. Pour les autres, c'était un peu plus compliqué à appréhender dans sa tête. Mais, petit à petit, elle savait qu'elle finirait par retrouver de proches rapports avec toute personne qui avait du sang Halliwell dans ses veines. Oui, même les garçons.

« C'est vrai que ça me fait plaisir, mais ça ne me surprend pas plus que ça. Je me suis occupée de Melinda à de nombreuses reprises depuis que nous sommes ici. De fait, il était logique que je continue après avoir appris notre lien, mais disons que cette relation sera d'autant plus forte. »

La petite Sarah était pleine de questions pour toute la famille. Penny y voyait là la certitude qu'elle était faite pour s'intégrer à la famille Halliwell. Elle n'avait peut-être pas de pouvoir magique, mais il ne faisait aucun doute qu'elle avait du cœur et qu'elle serait certainement une personne parfaitement intégrée aux valeurs de la famille. Il n'y avait pas besoin de savoir si elle allait s'entendre avec eux. S’ils avaient les valeurs de la famille, il était clair qu’elle serait la bienvenue auprès de tous ceux qui en faisaient partie. La nouvelle maman sourit donc tendrement à celle qu'elle aimait déjà comme sa fille avant de répondre à ses questions.

« Nous avons tous des pouvoirs dans la famille. Pendant longtemps, j'ai cru que ce privilège serait réservé aux femmes, mais il semblerait que le jeune Chris ait prouvé que nos pouvoirs sont transmissibles aux hommes. Il ne m'appartient pas de dévoiler les dons de Melinda, car elle seule peut choisir à qui elle a envie de partager cette information, mais elle est puissante, comme toute la famille. »

Sarah semblait se rappeler que Penny vivait près de la forêt et il apparaissait qu'elle avait hâte des longues balades que les deux allaient pouvoir faire ensemble. Penny était impatiente aussi. Elle ne pouvait pas apprendre à Sarah à utiliser les pouvoirs de la famille Halliwell, mais elle pourrait sans aucun doute lui apprendre quand même l'art des potions. Ce serait peut-être un moyen de partager un peu d'héritage avec la fillette, et de lui permettre ainsi de se sentir à sa place au sein d'une famille qui partageait des dons qu’elle-même ne pouvait avoir.

« Les promenades en forêt ne sont pas seulement agréables, elles sont aussi instructives. En t’y promenant avec moi, tu pourras découvrir quelles plantes sont les plus puissantes et quand les ramasser. Avec les bonnes plantes et les bons ingrédients, si tu le veux, tu pourras apprendre à concocter de puissantes potions. »

Elle semblait également tenir à adopter un animal. La plupart des sorcières en possédaient un au début de leur carrière, et ce n'était pas un animal ordinaire. C’était un familier qui les aidait à canaliser leur pouvoir et qui les protégeait. Cela dit, les chats étaient fréquemment les animaux de compagnie des sorcières, et même si elle n'en avait pas encore, la matriarche des Halliwell ne verrait aucun inconvénient à en adopter un. Bien entendu, si c'était le choix de Sarah, il lui appartiendrait alors de prendre soin de la créature et de veiller sur elle.

« Si tu adoptes un animal, il t'appartiendra de t'en occuper et de veiller sur lui. Il faudra aussi lui apprendre à être sage et à ne pas faire de bêtises. Mais je ne suis pas contre l'idée si cela te fait plaisir. »