Une petite dernière pour la route ! (Abelforth et Chance)

▿ Date de naissance : 02/12/2003

La neige tombe dru ce jour-là. Elle forme un manteau immaculé qui recouvre les rues de la ville. Ou un gros édredon. Aux yeux d'une flemmarde comme Chance d'Estaing, c'est tout comme.

Une fois n'est pas coutume, notre démonette préférée est à la bourre sur tout aujourd'hui. Voulant prouver sa bonne volonté auprès du bureau des étudiants de l'université Marshall, elle s'était engagée à aller faire du repérage pour des lieux de sortie sympa et pas trop chers. C'était sans compter sur le fait qu'elle allait procrastiner sa tâche jusqu'à l'extrême dernière limite et qu'elle se retrouve en prime avec une interro à réviser pour le lendemain dans une matière dont elle se contrefout. (Socio. C'est quoi Socio sérieux ? Ca s'étudie les gens ?? Pfff ce qu'il faut pas faire pour avoir un diplôme.

Elle compte ce soir faire d'une pierre de coups et s'installer dans le Tête de Sanglier pour réviser son examen tout en évaluant l'ambiance du lieu.

Elle roule donc ce soir à travers les ruelles enneigées pour atteindre la silhouette délabrée de la "Tête de Sanglier", un vieux tripot qui ne paye pas de mine. Son camion déglingué glisse difficilement sur la chaussée verglacée, mais elle parvient finalement à se garer non loin de l'établissement.

Assaillie par des torrents de neige, elle rentre la tête dans les épaules et s'élance hors du véhicule, laissant derrière elle des traces de pas chaotiques dans la neige. A moitié aveuglée par la tempête, elle se précipite vers la porte du bouge et dérape sur une plaque de verglas. Après des battements de bras comiques et un rien comiques, elle se vautre. Elle se redresse difficilement, ses mains agrippant le gros heurtoir de la porte, laissant échapper un juron étouffé.

-Vous voulez tuer vos clients ou quoi avec du verglas devant la porte ?! s'époumone t'elle avant d'enfin ouvrir la porteet de se mettre à l'abri à l'intérieur.

Dès les premiers pas dans la salle commune, elle lance avec bonne humeur un joyeux

- Bonjour !

Sauf que bah ... dans la salle mal éclairée et étroite, on peut pas dire que l'ambiance soit à la grande fête. Elle s'attire en retour de très vagues regards et marmonne in petto.

- Ca commence bien.

Une substance collante recouvre le bois de nombreuses tables, dont celle où elle choisit de s'installer. Chance jauge avec scepticisme l'état de sa table et ose la toucher d'un bout d'index curieux. Mieux vaut ne pas trop se demander ce qui a pu arriver à cette pauvre table pour finir ainsi. Est-ce que ses cours ont une moindre chance de survie en étant posé là dessus ?
Difficile à dire. il existe une chance non négligeable pour qu'ils se mettent à fumer et à fondre ...

Elle finit par ôter la grosse doudoune qu'elle porte mais surtout son bien joli bonnet à ponpon, celui qui cachait jusqu'à maintenant sa merveilleuse paire de petites cornes qui pointent avec fierté à travers sa chevelure rousse emmêlée. Son regard pétillant contraste avec l'atmosphère décrépite du Tête de Sanglier alors qu'elle lève un bras, essayant d'attirer le regard de quelqu'un pour commander.

- Je voudrais une bière s'il vous plait !

Autant commencer par le commencement pour voir si ce bar a une chance d'être fréquentable !

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▿ Date de naissance : 17/12/1948

Une petite dernière pour la route

Il y allait avoir une tempête. Avec le temps, Abelforth pouvait les sentir et savoir à peu près si ça allait être grave ou pas. En l'occurrence, il s'attendait à une belle tempête. Il n'était donc pas question de laisser les chèvres dehors au risque qu'elles soient blessées. Il avait donc laissé un instant cette taverne à ses habitués du moment et c'était rendu dehors pour aller chercher la petite famille de chèvre et les ramener à l'intérieur. Cela ne serait pas très compliqué et elles ne feraient pas de dégâts. C'étaient de bonnes chèvres.

En rentrant, il constata la présence d'une jeune fille qui ne semblait pas vraiment à sa place à cet endroit. Il fronça les sourcils. Il avait passé du temps à la porte de Poudlard à avoir des élèves de l'école essayaient d'obtenir de l'alcool de sa part. Ils pensaient tous que, parce qu'il était le propriétaire d'un pub moins fréquentable que les Trois Balais, il allait prendre ce risque. Mais à part de la Bièraubeurre, il ne servait rien d'alcoolisé à des individus mineurs. Il regarda donc d'un air suspicieux de la jeune fille en se demandant ce qu'il conviendrait de faire.

« T'as quel âge, Petite ? Je sers pas de l'alcool aux gosses. T'auras rien de plus fort que de la Bièraubeurre si tu viens du lycée. »

Il regarda vers la fenêtre et songea qu'il avait bien fait de rentrer les chèvres car la neige tombait vraiment drue. Il regarda à nouveau la jeune fille, puis les clients. Le vent dehors faisait un bruit féroce et il ne fallut que quelques minutes pour que quelqu'un s'inquiète et aille ouvrir la porte. Il suffisait de se rendre compte qu'on ne voyait absolument rien et que la neige n'en avait pas fini de tomber pour comprendre qu'ils allaient être bloqués ici un moment. Heureusement que la taverne avait des chambres au cas où il serait impossible de repartir avant le lendemain matin.

« Tu devrais peut-être appeler tes parents, Gamine », lança-t-il à la demoiselle. « On risque de ne pas pouvoir partir d'ici avant un bon moment. »

Cela dit, il pouvait y avoir pire que de rester enfermé une nuit à la Tête de Sanglier. Le vieil homme aurait adoré passer la fête de Noël dans son pub. Ce n'était pas le meilleur endroit pour une soirée entre amis, mais ce serait toujours mieux que ce à quoi il était habitué avec sa famille. Il n'y avait rien de pire pour Abelforth qu’un Noël dans la famille Dumbledore, coincé entre sa mère et son frère si merveilleusement parfait. Il n'y avait jamais eu que Ariana pour rendre la fête un peu plus agréable pour lui. Repenser aux fêtes de Noël en famille lui donnait envie de bougonner et il ne faisait aucun doute qu'il ne serait pas forcément agréable avec la gamine si elle lui répondait trop brusquement.

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Joyeux Noël
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▿ Date de naissance : 02/12/2003

Voilà que l'ancêtre qui tient le bouge revient en salle et fait entrer avec lui un troupeau de chèvres. La vue des animaux bêlant fait relever le nez de Chance et plisser le museau.

- Ah ouais ... ca pose l'ambiance.

Au moins ca veut dire que les cornues ne sont pas les malvenues ici. C'est déjà ça. Par contre pour ce qui est de l'hygiène, on repassera.

L'entrée en matière du propriétaire des lieux et sa suspicion bien légitime fait marrer la diablotine qui réplique avec dérision.

- Wow, ca faisait longtemps qu'on me l'avait pas fait le coups de la carte d'identité. Je vais prendre ca pour un compliment.

Peut-être que le vieux est bigleux. Ou qu'il a plus l'habitude de voir des visages jeunes. Faut dire que sa simple présence semble avoir fait baisser la moyenne d'âge des gens de 15 ans ... Il ne lui faut qu'un geste pour sortir un gros porte-cartes ventrue, duquel elle extirpe pèle mêle toutes les preuves de son adultitude.

- Voilà tout ce qu'il vous faut monsieur l'agent.

Carte d'identité, carte d'étudiante, carte professionnelle (indispensable pour acheter ses provisions chez des grossistes), carte de fidélité d'une boutique-vidéoclub "ho la la" (Evidement interdite aux moins de 18 ans). Il y a même une capote qui était rangée là qui glisse sur la table accidentellement en même temps que le reste.

-Oups. Non, pas ça.

Elle s'empresse de la reprendre et la faire disparaître dans son portefeuille. Un œil averti aura d'ailleurs pu noter que la date de péremption de l'accessoire est largement dépassée. Une tristesse. C'est une nouvelle preuve s'il en fallait que dans la vie, c'est pas celles qui en parlent le plus qui ... bref vous connaissez la suite.

Elle affiche un grand sourire et demande du coups avec innocence.

- Du coups pour la bière, c'est ok ? En 25 s'il vous plait ! Et sans beurre dedans.

Les remarques de l'ancien sur le temps dehors la laissent un instant perplexe. Elle jette un oeil par la fenêtre et va jusqu'à se déplacer jusqu'à la fenêtre pour jeter un coup d'oeil. Elle manque de se prendre les pieds dans une chèvre et fait un petit bond de côté pour éviter de shooter dans la pauvre bête. Arrivée devant la vitre, elle regarde le paysage et grimace.

- Et merde. C'est pas cool.

Elle a des chaines de pneus dans son camion mais c'est la galère de les mettre. Elle a la flemme. Pas du genre à paniquer elle retourne à sa place (toujours sans marcher sur la chèvre) et déclare avec une bonne humeur résolue.

- Bon ben finalement je vais prendre une 50 !

Ouais. Autant voir la pinte de bière à moitié pleine. Elle justifie son choix de manière très simple :

- On dirait que je vais pas prendre le volant avant un moment.

Et puis il faut du carburant pour que ses neurones fonctionnent pendant ses révisions, non ?

Joyeeeeeuuuuuux Noëeeeeel !!

▿ Date de naissance : 17/12/1948

Une petite dernière pour la route

S’il avait un peu de considération pour quelque chose, c'était encore la jeunesse. S’il voyait un enfant sur le point de faire une grosse connerie, c'était peut-être encore le seul moment où Abelforth interviendrait. De là à dire qu'il était attentionné, c'était peut-être beaucoup. mais il n'avait pas envie de saouler une collégienne ou une lycéenne. Le nombre de documents qu’elle sortit de sa poche était astronomique et le vieil homme ne put s'empêcher de lever un sourcil hautement sarcastique en la voyant déposer avec, un préservatif. Au moins, elle avait de quoi se protéger, la gosse. Elle ne devait donc pas être complètement dénuée de neurones.

« La carte d'identité, ça suffisait, mamzelle », commenta-t-il avec humour.

En tout cas, s’il ne ressentait pas le besoin de connaître la vie entière de ses clients, celle-là, il était quand même un peu curieux de ce qu'elle faisait de tout le barda qu'elle avait sur elle. Il était rare d'avoir à la fois une carte professionnelle et une carte étudiante. Elle était peut-être en reconversion, ou alors elle étudiait pour améliorer sa propre boîte. Bref, et ce n’étaient pas ses affaires. En allant lui préparer sa 25, il remarqua la dégradation du temps et préféra la prévenir. Après tout, si elle risquait d'être bloqué avec un vieux grigou comme lui, il valait mieux qu'elle soit au courant. Ça ne lui plut visiblement pas mais elle réagit avec tellement de philosophie qu’elle réussit à arracher un sourire au vieux sorcier. Au fond, elle était attachante cette gosse.

« Et une 50 qui marche ! T'en fais pas trop, Gamine. Si la tempête dure trop longtemps, j'ai des chambres ici. Avec une clé », précisa-t-il.

Il valait mieux fermer à clé dans le coin. En ce qui le concernait, il pouvait casser le nez de n'importe qui. Cette pensée lui fit automatiquement penser également à son frère et lui arracha un sourire en pensant au nez de celui-ci. Mais bref, en ce qui concernait la gosse, une fille mignonne comme elle avait plutôt intérêt à fermer sa porte dans un quartier comme Lockwood Hill. Il remarqua que la petite chevrette s'était avancée pour faire connaissance avec la demoiselle et qu'elle avait glissé sa tête dans sa main presque d'autorité. Cela le fit sourire et en arrivant pour déposer le verre, il vint caresser la tête de sa petite protégée.

« Tiens, 50, profites en. Tu peux lui dire zut, si elle t'embête. C'est une petite curieuse. »

▿ Date de naissance : 02/12/2003

Le maître des lieux indique à Chance qu'une telle débauche de preuves n'était pas indispensable. La démonette répond à la remarque par un large sourire.

- Qui peut le plus peut le moins, mon bon monsieur !

Le temps qu'elle remette tout dans son portefeuille, capote incluse, elle commente.

- Quand j'utilisais encore de faux papiers, ca marchait de ouf, vous voyez. L'abondance faisait office de distraction.

Et devant le regard possiblement soupçonneux du vieux après cet aveu non nécessaire, elle lève les deux mains, l'innocence résolument rivée au visage.

- Mais ca c'était avant. Je suis une repentie maintenant.

Elle est surtout suffisamment âgée pour ne pas recourir à de tels subterfuge.
Du coups, sa commande est acceptée et elle est bien contente. Après avoir regardé dehors et doublé la dose, elle réagit à la remarque du tenancier.

- Ah, des chambres !

Reprend t'elle joyeusement.

- Avec clefs en plus.

L'établissement marque des points. Avoir de quoi loger les copains qui picolent et qui ont oublié de se prévoir un SAM, c'est un sacré plus. Il y a fort à parier, au vu de l'ambiance du bâtiment et des chèvres qui galopent qu'il doit y avoir un supplément punaises et pas mal de poussière. Mais c'est pas grave. Les étudiants bourrés sont pas difficiles à loger. En vrai ils sont souvent prêts à prendre tout ce qui est mieux qu'un caniveau. Pour peu qu'on les prévienne en avance et qu'ils prévoient leur sac de couchage, il y a des chances pour que ca passe.

- C'est noté patron. C'est pas le plan mais si jamais ...

Répond t'elle avec un grand sourire. Elle lève la bière qui vient de lui être servie.

- A la votre du coups !

On va pas se mentir, dormir ici, ce serait quand même la tuile. Elle a pas pris de fringues de rechange. Les copains vont encore s'imaginer des trucs s'ils la voient encore une fois venir en cours avec les mêmes fringues que la veille. Ils s'imaginent à chaque fois des trucs pas possibles. Alors si en plus elle sent la vieille chèvre, je vous laisse deviner ce qu'ils vont trouver à en dire ...

Et parlant de chèvre, biquette est plutôt du genre collante. Dans le genre cool du terme pour une fois. La cornue miniature semble en grand manque d'affection.

- Naaaan, je crois qu'on est déjà potes. C'est les cornes, vous voyez. Ca créé des liens.

Regardez si c'est pas mignon. Elle commence déjà à mâchonner un coin de classeur que Chance avait sorti plus tôt pour commencer à réviser.

- Han. Toi t'aimes la socio. T'es bien la seule.

Chance empêche tout de même l'animal de continuer son repas. Mais faut pas pousser mhéé mhéé dans les orties quand même. Si elle se casse le cul à prendre des notes en cours, c'est pas pour nourrir le premier bestiau venu. La socio c'est pour les moutons, mais ceux qui ont payé leurs frais d'inscriptions à la fac. La privation n'empêche pas l'animal d'étaler ses élans d'affection pour chance jusqu'à finir à moitié juchée sur ses genoux pendant qu'une Chance ravie veille à l'essentiel : ne pas renverser la chopine ni la laisser à portée de Gourmande (Oui, c'est fait. La chèvre s'appelle Gourmande, elle officiellement baptisée aux yeux de Chance).

▿ Date de naissance : 17/12/1948

Une petite dernière pour la route

Apparemment, la gosse en savait plus qu’à son tour pour ce qui était de gruger. Ça n'aurait pas dû étonner Abelforth. Elle était totalement le genre de gamine qui devait faire passer une copine pour sa grande sœur juste histoire de ne pas amener sa mère à l'école quand elle avait fait une connerie. Elle se vanta elle-même de sa capacité à noyer le poisson dans un trop-plein de preuves complètement fabriqué de toutes pièces. Dire ça à un homme à qui on essayait désespérément de prouver qu'on était majeur et vacciné merci bien, ce n'était pas la plus brillante des manières de procéder et le vieil homme lui accorda un haussement de sourcils suspicieux.

Mais la demoiselle réagit aussitôt à sa propre remarque en affirmant qu'elle était à présent une repentie et qu'elle ne recourrait plus à ce genre de stratagème. Le vieil homme la toisa avec une fausse suspicion, car il avait ce sentiment qu'elle ne mentait pas mais il se sentait quand-même pris d'une furieuse envie de la taquiner un peu par rapport à tout cela. Après tout, elle était bien attachante cette gosse et il avait l'impression qu'il allait bien s'amuser en la compagnie de quelqu'un comme ça. Elle lui rappelait de bons souvenirs et elle était plutôt sympathique.

« Je crois qu'on appelle ça la majorité plutôt. Profites-en bien, Mamzelle ! »

Abelforth ne pouvait s'empêcher d'être un minimum attendri devant le spectacle de la chevrette en train de prodiguer de l'affection sans bornes à la cliente impromptue du bar. Le vieil homme avait fait savoir à sa cliente qu'elle avait le droit de virer la chèvre si celle-ci l'incommodait. Mais elle gagnait encore des points puisqu'elle se déclara officiellement amie avec la petite chevrette. Les yeux du vieil homme s'adoucirent en entendant le commentaire de la jeune fille et il se mit à passer la lavette sur son bar, les yeux légèrement humides. Elle avait peut-être un goût trop prononcé pour l'alcool et une tendance à raconter des cracks, mais elle avait bon fond, cette petite, il en était sûr.

« Sûrement », confirma-t-il en ce qui concernait les cornes.

Il l'écouta parler à la petite chèvre et découvrit qu'elle était étudiante en sociologie, apparemment. Il n'avait pas la moindre idée de ce que ça pouvait être, tout comme il n'avait pas la moindre idée de la plupart des choses qui étaient une réalité pour les gens de ce monde. Ça ne l'intéressait pas. Il n'avait jamais été quelqu'un qui l’étudiait et il se sentait bien avec ses quelques connaissances basiques pour gérer son bar. Il n'avait pas besoin de plus, mais il comprenait que certains en aient besoin et après, il se demandait aussi combien de personnes faisait ce genre de choses pour retarder d'autant le moment où il devrait devenir de vrais adultes responsables.

« Tu étudies la sociologie ? Ca te plait comme sujet ? »

Qui pouvait savoir, il apprendrait peut-être des choses.

▿ Date de naissance : 02/12/2003

Aucun prof dans les parages ? Aucun autre élève qui pourrait baver par la suite ? Great, Chance a les coudées franches pour s'exprimer sans retenue.

- Nan c'est de la merde.

Une réponse qui vient du coeur. Mais qui demande quand même un tout petit peu de développement.

- La socio, c'est un peu comme regarder un épisode de télé-réalité, tu vois ? T'as plein de gens, souvent bizarres, qui interagissent dans un environnement étrange. Et là, on se met à les observer, à décortiquer leurs relations, à analyser pourquoi ils font ce qu'ils font. C'est un peu du voyeurisme sans que les gens soient à poil du coups ca perd de son intérêt.

C'est pas plus clair. Elle poursuit donc.

- Imagine que la société, c'est une immense pizza. Chaque tranche, c'est un groupe différent, avec ses propres délires. Alors, les sociologues, ils prennent un microscope et ils passent leur vie à examiner leur bout de pizza. Ils décryptent pourquoi untel aime la musique, pourquoi machin déteste l'école, tout ça en se demandant si c'est la faute de la pizza ou du fromage.

Et puis, y a des gars, les grands pontes, qui inventent des théories compliquées. Ils parlent de trucs comme la structure sociale, les classes sociales, le pouvoir symbolique... c'est comme une bouillie de mots qui te donne l'impression d'être super intelligent quand tu la balances à une réunion. Le truc c'est que ... Hey bouffes pas ça !

Elle repousse le museau de Gourmande la biquette qui avait commencé à s'attaquer au coin d'un classeur. Ca bouffe aussi le carton les chèvres ? Incroyable. On devrait s'équiper de chèvres plutôt que de poubelles recyclables. La pause lui permet de prendre une gorgée de bière avant de reprendre, tout en gratouillant la tête de la chèvre.

- Le truc, disais-je, c'est que ça finit souvent en débats interminables où tout le monde se prend le chou pour savoir si c'est la pâte ou la garniture qui domine la pizza. Et à la fin, tout le monde sort du resto sans avoir vraiment résolu le mystère.

Au terme de l'exposé, elle ne se sent pas trop mécontente d'elle même. L'analogie de la part de pizza, c'est pas mal. On ne sait pas si Abelforth aura une vision plus claire sur le sujet mais au moins il aura compris qu'à priori, c'est pas les études qui la passionnent. Et anticipant cette remarque, l'étudiante professionnelle ajoute.

- Mais il y a pas que la socio. A la fac tu choisis des modules de ci de là, ce qui te plait, même quand ca fait aucun sens.

Ca c'est le point de vue de Chance dont le parcours scolaire est exceptionnellement chaotique. Beaucoup d'étudiants sérieux de l'Université Marshall ne seraient pas de son avis.

- C'est les parents qui veulent que les jeunes soient diplômés. Et les banques aussi ! Vas-y pour te faire prêter de l'argent quand t'as pas validé de diplôme, ils te rient au nez et te claquent la porte au nez. Alors que je vous jure, avec strictement le même projet et un diplôme en poche, ils vous déroulent le tapis rouge.

Elle en sait quelque chose, Chance. C'est une entrepreneuse née.

- Pareil pour les patrons. Même pour répondre à un téléphone ils pensent qu'il faut avoir étudié ce genre de truc pendant deux ans.

Elle en agite sa liasse de cours de socio pour rendre la démonstration plus éloquente. Et évidement, Gourmande prend ça pour une invitation et mord à pleine dents dedans.

- Meeeeeerde, bouffe pas le chapitre sur les théories du genre, toi ! T'as déjà vu une chèvre s'interroger sur la binarité sociale ? On va finir par te retrouver en train de défiler dans un mouvement féministe, et ça risque de foutre le boxon dans la basse cour ça.

C'est sans violence mais avec fermeté qu'elle parvient à sauver ses cours de la déchiqueteuse ambulante. L'étudiante décide fort sagement d'éloigner l'objet de la gourmandise des dents carnassières. De toutes façons, Chance est une championne de la procrastination, elle n'est plus à un quart d'heure près pour se mettre à réviser.

- Désolée, je parle, je parle, je m'arrête plus. Pour ma défense, vous êtes pas un grand bavard ... Vous recevez souvent des étudiants dans le coin ? Les universités sont pas trop loin.

▿ Date de naissance : 17/12/1948

Une petite dernière pour la route

Elle lui plaisait vraiment la gosse. Si ça n’avait pas été le cas, il n’aurait pas entretenu la conversation. Il se serait contenté de la laisser boire dans son coin sans se préoccuper davantage de son occupation. Cela dit, il était coincé avec elle et pour un moment, alors il valait mieux qu’elle soit sympa. Au moins, il avait de quoi s’occuper en attendant que la tempête de neige ne se calme. Rien qu’à regarder dehors, la neige avait déjà grimpé de quelques centimètres. Heureusement que les chèvres étaient au chaud. Il n’avait pas tellement envie qu’elles affrontent le froid mordant.

Il commença à nettoyer quelques verres en l’écoutant commenter la sociologie d’une oreille distraite. S’il n’en était pas à l’analyse et au débat, tenir une taverne était un bon exercice de sociologie en soi. Abelforth en savait plus qu’il ne pouvait lui-même le dire au sujet des habitudes de la société, surtout dans le monde du banditisme. Mais de là à dire qu’il pourrait analyser et débattre, il n’était pas assez intellectuel pour ça. C’était plutôt le truc de son frère. Il sourit en coin quand elle mentionna la dispute au sujet de l’influence de la pizza, de la croûte, de la sauce ou du fromage.

« Est-ce qu’ils ont au moins mangé la pizza ? » demanda-t-il au sujet de ces gens qui sortaient du restaurant en situation d’échec, avec un sourire malicieux.

Abelforth avait un sens des priorités tout à fait particulier. Cela ne le dérangeait absolument pas de prendre une conversation à contrecourant tant que c’était marrant. Il fallait toujours un brin d’humour dans la vie, même si c’était caustique ou sardonique. On ne pouvait pas vraiment dire que l’humour d’Abel était adapté à toutes les oreilles et surtout à toutes les sensibilités. Heureusement, la plupart des personnes qu’il rencontrait étaient des durs à cuire ou au caractère bien trempé. Pas des gens bien faciles à vexer, même s’il ne cherchait pas forcément cela. Ca sortait tout seul, depuis bien longtemps.

La fac et les modules qu’on pouvait bien y enseigner, tout cela était largement loin des préoccupations de Abelforth. Il avais ses ASPICS et certes, il s’était démené au-delà de ses propres capacités pour les avoir tout juste, mais ça ne lui servait pas à grand-chose ici. Comme quoi on n’avait pas besoin d’une grande formation pour gérer une taverne. Il fallait dire aussi qu’il s’était installé là sans rien demander à personne et qu’il avait suffisamment de tolérance sur la clientèle pour que ça ne pose pas de souci. Il gagnait assez pour être tranquille sur ce plan là et le reste, il s’en fichait bien.

« C’est que tu t’adresses pas aux bonnes personnes. Ici, moi, j’m’en fous des diplômes. T’as des endroits, faut seulement savoir s’en sortir, surtout ici où y a plein de gens qui viennent d’endroits différents. Tu crois que qu’la fermière du dixième siècle, elle va en avoir quelque chose à cirer de ton diplôme ? Ce qu’elle veut, c’est qu’tu saches traire une vache… ou une chèvre », acheva-t-il en la voyant essayer de sauver ses cours de l’appétit de la jeunette. « T’as tes parents avec toi, Gamine, au fait ? »

Elle était pas sevrée depuis long, mais c’était sacrément bien ancré pour cette biquette. Il pouffa de rire en imaginant la petite chèvre dans un mouvement féministe. La seule chose pour laquelle elle se battra, ça sera pour revendiquer son petit coin d’herbe à brouter. C’était tout ce qui comptait pour la petite chevrette. La jeune fille eut la présence d’esprit de retirer le dossier précieux de la portée de la chèvre avant de s’excuser pour ses bavardages. Il hocha la tête pour dire que ce n’était rien. Elle le questionna sur les étudiants, et il hocha à nouveau la tête, cette fois avec dénégation.

« Ce n’est pas vraiment le public de la maison. On a plutôt affaire à des loubards peu fréquentables par ici. Je les dérange pas trop quand ils ont besoin de tranquillité et tout va bien. Cela dit, je serai toi, j’me baladerais pas trop dans le coin à la nuit tombée. Surtout que t’es plutôt jolie, y’en a qui seront clairement intéressés. »

Même si elle était équipée, ça ne voulait pas dire qu’elle devait forcément être obligée de s’en servir et puis, il n’aurait pas tellement envie de ce genre de choses dans le coin s’il avait été une minette. Dans le coin, il valait mieux se tenir à carreaux.

▿ Date de naissance : 02/12/2003

Il suffit de pas grand chose pour entretenir la conversation avec Chance. Un sous dans la machine suffit, comme le dit l'expression. La question du vieux sur la part de pizza la fait marrer et restant dans la maîtrise totale de son analogie, elle réplique.

- Même pas ! La pizza finit froide et moisie avant que quiconque la mange. Du coups on peut rien en faire.

Ses récriminations contre le système ne tombent pas dans l'oreille d'un sourd et le vieux tenancier abreuve la jeune femme de paroles pleines de sagesse qui font directement écho aux convictions de la démonette. Elle s'exclame, tout en faisant faire un soubresaut bien involontaire à la cheverette installée sur ses genoux.

- Exactement ! L'école de la vie c'est la plus importante. Plus que ça en tout cas.

Dit elle en désignant les cours qui étaient maintenant hors de portée de Gourmande.

- Mais allez dire ça aux parents, hein ... ? La seule fois où mes vieux ont dépassé une ligne tracée ca devait être en maternelle quand ils apprenaient à colorier leurs dessins. Et ca a du arriver une fois.

Un sourire de connivence se dessine sur son visage alors qu'elle prend un air de conspiratrice et se tapote la tempe du bout de l'index.

- Vous y trompez pas. Je suis une maligne. Je sais comment mener un business. Je suis une patronne de food-truck et je roule ma bosse plutôt pas mal ...

A son humble échelle d'étudiante en tout cas. Ca suffit pour qu'elle se paye son loyer toute seule, s'autorise quelques extras et commence même à mettre un petit de côté en cas de galère. C'est ce qu'on appelle "entrer dans la vie adulte", non ?

Abelforth prend ensuite le temps de décrire les fréquentations "douteuses" de l'établissement et du quartier en général. Le bilan de la clientèle est peu flatteur et est supposé servir de mise en garde pour la jeune oiselle qui lui fait face. Manque de bol, la notion de danger semble complètement passer au dessus des cornes de la diablesse dont le sourire s'élargit alors qu'elle réplique avec enthousiasme.

- Chouette, ca doit faire de l'animation.

C'était sûrement pas la réponse attendue. Visiblement la démonette a retenu deux choses du discours : Il y a des bad boys dans les environs ET certains pourraient la trouver à leur goût. Ca tombe bien, Chance est plutôt du genre à aimer les loubards. Bien qu'elle n'ait jamais vraiment eu de succès avec eux. Ni avec d'autres d'ailleurs ... meh ... c'est qu'un détail.

- Vous laisserez ma carte aux plus mignons que vous croiserez alors ? J'y laisserais mon numéro écrit dessus.

On sait jamais. On ne réussit pas dans le business sans être un tout petit peu opportuniste.

Mais elle se rend compte qu'elle a oublié de répondre à une des questions du tenancier ! Même si elle y a déjà implicitement répondu. Elle rajuste sa position dans le fond de son dossier, remet une mèche de cheveux derrière ses oreilles et prend le temps de boire une gorgée de sa bière (parce que parler donne soif) avant de reprendre.

- Du coups, ouais, je suis venue avec toute ma famille.

Elle a beaucoup de chances de ce point de vue. Vraiment. Elle a le plus souvent conscience. Elle ne l'oublie que quand ses 7 emmerdeurs de frères lui font péter un gros cable.

- Mais la maison commence à être trop petite. J'ai 7 frères, ils saoulent. J'ai un plan pour bientôt me prendre une coloc'.

▿ Date de naissance : 17/12/1948

Une petite dernière pour la route

Cette gamine était décidément attachante et elle faisait sourire Abel qui joua le jeu en ce qui concernait son analogie de la pizza. La mention d'une pizza moisie qu'on ne pouvait même pas manger après fit grimacer le vieil homme qui avait suffisamment de gourmandises pour trouver le gâchis dommage, même s'il avait conscience qu'il ne s'agissait que d'une analogie et qu'il n'y avait pas de pizza moisie dans le coin. À bien y réfléchir, cette conversation lui avait donné envie de pizza et il ne serait pas contre de s'en commander une petite, voir moins petite, mais de toute façon, ça ne pourrait pas être avant que cette tempête soit terminée.

Il n'était pas réellement surpris de l'entendre dire qu'elle avait un business. Elle avait l'air sérieusement dégourdie cette petite, et cela démontrait bien ce qu'il lui disait, il n'y avait pas forcément besoin d'école pour réussir à s'en sortir. Il fallait juste un peu de débrouille et on obtenait un résultat à la hauteur. Cela dit, il avait parfaitement conscience que toutes les personnes qui étaient plutôt nuls à l'école ne pourraient pas se débrouiller aussi bien. Cela dépendait beaucoup la capacité que la personne aurait à prendre les choses en main et à faire ce qui serait nécessaire.

« Ca me paraît un plan pas mal. Et y a des pizzas dans ton truck ? Tu m'as donné envie de pizza avec tes histoires. »

S'il y avait bien une chose à laquelle il ne s'était pas attendu, c'était qu'elle trouve l'idée des fréquentations douteuses du coin plaisante. Il avait voulu la prévenir afin qu'elle ne risque pas de se faire agresser et voilà qu'elle était prête à donner sa carte à des individus dangereux sans même savoir ce que cela valait en termes de sécurité. Il ne savait pas quel genre de gosse était cette petite, mais elle n'était clairement pas comme les autres. Ca ne la dérangeait pas plus que ça de lui donner un petit coup de pouce, mais il allait garder un œil sur elle, malgré tout.

« La plupart ont une sale tête », affirma-t-il en jetant un coup d'œil à la carte. « Mais si tu veux faire de la prospection, tu n'as qu'à passer un de ces soirs. Je pense que tu peux facilement négocier quelques boissons gratuites avec ton look. Un petit sourire et ils seront remplis de tous les espoirs. Cela dit, je garde un œil sur toi quand même. Je tiens pas à ce que tu disparaisses dans la nature. Je pense que tu me manquerais. »

À lui ou à la chèvre. Elle avait l'air sacrément accrochée la petite. Maintenant qu'elle n'avait plus accès aux cours de la demoiselle, elle semblait très intéressée par l'idée de mâchouiller ses cheveux. Abelforth n'était pas sûr que ce soit une brillante idée de la laisser faire, mais après tout, c’étaient ses cheveux à la gamine et c'était à elle de décider ce qu'elle voulait en faire. De la nourriture pour chèvres, c'était une option comme une autre. Elle avait de la chance, cela dit. Il n'y avait pas grand-monde qui pouvait se vanter d'avoir toute sa famille auprès d’eux. Il y avait un certain nombre d'enfants qui se retrouvaient d'ailleurs à l'orphelinat à cause de ça.

« Oui, je comprends. Ça peut être ennuyeux, les frères, je dis pas le contraire, mais t’as quand-même de la chance de les avoir tous ici. Tout le monde a pas cette chance. Du coup, j'espère que tu iras quand-même les voir de temps en temps quand tu habiteras à part. T'as déjà des plans pour ta coloc ? Évite Lockwood Hill si tu veux mon avis. Après, ca t’arrangerait peut-être pour le coup des loubards. M’enfin, je maintiens que t'es un peu trop mignonne pour ce quartier. »

▿ Date de naissance : 02/12/2003

Chance hoche fermement la tête.

- J'vous dit, même avec l'économie la plus pourrie de la terre, on trouvera des gens qui se diront "tiens, j'ai un petit creux" à un moment ou un endroit incongru. Et c'est là que nous autres, dans le business de la restauration nomade, on aura toujours de quoi vivre.

C'est une loi universelle quasiment mystique aux yeux de Chance. Partout où des gens se réunissent, ils finiront invariablement par ressentir le besoin irrepressible d'ingérer de la nourriture grasse et bon marché. Il suffit d'anticiper le besoin en étant pile poil là où il faut pour être la personne présente devant eux au moment où cette envie va naître.

- Bien sûr que je fais des pizzas ! La Pizza al Porno est mon best seller, la Spéciale Rocco crème de mozzarella et saucises géantes connait son petit succès aussi. La Lolo Ferrari à la poitrine fumée est pas mal non plus. J'offre la salade de pastèque fraiche en été avec ...

Elle jette un coup d'oeil en direction de la fenêtre la plus proche et grimace un peu en voyant que la neige continue de tomber de manière si drue.

- J'vous en aurais bien proposé une, mais là ca va être un peu chaud de remettre les fourneaux en route sous cette tempête ... A moins que vous ayez un four à pizza dans vore arrière boutique ...

Et elle en doute en voyant l'allure générale du bouge.

- ... j'ai l'impression que c'est mort.

Tant pis. Mais si vraiment le vieux tenancier souhaite goûter une de ses pizzas, il aura forcément l'occasion de le faire. Ne serai-ce que si elle organise une ou deux soirées étudiantes ici comme elle envisage peut être de le faire. La présence de chambres à l'étage est un gros plus et il faut avouer qu'au moins les jeunes ne craindraient pas de trop salir. Elle se demande même à quel point renverser de la bière par terre ne contribuerait pas à nettoyer le sol à certains endroits ... Mais peut être que c'est parce qu'il y a des chèvres partout aujourd'hui qu'elle a cette impression. Du genre opportuniste dans les affaires comme dans les amours (mais pleine de reussitte que dans un seul des deux domaines), Chance avait donc parlé au tenancier de ses petites recherches personnelles.

Qu'ils soient décrits comme ayant "une sale tête" est évidement un obstacle. La jeune démonette n'est pas encore désespérée au point de se dire "un bon sac sur la tête et hop ca suffira".

- A voir

Dit elle distraitement du coups, se remettant à siroter sa bière tout en caressant distraitement le museau d'une chèvre qui commençaient à vouloir lui bouffer les cheveux. A choisir entre défendre sa bière et risquer de se faire tondre ses magnifiques cheveux roux, le choix de Chance est vite fait. Elle défend ses cheveux, ce qui laisse son godet sans défenses. Plusieurs grands coups de langues sont donnés directement dans la pinte par une chèvre non seulement envahissante mais visiblement également alcoolique.

- Non mais te gênes pas, toi ! Rha.

Chance éloigne la bière et essuie du revers de sa paume l'endroit où la bête a visiblement bavé. Elle fronce les sourcils un moment et agite un index sous son museau.

- T'es mignonne mais tu pousses le bouchon un peu loin Mauricette.

Elle a des références Francaises, il faut lui pardonner.

- La bière, c'est sacré !

L'admonestation est d'une sévérité très modérée. Bientôt la chèvre pompette retourne au sol et se met à claudiquer de ci, de là, découvrant (ou redécouvrant ?) les effets de la consommation d'alcool.

- Ouais, comme vous dites. On a eu du bol de tous être arrivés ici ! Mais quand même, c'est une bande de relouds, il est temps que je prenne un peu de distance, vous voyez ?

Peut être le comprendra t'il oui. Chance rajuste une mèche de ses cheveux, utilisant une de ses cornes pour la maintenir comme d'autres filles utiliseraient leur oreille. Elle jette un coup d'oeil à sa bière léchée par la chèvre et puisse hausse les épaules. Booze is booze, tant pis. Elle se remet à boire dans le verre, ne s'interrompant que pour retirer un poil de chèvre de sa bouche et l'écarter d'une pichenette agacée.

- J'ai quelques pistes ... je pensais plutôt vers Hogwarts Place, près des universités.

Un quartier populaire pour les étudiants. Que le propriétaire des lieux la qualifie de "trop mignonne pour le quartier" la fait rire un instant.

- Ouais, ca doit être ça ...

Il vaut attribuer son célibat à cette explication. C'est moralement plus acceptable. Même si évidemment elle y croit pas. Elle est "trop" beaucoup d'autres choses. Trop remuante. Trop énergique. Trop occupée. Trop intimidante peut être aussi. Ou trop selective aussi, qui sait ... ? En tout cas qui ne tente rien n'a rien. Elle sort quelques cartes de visites et laisse son 06 derrière. Au pire sa lui fera de la pub pour son foodtruck ... Et pendant qu'elle remplit de manière distraite les cartons, elle demande.

- Et vous alors ? Pas de madame tête de sanglier dans le coin ? Pas de fiston qui veut reprendre l'affaire ?

▿ Date de naissance : 17/12/1948

Une petite dernière pour la route

Il y aurait toujours du travail aussi pour lui. Les tavernes miteuses dans lesquelles on se retrouvait pour planifier des mauvais coups, on en avait toujours besoin. En dehors des besoins de première nécessité, dont la bouffe faisait partie, s’alcooliser et se rencontrer pour des raisons partiellement ou complètement criminelles était l’une des choses qui faisaient partie de la société depuis suffisamment de siècles, maintenant, pour que ce soit entré dans les mœurs. Abelforth ne voyait aucun souci à être celui qui prendrait la responsabilité de cet accueil. Ca faisait marcher les affaires et il avait le cœur assez accroché pour supporter.

« C’est à peu près pareil pour ce genre d’endroit. Il y aura toujours des gens pour vouloir boire et comploter. Pratique de se faufiler sur les vices de la nature humaine pour faire son commerce. »

Elle connaissait son affaire. Les noms grivois n’étaient pas forcément des plus au goût de Abelforth, mais une pizza était une pizza. La bouffe, c’était la bouffe, peu importait comment ça s’appelait. Évidemment, on ne pouvait pas s’attendre à ce que son entreprise soit en route sous cette tempête. Mais il se promit de trouver un moyen de goûter une de ses pizzas à un moment ou à un autre. Il fit la moue quand elle parla de four à pizza. Il n’était pas vraiment du genre à avoir un four à pizza dans sa taverne, si ? Non, de toute évidence.

« Pour le moment, je le crains, en effet. »

Il contempla la chevrette qui, éloignée des cheveux du nouvel amour de sa vie, décida de goûter à sa boisson. La petite chevrette était encore jeune et elle ne savait pas que ce n’était pas de très bon ton de goûter dans les chopines des clients. Souriant malgré lui, Abelforth attrapa la bestiole et la glissa derrière le comptoir. Décidant que l’heure d’une sieste était venue, elle se coucha sous le regard doux et bienveillant du tenancier. Il écouta la jeune fille parler de ses frères et soupira. Il savait ce que c’était que de ne pas se sentir tout à fait en harmonie avec sa famille.

« Je sais ce que c’est oui. Parfois, on est simplement content d’avoir la famille présente non loin, mais on n’a pas forcément envie d’être constamment avec eux. »

Mais il était quand-même content qu’elle ne cherche pas dans le quartier. Il ne pensait pas que ce serait un endroit pour elle. Elle finirait sûrement par trouver ce qui lui correspondrait le mieux et il espérait que ce serait un endroit où elle se sentirait tout à fait à son aise. Il reprit conscience des choses quand elle évoqua une possible histoire d’amour. Il n’avait pas l’impression d’avoir de la place dans sa vie pour ça. Il n’était pas de ces hommes qui vivent des histoires passionnées. Il était plutôt dans son coin et il vivait seul. Désespérément seul. Toujours assez seul pour que cela justifie qu’il pense le mériter. Il secoua la tête.

« Personne. Je n’ai qu’un employé, et je ne suis pas sûr que reprendre une taverne soit dans ses priorités de vie. »

▿ Date de naissance : 02/12/2003

Chance considère ce qui les entoure d'un air pensif et d'un oeil globalement bienveillant. Le vieux parle de complot et de vice. Elle y voit surtout une bande de gens qui cherchent un endroit paisible pour se rassembler. Bon d'accord ils sont pas forcément tous lavés mais dans un sens c'est tant mieux, ils dérangeront pas les chèvres comme ça.

- Tout de suite comploter, boarf.

Dit elle d'un ton indulgent.

- La moitié d'entre eux doit se la jouer un peu durs mais sont en fait ici pour se cacher de leur femme.

Chance sait très bien que son père fait la même chose de son côté ! Elle sait exactement dans quel troquet finit son père quand il "va chercher un journal" le samedi matin. C'est un complot en quelque sorte oui. Un vaste complot masculin où tous les protagonistes se jurent mutuellement assistance en cas d'intrusion féminine. "Vous cherchez Henry ? Ah vous êtes sa femme ? Non désolé, jamais vu. Je sais même pas qui est ce type. En vérité j'ai même jamais vu un seul Henry de ma vie".

- Ils ont l'air sympa vos clients

Conclue t'elle avec un sourire et en reprenant une lampée de sa bière. Même si c'est une cinquante, il allait falloir qu'elle l'économise celle là. La tempête ne donne pas signe de vouloir s'apaiser. RIP le projet le projet Pizza, comme le confirme le vieux. Les deux ont donc tout le loisir de papoter. Ils n'ont même que ça à faire. Boire et parler. Ou réviser ses cours de socio aussi mais ça, c'est moins urgent. Elle a jusque demain matin pour le faire n'est-ce pas ?

- Voilà, c'est exactement ce que j'essaye d'expliquer à mes parents ! J'ai besoin d'espace !

Mettre un peu de distance mais pas trop. Les voir pour le rôti du dimanche (on dit jamais non à de la bouffe gratuite) ou pour apporter son linge sale à laver, c'est déjà pas mal.

- Je dois apprendre à voler de mes propres ailes.

Et ca c'est très littéral. Chance a une magnifique paire d'aile qui lui est revenue mais comme c'est un vrai tâcheron en sport, elle est infoutu de s'envoler avec. Elle pourrait y arriver, en faisant de l'exercice, sans doutes. Mais ... flemme quoi. Ain't Nobody Got Time for That.

Le tissu familial du propriétaire en revanche, semble un peu plus modeste. Pas de repreneur potentiel, elle apprend au passage qu'il a un également un employé. Le gars pourra se faire une double entrée dans son CV Barman / éleveur de chèvres. Préférant aborder les choses sous un angle comique, elle répond.

- Du coups, ca fait de Gourmande une riche héritière ! Mah mah, il va falloir éloigner les jeunes boucs qui vont se précipiter pour la courtiser. Et l'aider à relever ses standards.

▿ Date de naissance : 17/12/1948

Une petite dernière pour la route

Abelforth ne voulait pas trahir le secret des personnes qui venaient dans son bar. Mais la petite se trompait complètement si elle pensait les visiteurs plus innocents que ce qu'il affirmait. Les bandits du coin n'étaient pas bien méchants, mais ce n'était pas d'innocents citoyens avec juste une femme acariâtre. D'ailleurs, pour ce qu'il en savait, la plupart n'avaient pas de femmes. Mais ce qui se jouait ici n'était pas vraiment des crimes contre l'humanité. Ce n'était pas très innocent, mais on ne pendrait pas des gens pour ce qui se passait dans son bar et il n'y avait jamais eu plus grave que quelqu'un qui se faisait refaire aux poches.

Les conversations pouvaient aborder des sujets un peu plus sérieux, mais il n'avait jamais entendu parler de meurtre et les habitués savaient que la discrétion du propriétaire des lieux s'arrêterait très certainement à quelque chose d’aussi grave que le meurtre. Dans ce cas précis, il était plus que probable qu'il collaborait avec la police. Mais il ne fallait pas penser que les choses se faisaient ici en toute innocence. C'était un bar mal famé et il fallait bien qu'elle le sache si elle voulait y venir régulièrement, où elle aurait quelques surprises.

« Prends pas trop la confiance, petite. Je te dis pas qu'il y a des meurtriers qui passent par ici, mais ça discute pas que de jolies choses. crois-moi, c'est pas ici que viennent les pères de famille qui ont envie de se bourrer la gueule. c'est un peu plus malfamé. Mais vu la fréquentation en ce moment, tu risques pas grand-chose. »

En attendant, il comprenait parfaitement qu'elle ait envie de se faire la belle. Après la mort d’Ariana, avec ses parents qui n'étaient plus à la maison, Abelforth n'avait aucune envie, c'était de s'éloigner du cocon familial et d'oublier complètement tous les membres de la famille Dumbledore et en particulier son imbécile de frère. Bon, concrètement, il était loin d'être un imbécile, mais il avait agi comme un idiot au regard de son frère et celui-ci lui en voulait trop pour accepter de lui pardonner aussi facilement. Il reconnaissait que maintenant, il avait tendance à voir les choses différemment. Mais c'était ce qui se produisait quand on avait presque plus de famille et que le peu qui restait vous était enlevé. Évidemment, c'était ce qui arrivait avec la vieillesse.

« Il viendra un jour où tu regretteras sûrement si tu n'as pas passé autant de temps que tu le pouvais avec tes parents, et peut-être même avec tes frères. Si tu veux un bon conseil, pense à revenir de temps en temps au bercail quand tu auras pris ton envol. »

Il se mit à ranger les verres qu'il avait essuyés dans le bar en lui jetant un coup d'œil. La chevrette avait déjà un humain préféré mais c'était probablement parce que c'était celui qui lui donnait de la nourriture. Il n'était évidemment pas le seul. Abelforth la nourrissait aussi. Mais il ne comptait pas. C'était le paternel dans l'affaire. Il y avait autre chose à prendre en compte. En cela lui mit une idée en tête qu'il n'exprima pas immédiatement mais dont il se demanda à quel point il avait envie d'aller jusqu'au bout de cette idée. Après tout, c'était un bon garçon.

« Oh, elle a déjà donné son cœur. Et je ne parle pas de tes cheveux ni tes cours de sociologie. Y a un petit jeune qui bosse avec moi, il doit être quelque part dans les étages. La petite l'adore, elle n'arrête pas de le coller quand il vient la voir. C'est mignon remarque. C'est pas si mal qu'il soit copains. »

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