A nos rendez-vous manqués (Alastor)

La vie... après la mort et l'enfer était un concept tout à fait particulier, il n'en avait jamais entendu parler, en tout une chose était sûre : il n'était pas au paradis et n'était pas devenu un ange, ce qui était plutôt une bonne nouvelle. En arrivant dans cette ville étrange - et pourtant, il en avait vu des choses étranges, c'est vous dire ! -, il n'y avait que deux personnes qu'il souhaitait retrouver. La première était Vox, qui n'était vraiment pas difficile à débusquer puisqu'il y avait sa tête un peu partout, par contre pour sa douce Rosie, c'était une autre paire de manche. Elle n'était pas du genre médiatique, sinon il aurait directement fait affaire avec elle plutôt que s'encombrer de quelqu'un comme Vox. Mais il y avait bien d'autres choses qui les liaient l'un à l'autre et il savait au moins qu'il pouvait toujours compter sur elle, peu importe le monde dans lequel ils sont.

La vie d'Alastor n'était pas aussi facile que ce qui laissait paraitre, il cachait tout un tas de secrets, et surtout, il enterrait ses sentiments en fin fond de sa conscience pour que jamais les remords viennent le hanter. L'idée de Charlie pour offrir la rédemption aux démons étaient une idée ridicule pour tout démon qui se respecte, mais dans la réalité des faits, qui n'avait jamais eu envie d'une deuxième chance de faire les bons choix ? Alastor avait préféré oublier cette idée, il y a bien longtemps, pour autant, ça ne voulait pas dire qu'il ne restait pas parfois un semblant d'espoir. Et si cette résurrection dans ce monde lui signifiait qu'il avait droit à cette chance ? Il n'en savait rien, ça paraissait ridicule, surtout que contrairement à d'autres, il n'avait fait absolument aucun effort pour se repentir. Bien qu'il ait tout de même aidé l'hôtel, quitte à mettre sa vie en danger, il faut bien avouer que ça n'arrivait pas tous les jours.

À force de recherche, il avait finalement trouvé cette boulangerie dans Baker Street Avenue qu'on lui avait beaucoup loué de par les talents de la propriétaire, la pimpante Rosie. Autant vous dire qu'en entendant ce nom et ces louanges, elle était arrivée en tête de liste, il n'en fallut pas plus pour qu'il se pointe ce cher Alastor et fut ravie de constater qu'il ne s'était pas trompé.

- Je pense avoir déjà trouvé exactement ce qu'il me faut.

Avait-il répondu avec un large sourire, prêt à voir sa réaction de voir son Alastor dans sa boutique. Il ne connaissait que trop bien les sentiments qu'elle nourrissait à son égard, malheureusement, il ne pouvait pas répondre à ses attentes. Les sentiments étaient souvent ce qui lui faisait défaut, lui qui n'aimait pas paraitre vulnérable, c'était la pire faiblesse qu'il pouvait avoir. Les gens qui perdent leur sang-froid à cause des sentiments finissent par se faire dévorer par les autres et c'était hors de question pour Vox de terminer ainsi. Il la laissa lui sauter au cou, répondant à son étreinte chaleureuse, il semblait avoir moins mal avec le contact des autres depuis son arrivée ici, mais avec Rosie de toute façon, il n'avait jamais eu aucun mal.

- J'imagine que je peux compter sur toi et tes mets délicats ?

D'un point de vue totalement extérieur, Alastor n'était pas plus maigre qu'avant, il était même mieux bâti, mais il comprenait que Rosie se faisait du souci et qu'elle allait se faire un plaisir de le régaler. Puis, il penche la tête sur le côté alors qu'elle fait mine de le réprimander.

- Cela fait longtemps que tu es ici ? Car je viens tout juste d'arriver, j'ai bien peur que la seule personne que tu puisses enguirlander pour l'attente est celui qui nous a fait arriver ici. As-tu des informations à ce sujet ?

Dire que Alastor s'était donné du mal pour retrouver Rosie, il était même venu lui-même jusqu'à elle, pourtant il avait l'impression que ce n'était jamais suffisant pour ses beaux yeux, comme si Alastor n'en avait rien à faire d'elle, pourtant ses paroles autant que ses actions indiquées tout le contraire. Ce n'était pas son genre de faire dans le sentimental, pourtant il faisait vraiment des efforts pour Rosie, le voyait-elle seulement ? Pouvait-elle considérer d'être importante pour lui sans pour autant être constamment le centre de son attention ? Alastor avait une vie en dehors, que ce soit la radio, mais aussi d'autres relations, parfois qu'il aimerait oublier. La vie, la mort, l'existence, tout ça n'avait rien de simple quand les sentiments venaient s'en mêler. Il avait besoin de quelqu'un qui soit là, qui l'écoute sans le juger, qui lui laisse son espace personnel. Ça avait toujours bien fonctionné avec Rosie, du moins jusqu'à ce qu'il "disparaisse" pendant 7 ans. Elle était pourtant bien la seule à qui il donnait des nouvelles malgré sa disparition. Il la serra affectueusement dans ses bras, mais sa réponse le crispa légèrement, avait-elle un peu trop fréquenté Suzan ? Néanmoins, il haussa les épaules.

- Oh, tu sais, tu aurais pu changer de plan depuis notre dernière entrevue ! Il ne faut jamais prendre les gens pour acquis, n'importe qui peut nous trahir au moment où on s'y attend le moins...

Ce n'était pas comme si ça lui était arrivé, non, certainement pas, c'était Vincent qui l'avait appris à la dure quand il lui avait demandé tout souriant comme le benêt qu'il est de rejoindre son équipe de bras cassés. Il avait voulu lui donner une "leçon" à son retour et finalement, même si les rôles n'étaient plus exactement les mêmes, il avait bien vu qu'il ne faisait toujours pas le poids contre lui. Quel bilan peu glorieux de la situation, et ce n'était pas beaucoup mieux dans cette vie, mais que pouvait-il dire, que pouvait-il faire... il n'était qu'un humain après tout.

- Bien entendu, très chère, je viens jusqu'ici pour te demander à toi personnellement ce que j'aurais pu demander au premier passant venu...

Toujours stoïque, toujours souriant, néanmoins légèrement sarcastique, ça ne lui plaisait que moyennement qu'elle croit qu'il était venu juste pour des informations alors qu'il avait tout ce chemin pour retrouver sa meilleure amie. À moins, bien entendu, qu'elle ne voulait pas le revoir, dans ce cas, il comprendrait aisément pourquoi elle s'offusque. Néanmoins, elle répondit tout de même à ses interrogations, ce qui lui permit de savoir effectivement qu'elle était là depuis déjà 5 ans, mais au moins, elle comprenait que cette fois, ce n'était pas sa faute, ce qui était déjà ça de pris. Il était toujours mal à l'aise face aux larmes d'une dame, consoler les gens ne faisait pas vraiment partie de ses attributions, surtout qu'il manquait cruellement d'empathie. Heureusement, d'un côté, vous imaginez s'il devait faire preuve d'empathie avec ses victimes ? Mais elle passa bien vite à autre chose, voulant visiblement profiter de sa présence, ce qui le soulageait d'un poids.

- N'oublie pas le café très chère, bien noir comme je l'aime.

Alastor aimait profondément tout ce qu'il y avait de plus amer, il avait un dégout profond pour le thé et toutes les choses sucrés qu'on pouvait trouver. Quelle ironie que Rosie ait ouverte une boulangerie, n'est-ce pas ? Il se laissa conduire jusqu'à leur table pour pouvoir continuer cette conversation dans de meilleures conditions.