Hello Cat, hello ! ● Catice

« Fleurpageons les rhododendroves gyraient et gygamblaient dans les vabes ! » chantonna Cheshire en s'amusant à apparaître et disparaître

Depuis qu'elle avait découvert qu'elle était capable de le refaire, Elle s'amusait souvent à ce genre de petit jeux. Évidemment, il arrivait qu'elle réapparaisse devant quelqu'un qui ne s'y attendait pas et surtout qu'il ne voit réapparaître qu'une partie de la demoiselle. Malgré le fait que certains de ses attributs félins soient revenus, elle possédait toujours ses bras et ses jambes humaines et ça pouvait être très bizarre de voir une jambe suspendue dans un arbre. Dans la forêt Mirkwood, à côté du quartier de Lockwood Hill, il était facile de penser qu’il s'agissait d'une jambe issue d'un corps qu'on aurait tué.

Mais aujourd'hui, les passants auraient un peu plus de chance. C'était son visage qu'elle avait décidé de faire apparaître et disparaître. Pour le moment, elle s'était décidé à n’être qu'un sourire qui se baladait dans les airs. Le genre de choses qui pouvaient faire peur à beaucoup de monde. Mais il y en avait certains qui étaient familiers de ce genre d'apparition soudaine et ils avaient tous visité le Pays des Merveilles. Il y en avait quand-même une qu'elle connaissait mieux que les autres et elle se disait qu'elle l'aurait reconnu, ce qui était probablement vrai, si elle avait eu l'âge dont elle se souvenait.

En tout cas, aussi familière que puisse sembler la jeune femme qui venait de se heurter à l'arbre sur lequel elle était perchée et en partie invisible, elle ne semblait pas tout à fait sûre de ce qu'elle était en train de voir. Histoire de compléter un peu le puzzle, Cheshire fit apparaître son visage dont les moustaches et les oreilles étaient revenues et qui ressemblait donc plus ou moins à un chat. Sans le corps humain pour perturber les choses, il était plus facile de ne pas avoir de doute sur sa véritable nature. Du moins, c'était l’avis général de ceux à qui elle avait fait le test.

« Je vous souhaite le bonjour », dit-elle, aimablement.

Quand elle faisait des cabrioles et qu'elle jouait dans le feuillage, il n'y avait rien de plus appréciable que d'être remarquée. La jeune femme blonde qui se trouvait au pied de l'arbre et qui la remarqua sans avoir l'air surprise le moins du monde avait une énergie qui lui était familière, même si elle était quasiment certaine de ne pas la connaître personnellement. Il y avait quand même quelque chose et elle étira son sourire jusqu'aux oreilles alors qu'elle la saluait en mentionnant ses caractéristiques de chat. C’était vrai qu'elle était un chat, tout autant qu'il était vrai que cette personne était une femme.

« Bonjour, la femme », répondit-elle donc.

Elle se présentait sous le nom d'Alice, mais en prétendant qu'elle n'était pas son Alice. Cheshire réapparut complètement dans le sommet de l'arbre avant de l'observer d'un air dubitatif. Il y avait quelque chose d'évident à quoi elle pensait mais en dehors de ça, elle avait surtout l'impression que l'esprit du Pays des Merveilles n'était pas étranger à cette jeune personne. Si cela était vrai, cela voulait dire qu'elle connaissait sûrement un autre chat quelque part. mais Cheshire ne pensait pas que ce chat était ici. En tout cas, elle n'avait absolument rencontré aucun autre chat qui viennent du comté de Cheshire.

« Eh bien, à ma connaissance, je ne possède aucune Alice. Mais j'en ai croisé une il y a longtemps, dans un endroit qui s'appelle le Pays des Merveilles. Alice était une petite fille, alors pour ce que j'en sais, vous pourriez très bien être elle que je ne vous reconnaîtrais pas. Mais ceci n'est pas important puisque je me porte très bien. Ou plutôt, c'est cet arbre qui me porte très bien. Mais les arbres sont doués pour ces choses-là en général. Vous arrive-t-il d'être portée par un arbre ? »

Alice mentionna le Lièvre, son cher Lièvre, son beau Lièvre. Ce Lièvre qui était tout pour elle et qui représentait à la fois son cœur et ce qui lui donnait l'impression de respirer. Mais elle adorait perdre le souffle parce qu'il le lui coupait. Ah, ce lièvre. Alice ne voulait peut-être pas être son Alice, mais Marsh était son Lièvre aussi sûrement que s'ils étaient nés dans le même monde, et peut-être était-ce le cas parce qu'ils avaient toujours fait comme si c'était effectivement vrai. De toute façon, il n'y avait personne pour dire le contraire et si une autre Cheshire se pointait, eh bien elle pourrait se joindre à la fête.

« Il ne t'a pas dit ? Nous vivons ensemble, très chère. L'endroit est plutôt plaisant et l'on y boit de délicieuses compositions. Je te conseille de passer. »

Elle n’était pas l’enfant qui l’avait croisée, elle le répétait. Cela n’importait pas Cheshire. Les rencontres qu’elle avait faites au cours de sa vie ne lui imposaient pas le désir de les retrouver absolument et elle savait profiter de chaque rencontre intrinsèquement. Il n’y avait que Marsh pour qui elle voulait absolument qu’il y ait de la récurrence. Il était son désir de récurrence le plus précieux. Y penser, cela lui réchauffait le cœur. Alors, ce n’était pas grave qu’elle n’ait jamais rencontré cette Alice. C’était quand-même une Alice qui avait la capacité de partager un peu de sa folie naturelle.

« Ce n’est pas grave. C’est toi, ici, aujourd’hui. Peu importe, si tu es bien ici aujourd’hui, c’est l’essentiel. Ne crois-tu pas ? »

Elle sourit de toutes ses dents alors que la demoiselle toute blonde lui affirmait qu’elle avait déjà été portée par un arbre, notamment pour lire un livre. La perfection du port d’un arbre n’était plus à démontrer. Elle passait tout son temps à en profiter, pour sa part. Il n’y avait rien de plus agréable que de contempler le monde du point de vue d’un arbre. Son sourire était une réponse en soi. Cheshire lui apprit qu’elle vivait avec Marsh et apparemment, il ne lui en avait rien dit. Il aimait bien se montrer mystérieux, parfois, et c’était son cas à elle aussi. Mais puisque la question lui avait été posée, elle n’avait pas voulu mentir.

« Nous nous sommes retrouvées il n’y a pas très longtemps. Il m’a séduite. Alors je l’ai séduit aussi. Il n’y a pas de raison, n’est-ce pas ? »

Apparemment, il y avait plus d’une Alice dans cette ville, voilà qui intriguait Chechire. Les Alice étaient-elles toutes au Pays des Merveilles, ici ? En tout cas, elle aimait le thé, et elle avait aimé le thé de Marsh. C’était donc une Alice tout à fait comme il fallait, à n’en pas douter. Elle avait juste ce qu’il fallait de folie et d’audace pour que Cheshire soit conquise, pas comme avec Marsh, mais comme avec Alice. Quand elle vint sauter sur la branche qui la portait, Cheshire s’effaça obligeamment pour lui laisser de la place et réapparut à quelques mètres à côté d’elle.

« Prends place, c’est un endroit où l’on se trouve parfaitement bien, à mon avis », affirma-t-elle avant de réfléchir au sujet du Chapelier. « Je ne crois pas avoir croisé le moindre Chapelier, quoiqu’il y a une chapelière en ville, il me semble. Mais je ne crois pas que ce soit la personne que tu cherches. Elle ne ressemble pas à quelqu’un du Pays des Merveilles. Pourquoi le chercher lui en particulier ? »