Training [PV Lucy Pevensie]

Artemis avait décidé d’aller passer un peu de temps à s’entraîner dans la salle de sport prévue à cet effet dans la partie privée de l’entreprise de la déesse. Exigeante, elle tenait à ce que ses protégées s’entraînent régulièrement afin de maintenir leur forme et leur niveau. Elle-même ne négligeait pas son apprentissage, tenant à rester également le plus en forme possible. De toute façon, elle partait du principe qu’on ne pouvait pas demander à ses employées quelque chose qu’on n’était pas prête à faire soi-même. Elle était donc vigilante et n’hésitait pas à prendre du temps pour se consacrer au maintien de ses compétences au combat. Aujourd’hui serait donc entraînement.

En arrivant dans la salle, toutefois, elle entendit du bruit. Une autre jeune femme était déjà en train de s’entraîner. Peu désireuse de se montrer sous la position de patronne et de lui mettre la pression, Artemis fit comme si de rien n’était et alla se changer paisiblement. Quand elle arriva, elle constata que c’était la plus jeune de ses recrues qui étaient en train de remettre un coup de neuf à ses compétences. La jeune Lucy n’était pas à proprement parler une employée comme les autres, car elle avait demandé à travailler pour Artémis en attendant de finir ses études.

Elle était douée. Artemis l’aurait bien gardée mais il aurait encore fallu qu’elle le veuille. La déesse ne désespérait pas de la convaincre, mais elle ne le ferait pas en l’empêchant de poursuivre ses études. Autant attendre qu’elle en voit le bout et cultiver, en attendant, son goût pour l’entreprise et l’affection qu’elle pouvait avoir pour ses collègues. Elle aurait fait son trou dans la boîte et cela pourrait lui donner envie d’y rester. Artemis savait que la loyauté ne s’acquérait jamais par la pression. Parfois, elle pouvait s’obtenir via le respect et les valeurs communes, mais l’amour en était le vecteur le plus efficace. Artemis chérissait donc chacune de ses protégées.

« Bonjour, Lucy, c’est votre journée d’entraînement aujourd’hui ? Ou vous avez juste décidé de venir faire quelques exercices ? »

Artemis commença à s’étirer et à échauffer ses muscles. En tant que déesse, elle n’en aurait pas eu besoin, mais en tant qu’humaine, elle avait eu l’occasion d’expérimenter l’exercice sans échauffements ou étirements, et elle l’avait regrettée. Elle ne commettait désormais plus cette erreur. Mais elle était parfaitement capable de le faire en conversant naturellement avec une de ses employées, Lucy ou n’importe qui d’autre. Elle n’avait pas attribué de personne à Lucy, sa mission était plus générale et elle ne recevait aucune ressource pour la payer elle. En effet, sa mission était simplement une volonté d’Artemis qui pouvait sembler humanitaire à un œil extérieur.

Lucy était chargée avec quelques autres filles de veiller à la protection du collège et du lycée de la ville. Artemis était la Déesse Protectrice de Enfants et même si elle avait perdu ses pouvoirs et ce qui faisait d’elle une déesse dans son monde d’origine, Artemis avait gardé ce qui représentait sa nature profonde. Elle avait donc investi de son entreprise pour protéger ceux que son cœur voulait toujours préserver, les plus jeunes. Lucy était au cœur de ce programme, ce qui lui permettait de ne pas avoir à en répondre à un client. De plus, l’école était un endroit rêvé lorsqu’elle devait profiter de ses surveillances pour travailler un peu de son côté.

« Comment se passent les choses pour vous au lycée ? Pas de danger à constater, j’espère. »

Artemis appréciait la simplicité de Lucy et de sa nature sociable qui la poussait à agir sans crainte vis-à-vis de sa patronne. Une grande partie de ses employées était impressionnée quand elle entrait dans la pièce. Elles avaient souvent l'air de craindre de dire ou de faire une bêtise en sa présence. Artemis avait l'habitude d'être crainte étant donné le nombre de personnes qui avaient toujours montré de la crainte envers les pouvoirs des dieux, mais elle appréciait aussi d'avoir quelques personnes qui ne réagissaient pas de cette façon avec elle. Et elle devait reconnaître qu'il n'y en avait pas beaucoup. Mais cela donnait à la jeune fille une raison de plus d'être apprécié de sa patronne.

La première raison était toutefois sa dévotion dans son travail. Elle avait toujours montré un soin particulier à faire ce qui était nécessaire pour se maintenir en forme et assurer dans la tâche ce que Artemis lui avait confié. La déesse imposait une séance d'entraînement par mois avec un contrôle par elle ou Natasha une fois par trimestre. Si le contrôle n'était pas à la hauteur des exigences, la demoiselle avait droit à un entraînement avec l'une des deux, pour compléter ses capacités. Mais en agissant de façon autonome sans qu'on lui demande rien, Lucy n'avait, en général, aucun mal à faire ses preuves.

« J'approuve cette initiative de ta part. Tu es vraiment une excellente recrue et plus vont les choses, plus je regrette et que tu ne restes ici que le temps de tes études. J’espère que tu continueras à nous donner de tes nouvelles quoi qu'il arrive. »

Même à l'époque des chasseresses d'Artemis, elle n'avait jamais empêché chacune de suivre son propre chemin. Elle devait bien reconnaître que son plus cher désir était de toutes les garder auprès d'elle. Mais si elle devait choisir entre leur bonheur et le sien, Artemis se sacrifierait sans hésiter pour chacune des jeunes femmes qu'elle avait sous sa protection et sous sa responsabilité. C'était pour cette raison, principalement qu’elle s'intéressa à la situation de la mission de la jeune fille. Il y avait peu de risques qu’il se passe des choses graves, mais il était important pour elle que le lieu soit protégé.

« C'est une excellente nouvelle si tu n'as rien constaté d'alarmant. Reste sur tes gardes, toutefois. J’ai entendu des choses concernant un potentiel trafic de drogue au niveau du lycée. Je ne sais pas si c'est vrai ou pas, mais il vaut mieux demeurer prudente. Si des individus de cet acabit se présentent, il te faudra être capable d'agir en conséquence. Ne prends aucun risque exagéré et n'hésite pas à demander du renfort si jamais tu en as besoin. Nous serons toutes là pour t'épauler, tu le sais. »

Sur un thème moins sévère, la jeune fille lui raconta qu'elle avait déjà rencontré le véritable Père Noël. Avec tout ce qui se passait dans ce monde étrange, il y avait encore bien peu de choses qui pouvaient étonner la déesse. Elle se méprit cependant sur la véritable nature de ce que la jeune fille voulait dire. Avec un sourire sur les lèvres, elle pencha la tête sur le côté en accueillant avec bonhomie l'anecdote racontée par son employée. Il était évident que pour la plupart des gens, le Père Noël était un rêve autrement plus intéressant que les dieux et les déesses. Artemis espérait tout de même faire rêver encore un bon nombre de jeunes filles.

« Plus rien ne m'étonne avec cette ville. J’imagine qu'il doit avoir beaucoup de travail en ce moment, s'il a dans l'idée de célébrer les fêtes de Noël dignement, et selon ses anciennes habitudes. »

Dans un certain sens, Lucy faisait partie de la famille pour Artemis. Elle l’avait accueillie et la jeune femme s’investissait comme il se devait, et avec une vive passion et un plaisir certain et évident. Le résultat, c’était que Artemis lui donnait la même place dans son estime que n’importe laquelle de ses employées qui se conduisait de cette façon. Les choses n’étaient pas tellement compliquées avec la déesse. Si on se montrait à la hauteur de son estime et de son respect, on l’obtenait. Il était vrai que les femmes avaient plus de chance que les hommes de l’obtenir, mais cela arrivait pourtant.

Elle sourit en l’entendant dire qu’elle continuerait de toute façon à donner de ses nouvelles, une fois ses études terminées. Artemis serait toujours ravie de l’accueillir par la suite, même si elle n’était plus dans l’équipe. Et si elle décidait d’y rester, ce serait une jolie surprise et un joli cadeau. Elle ne pouvait pas le nier. En attendant, elle était tout simplement contente de compter dans l’équipe, l’ancienne Reine de Narnia. Elle se demandait simplement de quoi serait fait son avenir et elle n’avait aucun doute sur le fait qu’il serait sûrement lumineux. En tout cas, elle l’espérait de tout son cœur.

« Voilà qui est parfait. »

L’école était un lieu sensible et les personnes qu’elle protégeait avait une fragilité plus importante que la plupart des clients de l’entreprise. Il fallait se montrer tout particulièrement prudents car une erreur pouvait être d’autant plus conséquente et toucher infiniment plus de personnes. En contrepartie, il y avait nettement moins de risques effectifs qu’elle se fasse attaquer. Pour autant, Artemis transmit les échos qu’elle avait eus et comme elle s’y attendait, la jeune femme lui promit d’être vigilante, elle hocha donc la tête avec un air appréciateur. Elle n’en demandait pas davantage, après tout. Le plus important demeurait de faire de son mieux.

« Nous nous entraînons ensemble ? », lui proposa-t-elle.

Elle se mit en garde. Cet affrontement serait un bon moyen de constater l’évolution des progrès de Lucy. La jeune femme avait eu un bon niveau dès le départ, mais Artemis était certaine qu’elle avait progressé depuis avec ses fréquents entraînements. Natasha veillait aussi à augmenter le bagage de chacune de ses collègues au fur et à mesure que le temps passait. Au global, les recrues prises dans un état particulièrement brut devenaient de mieux en mieux, meilleures avec le temps et de plus en plus performantes. Cet entraînement servirait à Lucy, quelle que soit la voie qu’elle emprunterait pour se protéger, au moins, si elle en avait besoin.

Elles pouvaient toutefois s’entraîner et parler en même temps. Une conversation avait toujours ceci d’intéressant que cela permettait de s’entraîner à ne pas se laisser déconcentrer par la discussion, et réussir à la tenir en combattant arguait d’un certain niveau. Cela faisait partie des entraînements que Natasha proposait régulièrement et peu arrivaient à le faire de façon réellement efficace, il fallait le reconnaître. Mais il n’était pas question d’y renoncer. Petit à petit, toute l’équipe aurait un niveau supérieur, c’était le vœu de la déesse. Elle savait que ses filles avaient les mêmes désirs et les mêmes motivations. Elle les avait choisies dans ce but, elle l’avouait bien volontiers.

« Il vous a aidée ? Ici ? Qu’a-t-il donc fait pour vous ? »

Artemis avait commis une erreur en pensant que Lucy parlait du Père-Noël dont la légende courait parmi les hommes, parfois même plus que la légende des Olympiens, ce qui contrariait quelque peu la déesse, ainsi que les autres membres de l’Olympe. Ces légendes modernes leur déplaisaient d'autant plus que ce Père Noël n'avait rien fait de particulier pour mériter l'adulation des humains. Artemis peuplait quand-même la forêt et permettait à la faune et à la flore de se développer et ce n’était pas le moindre de ses pouvoirs. Mais le fait était que ces nouvelles légendes existaient et qu’il fallait composer avec elles.

Mais le Père Noël n'était peut-être pas dans cette ville. Artemis s'était trompée. Elle évoquait des souvenirs de son monde d'origine où elle avait apparemment rencontré cette légende qui l’horripilait tellement. Mais dans un monde tel que celui que la jeune femme avait visité par le passé, les dieux avaient si peu d'influence que la présence de cette prétendue légende ne perturbait pas Artemis plus que ça. Et puis, elle souhaitait que Lucy se sente à l'aise avec elle et qu'elle puisse lui confier tout ce qu'elle souhaitait. Ce n'était pas en méprisant certaines de ces aventures qu’elle allait obtenir ce résultat.

« Je me souviens, il me semble. Cet endroit étrange que vous avez visité avec votre sœur et vos frères et où vous auriez vécu toute une vie avant de retrouver votre enfance. Une expérience qui doit être perturbante pour un être humain. Je dois reconnaître qu’ayant la possibilité de prendre l'apparence qu'il me plaît, je n'ai jamais été perturbé par ce genre de transformation avant d'arriver dans cette ville. »

Elle laissa Lucy parler avec nostalgie de sa rencontre avec le Père Noël et des cadeaux qu’il lui avait fait. Elle sentait et le bonheur que la jeune femme éprouvait à l'idée de ses aventures et elle savait pertinemment que si l'enfant avait fait partie de son monde alors qu'elle était plus jeune, elle lui aurait probablement proposé de devenir une de ses chasseresses. Elle n'était pas sûre que l'enfant d'alors aurait accepté. Toutes les filles n'acceptaient pas de devenir chasseresses d'Artemis et il était rare que la déesse en éprouve de la rancune. Il fallait vraiment des circonstances particulières pour cela.

« Je comprends que cette rencontre puisse être un bon souvenir. Je crois que si je vous avais connu à cet âge, j'aurais très certainement essayé de vous recruter parmi mes chasseresses. Je crois que vous avez toujours eu ce qu'il fallait pour attirer mon attention. Cela dit, c'est peut-être aussi le cas de votre sœur. Ne perdez pas espoir de retrouver vos biens. Il semblerait que cette ville ait la curieuse manie de rendre certaines choses selon son bon plaisir. »

Le don de Artemis de se transformer en autre chose lui était particulièrement agréable. Elle avait toujours aimé se promener sous une forme ou sous une autre sans que personne ne se doute qu'il avait affaire à une déesse. Mais lorsqu'elle était identifiable sous sa forme de déesse, il valait mieux ne pas chercher à la contrarier où cela pouvait très mal finir. Elle avait pris l'habitude d'une forme enfantine avec ses chasseresses, mais ce monde lui avait imposé un corps de femme et elle n'avait pas encore trouvé le pouvoir de pouvoir changer son apparence. Elle faisait donc avec mais en espérant retrouver un jour le don de se transformer.

En attendant, elle était déjà devenue plus forte et plus invulnérable qu'avant et elle avait même retrouvé son arc et ses flèches. C’était déjà beaucoup et cela lui avait rendu un peu de confiance après l'incident qui avait eu lieu quelque temps auparavant. Elle avait eu bien besoin de retrouver un peu de sa divinité et elle était heureuse de constater qu’en ce qui concernait ces employées, elle n'avait jamais été moins qu'une déesse. C’était une façon de reformer ses chasseresses et elle était touchée de voir à quel point leur loyauté était proche de celle de ces anciennes protégées.

« C'est un don précieux qui permet de se camoufler au milieu du monde. Malheureusement, c'est quelque chose qui m'a été pris ici et que je n'ai pas encore retrouvé. J'espère récupérer cette capacité un jour. »

En tout cas, les filles de cette famille semblaient tout à fait dans l'esprit des anciennes chasseresses et la déesse ne pouvait s'empêcher de penser qu'elles auraient fait des recrues idéales. Lucy semblait d'accord, même si elle était à présent trop vieille pour revendiquer cette place au même titre que toutes celles qui faisait partie de Artemis Security. Ses chasseresses n'avaient jamais plus de quatorze ans et il était évident qu’elle n'allait pas employer des enfants aussi jeunes même si elle était tout à fait en mesure de décider d'en protéger certaines.

Si la sœur de Lucy était de la même trempe, elle valait le coup que Artemis la rencontre. La déesse se questionnait afin de savoir quel genre de personne cela pouvait bien être, mais il était évident que sa petite sœur la tenait en haute estime. Cela était amplement suffisant pour que Artemis pour avoir envie de la considérer. Cela dit, il était peu probable qu’elle ait envie de faire aussi partie de l'équipe. La déesse avait constaté que les personnes de ce monde avaient généralement envie de séparer leur vie personnelle de leur vie professionnelle. En attendant, si cette jeune femme se montrait finalement intéressés à travailler pour elle, elle l'accueillerait volontiers.

« Ce serait un plaisir. Si elle vous ressemble un tant soit peu, elle doit valoir le coup qu'on la connaisse. Il me faudra peut-être me contrôler pour ne pas essayer de la recruter également », dit-elle avec un petit sourire malicieux.

Lucy lui demanda si elle avait retrouvé quelque chose et même si la question était un peu indiscrète, cela ne dérangea pas la déesse qui trouvait même intéressant que ses employées sache qu'elle avait retrouvé certaines de ses armes. Les compétences et les armes spécifique de leur chef présente sur le terrain étaient une bonne information pour que les jeunes femmes soit le plus rassurées possible quant à la façon dont les combats se dérouleraient. Et puis, elle n'avait que très peu de secrets pour ces femmes en qui elle avait toute confiance.

« Je suis de nouveau vulnérable et je ne vieillis plus. La ville m'a aussi rendu mon arc et flèches. C’est Natacha Romanov qui les a retrouvés à l'armurerie, étonnamment au moment où j'en avais le plus besoin. »

Retrouver ses facultés et certains éléments de sa vie de déesse l’avait aidée à surmonter l'agression dont elle avait été victime et qui l’avait fait se sentir infiniment vulnérable. Heureusement, cet incident appartenait au passé et quasiment personne n'en avait été informé.

Le côté optimiste et convaincu de la jeune Lucy faisait partie de ce que Artemis considérait comme un élément qui lui donnait envie de garder la jeune fille auprès d'elle. Elle avait besoin que ses filles apportent du positif et de l'optimisme dans la vie de l'entreprise et cela lui plaisait d'avoir une personne qui était à ce point capable de le faire. La déesse ne se posait pas trop de questions sur les pouvoirs qu'elle avait perdus, car elle s'était aussitôt reconstitué une force de combat à la hauteur de son ancien monde et tout avait pour elle le respect dévolus à une déesse. À ce stade, peu importait qu'elle soit incapable de châtier ceux qui réfuteraient son autorité.

Mais elle devait avouer que le fait d'avoir récupéré un don lui permettrait de faire certaines choses qui lui étaient interdites pour l'instant et que cela serait appréciable. Le don de transformation avait toujours été celui qu'elle préférait parce qu'il permettait à la déesse de se fondre parmi les jeunes adolescentes qui avaient accepté de combattre à ses côtés. Dans ce monde, elle était suffisamment jeune pour être en harmonie avec ses équipes, étant donné que la plupart de ces jeunes femmes avaient la vingtaine. Dans cette ville, Artemis n'avait pas le droit d'employer des filles aussi jeunes. Depuis trois ans, elle en avait accepté des limites, mais ses anciennes habitudes lui manquaient tout de même.

« Qui est donc votre meilleur ami ? Une personne de confiance, j'espère ? Il ne s'agirait pas qu'il vous arrive quelque chose. J’en serais fort peinée. »

Non que Artemis doutes des capacités de son employée à choisir ses amis, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de se méfier à chaque fois qu'elle entendait qu'un homme était dans l'histoire. Les hommes étaient des êtres peu fiables et ils n'avaient jamais réellement porté chances à ses chasseresses. Il y avait des exceptions bien évidemment, mais la déesse les comptait sur les doigts d'une seule main. Elle savait que la plupart de ces agentes avaient des relations avec des hommes, et elle les avait prévenues de se méfier et de ne pas leur faire complètement confiance.

Elle ressentit une certaine peine en entendant la jeune fille prétendre que sa sœur allait lui faire de l'ombre. Elle demeurait persuadée que personne ne devrait se sentir rabaissée face à un membre de sa famille. Pour Lucy c'était un signe évident qu'elle manquait un peu de confiance en elle-même. Artemis ne tenait pas à entretenir ce manque de confiance, d'autant moins qu'elle était persuadée que la jeune fille ne manquait pas d'être extrêmement performante et d'être pourvue d'immenses qualités qui lui donnaient une valeur intrinsèque importante.

« Votre sœur ne peut être exactement votre identique et il est donc impossible qu'elle vous fasse de l'ombre à mes yeux. Sachez Lucy, que vos qualités sont effectives et réelles et que cela n'est pas sans signification pour moi. »

Même si elle n'avait pas retrouvé son pouvoir de capacité à se transformer, Artemis avait retrouvé une partie d'elle-même et également son arc et ses flèches. Cette révélation intéressa Lucy qui était curieuse de savoir ce que cet arc avait de particulier. Ce n'était encore pas quelque chose que Artemis exposait à tout va, mais elle ne vit aucun mal à en parler à sa jeune employée en qui elle avait parfaitement confiance. Son arc et ses flèches étaient parmi les premiers cadeaux qui lui avaient été offerts après sa naissance et elle avait toujours ressenti de la nostalgie en les utilisant.

« Ils ont été forgés par les Cyclopes qui m'en ont fait cadeau juste après ma venue au monde. Mes flèches peuvent atteindre leur cible même si celle-ci se trouve très loin de là où je me trouve. Elles peuvent parcourir de longues distances et atteindre leur cible. L’archerie est une capacité que je partage avec mon frère. Elle compte beaucoup pour moi. »

La plupart du temps, Artemis considérait que c'était une erreur de penser pouvoir compter sur un homme. C’était sa propre vision des choses et les plus loyales de ses chasseresses avaient généralement adopté ce point de vue, à l'époque. Mais il était vrai que cela demeurait réducteur et qu'elle avait pu trouver quelques hommes qui valaient la peine qu'on fasse connaissance avec eux. La question de savoir si Lucy avait pu tomber sur l'un d'entre eux, c'était justement son employée qui avait le plus de chances d'avoir la réponse. Mais Artemis était persuadée que son jugement n'était pas mauvais sur la question. Elle pouvait se tromper, mais pour le moment, elle ne voyait aucune raison de ne pas croire en la conviction de la jeune femme.

« Je pense que vous savez ce que vous faites. Vous êtes une jeune femme intelligente et si vous pensez pouvoir avoir foi en cette personne, il me semble que vous devez avoir raison. Soyez toujours vigilante tout-de-même lorsque vous accordez votre confiance. Votre sécurité est à ce prix. »

La déesse n'avait pas tendance à donner gratuitement des compliments, même à ses collaboratrices. Elle tenait à ce que l'entreprise forme une grande famille, autant que cela était possible, mais cela ne se faisait pas à n'importe quel prix. Elle n'aurait jamais été jusqu'à récompenser une personne pour quelque chose sans avoir l'absolue certitude que c'était mérité. Pour ce qui était de Lucy, elle avait beaucoup trop tendance à manquer de confiance en elle alors qu'elle était extrêmement méritante et avait de grandes capacités. Artemis avait beaucoup d'affection pour elle, d'autant plus qu'en dehors de la petite Lyra, elle était la plus jeune et celle qui se rapprochait donc le plus de l'âge de ses chasseresses.

« Avec plaisir, très chère. »

Pour la déesse qui avait eu du mal à se sentir vraiment à l'aise ces derniers temps et à penser à elle-même comme la déesse qu'elle était, cela faisait vraiment du bien d'avoir retrouvé quelque chose d'aussi utile que ses armes magiques. Elle se souvenait avec émotion du moment où elle les avait reçues. Son père avait pris soin de les faire forger par les cyclopes, afin de leur donner un pouvoir magique, et cela avait été un de ses plus beaux cadeaux. Elle savait qu'elle avait toujours été à part parmi ses enfants, car il avait toujours respecté son vœu de chasteté, quand il n'avait pas hésité à chercher à en séduire la plus grande majorité.

Lucy s'intéressa à l'anecdote des cyclopes en lui demandant si elle avait déjà eu l'occasion d'en rencontrer. Il était vrai qu'elle avait rencontré toutes sortes de créatures au cours de ses voyages, mais elle n'avait pas passé beaucoup de temps avec les enfants de Poséidon. Ils avaient fait du bon travail en forgeant ses armes, mais ils étaient dangereux et souvent imprévisible. Comme tant d'autres figures du monde antique, elle avait eu l'occasion de les fréquenter à un moment ou à un autre, mais à-peine plus que la majorité de ces créatures. Disons que les chasseresses n'avaient pas besoin de les tuer, c'était l'un des liens les plus positifs qu'elle pouvait avoir avec les monstres.

« C'est arrivé que je croise les cyclopes au détour de mes voyages avec les chasseresses, mais cela n'arrivait pas fréquemment. Les cyclopes ne sont pas de ceux dont on recherche vraiment la compagnie, voyez-vous? » dit-elle avec un petit sourire légèrement amusé.

C’était parce que Lucy lui était précieuse que Artemis avait décidé de l’alerter. Mais elle ne s’inquiétait pas autant qu’elle pouvait le laisser croire. Non pas parce que la jeune fille n’était pas aussi précieuse qu’elle le prétendait, mais parce que la déesse avait pleine confiance en la jeune étudiante pour se protéger et faire preuve de la vigilance nécessaire. Ho, elle tenait à ce que Lucy soit avertie de ce que les autres humains, et tout particulièrement les hommes, pouvaient être sources de danger. Mais elle lui faisait confiance pour avoir le jugement nécessaire et les qualités pour ne pas se tromper.

En revanche, dans tous les cas, Artemis se refusait à l’abandonner et si elle avait besoin d’aide à un moment ou à un autre, la jeune femme pourrait compter sur elle. La déesse apprenait à celles sur qui elle veillait à se protéger elles-mêmes, mais la force de son groupe venait de la coopération et du soutien qu’elles se manifestaient entre elles. Ses filles étaient complices et associées et c’était pour cette raison qu’elle savait qu’il n’y aurait pas de risque en ce qui concernait Lucy. Elle aurait le soutien de ces femmes qui étaient comme ses sœurs du points de vue de la déesse.

« Je suis contente de l’entendre. »

Elle n’avait pas besoin d’en dire plus. Ce n’était pas la peine d’insister, elle avait compris, elle n’était pas sotte. Il valait mieux approfondir l’entraînement. Artemis porta ses coups un peu plus férocement, un peu moins prévisiblement, afin de tenter de piéger la jeune Lucy. Elle était persuadée qu’elle réagirait en conséquence, mais elle tenait à lui donner du niveau. Si elle avait besoin de défendre des élèves, elle allait devoir savoir se battre. Et il ne fallait pas faire de quartiers avec ceux qui ciblaient des enfants. C’était le genre de choses que la déesse ne pouvaient pas pardonner. Elle était la protectrice des enfants et cela avait du sens pour elle.

Tandis qu’elles portaient leurs coups, Artemis replongea dans les souvenirs de ses Chasseresses. Elle ne voyageait pas toujours avec elles, mais elle avait passé énormément de temps en leur compagnie et la simple loyauté de ces femmes envers elle, la façon dont elles la chérissaient autant qu’elles la respectaient. Cette unité lui manquait, même si elle ne pouvait nier que ses employées avaient pour elle bien de l’admiration et de l’affection et qu’elles remplaçaient un peu celles qui lui avaient juré fidélité. Ce n’était pas tout à fait pareil, mais ça ne serait plus jamais la même chose. Les Chasseresses ne pourraient se reformer ici.

« Je n’ai pas voyagé avec elles constamment, mais nous avons rencontré beaucoup de créatures différentes oui. Certaines que nous avons affrontées, certaines que nous avons épaulées, comme les satyres, qui guident les héros. Je dois avouer avoir été fascinée par les centaures, comme Chiron, éminemment sages. Nous avons affronté des Harpies par exemple. »

La notion de différence entre les dieux romains et grecs était un peu délicate pour Artemis. Chacun des dieux avait comme une double personnalité et Artemis n'aimait pas vraiment sa version romaine. Il y avait toujours des exceptions comme son frère Apollon, qui demeurait lui-même quoi qu'il arrive. mais fort heureusement, elle n'avait pas connu cette transformation depuis qu'elle était arrivée dans cette ville, et ce n'était pas une des choses qu'elle avait envie de garder. Pour autant, sa discussion avec Lucy ne pouvait que lui faire penser à la vie de dieu.

En réalité la réponse à ses questions était assez simple, elle se rapportait tout justement à ce rapport direct entre les croyances grecques et romaines auxquelles elle n'avait pas envie de penser en ce moment, comme elle allait si justement l'expliquer à Lucy. L'adolescente était loin d'être la seule à avoir un faune ou un satyre comme ami. Ils étaient les guides et les protecteurs usuels des demi-dieux. Lucy n'était peut-être pas une demi-déesse et ce faune n'était peut-être pas son protecteur, mais le monde d'où elle venait n'était pas exactement le même. Toutefois, ces références l'intriguèrent quand-même.

« Les faunes et les satyres sont la même chose, mais l'une est l'appellation romaine et l'autre grecques. le plus souvent, ils sont les protecteurs et les guides des demi-dieux, des héros dans mon monde. »

Lucy ne put s’empêcher de faire le lien avec le monde de Narnia, où elle avait combattu les forces du mal. Certaines créatures lui semblaient familières et Artemis ne pouvait s'empêcher de penser que si elle avait combattu si jeune les harpies, elle était vraiment digne d'être une chasseresse d'Artemis. Il était dommage qu'elle n’ait pas fait partie de son du monde. Elle aurait été une parfaite recrue. Les harpies étaient de dangereuses créatures, autant que la femme que Lucy avait combattue, et elles faisaient partie des forces du mal, leur présence auprès d'elle avait du sens.

« Affronter des harpies n'est pas donné à tout le monde et cela ne fait que confirmer ce que je pensais. Vous êtes parfaite pour être à mes côtés dans ce monde ou dans un autre. Il est bien dommage que nous n'ayons pas fait partie du même. »

Pour ces filles, Artemis était prêt à tout. Elle n’hésitait pas à leur apporter toute son aide et tout son soutien autant qu'elle le pouvait. Et elle leur parlait avec plus de douceur et de franchise que n'importe qui d'autre. La déesse n'était pas une menteuse, mais elle n'accordait pas autant d'attention à tout le monde. Une personne comme Lucy, qui était jeune et pleine de promesses, et qui lui offrait respect et loyauté, était tout en haut de sa liste. Elle était tellement contente des efforts fournis par la jeune femme qu'elle avait de plus en plus envie de la convaincre de demeurer auprès d'elle une fois ses études terminées.

La discussion concernant les faunes et les satyres parut toucher tout particulièrement la jeune femme. Son ami devait beaucoup compter pour elle, probablement autant que leur guide comptait pour les héros. Peut-être Lucy était elle une sorte d’héroïne et ce Tumnus son guide attitré. Elle en avait, en tout cas, toutes les qualités et la déesse était heureuse de lui avoir fait plaisir par ses propos au sujet de son ami. Cette affection pour le faune était si sincère et si pure qu’elle méritait d'être encouragé du point de vue de la déesse.

« Je ne fais que dire la réalité. Je pense que ce faune doit être honoré de vous avoir pour amie. En tout cas, je gage qu'il ne saurait avoir de plus ardente défenseuse. »

C’était un caprice récurrent de la part de la déesse de se dire que les jeunes femmes qu'elle avait engagées dans son entreprise, elle aurait aimé les connaître plus jeunes dans son propre monde afin d'en faire des chasseresses. Elle n'était pas certaine que toutes ses employées se seraient épanouies dans ce rôle, mais elle était persuadée que ça aurait été le cas pour la jeune fille avec qui elle échangeait. Elle aurait d'ailleurs fait sûrement une excellente chasseresse, et sa sœur probablement également. Il lui était déjà arrivé d'avoir des sœurs dans son groupe et cela avait le mérite de renforcer les liens.

« Je reconnais qu’il n'est pas très bien de ma part de toujours vouloir que les choses soient différentes et de vous avoir toutes connues dans mon monde, à une époque où j'aurais pu faire de vous toutes des chasseresses. Tu es plus raisonnable et plus avisée que moi Lucy, du moins actuellement. Ce n'est pas quelque chose que nous admettons facilement, mais il est difficile aux dieux d'admettre les qualités profondes de la majorité des humains, question d'orgueil. J'ai toujours été meilleure à ce petit jeu que la plupart des membres de ma famille. Mais il reste que je n'aurais pas dit ce que je t'ai avoué à n'importe qui. »

Qu’il s'agisse de faire découvrir son monde à Lucy, ou de découvrir celui de la jeune fille, Artemis serait totalement prête apprendre ce chemin. Après tout, elle était extrêmement curieuse de ce Narnia, et elle se demandait et aussi comment ses chasseresses accueilleraient quelqu'un comme Lucy.

« Ce serait un honneur pour moi, dans l'une ou l'autre cas. »

Artemis aimait les personnes loyales et sincères qui se montraient ardent défenseurs de leurs amis et de ceux en qui ils croyaient. Elle savait que si elle pouvait les amener à avoir confiance en elle, elle pourrait se reposer sur elles avec tranquillité, car elles ne la trahiraient pas. C’était pourquoi elle recherchait tout particulièrement ce type de personnalité chez ses Chasseresses et aujourd’hui, chez ses employées. Beaucoup de dieux régnaient par la crainte et l’intimidation, mais Artemis préférait la loyauté et une certaine affection. Elle trouvait la fidélité plus durable de cette façon. Et Lucy remplissait admirablement toutes les conditions.

« C’est une belle qualité que d’être loyale à ses amis, croyez m’en. »

Les dieux n’avaient jamais été moins divins qu’à cet endroit où tout le monde était logé à la même enseigne. Cette absence de pouvoir et cette fragilité étaient difficiles à gérer, Artemis l’avait expérimenté d’une façon des plus douloureuses. Toutefois, elle savait que les gens de la ville commençaient à récupérer leurs pouvoirs et leurs capacités et bientôt, elle redeviendrait la déesse qu’elle avait toujours été, elle en était persuadée. Philosophe, elle approuva la sagesse de la jeune fille qui exprimait que le changement et la perte d’une part de soi-même n’était facile pour personne. Et elle l’exprimait avec une certaine humilité, il fallait l’avouer.

« Il est toujours difficile de se voir privé de ce qui fait votre individualité. Mais les dieux doivent rester forts et ne pas le montrer malgré tout. Nous n’avons guère le droit de nous reposer sur autrui ou nous ne serions plus des dieux. »

La façon dont Lucy croyait en la vie et en la possibilité que son cœur se retrouve satisfait à condition qu’elle y croit assez fort avait quelque chose de magique. Mais même si cette conviction était belle et la rendait attachante, elle ne devait pas se résumer à ça. Il était important de toujours se battre pour ce en quoi on croyait, pour obtenir ce qu’on voulait. Si on se contentait de rêver, les choses n’arrivaient jamais tout cuit dans le bec, il fallait travailler dur pour y arriver. Elle avait toujours appris ça à celles qui lui juraient fidélité.

« C’est très beau d’y croire, mais il faut aussi se battre pour que ça arrive, n’est-ce pas ? »

Artemis ne savait pas si Lucy l’incluait dans les personnes qui lui rendaient sa loyauté de son avis, mais elle espérait que la jeune fille savait à quel point elle pourrait toujours compter sur elle dans les moments difficiles. Artemis était vraiment fière de la façon dont Lucy défendait ses valeurs et les mettait en application et tant qu’elle continuerait dans cette voie, elle aurait toujours sa place ici quand bien même elle déciderait de ne plus y travailler. Artemis Security pouvait être un abri pour les protégés de la déesse, au-delà de leurs fonctions dans l'entreprise, comme Lyra par exemple.

« C'est le genre de choses qui vous donne une place à part dans de nombreuses vies. »

Dont la sienne, elle devait bien le reconnaître. Elle avait toujours privilégié les rapports avec des filles très jeunes, préférant l'innocence précédant la puberté. Mais ici, elle découvrait finalement que certaines femmes adultes pouvaient lui apporter la même douceur et la même satisfaction en termes de relation que ces anciennes chasseresses, ce qui remplissait son cœur de chaleur. La bienveillance de ces filles pourtant combatives était parfois aussi pur que pouvait l'être celle d'une enfant. Elle n'avait jamais cru qu'elle pourrait trouver un tel degré de douceur à l'âge adulte et cela lui avait réchauffé le cœur.

Tout comme cela lui réchauffa également le cœur que la compassion de Lucy pour la difficulté que pouvait avoir les dieux lorsqu'ils étaient confrontés à des dangers au-delà de ce qu'ils étaient capables de gérer. Il devait tout-de-même faire semblant que tout allait bien et régler les choses de leur côté. C'était la responsabilité des dieux et même s'ils pouvaient parfois se reposer les uns sur les autres, ce n'était pas tout à fait sûr de le faire. Il valait mieux tout gérer seul et éviter de montrer ses faiblesses à qui que ce soit si l'on voulait demeurer à sa place et conserver son pouvoir.

« Il est vrai que ce n'est pas forcément une chose facile, il n'est pas facile d'être un Dieu. C'est quelque chose qui est au-delà de tout, et il est normal que cela implique des sacrifices. Pour de grands sacrifices, la récompense est, elle aussi, grande. »

Artemis n'avait jamais vraiment pris le temps de se poser et de se questionner sur son statut de déesse. Elle était née ainsi, elle avait tout de suite eu accès à la conscience et il lui avait fallu toute cette conscience pour aider son frère Apollon à venir au monde. C’était cette conscience à la fois si jeune et si développée qui avait fait choisir à la déesse ce destin de vierge. Mais ce n'était pas à cet âge qu’elle pouvait prendre conscience de ce que signifiait réellement être une déesse. C’était une chose qui s'appréhendait avec le temps. Alors au début, elle avait demandé la loyauté de ses chasseresses et ça s'était arrêté là.

En prenant de l'expérience, elle était devenue capable de s'ancrer dans ses valeurs et dans le mode de vie qu'elle avait choisi, d'en parler, de gagner en prestance et d'améliorer le rapport d'autorité qu’elle avait sur les filles qui avaient accepté de combattre à ses côtés pour toujours. Il ne s'agissait plus seulement de sa volonté, mais de quelque chose de plus grand. Il s'agissait de fierté, de respect, de grandeur. Elle estimait que c'était de cette façon qu'elle était réellement devenue la déesse qu'elle était au moment de venir au monde. Elle avait vu la différence seulement avec le passage des siècles mais aujourd'hui, elle savait ce que cela voulait dire.

Et des sacrifices, elle en avait fait. Zoé avait beau avoir toute sa confiance et le lead de ses chasseresses depuis des siècles, cela ne changeait pas le fait qu'elle ne se confiait pas à elle quand elle était inquiète ou préoccupée. Il lui arrivait de se confier à son frère et c'était là le véritable cadeau que la vie lui avait fait, d'avoir un frère jumeau sur qui elle pouvait compter en toutes circonstances. Bien des dieux n'avaient pas quelqu'un dans leur vie pour les écouter et les comprendre aussi naturellement qu'il le faisait. Mais c'était tout ce qu'elle avait et cela lui manquait infiniment depuis qu'elle était ici.

« Disons que je ne me rends pas forcément compte d'avoir fait ces sacrifices en ce qui me concerne. Avant d'arriver ici, je suis née déesse et je n'ai jamais eu le désir de changer de vie pour vivre sur terre comme n'importe quel humain. Mon frère Apollon a subi ce châtiment à plusieurs reprises et je ne peux m'empêcher de me demander si notre père n'avait pas une certaine tendance à passer régulièrement ses nerfs sur lui, mais on ne peut pas dire qu'il ait aimé ça, en tout cas. Mais quand on vit comme un Dieu, on ne peut se reposer sur une épaule d'homme, car on doit rester en permanence au-dessus d’eux. J’ai toujours eu une affection profonde pour chacune de mes chasseresses, mais aucune ne pouvait réellement avoir mes confidences. J’avais encore la chance d'avoir un frère, car même entre dieux, on ne peut être sûr de ce qu'on dit un membre de notre famille. Il faut être prudent car cela peut toujours se retourner contre nous. Mais je n'ai vécu que comme ça et je ne me vois pas vivre autrement. Je dois porter le poids qui est le mien sur mes épaules et je n'ai nullement le droit d'en déposer ne serait-ce qu'une partie sur celle de quelqu'un d'autre. C'est ainsi, mais en retour, je reçois le respect et l'admiration de tous et je suis crainte. Croyez-moi, la vulnérabilité est probablement le pire sentiment que puisse un jour ressentir un dieu. »

Lucy ne savait pas à quel point cela était un cri sincère du cœur de la déesse et elle n'avait pas à le savoir. Mais Artemis était définitivement heureuse d'avoir retrouvé tout son potentiel et de pouvoir désormais se protéger elle-même comme elle ne l'avait encore jamais fait jusqu'à présent.