The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

Et dire qu’il lui aura fallu près de trois ans pour retrouver enfin les membres de sa famille ! Certes, Edmund – et Eustache – manquent encore à l’appel, mais à présent que Lucy a retrouvé sa sœur, celle qu’elle pensait retrouver encore moins que les autres, à présent qu’elle s’apprête à retrouver son frère, Lucy se sent… euphorique, ou pas loin. Jamais cet endroit ne lui a semblé regorger de plus de perspectives qu’à présent.

Elle ignore où elle se trouve exactement, elle a bien admis, au film du temps, que cet endroit n’était pas le royaume d’Aslan, et qu’il devait s’agir d’autre chose… pas d’une vie après la mort à proprement parler, plutôt d’une forme de renaissance… Découvrir ces lieux lui avait fait l’effet de redevenir cette petite fille qui, en traversant une armoire  magique, en s’insinuant à travers une forêt de manteaux, avait découvert les paysages alors enneigés du royaume dont elle deviendrait l’une des souveraines. Elle n’est pas malheureuse d’être ici, elle est davantage curieuse, exaltée, intriguée… et après tout ce temps, et en dépit de l’écart technologique qui sépare ce monde de celui qu’elle avait quitté, elle serait presque capable de se sentir chez elle, même si le décor tout particulier de Narnia, et Aslan, lui manque… Ce qu’il lui manquait, ce qui lui manquait vraiment, pour se sentir un peu mieux pour se sentir un tant soit peu complète, c’est sa famille.

C’est presque par hasard qu’elle a retrouvé Susan, après avoir pourtant recherché la trace du moindre Pevensie pendant des mois et des mois, et c’est grâce à elle qu’elle a pu obtenir l’adresse de Peter. Lucy a insisté, elle ne voulait pas que Susan prévienne son grand frère de sa visite, elle voulait lui faire la surprise, et elle espère de tout cœur qu’il saura l’apprécier avec le même enthousiasme qu’elle éprouve elle-même à l’idée de retrouver enfin son frère… Ils auront tant de choses à se dire ! Ils auront enfin l’occasion de redevenir une vraie famille, de rattraper le temps perdu, de saisir cette chance singulière et nouvelle qui s’offre à eux.

Lucy n’est pas venue les mains vides, elle supposait que sa présence suffirait, certes, mais en même temps, elle songe aussi que des retrouvailles en bonnes et dues formes, ça se célèbre dignement. Elle a donc acheté une bouteille de champagne, la plus cher que lui permettent ses maigres économies, ravie d’avance à l’idée que Peter puisse éventuellement la houspiller et la mettre en garde contre une consommation d’alcool, mise en garde qui serait fort inutile compte tenu du fait qu’elle se révère d’ores et déjà malade après deux verres seulement. Mais les célébrations, c’est au champagne qu’on les fait, traditionnellement, alors.

Impatiente, sa bouteille à la main, Lucy sonne et patiente. Elle ne s’est pas annoncée, ce qui veut dire qu’elle prend le risque de tomber au mauvais moment, mais tant pis, si c’est pour la retrouver, le moment est forcément le bon, pas vrai ? Bien sûr que oui ! Elle refuse catégoriquement de le concevoir autrement. Et donc, elle trépigne, jusqu’au moment où la porte s’ouvre.

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

Le sourire qui s’affiche sur les lèvres de Lucy lui dévore la moitié du visage tandis qu’elle découvre Peter de l’autre côté de la porte. Elle savait bien que Susan ne l’aurait jamais induite en erreur, et pourtant, avant de se retrouver bel et bien face à lui, Peter avait redouté, jusqu’à la dernière minute d’être victime d’elle ne sait quelle désillusion. Il faut la comprendre : elle attend de retrouver ses frères et sœur depuis tellement longtemps ! Et enfin son grand frère est là, sous ses yeux, en chair et en os, et comble du bonheur, il lui semble plus en forme que jamais…Il sent que lui-même n’en revient pas, et la jeune femme en éprouve une certaine satisfaction : elle a donc réussi son coup.

Passé le choc, Peter la prend dans ses bras, et Lucy resserre cette étreinte aussi longtemps que nécessaire. Bon sang ce que ça lui fait du bien de retrouver enfin son frère. Elle a l’impression de se sentir un peu plus complète maintenant qu’elle sait que Peter, en plus de Susan, est de retour de sa vie. Il ne manquera plus que Edmund pour qu’elle se sente totalement complète. Parce que oui, c’est un fait, c’est comme ça : elle a besoin d’eux pour se sentir elle-même. Elle imagine que c’est le cas de tous les frères et sœurs, mais leur cas est encore particulier : ils ont tant vécu ensemble : traversé tant d’épreuves, et surtout, vécu une vie en plus de leur vie, que l’on ne soupçonnerait sans doute pas en ne les regardant pas d’assez près.

« Il paraît que c’est ce qui arrive quand on prend de l’âge », répond Lucy avec amusement quand Peter observe qu’elle a encore grandi. Avant de le serrer de nouveau contre elle.

La dernière fois qu’ils se sont vus, elle était encore une adolescente, adolescente mais grande enfant néanmoins, aujourd’hui, elle est une jeune adulte – une jeune adulte qui reste une grande enfant, certes. Elle pourrait bien lui retourner le compliment, d’ailleurs. Pas qu’il ait pris en taille, mais Lucy gagerait que Peter a gagné en quelque chose qui ressemble fort à cet aura de sérieux qui accompagne l’âge adulte. Quoique Lucy a toujours trouvé Peter terriblement sérieux… trop sérieux parfois, même, d’ailleurs, quand bien même ça a toujours été pour leur bien à tous, et sans doute d’elle, la petite dernière de la fratrie, en particulier.

« Suffisamment pour trinquer avec toi », dit-elle en agitant la bouteille de champagne qu’elle a embarqué sous le nez de son frère. « Tu me fais entrer ? »

Elle n’attend pas sa réponse, en fait, pour s’inviter directement chez son frère. Dans de telles circonstances, il ne va décemment pas la mettre à la porte, pas vrai ? Et ils ont tellement à rattraper. Trois longues années ! Et pas seulement trois longues années, trois longues années dans un monde inconnu, alors que tout prêtait à croire qu’ils vivaient leurs derniers instants. Ça mérite un verre. Et une longue conversation.

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

Lucy affiche une grimace exagérée quand Peter assure qu’il a l’impression qu’elle était une petite fille hier encore, elle a l’intuition qu’elle l’entendra souvent, celle-là. En tant que petite dernière de la fratrie, elle est celle qu’on ne voit pas forcément grandir, et parce qu’elle est fantasque, ingénieuse, malicieuse, en bref qu’elle se comporte souvent comme une grande enfant, il est certain que ça n’aide pas non plus, mais oui, Lucy n’est définitivement plus une enfant, plus une adolescente non plus : en revanche une jeune adulte avec des rêves plein la tête, et impatiente de montrer qu’elle n’est pas seulement une gamine, quand bien même elle prendra toujours soin de rester une grande enfant… Perdre ça, c’est perdre une constituante d’elle-même, elle en est convaincue. Quand grandir revenait à ne plus pouvoir revenir en Narnia, il est certain que ça ne donnait pas forcément l’envie de grandir non plus.

Lucy rentre donc dans l’appartement de son frère et en examine chaque pièce avec un grand sourire. Elle trouve que cet endroit lui ressemble, et elle est rassurée de voir qu’il est bien installé. Il a l’air de bien s’en sortir, et clairement, ça la soulage largement. Alors qu’ils rejoignent finalement le salon, aussitôt, Peter se confond en excuse, sous le regard médusé de Lucy qui estime définitivement qu’il ne lui en doit absolument aucune : et pour cause : il n’a absolument rien fait, bien sûr qu’il n’a pas à s’excuser. Ce n’est pas lui qui est à l’origine de ce terrible accident.

« Peter… je sais que tu penses que ton rôle est de tous nous protéger, envers et contre tout », et il s’y est tenu, autant qu’il l’a pu, et c’est vrai qu’il a été souvent rassurant, réconfortant pour Lucy de pouvoir se reposer sur son frère, en songeant qu’il serait toujours là pour elle, et aussi pour Edmund et Susan… sauf qu’il n’avait pas à porter tout ça sur ses épaules. « Mais tu n’aurais rien pu faire, tu le sais, pas vrai ? T’es pas responsable de ce qui est arrivé », reprend-elle en déposant une main réconfortante sur son avant-bras. « Je t’en veux pas, je t’en ai jamais voulu, et je pourrai jamais t’en vouloir. T’as jamais arrêté de veilleur sur nous, tu pouvais pas nous protéger de ce que personne ne pouvait prévoir. » Elle sait qu’au fond, Peter en a tout de même conscience, mais elle tient à le répéter malgré tout. « Et puis, on est là, maintenant, pas vrai ? » Elle lui adresse un grand sourire. « C’est Susan qui m’a dit que tu étais ici », ajoute-t-elle afin qu’il sache qu’elle a déjà retrouvé leur sœur. « Et je suis sûre qu’on retrouvera Edmund bientôt. Alors tout va bien, t’as pas à te faire des reproches, c’est derrière nous, tout ça. Moi je ne t’en veux pas du tout. » Elle décide de s’asseoir, tout en détaillant son frère du regard. « Alors, comment c’est, ta nouvelle vie, ici ? Susan m’a dit que tu étais prof. »

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

Lucy affiche un fin sourire compréhensif à l’adresse de son frère. On ne change pas sa nature si facilement, il sait pertinemment que son frère ne pourra jamais revenir sur sa promesse, même s’il doit avoir le sentiment de l’avoir trahie, et même s’ils sont tous assez grands, maintenant, pour compter sur eux-mêmes. Et c’est rassurant, quelque part. Très rassurant, même, en vérité. Elle aime savoir que son grand frère est là, et qu’il sera toujours là pour veiller sur elle. C’est une responsabilité qu’elle n’est pas en droit d’exiger de sa part, mais c’est une chose qu’elle souhaite tout naturellement, sans doute parce que toutes les petites sœurs attendent cela, consciemment ou pas, de leur frère aîné. Alors au fond, Peter n’a pas à oublier sa promesse, juste se rappeler que cette promesse ne doit pas l’empêcher de vivre pour lui-même. C’est au moins à ça que lui auront servi ces trois années sans sa fratrie, à se construire indépendamment d’eux… et ils avaient peut-être tous besoin de ça, de s’individualiser….Bien sûr, la même chose avec des circonstances moins tragiques, ça aurait clairement été apprécié, mais ça, c’est encore autre chose, évidemment.

Lucy, sur l’invitation de son frère, s’installe sur le canapé et fait tinter son verre contre celui de son frère, pour la forme : de telles retrouvailles méritent bien de trinquer dans les règles de l’art, pas vrai ? Et d’un coup d’un seul, Lucy a ce sentiment qu’elle n’a jamais eu totalement jusqu’alors, celui de se sentir adulte, à se retrouver là dans l’appartement parfaitement aménagé de son frère bien installé dans la vie, et à trinquer au champagne en sa compagnie.

Et parlons-en, de la vie de Peter ! évidemment, Lucy est plus qu’intéressée à ce sujet, elle a envie de tout savoir, et elle espère bien que son frère ne lui épargnera aucun détail. Surtout, elle espère que son frère a eu une belle vie, ces trois années durant : le genre de vie dont on peut être fier. C’est sûr, ils ont été roi et reine, c’est difficile de rivaliser avec ça, et comme le dit Peter lui-même, la vie est loin de ressembler à Narnia, mais sur ce point, il a bien fallu qu’ils se fassent une raison.

« Je te vois très bien en prof, t’as toujours eu un côté savant autoritaire », dit-elle surtout pour la plaisanterie, même si ce n’est pas entièrement faux non plus. « Moi je me suis lancé dans des études de véto. C’est super – super exigeant, mais j’aime bien ça, en fait. J’apprends tout un tas de choses », répond-elle avec un sourire. « Et puis les fêtes étudiantes, c’est pas trop mal », ajoute-t-elle innocemment avant de boire une gorgée de champagne. « Il est vraiment chouette, ton appart », reprend Lucy sur le ton de la conversation. « Tu vis seul, du coup ? »

Oui, le sous-entendu n’est pas franchement subtile, mais après tout, ce n’est pas comme si elle avait l’intention de passer par quatre chemins non plus.

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

« C’est bien parce qu’elle est beaucoup plus autoritaire que toi que je peux te dire à toi que tu l’es et pas à elle », répond Lucy, malicieuse, du tac-au-tac, avant de tremper ses lèvres dans son verre de champagne.

Et c’est totalement vrai. S’il y en a bien une pour être particulièrement sérieuse au sein de la fratrie Pevensie, c’est définitivement Susan, ce qui ne veut pas dire pour autant que Peter est autre chose que sérieux, lui aussi. Ou disons plutôt que c’est sa famille qu’il a toujours considérée avec le plus grand sérieux, avec cette volonté constante et quasi-paternelle de tous les protéger, et même s’il arguera sans doute le contraire au vu des circonstances, Lucy considère qu’il y est impeccablement parvenu, et qu’il peut être tout particulièrement fier de lui pour cela. La sévérité de Peter, par ailleurs, ce n’est jamais vraiment Lucy qui y a goûté, par ailleurs. En tant que benjamine, petite dernière de la fratrie, elle a toujours été plus choyée que houspillée, contrairement, par exemple, à Edmund (mais elle a été une enfant moins difficile que lui également).

« Mais oui, t’en fais pas, ta petite sœur est très sage », répond Lucy, amusée par les avertissements de son frère, quand ce dernier lui dit tout de même de ne pas abuser des fêtes étudiantes.

Elle le remercie de ne pas lui faire une longue leçon sur les méfaits de l’alcool, de la drogue et des vilains garçons qui ne veulent qu’une seule chose. Au fond, qu’il ne le fasse pas prouve bien qu’il la connaît tout de même assez pour savoir qu’elle n’est pas du genre à faire dans l’excès. Quand elle boit, c’est modérément, elle n’a jamais fumé une seule cigarette de toute son existence et n’a pas l’intention de commencer, et les fêtes et les soirées sont davantage une occasion pour elle de faire la connaissance de nouvelles personnes, ce qui est une chose que, il faut bien le dire, elle adore.

Intéressée, évidemment, par la vie de son frère, Lucy lui pose toutes les questions qui lui viennent à l’esprit, sur le moment. Elle a l’impression d’avoir tout un tas de choses à lui dire et à lui demander, et en même temps, parce que cela fait si longtemps qu’ils ne se sont pas vus et que leurs vies ont tellement changé, Lucy ne sait même plus vraiment quoi dire ni par où commencer.

« Les cours, c’est pas une excuse pour ne pas rencontrer des gens. Et moi et Susan encore moins », répond directement Lucy quand Peter affirme qu’il a déjà tout ce qu’il lui faut sans avoir besoin de se trouver une compagne. « Enfin, si t’es bien tout seul c’est très bien, mais j’ai ma vie, je suis sûre que Susan a la tienne, t’as pas à vivre pour nous, tu sais ? Et d’ailleurs, tu nous aideras jamais mieux qu’en t’aidant toi-même. »

Lucy n’en est pas peu fière, de celle-là. Elle se sentirait presque l’âme d’une philosophe, pour le coup.

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

« Tu vas me faire rougir », répond Lucy avec un sourire quand Peter affirme qu’il admire chez elle la manière qu’elle a de savoir distinguer le bien du mal. Tout est relatif, bien sûr.

Elle est capable d’une loyauté sans borne, d’une confiance infinie et aveugle envers ceux qui ont son affection, et c’est en effet pour cette raison que, même quand tout espoir semblait s’amenuir, elle a continué de croire en Aslan… Peter appelle cela de l’optimisme, d’autres affirmeraient que c’est de la naïveté et de la bêtise… Qu’importe, ce n’est pas un trait de caractère que Lucy a l’intention de changer, certainement pas. Elle est heureuse de la manière dont elle s’est construite, dans la foi inébranlable en des valeurs qu’elle continue de porter avec elle non sans une certaine fierté quand même à certains moments. Pour ce qui est de savoir faire la distinction entre ce qui est bien et ce qui ne l’est pas… C’est sans doute davantage une intuition qu’une véritable qualité de jugement, car elle ne réfléchit jamais si longtemps que cela à la portée morale de ses actes, elle a davantage tendance à agir avec le cœur, mais il faut croire que cela lui sert la plupart du temps.

Quant au fait de demeurer positive en toute circonstance, ça… elle estime aussi que c’est une qualité au-delà de nécessaire, en l’occurrence, et qu’elle ne saurait en aucun cas y contrevenir. Après tout, dans quelles circonstances est-ce que broyer du noir a un jour mené où que ce soit ? Oh, elle peut répondre sans mal à cette question : jamais, absolument jamais.

« Je te le prête, mon optimisme, si tu veux, j’en ai assez pour nous deux. Pour nous quatre », ajoute-t-elle ensuite. Quatre, oui, car elle ne peut qu’être certaine du retour prochain d’Edmund dans leur vie : encore une preuve évidente de l’enthousiasme et de l’optimisme dont elle est capable.

Dans la famille Pevensie, chacun a son rôle spécifique à jouer, et c’est pour cette raison qu’ils se complètent aussi bien. Lucy sait pertinemment qu’elle ne doit surtout pas, pour sa part, céder au négativisme, elle est le rayon de soleil de la famille, celle qui apporte la chaleur et les sourires : c’est un rôle qui lui tient très à cœur, et à l’évidence, ça lui plaît d’avoir l’occasion de le remplir de nouveau : trop longtemps, elle n’en a pas eu l’opportunité. Et par cet intermédiaire, elle espère aussi encourager ses proches à faire les choix les plus susceptibles de les rendre heureux : en l’occurrence, elle est convaincue que Peter devrait… rencontrer des gens, se trouver une petite amie, qui sait, et profiter davantage de la vie, mais elle comprends en effet que, sans eux, profiter de la vie, justement, n'était pas facile.

« Promis juré ? Tu sais que si tu me fais une promesse, t’es obligé de la tenir, sinon… » Elle fait mine d’être plus menaçante qu’elle en est capable. « Les conséquences seraient ter-ribles ! » ajoute-t-elle sans sérieux. « Je peux te présenter des gens, moi, si tu veux… J’ai quelques amies plus âgées que moi qui adoreraient te rencontrer, j’en suis sûre ! »

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

« La pauvre… », fait seulement Lucy avec une légère moue navrée, sans développer.

Parce que ce n’est pas nécessaire, Peter sait aussi bien qu’elle pourquoi le sort de Susan a été le moins enviable entre eux quatre… Ils n’ont pas supporté son absence aussi longtemps qu’elle, ils n’ont pas connu cette épreuve terrible, celle de faire le deuil de toute sa fratrie, si brusquement. Il est normal, naturel, même, qu’elle ne soit pas la plus optimiste entre eux tous, quand bien même une situation telle que celle-ci laisse tout de même largement suggérer qu’à cœur vaillant, rien n’est impossible, et que dire du cœur de Lucy ? Si elle a été nommée la vaillante, ce n’est pas sans raison, après tout.

« Il faudra absolument qu’on s’organise quelque chose tous les trois. Un dîner ? Un ciné ? Qui sait, on sera peut-être quatre d’ici là ? » Elle se reprend. « Non, c’est sûr qu’on sera quatre d’ici là. »

Elle apprécie de retrouver sa fratrie, elle apprécie de savourer à nouveau leur compagnie, mais elle a envie qu’ils soient tous ensemble en même temps. Elle les aime individuellement, et elle aime plus encore ce qu’ils sont quand ils sont tous ensemble. Ils se complètent, leurs caractères sont complémentaires, et dans ce contexte qu’ils ont appris à apprivoiser, mais qui reste si différent de leurs habitudes. Oui, elle se projette déjà dans les moments à venir, mais elle n’oublie pas le moment présent pour autant, et elle ne demande qu’à en apprendre plus sur la vie de son frère, quitte à se montrer intrusive dans le procédé, elle doit bien le reconnaître… Mais en même temps, si elle est intrusive pour le bien de son frère, ce n’est pas forcément un mal non plus, elle considère que c’est pour son bien, en tout cas, et elle ne veut surtout pas qu’il lui en tienne rigueur. Tout ce qu’elle fait en se montrant peut-être un peu trop… sur les cotes de sa fratrie, ce n’est jamais que dans l’espoir que cela contribuera à leur bonheur, et elle est certaine que Peter sera heureux d’une part avec son frère et ses sœurs autour de lui, d’autre part avec une charmante jeune femme à son bras.

« Parfait alors ! Et il faut que je te présente tout plein de gens dans tous les cas. J’ai fait plein de rencontres incroyables ici, et les gens ont tous des histoires incroyables, tu n’as pas idée ! »

Enfin si, il devait avoir idée, parce qu’il n’avait pas dû vivre en total ermite non plus, il avait sans doute rencontré des personnes qui avaient partagé avec lui leurs histoires extraordinaires.

« J’ai hâte que tu rencontres tout le monde, oh, et Camilo a déjà insisté pour te voir », ajoute-t-elle alors que le rose lui monte doucement aux joues à la mention de Camilo.

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

« C’est tout ce que je voulais, moi, t’avoir à nouveau sur le dos », répond Lucy avec un large sourire.

Parce qu’elle ne l’a jamais ressenti comme tel. Peter a toujours été très protecteur à son adresse, mais Lucy n’a jamais eu le sentiment qu’il était top protecteur. Elle ne veut pas qu’il s’oublie au profit de sa famille, c’est un fait, mais en revanche, elle apprécie de savoir qu’elle pourra toujours compter sur lui, que si elle doit avoir le moindre problème, il viendra à sa rescousse. C’est une pensée douce, toute simple et surtout réconfortante. Vivre sans aucune référence familiale, pendant trois ans, sans pouvoir trouver du soutien et du réconfort de la part de sa fratrie, ça a été réellement un crève-cœur à ses yeux.

Maintenant, elle aura peut-être trop tendance à vouloir se reposer sur lui, justement parce qu’elle l’a retrouvé et qu’elle a des années à rattraper. Par la force des choses, elle a appris l’indépendance, à apprécier la compagnie des autres mais à se débrouiller par elle-même malgré tout (ceci dit, elle a toujours été très débrouillarde). Ils verront bien ce que sera la nouvelle dynamique de leur fratrie, après ce hiatus de trois trop longues années, mais dans tous les cas, ce qui importe, c’est qu’ils seront à nouveau là l’un pour l’autre.

« Oh maintenant que tu le dis, j’ai un petit creux, oui ! » En même temps, Lucy est très gourmande : si on lui propose de manger un morceau, elle ne dit jamais non, c’est une question de fierté. « Qu’est-ce que tu proposes de préparer de bon ? Je peux t’aider ? » demande-t-elle avec curiosité.

Maintenant, elle se pose des questions stupides, du genre : comment est-ce qu’il mange en temps normal ? Est-ce qu’il cuisine ? Si oui, il cuisine bien ? Mieux qu’elle, elle l’espère, parce que pour sa part, elle a plutôt tendance à grignoter, et le reste du temps, elle mange des nouilles instantanées. Oui, il faut quand même espérer qu’il se débrouille mieux qu’elle.

« Au pire on peut commander, aussi ? »

C’était la meilleure des inventions, les applications de livraison de nourriture. Elle, de son côté, ça lui change la vie : même si son portefeuille ne l’en remercie pas. Peter s’éclipse un moment, quand il revient, c’est pour lui montrer son épée, exactement similaire à celle que le Père Noël lui avait offert, il y a plusieurs vies de cela. Lucy a les yeux qui brille en la regardant de plus près.

« Wow !! C’est fou ! Où est-ce que tu l’as retrouvée ? » Elle, elle n’a retrouvé ni sa fiole, ni sa dague, mais elle adorerait. Pas pour s’en servir, mais juste pour le plaisir de les avoir avec elles. « Hum… c’est un ami », répond Lucy, les joues roses, quand son frère lui demande qui est Camilo. « Il est super sympa et super intéressant, il m’a beaucoup aidée quand je suis arrivée ici et que j’avais personne. »

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

« Allez, va pour le choix du faible, maintenant que tu le dis, je dirais pas non à un pizza ! » fait Lucy avec enthousiasme quand son frère suggère de plutôt commander à manger. A deux, ils seraient sans doute capable de préparer quelque chose de décent, mais pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple. Et une pizza, ça ressemble à un repas de roi aux yeux de la jeune Pevensie. « Et c’est moi qui régale, pas de discussion possible », précise-t-elle avant de s’emparer aussitôt de son téléphone afin de leur dénicher ce qui ferait leur bonheur. Lucy ne roule pas sur l’or, mais elle est généreuse. Quand elle a un peu d’argent sur son compte, elle ne voit pas d’intérêt à l’y laisser dormir, et elle préfère s’en servir pour faire plaisir aux gens autour d’elle.

Après que la commande soit passée, elle peut focaliser son attention sur la fameuse épée. Que Peter l’ait tout simplement retrouvée au beau milieu de la forêt et complètement par hasard est chose totalement improbable, mais ce n’est certainement pas pour déplaire à Lucy qui trouve un mystère plus qu’attirant à la manière dont les choses ont bien pu se passer. Oui, c’est complètement inattendu, mais Lucy aime immensément l’idée de pouvoir retrouver des objets venant de Narnia ici, comme un signe qu’ici est leur place. Cependant, pour l’heure, la jeune femme n’a absolument rien trouvé. Ceci dit, on ne peut pas dire non plus qu’elle ait beaucoup cherché.

« Va falloir lui trouver une place de choix, ce serait dommage qu’elle prenne la poussière. » Elle affiche un sourire songeur. « C’est horrible, j’aurais presque envie que tu aies l’occasion de l’utiliser de nouveau… »

Juste parce que ça voudrait dire qu’ils seraient à Narnia de nouveau, et même si cet endroit est fascinant, qu’elle y découvre tout un tas de choses et qu’elle s’y plaît, elle donnerait vraiment tout pour avoir l’occasion d’y retourner. Malheureusement, il semblerait que ce ne soit absolument pas prévu au programme.

« Oui bon… », fait Lucy, prise en flagrant délit de vague mensonge peu convaincant quand elle tente de parler de Camilo comme d’un simple ami. « … c’est éventuellement un peu plus qu’un ami, et t’en sauras pas plus, rêve pas. »

Sauf que c’est trop tard, puisqu’elle en a certainement trop dit ou pas assez. Si elle peut compter éventuellement sur le fait que Peter respectera son jardin secret, il serait de bonne guerre qu’il ne le fasse absolument pas, en réalité, parce qu’elle-même, de son côté, n’aurait clairement pas hésité à insister encore et encore jusqu’à ce que son frère lui confie absolument tous les détails croustillants.

The Valiant and the Magnificent

feat. Peter

« Arrête, c’est pas trois pizzas qui vont me mettre sur la paille, tu t’inquiète pour rien, frangin », fait Lucy avec un large sourire, ravie de pouvoir offrir ces trois (quoi ? Y avait une promo trois pour le prix de deux, et elle a très faim) pizzas, puisqu’il n’y a pas beaucoup d’autres offrandes qui soient à la hauteur de ses moyens.

Lucy n’est pas forcément une grande dépensière, et pourtant, c’est un panier percé, surtout parce qu’elle aime se faire plaisir, et elle se fait plaisir en faisant plaisir aux autres. Elle aime rendre service et donner tant qu’elle le peut, alors si elle doit manger des pâtes le reste de la semaine pour compenser l’achat des pizzas, elle le fera très sincèrement de bonne grâce, et sans aucune hésitation, ça lui conviendra très bien. Heureusement (pour lui), Peter ne cherche pas à discuter. En même temps, il doit forcément savoir qu’il ne pourra pas obtenir gain de cause avec elle, c’est positivement impossible.

Installés tous deux sur le canapé, Lucy a pris le temps d’examiner l’épée de son frère avec une grande attention. Retrouver des indices tels que celui-ci de leur vie passée, c’est rassurant en même temps que c’est intrigant. Elle sait bien, évidemment, que ça ne fait pas beaucoup de sens, et que ce n’est sans doute pas l’indice de grand-chose, mais c’est malgré tout une chose qu’elle apprécie de constater. Et elle sait que ça doit être la même chose pour son frère, qu’il doit d’autant plus tenir à cette épée qu’elle représente tout un tas de choses symboliquement, autant de choses qui ont changé radicalement le cours de leurs existences respectives.

Peter lui confesse aussi que Narnia lui manque. Elle le sait très bien, mais en même temps, il ne sert à rien de regretter ce qui a été. S’ils doivent y retourner un jour, alors ça arrivera, et comme les autres fois, ce sera à peine dépendant de leur volonté : il faut simplement qu’ils sachent se montrer patients. En attendant, c’est vrai qu’ils ont une chance incroyable, et c’est celle d’être à nouveau réunis – et elle est convaincue que bientôt, elle retrouvera aussi Edmund, c’est là-dessus qu’elle veut se concentrer.

« C’est vrai que c’est ce qui compte. Et on a de la chance », confirme-t-elle avec sincérité.

Et il est plus simple d’évoquer ce sujet que de passer au suivant. Pas que ça la dérange complètement de discuter de Camilo, mais si elle est douée pour poser des questions insistantes, ce n’est pas pour autant qu’elle tient spécialement à ce qu’on lui en pose en retour (deux poids, deux mesures, vous saisissez l’idée). Peter a l’air de respecter son embarras et d’accepter de ne pas la déranger plus que ça, et elle la remercie intérieurement.

La conversation poursuit alors son cours, les pizzas aidant, et le frère et la sœur peuvent rattraper le temps perdu, avec plaisir. Quand Lucy finit par prendre congé de son frère, la nuit est tombée depuis un moment déjà, et les deux se sont déjà promis de se revoir prochainement. Forte de la certitude d’avoir enfin retrouvé sa famille, Lucy est convaincue du fait que plus rien ne sera susceptible de l’atteindre à présent.