Bienvenue dans le clan familial [PV Nymphadora Tonks]

Françoise n’était pas mécontente de sa journée. Elle n’était pas en train de travailler sur une affaire en ce moment, et elle profitait des cours pour apprendre plein de choses sur une foultitude de sujets. Mais ça ne l’empêchait pas d’aider les autres et de parler avec les professeurs. Ce jour-là, elle avait eu une discussion passionnante avec le professeur Lupin et un échange plein de joie avec la petite Sarah qui avait eu une bonne note grâce à elle. Tout ce qu’il fallait pour passer une bonne journée. Elle ne voyait rien qui puisse améliorer une journée comme celle-là.

C’était la fin des cours, et Françoise s’apprêtait à regagner la maison où elle vivait depuis maintenant trois ans avec Ted et Andromeda. Enfin, elle vivait depuis trois ans avec Ted. Andromeda était arrivée plus tard, mais elle était une femme généreuse et exceptionnelle, qui ne manquait jamais une occasion de la cajoler et de la gâter. Dans sa nature à toujours être tournée vers les autres, Françoise n’avait pas l’habitude qu’on prenne soin d’elle. Même Ted avait plutôt tendance à se fier à sa grande indépendance. Mais cela ne déplaisait pas à l’adolescente qui acceptait plutôt bien de se faire cajoler un peu.

En sortant de l’école, elle était un peu dans ses pensées quand elle entendit prononcer son nom. Elle ne savait pas qui la cherchait, mais elle s’écarta immédiatement du flux des élèves sortant de l’école pour ne pas déranger les gens pendant qu’elle chercherait l’origine de l’interpellation. Françoise faisait toujours attention à gêner le moins possible, il fallait savoir se montrer discrète lorsqu’on passait dans le rôle de la justicière et qu’on enquêtait sur de malveillants bandits. Au moins, à cet endroit, elle pouvait chercher sans crainte de gêner quelqu’un. Elle regarda donc autour d’elle, à l’affût de la personne, espérant qu’elle se remanifeste.

Alors qu'elle s'était écartée du flot d'élève afin de pouvoir mieux chercher la personne qui souhaitait lui parler, la jeune fille finit par apercevoir les grands gestes d'une femme dont l'allure et certains traits lui rappelaient sensiblement quelque chose. Elle ne savait pas exactement qui elle était, mais le meilleur moyen de le découvrir était encore d'aller à sa rencontre. Maintenant qu'elle avait identifié où elle était, il lui était plus facile de s'orienter et elle fendit rapidement la foule jusqu'à arriver à proximité de la jeune femme à l'allure familière. Elle se demanda si c'était elle que la jeune femme attendait au départ.

« Bonjour ! Désolée, je ne vous ai pas trouvée tout de suite. »

Si elle ne la remettait effectivement pas quand elles s'étaient rencontrées au départ, la façon dont elle se présenta clarifia aussitôt les choses et Françoise comprit. C’était la fille de Ted et Andromeda qu'ils avaient récemment retrouvée. Cela ne les empêchait pas d'être toujours aussi bienveillants et attentifs envers elle, et elle s'était dit qu'elle allait devoir trouver un moyen de lui être présentée. Quelque part, elle représentait un genre de grande sœur. Mais Françoise ne savait pas si la jeune femme aurait envie de cette relation avec elle. Puisqu’elles se croisaient, c’était l’occasion de le découvrir

« Dora ! Bien-sûr. Tu es la fille de Ted et Andromeda. J'ai beaucoup entendu parler de toi. C’est moi que tu venais voir ? Ca fait un moment que je me dis que je devrais essayer de te croiser, et je ne savais pas trop comment. C’est gentil d'être passée me voir au lycée. »

Peut être qu'elle n'était pas venue spécifiquement pour elle, c'était même tout à fait probable. Après tout, elle ne savait peut-être même pas à quelle heure exactement elle finissait et il était probable qu'elle avait d'autres personnes à voir que la fille que son père et sa mère avait choisi d'élever. Cela dit, si elle avait un moment à passer avec elle, la jeune justicière ne dirait pas non. Elle ne savait pas si Ted avait évoqué avec sa fille le secret qu'elle dissimulait, mais il lui semblait qu'il avait promis de n'en parler à personne et cela incluait aussi sa femme et sa fille.

« A moins que tu n'attendes quelqu'un d'autre… mais si tu as un moment on pourrait discuter quelque part. Enfin, si ça te dit. »

On pourrait se demander si Nymphadora Tonks s'était sentie obligée de saluer la jeune fille que ses parents avaient prise en charge ou si elle était contentée de le faire et à quel point elle avait forcé les éléments. Mais Françoise comprit très vite qu'elle faisait tout simplement de l'humour. Elle n'eut aucun mal à en prendre conscience puisque c'était son mode d'expression le plus familier. Elle pouffa de rire et cela lui fit plaisir car elle avait l'impression de gagner un semblant de complicité avec la fille de Ted. C’était ce qu'elle désirait le plus, s'intégrer le plus complètement possible à la famille dans laquelle elle était placée.

« Dans ce cas, autant exercer nos curiosités ensemble, cela nous permettra d'aller dans le même sens. »

Elle devait bien reconnaître qu'elle avait également beaucoup de curiosité pour celle dont elle espérait qu’elles finissent par devenir sa grande sœur. Ted et Andromeda lui avaient beaucoup parlé de la jeune fille qu'ils avaient eue ensemble et elle savait parfaitement quel genre de personne était Dora. Son sens de l'humour et sa gentillesse étaient apparemment des caractéristiques importantes de sa personnalité. Elle s'était dit que c'était typiquement le genre d'amie avec qui elle avait envie de nouer des liens. Mais elle ne savait pas comment faire sa connaissance. Ses parents adoptifs auraient fini par la lui présenter, mais c'était aussi simple comme ça.

La jeune femme décida de lui offrir quelque chose à boire en devinant qu'elle n'aurait peut-être pas envie de prendre un café ou de l'alcool à son âge et c'était vrai qu'elle n'en buvait pas. De toute façon, la jeune justicière prônait la sobriété. Elle trouvait que c'était encore le meilleur moyen de garder la tête froide et les idées claires, surtout quand elle avait une mission. Mais elle ne serait pas contre un soda ou une tasse de thé. Elle avait très envie de passer un moment à discuter avec la jeune femme. Elle se demandait encore quel genre de personne elle était en dehors de son humour décapant.

« Sinon, une tasse de thé, ça me va aussi. Mais je ne suis ni très café ni très alcool. Je te suis. »

Sur le chemin, elle lui demanda comment cela se passait avec ses parents adoptifs. Le quotidien était simple pour Françoise, qui n'était pas une jeune fille difficile et qui faisait tout ce qu'elle pouvait pour aider sa famille d'adoption au quotidien. Le soutien de Ted était notamment très important pour elle mais elle ne pouvait pas parler à sa nouvelle sœur de son secret. Alors, elle se contenterait d'exprimer comment les choses se passaient de manière générale sans entrer dans les détails. Elle était devenue très compétente dans l'art de dissimuler.

« Ted et Andromeda sont des amours. Je n'ai pas forcément besoin de beaucoup d'aide dans la vie parce que je me suis toujours beaucoup débrouillée toute seule, mais ça fait du bien d'avoir des gens sur qui on peut compter face à l'adversité. Ils ont dû te manquer pendant tout ce temps que tu as passé ici loin d'eux. »

Françoise ne rougit même pas quand sa nouvelle sœur lui dit qu'elle était sage. Ça avait toujours fait partie de ses caractéristiques premières d'être une élève sage. Elle avait toujours fait ses devoirs en temps et en heure, avait toujours été polie et bien élevée et s'était toujours efforcée de montrer un comportement exemplaire même si, sous sa forme de justicière, elle était un peu moins sage. Mais cela, Nymphadora n'avait pas besoin de le savoir. Pour le moment, et pour sa propre sécurité, il valait mieux éviter qu'elle ne sache que sa nouvelle sœur passait une partie de ces nuits à combattre les forces du mal.

« Ce n'est pas par vertu. Je n'aime pas l'idée de perdre le contrôle de mes facultés à cause d'un comportement que je peux éviter. On ne sait jamais sur quoi on va tomber. »

Elle la suivit jusqu'aux Trois Balais et dut reconnaître que l'ambiance était plutôt sympathique. Elle n'avait jamais beaucoup fréquenté les tavernes ou les auberges, mais celle-ci avait quelque chose de convivial qui plaisait beaucoup à la jeune lycéenne. Elle semblait être faite pour des élèves et non pas être un lieu de débauche pour la population. S’installant confortablement à une table, Françoise décida de faire confiance à la jeune femme pour savoir quoi commander. Elle avait l'air d'avoir envie de lui faire goûter des spécialités locales et la jeune fille n'allait pas le lui refuser, même si elle devait bien reconnaître qu’elle espérait ne pas boire quelque chose de fort.

Elles discutèrent des connaissances et des amis qu’elles étaient capables de se faire dans ce monde si particulier où la plupart de ceux qu'elles connaissaient n'étaient pas là. La jeune femme semblait avoir eu du mal à s'habituer au fait de se retrouver loin de tous ceux qu'elle aimait. L’idée qu'elle ait passé beaucoup de temps à vouloir s'en aller d'ici faisait de la peine à Françoise qui se disait qu'elle avait dû être bien malheureuse. Elle ne put s'empêcher de mettre une main sur l'avant-bras de sa nouvelle sœur pour lui signifier sa compassion à l'égard de ce qu'elle avait ressenti.

« Tu as réussi à te faire des amis quand même avant de les retrouver ? »

De son côté, heureusement qu'elle y était parvenue, parce que contrairement à la plupart des gens qui l'entouraient, elle n'avait retrouvé personne qui était, à l'origine, de son monde. Elle n'avait même pas revu ce bon vieux Furet. Elle finissait par se dire que c'était ici qu'elle devait se construire une nouvelle famille et un nouveau réseau et ne plus penser à ceux qui étaient restés loin d'elle et qu'elle ne reverrait sans-doute jamais. Il était dans la nature de la jeune femme d'aller de l'avant et de ne pas penser à ce qu'elle avait perdu, pour pouvoir se concentrer sur ce qu'elle allait faire de son avenir. Elle ressentit tout de même un élan de nostalgie quand son interlocutrice lui demanda comment était le monde d'où elle venait.

« Assez classique. Vingt-et-unième siècle. J’habitais dans une petite ville de la région parisienne. Ça s'appelle Framboisy. Même si c'était ce genre de ville plutôt calme, il s'y passait régulièrement des choses. Mais ce qui me manque le plus, ce sont mes deux meilleurs amies. Elles pouvaient paraître un peu bizarre, des fois, mais je les adorais et j'aurais fait n'importe quoi pour qu'elles soient en sécurité. Ce n'était pas toujours facile parce qu'elles avaient le don de s'attirer des ennuis. Et toi, parle-moi de ce que tu vivais dans ton monde. »

Le sujet des relations ne semblait pas être facile pour sa toute nouvelle sœur. Il semblait évident se faire de nouveaux amis n'avait probablement pas été sa priorité jusqu'à présent. Françoise n'avait pas réellement besoin d'être entourée d'amis, mais il était dans sa nature d'être bienveillante et d'ouvrir aux autres son écoute et son affection. Forcément, cela trouvait de l'écho auprès des autres adolescents qui étaient comme tous les adolescents en questionnement et avec un besoin d’écoute assez chargé. On aurait pu dire que c'était à ça que servait la psychothérapie, mais il était parfois beaucoup plus simple de se confier tout simplement à une amie.

Si elle ne l'admettait que difficilement par modestie, il fallait bien reconnaître que Françoise était plus mûre que la plupart de ses camarades et que cela faisait d'elle un savant mélange entre une bonne copine, qui avait l'âge requis pour qu'on ait envie de se confier à elle et un adulte mûr capable de prodiguer de bons conseils face aux problèmes rencontrés. Cela la rendait plutôt populaire au lycée, tant parmi les camarades de sa classe que parmi les élèves plus jeunes. Elle en avait d'ailleurs pris plusieurs sous son aile à différentes reprises. Le fait qu'elle soit une excellente élève faisait d'elle une candidate idéale au tutorat.

« Je vois », dit-elle simplement pour faire comprendre à sa sœur adoptive qu'elle ne chercherait pas à en savoir plus.

Elle était bienveillante comme une grande sœur, lui souhaitant de retrouver ses amis même si ce n'était pas encore chose faite. La bienveillance de Nymphadora convainquit encore davantage si c'était possible la jeune aventurière qu'il y avait moyen de construire une belle famille avec les personnes qui appartenaient à l'origine à celle de Ted. Son père d'adoption ne lui avait pas caché ce qui faisait le bonheur de sa vie et son plus cher désir avait toujours été que celui qu'elle aimait dès à présent comme un père puisse réunir tout ceux qui lui étaient chers. Ce n'était pas chose facile dans ce monde où il y avait bien plus des siens que l'on pouvait ne le penser au départ mais où ils étaient cachés et dissimulés jusqu'à ce que la ville décide de vous les rendre. Françoise en avait parlé avec Aelita et il semblerait que même les registres se transformaient selon la personne qui les consultait.

Tout cela était bien mystérieux mais l'espoir devait être la clef pour continuer d'avancer dans ce monde. Nymphadora lui demanda si son père ne lui avait pas parlé de leur monde d'origine et elle sourit avant de hocher la tête. Elle savait certaines choses, des choses qui feraient qu'elle aurait toujours une place différente dans cette famille, simplement parce qu'elle ne serait jamais dotée de pouvoirs magiques, mais ce qui l'intéressait était moins la magie que les personnes qui la faisaient vivre. Françoise avait toujours préféré se concentrer sur les personnes.

« Il m'a dit que vous veniez d'un monde où régnait la magie et que toute la famille possédait des pouvoirs qui avaient disparu lors de l'arrivée ici. Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui avait des pouvoirs magiques avant d'arriver ici, mais je crois que dans cet endroit, tout est possible. Tu as des pouvoirs, toi ? Je sais que sur certaines personnes, cela commence à revenir. Moi, j'ai seulement réussi à récupérer le disque dur de mon intelligence artificielle. Moins glamour, n'est-ce pas ? »

Françoise était persuadée qu'une personne possédant des pouvoirs magiques ne pourrait pas être intéressé par quelque chose comme Ajax. Quelqu’un comme Nymphadora ou Ted avait sûrement d'autres moyens de résoudre le genre d'enquête qu'elle menait, même si leur baguette magique ne leur permettrait sûrement pas d'effectuer des analyses sur des prélèvements faits sur des scènes de crime. Cela dit, il y avait peut-être des potions ou des sorts qui permettaient de révéler certaines choses. Françoise ne connaissait pas assez le monde de la magie pour avoir ce genre d'informations. Mais elle ne pouvait s'empêcher de se demander ce que dissimulaient les instances de justice dans le monde de la magie, du moins, celui de sa nouvelle famille.

Et puis elle reçut l'enthousiasme de Nymphadora, et cela lui donna envie de lui parler un peu plus de cette intelligence artificielle avec laquelle elle travaillait. Ajax lui avait été très utile depuis qu'elle le possédait. Il lui communiquait de nombreuses informations et lui permettait de contacter bien plus de personnes et bien plus facilement qu'avec les moyens de communication qu'elle avait à ce moment-là. Il fallait reconnaître que ce n'était plus aussi vrai avec l'avènement des téléphones portables et d'autres outils informatiques, mais il disposait encore de technologies que l'on n'avait pas quand on était un particulier, même si elle supposait que la police devait avoir certaines choses qui ressemblaient à ce qu'il était capable de prendre comme information.

« En tout cas, il m'a toujours été très utile. Il peut prendre des communications et me les transmettre, il est capable de me communiquer une information en fouillant un grand nombre de données historiques où informatives, il peut analyser des échantillons et me dire ce qu'ils contiennent. C'est comme ça que j'ai su que ce qui circulait au lycée était effectivement de la drogue. Il va d'ailleurs falloir que je trouve le moyen d'en informer les autorités de l'école. Ça pourrait devenir très dangereux. »

Elle ne s'inquiétait pas pour elle-même car elle avait fait bien pire que de s'attaquer à des trafiquants de drogue. Elle avait de nombreux camarades dont certains étaient très innocents et qui pourraient peut-être se laisser influencer. Elle tenait à protéger un maximum ses condisciples. Elle avait déjà mis en garde une partie de ses protégés. mais tout le monde ne l'écoutait pas et elle ne savait pas encore de quelle façon ceux qui avaient décidé d'introduire ces cochonneries dans l'école allaient les présenter aux élèves. Il ne suffisait pas d'une seule fois pour devenir accro et il était probable qu’une personne qui serait trompée sur le contenu de quelque chose ne s'y laisserait peut-être pas reprendre. Mais tant qu'elle n'avait aucune certitude sur les méthodes employées, elle avait l'intention de rester sur ses gardes.

Elle fut sortie de ses pensées par sa nouvelle grande sœur qui lui proposait une expérience amusante. Elle la vit aussitôt changer des éléments de son visage pour se transformer en une figure plutôt comique. Françoise doutait que qui que ce soit ait pu un jour mélanger ces traits dans la réalité, mais elle éclata de rire en voyant le visage que cela donnait à Nymphadora. Elle n'avait jamais vu Ted faire des choses comme celle-là et elle ne pouvait pas s'empêcher de se demander s’il en était capable. Françoise était toujours curieuse des autres, une curiosité innocente et pleine de bienveillance. Elle n'aurait jamais supporté que l'on se moque de quelqu'un à cause de ce qu'il était ou de ce qu'il faisait. Les seules personnes qui étaient réellement condamnables étaient celles qui faisaient du mal aux autres.

« C'est génial, c'est super rigolo. Est-ce que tous les sorciers qui viennent de ton monde sont capables de faire ça aussi ? »

Sa grande sœur ne croyait pas si bien dire en annonçant qu'elle était une détective en herbe. Pas tant en herbe que ça d'ailleurs. Elle avait une certaine expérience, mais ils avaient convenu avec Ted que les autres membres de la famille n'en sauraient rien pour l'instant. Françoise tenait sincèrement à ce que la famille de Ted n'ait pas à souffrir des choix qu’elle menait dans la vie. Évidemment, si on savait qui elle était réellement, sa famille d'adoption courait un risque et il n'était pas question pour elle que ce soit le cas. Mais elle appréciait quand même le fait que ses qualités soient reconnues et elle espérait que Nymphadora ne se ferait pas trop de soucis pour elle.

« Un peu », dit-elle avec modestie. « Mais je ne fais pas grand chose avec mes petites capacités, tu sais. »

Apparaître comme une jeune fille timide et manquant légèrement de confiance en elle était un bon moyen pour que personne ne fasse jamais le lien avec la justicière qu'elle était. Pour autant, elle se sentit flattée par la remarque de sa nouvelle sœur, même si elle ne savait pas en quoi ce métier consistait exactement. Cela devait avoir un rapport avec les enquêtes dans le monde de la magie ou sa remarque n'aurait pas eu de sens. Mais à part cela, elle ne pouvait pas complètement déduire de quoi il était question. Plutôt que de s'interroger dans le vide, autant faire ce qu'elle attendait et lui poser la question.

« Merci, mais en quoi ça consiste exactement ? »

Le talent de métamorphomage de Nymphadora la fit beaucoup rire et elle ne pouvait pas s'empêcher de se demander si c'était quelque chose que tous les sorciers de son monde étaient capables de faire. D’après ce qu'elle comprenait, il y avait une certaine capacité à se transformer chez tous les sorciers, mais pas de manière aussi naturelle qu'elle le faisait en ce moment. Pour elle, c'était de naissance. Cela devait avoir certains avantages de naître avec une telle capacité. Visiblement, elle la maîtrisait très bien et elle semblait apprécier de l'utiliser pour faire rire les personnes autour d'elle. Françoise en était flattée.

« C'est un super talent que tu as. Et c'est très drôle. Tu as de la chance. Et moi, je ne souffre pas trop de maladresse, ça va. Mais je ne sais rien faire de si extraordinaire comme toi. Je suis une fille quelconque. »

Les arguments de Nymphadora firent évidemment davantage mouche que Françoise ne le laisserait paraître. Mais c’était uniquement parce que c’était aussi ce qu’elle pensait. Elle s’efforçait de donner une image d’elle vulnérable et moins courageuse qu’elle ne l’était réellement afin que personne ne puisse soupçonner sa double-vie. Mais la jeune femme se révélait avec un esprit assez aiguisé qui impressionnait Françoise. Elle avait rarement rencontré des personnes capables de faire preuve d’un tel degré de perspicacité. Elle allait devoir faire attention, car sa nouvelle sœur semblait avoir les capacités de la percer à jour, au final. Il ne valait sans-doute mieux pas.

Françoise était vraiment convaincue qu’avec de petites choses, on pouvait réussir à faire énormément. C’était pour cette raison qu’elle avait choisi de se battre, parce qu’il était certain qu’elle avait les moyens de faire changer les choses à sa maigre échelle. Empêcher des fauteurs de trouble de nuire et les livrer à la justice semblait être le meilleur moyen de contribuer à la paix et à la sécurité de l’endroit où elle vivait. Même ici, elle avait réussi à diminuer un peu le nombre de criminels qui parcouraient les rues. Elle estimait avoir apporté sa contribution à la sécurité de la ville, même de façon minime.

« C’est justement ce que je disais l’autre jour à mon amie Aelita. Il n’y a pas besoin de pouvoirs magiques pour pouvoir apporter sa pierre à l’édifice. Aelita a pas mal envie d’aider les autres », précisa Françoise avec un sourire bienveillant.

Sa sœur avait un boulot cool. Chasser les mages les plus dangereux du monde des sorciers devait être dangereux, mais passionnant. Du moins l’avait-elle dans son ancien monde. Ca ne devait pas être des plus simples de se reconvertir dans ce monde, où la magie ne régnait pas en maîtresse. Maladroite et dépourvue de magie, elle avait peut-être eu du mal à se faire une place. Françoise était très curieuse de savoir comment elle s’en était sortie et les choix qu’elle avait fait dans ce monde où la vie était si différente du sien.

« Ca doit être passionnant ! Du coup, tu as intégré la police ici ? Ou un genre de service de sécurité ? Je sais qu’il y en a. »

Quand elle mentionna qu’elle était une fille quelconque comme il en existait des dizaines, c’était à la fois par modestie, et aussi parce qu’il était totalement vrai qu’elle n’avait pas de pouvoirs magiques comme c’était le cas des membres de la famille qui l’avaient accueillie. Pour autant, elle avait conscience de ses propres possibilités, d’autant plus qu’elle s’efforçait de les exploiter de la meilleure manière possible. Mais elle n’était pas encore prête pour le révéler à celle qui allait lui servir de grande sœur. Elle ne voulait pas mettre Nymphadora en danger et c’était d’autant plus vrai en constatant à quel point elle était une personne sympathique et pleine de cœur.

« Je sais bien que l’on peut toujours accomplir des choses. Mais je ne possède pas de pouvoir, c’est ça que je veux dire. Par contre, je suis capable de courir très vite », plaisanta-t-elle.

Françoise ne pouvait qu’être d'accord avec quelqu'un qui disait que son amie était une bonne personne. Aelita avait toujours voulu aider les autres, et depuis que Françoise la connaissait, elle avait toujours eu cette impression de pouvoir compter sur elle et que c'était aussi le cas de la plupart des gens. Elle s'était demandé si son histoire de monde virtuel dans lequel elle avait été enfermée ne lui avait pas donné un côté justicier qui allait plutôt bien avec celui de Françoise elle-même, même si elle ne le lui avait pas avoué. En tout cas, sa façon de se tourner vers les autres avait donné envie à l'adolescente de lui offrir son amitié.

« Elle est vraiment gentille et généreuse. Je ne connais pas bien tous les aspects de sa vie, mais je sais qu'elle a beaucoup de mérite. Je me demande quelques fois si elle ne se ferme pas des portes toute seule en se pensant incapable d'accomplir certaines choses alors que ce n'est pas vrai. Elle a vécu une expérience étrange dans un monde apparemment virtuel et je crois qu’elle n'est pas certaine de pouvoir accomplir autant de choses dans la réalité, mais elle est plus forte qu'il n'y paraît. Finalement, certaines choses ne sont qu'une question de confiance en soi, tu ne crois pas ? »

La jeune fille avait toujours eu envie de savoir ce que ça faisait d'avoir des frères et des sœurs et elle devait reconnaître que ça lui plaisait, l’idée d'une sœur comme Nymphadora. Elle faisait un peu l'effet d'avoir ce petit côté enfantin qui laissait à penser qu'elle n'était pas complètement une adulte responsable, et Françoise trouvait ça mignon. Elle se demandait un peu à quel point sa sœur adoptive avait gardé son âme d'enfant. Même si elle devait reconnaître qu'elle avait une maturité qui dépassait un peu à celle des élèves de son âge, Françoise avait toujours apprécié échanger avec des personnalités moins sérieuses. Cela donnait un peu de légèreté à sa vie.

« C'est pas si mal si tu te sens bien dans ce que tu fais. Et au moins, si ça ne te plaît pas, c'est plus facile de changer que si tu étais figé dans un domaine précis. »

La jeune justicière savait que transplaner voulait dire de se téléporter instantanément à un autre endroit rien que par la force de sa magie. Elle trouvait ça, non seulement pratique, mais extrêmement stylé. Elle n'avait pas encore eu l'occasion de voir Ted le pratiquer, mais elle convenait que cela devait être d'une utilité remarquable. Pour sa part, en ne disposant d'aucun pouvoir qui pourrait l'aider à faciliter son quotidien, il avait bien fallu qu'elle s'entraîne afin de pouvoir devenir la justicière qu'elle était. Mais ça ne la dérangeait pas d'en passer par là pour la bonne raison qu’elle avait toujours estimé comme important de se maintenir un niveau d'exigence important dans toute sa vie quotidienne.

« C’est vrai que ça doit être très pratique. Mais quand on n'est pas capable de pratiquer la magie, je crois que développer sa force et son endurance est un bon moyen pour se créer son propre pouvoir. Si on s'en sort bien, on ne devient peut-être pas capable de vaincre un sorcier, mais très certainement d'affronter d'autres types de danger et de parvenir à les surmonter. Je me dis que si en faisant ça, je peux me protéger ou protéger certaines amies, j’aurais obtenu quelque chose qui en vaut la peine. »

Françoise trouvait que le contact était facile avec cette grande sœur que ce monde lui avait offert. Elle n'avait jamais vraiment ressenti ce que cela faisait de parler avec quelqu'un, avec qui elle pouvait partager ces sentiments profonds et ses réflexions. Elle le faisait parfois avec Œil-de-Lynx, mais ils n'étaient pas assez intimes pour qu'elle puisse réellement se laisser aller avec lui. Dans un sens, même si Dora et elle venaient de se rencontrer, il ne faisait aucun doute que sa nouvelle sœur pouvait facilement entendre ce qu'elle avait à dire. Ted avait raison, il était facile de parler avec elle.

Elle était convaincue que bien des choses ne réussissaient ou n'échouaient que du fait de la confiance en soi que la personne qui se chargeait de la tâche pouvait avoir. Elle était persuadée que c'était pour cette raison qu’énormément de personnes contrôlantes essayaient de saper la confiance en soi des personnes sur qui ils voulaient avoir un impact. Cela ne marchait malheureusement que trop bien en brisant irrémédiablement des personnes qui avaient pourtant de grandes qualités. C’étaient aussi ces personnes-là que Françoise combattait si activement en tant que justicière.

« Quelques fois, je ne peux m'empêcher de me demander si certaines personnes n'ont pas tendance à entretenir une sensation d'échec, afin de saper le moral des autres pour les priver de leur confiance en eux. »

La jeune fille comprenait parfaitement que son métier d'origine manque à sa grande sœur. Elle-même n'avait pas pu arrêter de combattre le crime en arrivant dans ce monde, pourtant blessée et affaiblie. Elle n'avait pas tardé à se remettre en route. Il n'était pas étonnant que son ancien métier manque à la jeune femme mais Françoise n'aurait pas parié sur le fait que ce changement de carrière soit définitif. Elle pensait même que tous ceux qui en étaient passés par ce métier allaient certainement se voir proposer de rempiler dans un avenir proche.

« Si cela te manque, tu en arriveras peut-être à reprendre ce métier. Tous ceux qui ont des pouvoirs sont en train de les voir revenir petit à petit, et si les méchants retrouvent la magie, il faudra sûrement une escouade pour les combattre, tu ne crois pas ? »

Françoise était très touchée par le vote de confiance de sa nouvelle sœur. Plus le temps passait, plus elle comprenait pour quelles raisons Ted lui avait dit qu’elle la trouverait forcément gentille et de bonne compagnie. C'était vraiment un amour de jeune fille et il était évident qu’elle était une âme particulièrement bienveillante et généreuse. Elle ne savait pas encore où ses propres pas la porteraient et elle ne pouvait s'empêcher de se demander si sa façon de pourchasser les bandits la définissait par une carrière dans la police, mais elle se refusait à se fermer les portes.

« Tu es gentille. Je voudrais surtout améliorer de la vie des gens qui m'entourent. Je n'en demande pas plus. »

La malveillance naturelle avait toujours été quelque chose que Françoise avait du mal à supporter. Elle ne comprenait pas la volonté de certaines personnes à vouloir obstinément faire le mal autour d'eux. Il était tellement facile de vivre en s’efforçant de faire le moins de dégâts possibles sur le monde qu'elle ne comprenait pas pourquoi certains s'obstinaient à vouloir tout détruire sur leur passage, en particulier quand la cible était particulièrement innocente et fragile. Elle avait toujours pensé qu'il y avait des êtres innocents et évidemment, c'était toujours ceux que la malveillance ciblait. Même si elle n'aimait pas ça, Françoise pouvait au moins se vanter de tout faire pour éviter que cela se produise. Beaucoup ne s'appréciaient pas mais ne se battaient pas pour autant.

Il aurait été facile de les accuser de lâcheté mais pour l'adolescente, c’était là porter un jugement gratuitement et tomber finalement du mauvais côté de la barrière. Elle se refusait à en arriver là et elle préférait faire montre d'un maximum de bienveillance. Sa nouvelle sœur semblait tout à fait d'accord avec le fait qu'il y avait des gens pour se montrer malveillant sans se soucier des limites et des besoins des autres. Et elle se sentait visiblement aussi impuissante que celle qui était maintenant sa petite sœur à ce sujet. C'était une chose bien triste de se rendre compte de cela.

« Non, bien malheureusement la plupart du temps. Mais je peux te dire que dès que je suis capable d'agir, je ne m'en prive pas. Et ce jour-là, la personne regrette d'avoir croisé mon chemin. »

C’était aussi pour cela qu'elle avait créé Fantômette. C'était sa façon de lutter, même si ce biais de lutte restait dérisoire et qu'elle avait appris ici qu'il était difficile d'affronter tout ce qui pouvait être un obstacle. Les plus grandes organisations n'étaient pas menaçables par une jeune justicière seule. Mais elle faisait de son mieux. Elle était convaincue que Nymphadora aussi faisait de son mieux et qu'elle pourrait apporter au monde bien des choses en sa qualité d'ex Auror. Elle fut ravie d'entendre que la pensée lui avait déjà traversé l'esprit et elle était persuadée qu'il y en aurait beaucoup pour combattre ceux qui avait des pouvoirs magiques et faisaient le mal, parmi les anciens sorciers.

« En plus, il pourrait y avoir des gens pratiquant la magie, mais qui ne viennent pas de votre monde et qui s'en serviraient pour faire le mal. Et des gens sans pouvoir comme moi ne peuvent pas faire grand chose pour les combattre. C'est presque cela le plus compliqué. Il y a un grand nombre de personnes vulnérables face à ces individus malveillants et dotés de pouvoir. »

Elle ne put s'empêcher de rosir en l'entendant lui dire qu'elle était capable de faire du bien à quelqu'un avec seulement cinq minutes de conversation. Elle ne s'était pas rendu compte à quel point elle avait pu aider sa sœur de cette manière mais cela lui faisait plaisir, d'autant plus qu'elle le lui avouait sans détour. Elle avait toujours essayé de soulager les poids du cœur des autres par des paroles douces et un peu de compréhension, mais elle ne se rendait pas vraiment compte à quel point elle pouvait aider les autres rien que de cette façon. Ça n'était pas dans la petite ville de Framboisy où le drame était si léger qu'elle avait pu se rendre compte de l'influence de ses paroles sur la psychologie des gens.

« Je te remercie, ça me touche beaucoup ce que tu dis. »

Françoise avait vraiment l'impression que Nymphadora tenait à elle. Plus leur discussion avançait, plus elle se rendait compte que sa sœur ne la regardait pas comme une inconnue ou une intruse, mais bel et bien comme une véritable sœur dont elle pouvait être fière. Cela la touchait. Elle savait que Ted l’avait incluse dans sa vie les bras grands ouverts. Elle avait senti que Andromeda suivait le même chemin, même si elles avaient encore besoin de temps pour s’apprivoiser complètement. Mais si elle redoutait que Nymphadora la jalouse, ce serait une belle erreur. Elle était digne de ses parents, ouverte et adorable.

En fait, elle se comportait déjà comme une grande sœur fière, et Françoise devait reconnaître qu’elle se sentait en bienveillance et en confiance avec elle. Au moins, elle pouvait être sûre que jamais sa sœur ne lui reprocherait ni sa présence ni sa nature. Et cela lui faisait chaud au cœur. Elle avait le plus grand désir d’être profondément intégrée à cette famille et cela lui était agréable de s’apercevoir que tout le monde avait à cœur de lui en offrir la possibilité. Ça la rendait bêtement heureuse. Elle qui avait toujours agi au-dessus de son âge ressentait maintenant la basique acceptation recherchée par toute enfant de six ans.

« Tu es vraiment cool, comme grande sœur. J’ai de la chance. »

Elle ne savait pas que des choses avaient déjà été mises en place pour lutter contre la magie noire, mais ça ne l'étonnait pas plus que ça. Il y avait un grand nombre de forces du bien qui était représentées dans ce monde dont certaines étaient d'ordre magique et d'autres, non. Mais pour tous les bons sorciers de ce monde, il était sincèrement évident à ses yeux qu'il devait avoir l'intention de lutter contre le mal. Si elle avait été détentrice de pouvoir magique, elle n'aurait pas supporté de laisser des personnes utiliser la magie noire pour blesser des innocents. Déjà, sans pouvoir, elle faisait tout ce qu'elle pouvait pour les protéger.

« Et tu te bats avec eux ? Si j'avais des pouvoirs, je crois que je ne pourrais pas faire autrement. J’ai bien du mal à voir des personnes innocentes souffrir à-cause de gens malintentionnés. »

Visiblement, Nymphadora ne se prenait pas pour rien. Elle connaissait sa propre valeur et dans la mesure où elle avait raison, Françoise ne lui en faisait pas reproche. Elle était même contente que sa sœur ait conscience de ce dont elle était capable. C’était important de croire en soi, sachant que la plupart des personnes étaient plutôt en train de se dévaloriser généralement. La fraicheur de la personnalité de sa sœur aînée lui rappelait celle de Ted, et elle n’avait qu’une envie, c’était de faire partie d’une famille avec de telles personnes. Elle était vraiment chanceuse d’être tombée sur Ted.

Elle se demandait quel genre d’effet elle aurait dans un groupe de sorciers qui combattaient ceux qui avaient des pouvoirs maléfiques. En tant que justicière, elle combattait le crime, certes, mais elle se méfiait toujours lorsque cela concernait des pouvoirs magiques. Elle connaissait ses limites et il était difficile d’affronter quelqu’un possédant des dons quand on n’avait pas la moindre capacité de cet ordre. Par ailleurs, elle n’avouait à personne ou presque son métier de justicière. Mais la suggestion de sa sœur aînée la touchait grandement. Elle était courageuse et protectrice, c’était quelque chose de doux à son cœur. Et lui donnait encore plus envie de se montrer douce et bienveillante avec elle.

« Et puis, je n’ai pas de pouvoirs magiques. Même si je devais combattre le crime un jour, par exemple, si je voulais intégrer la police, il vaudrait mieux que j’évite de me confronter à des sorciers. »

Elle avait déjà du mal dans ce monde à se confronter aux grandes organisations criminelles qui se construisaient dans cette ville qui avaient happée tout type de personnes provenant d’endroits divers et variés. Des endroits où l’organisation du crime n’était pas la même que dans le monde de Françoise, où Fantômette pouvait suffire à débroussailler un certain nombre d’affaires. Elle avait notamment rarement enquêté au sujet de meurtre. La plupart du temps, il s’agissait de vols, d’escroqueries, de détournements de fonds, d’enlèvements parfois. Mais dans cette ville, on atteignait un niveau supérieur, et elle ne pouvait que faire de son mieux.

« Les choses sont compliquées pour la loi et la justice dans un monde où tout est mélangé comme c’est le cas ici, n’est-ce pas ? »